Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat secondaire Le Signal a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, d’annuler la décision du 18 février 2013 du maire de Soulac-sur-Mer, la décision du 18 mars 2013 du président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et la décision implicite rendue par le préfet de la Gironde sur sa demande du 30 janvier 2013, par lesquelles ces autorités ont refusé de réaliser les travaux de consolidation du rivage aux abords de la résidence du Signal implantée sur un terrain situé boulevard du front de mer à Soulac-sur-Mer, d'autre part, de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 relative au dessèchement des marais.

Par un jugement n° 1301417-1301705-1301938 du 25 septembre 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 25 novembre 2014, 11 septembre 2015 et 19 novembre 2015, le syndicat secondaire Le Signal, représentée par Me Lepage, avocat, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du 25 septembre 2014 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler les décisions contestées du maire de Soulac-sur-Mer, du président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et du préfet de la Gironde ;

3°) d’enjoindre au maire de Soulac-sur-Mer ou à défaut à la commune et au président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc ou à défaut à la communauté de communes, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de réaliser les travaux nécessaires à la consolidation de la zone dunaire sur laquelle est située la résidence du Signal selon les prescriptions du rapport d’expertise du 22 octobre 2012 ;

4°) d’enjoindre à l’Etat, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de mettre en demeure la commune de Soulac-sur-Mer et la communauté de communes de la Pointe du Médoc de réaliser les travaux nécessaires à la consolidation de la zone dunaire sur laquelle est située la résidence du Signal selon les prescriptions du rapport d’expertise du 22 octobre 2012 dans un délai de deux mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de réaliser lui-même ces travaux dans un délai de deux mois à compter du constat de carence de la commune et de la communauté de communes ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Soulac-sur-Mer, de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et de l’Etat une somme de 3 000 euros, à lui verser, chacune, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

…………………………………………………………………………………………….

Considérant ce qui suit :



1. La résidence du Signal, dont le permis de construire a été délivré le 28 avril 1965 par le préfet de la Gironde, est un immeuble de quatre étages comprenant soixante-dix-huit logements édifié sur un terrain situé boulevard du Front de Mer à Soulac-sur-Mer (Gironde). Cette résidence est désormais implantée en zone rouge inconstructible du plan de prévention des risques d’avancée dunaire et de recul du trait de côte, approuvé par arrêté du préfet de la Gironde du 28 juin 2004. Le 30 janvier 2013, le syndicat secondaire Le Signal, qui regroupe les propriétaires de la résidence, a demandé la réalisation de travaux de consolidation de la zone dunaire sur laquelle est située la résidence « Le Signal » auprès de la commune de Soulac-sur-Mer, de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et de la préfecture de la Gironde. Le maire de Soulac-sur-Mer, le président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et le préfet de la Gironde ont rejeté cette demande, respectivement, par décision du 18 février 2013, décision du 18 mars 2013 et décision implicite née du silence gardé par l’Etat pendant deux mois, cette décision rejetant également la demande de mise en œuvre de la procédure d’expropriation prévue aux articles L. 561-1 et L. 561-3 du code de l’environnement . Le syndicat secondaire Le Signal interjette appel du jugement du 25 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes tendant, d’une part, à l’annulation de ces décisions, d’autre part, à la transmission au Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 relative au dessèchement des marais.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l’article R. 741-7 du code de justice administrative : « Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d’audience. ». En l’espèce, la minute du jugement, conservée au dossier de première instance, comporte la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d’audience. Par suite, le moyen tiré de l’irrégularité du jugement du fait de la violation des dispositions précitées du code de justice administrative doit être écarté comme manquant en fait.

3. Pour estimer qu’un secteur de la commune dit « l’Amélie », qui a fait l’objet d’importants travaux de lutte contre l’avancée de l’océan, se trouve dans une situation différente de celui du secteur d’assiette de l’immeuble du Signal, situé plus au nord, les premiers juges ont relevé que le secteur de l’« Amélie » « présente un intérêt économique significatif compte tenu du fait qu’il constitue un pôle touristique et balnéaire important pour la commune de Soulac-sur-Mer, caractérisé par la fréquentation estivale de la plage et l’existence de plusieurs campings ». Cette appréciation n’appelait pas de motivation supplémentaire. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait, sur ce point, entaché d’une insuffisance de motivation manque en fait.

4. Les circonstances, à les supposer établies, que les motifs retenus par les premiers juges seraient entachés d’une dénaturation des pièces du dossier, d’erreurs de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation concernent le bien-fondé du jugement attaqué et sont sans incidence sur sa régularité.

5. Aux termes de l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 modifiée, susvisée : « La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. (…) ».

6. Si ces dispositions impliquent que la juridiction saisie d’une question prioritaire de constitutionnalité se prononce dans le plus bref délai, elles ne prévoient pas pour autant de délai déterminé. Il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Bordeaux, saisi par le syndicat secondaire Le Signal d’une question prioritaire de constitutionnalité par mémoire distinct enregistré le 18 août 2014, a statué, par le jugement attaqué du 25 septembre 2014, sur cette question moins de six semaines plus tard. Le tribunal doit ainsi être regardé comme ayant respecté le bref délai qu’il lui était imparti par les dispositions précitées de l’ordonnance du 7 novembre 1958 modifiée. Par suite, et en tout état de cause, le syndicat requérant n’est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait, à ce titre, entaché d’irrégularité.

7. Pour refuser la transmission au Conseil d’Etat de la question prioritaire de constitutionnalité de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807, les premiers juges ont, au préalable, défini la portée des dispositions contestées, et en particulier l’expression « le Gouvernement » à laquelle il est fait mention, au regard de leurs termes mêmes et de la date à laquelle elles ont été adoptées. Ils ont ensuite indiqué, avec suffisamment de précision, les raisons pour lesquels la question de l’atteinte, par les dispositions contestées, au principe d’égalité, au principe de clarté de la loi, à l’objectif d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi, au principe de confiance légitime et au principe de libre-administration des collectivités territoriales ne présentait pas un caractère sérieux. Le tribunal a, ainsi, suffisamment motivé sa réponse sur la demande de transmission de question prioritaire de constitutionnalité. Dans ces conditions, le jugement attaqué n’est pas, sur ce point, entaché de l’irrégularité alléguée.

8. La contradiction de motifs affecte le bien-fondé d’une décision juridictionnelle et non sa régularité. Par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges ne pouvaient, sans contradiction, considérer qu’il convenait, pour apprécier s’il y avait lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité, de définir au préalable la portée des dispositions contestées de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 et juger que la question de l’atteinte par ces mêmes dispositions au principe de clarté de la loi ne présentait pas un caractère sérieux doit, en tout état de cause, être écarté.

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

9. Aux termes de l’article 23-2 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 : « (…) Le refus de transmettre la question ne peut être contesté qu'à l'occasion d'un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige ». Aux termes de l’article R. 771-12 du code de justice administrative : « Lorsque, en application du dernier alinéa de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, l'une des parties entend contester, à l'appui d'un appel formé contre la décision qui règle tout ou partie du litige, le refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité opposé par le premier juge, il lui appartient, à peine d'irrecevabilité, de présenter cette contestation avant l'expiration du délai d'appel dans un mémoire distinct et motivé, accompagné d'une copie de la décision de refus de transmission. (…) ». Il résulte de ces dispositions que, lorsqu’un tribunal administratif a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité qui lui a été soumise, il appartient à l'auteur de cette question de contester ce refus dans le délai d’appel si ce dernier est l’appelant principal, à l'occasion du recours formé contre le jugement qui statue sur le litige, par un mémoire distinct et motivé, que le refus de transmission précédemment opposé l'ait été par une décision distincte du jugement, dont il joint alors une copie, ou directement par ce jugement. Saisie de la contestation de ce refus, la cour procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux.

10. Aux termes de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 susvisée, dont la constitutionnalité est contestée : « Lorsqu'il s'agira de construire des digues à la mer, ou contre les fleuves, rivières ou torrents navigables ou non navigables, la nécessité en sera constatée par le Gouvernement et la dépense supportée par les propriétés protégées, dans la proportion de leur intérêt aux travaux ; sauf le cas où le Gouvernement croirait utile et juste d'accorder des secours sur les fonds publics. ». Le syndicat secondaire Le Signal soutient que ces dispositions, invoquées par l’Etat, la commune de Soulac-sur-Mer et la communauté de communes de la Pointe du Médoc, pour fonder leurs décisions contestées, méconnaissent les principes d’égalité devant la loi (articles 6 et 13 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen), de clarté et d’intelligibilité de la loi (articles 4, 5, 6 et 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen), de confiance légitime et de libre administration des collectivités territoriales garanti par l’article 72 de la Constitution.

11. Il ressort clairement des termes de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 que la protection des propriétés riveraines de la mer et des cours d'eau navigables ou non navigables contre l'action naturelle des eaux incombe aux propriétaires intéressés. Si cet article emploie le terme « le Gouvernement », cette mention, compte tenu de la date d’adoption de la loi en cause et de son caractère général ne préjugeant pas d’une répartition ultérieure des compétences, doit être regardée comme concernant l’ensemble des pouvoirs publics, soit l’Etat ainsi que les collectivités et établissements publics territoriaux. Cet article se borne à permettre aux pouvoirs publics, sous le contrôle du juge, d'apporter, s’ils l’estiment utile et juste, des aides financières aux propriétaires riverains qui seraient dans la nécessité d’entreprendre des travaux de protection contre la mer, les fleuves, les rivières ou les torrents. Par suite, le grief tiré de ce que le législateur aurait méconnu le principe de clarté de la loi et l’objectif à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité ne présente pas, en tout état de cause, un caractère sérieux.

12. Si les dispositions précitées de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 prévoient la possibilité pour les autorités publiques d’accorder des aides sur fonds publics en vue de la protection des propriétés privées situées en bord d’eau contre l’action naturelle des eaux, elles ne permettent pas de déroger au principe d’égalité de traitement pour des raisons autres que d’intérêt général. Par ailleurs, la différence de traitement entre les propriétés foncières selon qu’elles sont ou non riveraines de la mer ou de cours d’eau résulte de la prise en compte de situations différentes. Par suite, les dispositions contestées, qui ne créent, en elles-mêmes, aucune discrimination entre les propriétés privées situées en bord d’eau, ne portent pas atteinte au principe de l’égalité devant la loi, pas davantage qu’à ses corollaires, le principe d’égalité devant les charges publiques et le principe d’égalité des usagers du domaine public.

13. Si le syndicat secondaire Le Signal soutient que l’article 33 précité de la loi du 16 septembre 1807 porte atteinte au principe de confiance légitime, ce principe n’est pas au nombre des droits et libertés garantis par la Constitution. En l’absence de dispositions antérieures imposant aux pouvoirs publics d’assurer, en toute circonstance, la protection des propriétés privées contre l’action naturelle des eaux, cet article ne peut, en tout état de cause, être regardé comme portant atteinte à une situation légalement acquise, ni comme remettant en cause les effets qui pourraient légitimement être attendus d’une telle situation.

14. Il résulte de l’article L. 321-1 du code de l’environnement, que la politique d’aménagement, de protection et de mise en valeur du littoral implique une coordination des actions de l’État et des collectivités locales, ou de leurs groupements. Le législateur a précisé à l’article L. 211-7 de ce code que les collectivités territoriales et leurs groupements sont habilités à entreprendre l’étude, l’exécution et l’exploitation de tous travaux, actions, ouvrages ou installations présentant un caractère d’intérêt général ou d’urgence, visant notamment la défense contre la mer. En la matière et en tant que de besoin, le maire est compétent, sur le fondement des pouvoirs de police municipale qu’il tient des articles L. 2212-2 et suivants du code général des collectivités territoriales, pour prendre des mesures temporaires ou limitées de prévention ou de sauvegarde. A ce titre, l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 dont le recours à l’expression le « gouvernement », ainsi qu’il a été dit au point 11, ne peut être regardé comme visant uniquement l’Etat et ne préjuge pas d’une répartition ultérieure des compétences avec les collectivités territoriales, ne fait pas obstacle à l’application des dispositions du code de l’environnement et du code général des collectivités territoriales donnant des compétences aux collectivités territoriales et leurs groupements en matière de lutte contre l’érosion. Par suite, les dispositions de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 ne méconnaissent pas le principe de libre administration des collectivités territoriales.

15. Aux termes de l’article 5 de la charte de l’environnement dispose : « Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

16. Les dispositions de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807, qui n’ont pas pour objet la conservation du littoral, permettent aux propriétaires riverains de protéger leurs biens contre l’action naturelle de la mer, des fleuves, des rivières ou des torrents. Ces mêmes dispositions permettent en outre aux pouvoirs publics, s’ils le croient utile et juste, de participer financièrement à ces travaux de protection. Il s’ensuit que ces dispositions législatives ne méconnaissent pas le principe de précaution, défini par l’article 5 précité de la charte de l’environnement.

17. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le syndicat secondaire Le Signal ne présente pas un caractère sérieux. Par suite, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, il n’y a pas lieu de renvoyer cette question au Conseil d’Etat.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les moyens de légalité externe :

18. Aux termes de l’article 7 de la charte de l’environnement : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement. ». Ces dispositions ont ainsi réservé au législateur le soin de préciser « les conditions et les limites » dans lesquelles doit s’exercer le droit de toute personne à accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et à participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement. Or, aucune disposition législative, avant l’ordonnance n° 2013-714 du 5 août 2013 entrée en vigueur le 1er septembre suivant ayant créé l’article L. 120-1-1 du code de l’environnement, n’assurait, s’agissant des décisions individuelles des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement, hormis des dispositions spécifiques, la mise en œuvre du principe de participation du public à l’élaboration de telles décisions publiques. Il en résulte que le syndicat secondaire Le Signal, qui n’invoque aucune disposition spécifique, ne peut valablement soutenir qu’il aurait appartenu à la commune de Soulac-sur-Mer, à la communauté de commune de la Pointe du Médoc et au préfet de la Gironde, dont les décisions contestées sont antérieures au 1er septembre 2013, d’assurer la mise en œuvre d’une telle participation. Par suite, le moyen tiré de ce que ces décisions auraient été prises à l’issue d’une procédure irrégulière au regard de l’article 7 de la charte de l’environnement ne peut qu’être écarté.

19. Le syndicat secondaire Le Signal reprend en appel les moyens déjà soulevés en première instance et tirés, d’une part, de l’incompétence du président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc à prendre la décision contestée du 18 mars 2013 en l’absence d’une délégation en ce sens du conseil communautaire, d’autre part, de l’insuffisance de motivation de cette décision ainsi que de celle du 18 février 2013 du maire de Soulac-sur-Mer. A ce titre, il ne se prévaut d’aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l’argumentation développée devant le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d’écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

S’agissant de la décision du maire de Soulac-sur-Mer du 18 février 2013 :

20. Aux termes de l’article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : « Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale (…). ». Aux termes de l’article L. 2212-2 du même code : « La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / (…) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, (…) les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels, (…), de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure (…). ». Aux termes de l’article L. 2212-3 dudit code : « La police municipale des communes riveraines de la mer s'exerce sur le rivage de la mer jusqu'à la limite des eaux. ». Enfin, l’article L. 2212-4 de ce code dispose : « En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances. / Il informe d'urgence le représentant de l'Etat dans le département et lui fait connaître les mesures qu'il a prescrites. ».

21. Le syndicat secondaire Le Signal soutient que le maire de Soulac-sur-Mer aurait méconnu son pouvoir de police générale en refusant, par sa décision du 18 février 2013, de donner suite à la demande de réalisation de travaux de consolidation de la zone dunaire sur laquelle est située la résidence « Le Signal » exposée à un risque d’effondrement du fait du recul du trait de la côte. Il est toutefois constant que le maire, tenant compte de l’exposition du bâtiment du Signal à un danger grave ou imminent, a, antérieurement à la décision contestée, par arrêtés des 2 décembre 2011, 23 avril 2012 et 25 octobre 2012 mis en place un dispositif de surveillance et de contrôle de l’évolution du trait de côte devant le bâtiment. Ce dispositif consiste en la mise en place de piquets de repérage en crête de dune et en des observations visuelles par les agents municipaux chaque semaine, ainsi qu’à chaque coefficient de marée supérieur à 80 et lors d’événements météorologiques exceptionnels, en des mesures de pré-alerte et d’alerte dès lors que la distance observée entre l’un des points de la crête de la dune et le bâtiment atteint le seuil de vingt et un mètres. Dès lors que cette distance est inférieure à un seuil de vingt mètres, sont alors prévus l’évacuation de l’immeuble, un relogement temporaire d’urgence pour trois jours au maximum et l’installation d’un périmètre de sécurité. Alors qu’à la date de la décision contestée, le seuil d’alerte et d’évacuation n’avait pas encore été atteint, le maire de Soulac-sur-Mer avait ainsi prescrit les mesures adaptées pour assurer la sécurité des personnes compte tenu des risques présentés. Si ces mesures ne sont pas de nature à empêcher l’avancée des flots au droit de l’immeuble du Signal, les opérations requises pour protéger l’immeuble d’un tel phénomène, évaluée entre 9 500 000 et 17 000 000 d’euros hors taxes et dont l’efficacité ne peut pas être totalement garantie, auraient, en tout état de cause, excédé, par leur coût et leur ampleur, les « précautions convenables » au sens de l’article L. 2212-2 précité du code général des collectivités territoriales que le maire est habilité à prendre pour prévenir les accidents naturels. Dans ces conditions, et alors qu’il incombe, ainsi que la commune le soutient, en vertu de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807, aux propriétaires riverains de la mer d’assurer la protection de leur propriétés contre celle-ci, le maire de Soulac-sur-Mer, en refusant de faire réaliser les travaux sollicités, n’a pas méconnu l’étendue des pouvoirs de police qu’il tient des dispositions précitées des articles L. 2212-1 et suivant du code général des collectivités territoriales, quand bien même la collectivité a par le passé entrepris des travaux d’entretien de la dune et de réengraissement de la plage en sable pour tenter de ralentir le phénomène naturel en cause au droit de la résidence du Signal.

22. Si le syndicat secondaire Le Signal fait état de ce que la plage située dans la zone de la commune de Soulac-sur-Mer dite de « l’Amélie » a, de 1994 à 2006, fait l’objet d’importants travaux de consolidation, notamment par la réalisation d’un cordon d’enrochement d’une longueur de 270 mètres, pour éviter le recul du trait de côte, cofinancés par la commune et la communauté de communes de la Pointe-du-Médoc, le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que soient réglées de façon différente des situations différentes. Il ressort des pièces du dossier qu’alors que le secteur de la résidence « Le Signal », sans accès aménagé direct à la plage, est isolé de toute autre construction, et ne présente pas d’intérêt balnéaire ou touristique particulier, le secteur de l’Amélie accueille une plage publique surveillée particulièrement fréquentée par les estivants, et se situe à proximité de plusieurs campings, centres de vacances et hôtels. Par suite, le secteur de l’Amélie se trouvant dans une situation différente de celle du secteur de la résidence « Le Signal », le syndicat requérant n’est pas fondé à soutenir qu’en refusant de faire droit à sa demande de réalisation de travaux de consolidation de la zone dunaire aux abords de cette résidence, le maire de Soulac-sur-Mer aurait méconnu le principe d’égalité.

23. Le syndicat secondaire Le Signal se prévaut de lettres en date des 17 mars 2000, 11 juin 2001, 1er octobre 2001, 5 août 2002 et 16 mai 2008 du maire de Soulac-sur-Mer adressées respectivement à la copropriété de la résidence « Le Signal », à son conseil, à l’association « Dialogue et Renouveau » et à deux copropriétaires de la résidence. La première de ces lettres se borne à mentionner que « la municipalité va engager des travaux. Au demeurant une étude d’impact est en cours (...) », la deuxième que « la réflexion doit aboutir à des solutions concrètes (…) », la troisième que « le maire souhaite engager des travaux de protection », la quatrième que « l’apport de sable massif effectué sur l’Amélie à titre expérimental sera poursuivi (…). Aussi est il tout à fait envisageable et légitime d’imaginer la même opération sur la plage dite du Signal », enfin la cinquième que « la construction d’un épi vers la résidence « Le Signal » sera étudiée à moyen terme ». De telles promesses ou annonces, dont la concrétisation appelait des décisions ultérieures, sont sans incidence sur la légalité de la décision contestée portant refus de réaliser de tels travaux.

24. Si le syndicat secondaire Le Signal fait valoir que l’arrêté du maire de Soulac-sur-Mer du 24 janvier 2014 portant ordre d’évacuation et interdiction d’occupation de l’immeuble du Signal serait illégal et de nature à engager la responsabilité de la commune de Soulac-sur-Mer, une telle circonstance, postérieure à la décision contestée du 18 février 2013, est sans incidence sur sa légalité.

S’agissant de la décision du président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc du 18 mars 2013 :

25. Aux termes de l’article L. 5214-16 du code général des collectivités territoriales : « I. - La communauté de communes exerce de plein droit au lieu et place des communes membres les compétences relevant de chacun des groupes suivants : / 1° Aménagement de l'espace ; / (…) II.- La communauté de communes doit par ailleurs exercer dans les mêmes conditions des compétences relevant d'au moins un des six groupes suivants : / 1° Protection et mise en valeur de l'environnement, le cas échéant dans le cadre de schémas départementaux et soutien aux actions de maîtrise de la demande d'énergie (…). ».

26. Il ressort des pièces du dossier que la compétence en matière de protection de l’environnement et en particulier en matière de lutte contre l’érosion sur le littoral atlantique, a été transférée par arrêté du préfet de la Gironde du 13 juin 1996 de la commune de Soulac-sur-Mer au district de la Pointe du Médoc, auquel la communauté de communes de la Pointe-du-Médoc a par la suite succédé. Sur ce fondement, la communauté de communes de la Pointe-du-Médoc a fait réaliser en 2010 un diagnostic géotechnique sur le cordon dunaire qui supporte l’immeuble du Signal, ainsi qu’une étude de faisabilité en vue de la réalisation de travaux d’urgence de lutte contre l’érosion au niveau de l’immeuble du Signal et de la plage centrale de Soulac-sur-Mer. Il est constant qu’elle a par ailleurs participé, aux côtés de la commune de Soulac-sur-Mer, à de nombreuses actions menées en vue du ralentissement du phénomène de l’érosion marine, notamment par un réengraissement périodique des plages, la pose de barrières et la végétalisation des dunes. Si le syndicat requérant soutient que ces mesures ne sont pas de nature à empêcher l’avancée des flots au droit de l’immeuble du Signal, il ne ressort pas des pièces qu’une telle protection, évaluée comme il a été dit au point 21 entre 9 500 000 et 17 000 000 d’euros hors taxes, corresponde à l’intérêt communautaire dont à la charge la communauté, alors qu’il n’est pas contesté que cet immeuble, sans intérêt architectural et séparé des constructions avoisinantes par une voie de circulation, est dépourvu d’utilité publique. Par suite, en refusant de faire droit à la demande du syndicat secondaire Le Signal tendant à la réalisation de travaux de consolidation sollicités, le président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc n’a ni commis d’erreur de droit au regard des dispositions de l’article L. 5214-16 précité du code général des collectivités territoriales, ni entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation.

27. Ainsi qu’il a été dit au point 21, le maire de Soulac-sur-Mer, en refusant de faire droit à la demande du syndicat secondaire Le Signal tendant à la réalisation de travaux de consolidation du cordon dunaire aux abords de l’immeuble, n’a pas méconnu l’étendue des pouvoirs de police qu’il tient des dispositions précitées des articles L. 2212-1 et suivant du code général des collectivités territoriales. Par suite, et alors que la communauté de communes de la Pointe du Médoc n’a aucune compétence en matière de police et qu’en vertu de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807, ainsi que le soutient la communauté, il incombe aux propriétaires riverains de la mer d’assurer la protection de leur propriété contre celle-ci, doit, en tout état de cause, être écarté le moyen tiré de ce que la carence du maire de Soulac-sur-Mer à prendre des mesures de police adaptées aurait dû conduire le président de la communauté de communes à se substituer à ce dernier pour faire réaliser les travaux sollicités.

28. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 22 et 23, les moyens tirés de la méconnaissance du principe d’égalité et de l’existence de promesses non tenues doivent être écartés.

29. Si le syndicat secondaire Le Signal fait valoir que le président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et sa famille détiennent des intérêts immobiliers et commerciaux dans le secteur de l’Amélie où d’importants travaux notamment d’enrochement ont été réalisés, cette seule circonstance ne suffit pas à établir l’existence d’un détournement de pouvoir.

En ce qui concerne la décision implicite du préfet de la Gironde :

30. Aux termes de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale est assurée par le maire, toutefois : / 1° Le représentant de l'Etat dans le département peut prendre, pour toutes les communes du département ou plusieurs d'entre elles, et dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités municipales, toutes mesures relatives au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques. / (…) ».

31. Il résulte de ce qui a été dit aux points 21 et 27 que le maire de Soulac-sur-Mer n’a n’a pas méconnu l’étendue des pouvoirs de police générale et que la communauté de communes ne détient, en tout état de cause, pas de compétence en matière de police. Par suite et alors qu’il incombe, ainsi que le soutient le ministre, en vertu de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807, aux propriétaires riverains de la mer d’assurer la protection de leur propriété contre celle-ci, le moyen tiré de ce que le préfet de la Gironde aurait dû se substituer aux autorités locales en application des dispositions précitées de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.

32. Aux termes de l’article L. 561-1 du code de l’environnement : « Sans préjudice des dispositions prévues au 5° de l'article L. 2212-2 et à l'article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, lorsqu'un risque prévisible (…) de submersion marine menace gravement des vies humaines, l'Etat peut déclarer d'utilité publique l'expropriation par lui-même, les communes ou leurs groupements, des biens exposés à ce risque, dans les conditions prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et sous réserve que les moyens de sauvegarde et de protection des populations s'avèrent plus coûteux que les indemnités d'expropriation. / (…). ».

33. Il ressort des pièces du dossier que depuis les années 1965-1970, le trait de côte au droit du Signal recule, sans aucun signe de stabilisation à venir. La bonne connaissance scientifique, attestée par les divers rapports joints au dossier, de ce phénomène naturel, dont l’évolution régulière a pu être observée depuis près d’un demi-siècle et de manière accentuée depuis la tempête Xynthia, a permis l’édiction de mesures, déjà citées au point 21, telles que la mise en place d’un dispositif de surveillance, d’alerte, d’évacuation des résidents de l’immeuble et d’un périmètre de sécurité, propres à assurer, bien en amont de la réalisation du risque en cause, la sécurité des personnes. Dans ces conditions, le risque de submersion marine qui pèse sur l’immeuble du Signal ne pouvait, à la date de la décision contestée, être regardé comme menaçant gravement des vies humaines au sens des dispositions précitées de l’article L. 561-1 du code de l’environnement. Par suite, ne peut qu’être écarté le moyen que serait entachée d’erreur manifeste d’appréciation la décision implicite du préfet de la Gironde refusant d’engager la procédure d’expropriation prévue par cet article.

34. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat secondaire Le Signal n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation des décisions contestées du maire de Soulac-sur-Mer, du président de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et du préfet de la Gironde. Par voie de conséquence, les conclusions de l’intéressé aux fins d’injonction sous astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

35. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Soulac-sur-Mer, de la communauté de communes de la Pointe du Médoc et de l’Etat, qui ne sont pas, dans la présente instance les parties perdantes, les sommes que le syndicat secondaire Le Signal demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Soulac-sur-Mer et de la communauté de communes de la Pointe du Médoc présentées sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n’y a pas lieu de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le syndicat secondaire Le Signal.

Article 2 : La requête du syndicat secondaire Le Signal est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Soulac-sur-Mer et la communauté de communes de la Pointe du Médoc sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.