Vu la procédure suivante :

Par son arrêt du 16 juin 2015, la cour a demandé un avis technique, avant de statuer sur la requête présentée pour le centre hospitalier de Périgueux, tendant à l’annulation du jugement n° 1104142 du 3 décembre 2013 du tribunal administratif de Bordeaux, qui l’a condamné à verser une indemnité à M. et Mme M== en réparation des préjudices subis du fait du décès de leur fille et à rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de la Dordogne les frais engagés pour son assuré.

Par sa requête, enregistrée le 4 février 2014, par son mémoire complémentaire, enregistré le 28 mars 2014 et par son nouveau mémoire, enregistré le 13 novembre 2015, présentés par Me Le Prado, le centre hospitalier de Périgueux, représenté par son directeur en exercice, soutient que : ………………………………………………………………………………………….

Considérant ce qui suit :

1. Mme M== est entrée le 26 août 2001 à la maternité du centre hospitalier de Périgueux en vue d’un accouchement par césarienne. Sa fille, Océane, est née le lendemain en état de mort apparente et a été immédiatement intubée et ventilée par le pédiatre, puis transférée le jour même au service de réanimation néonatale du centre hospitalier universitaire de Bordeaux, où elle est décédée le 12 novembre 2001 d’une bradycardie profonde. Par jugement du 3 décembre 2013, le tribunal administratif de Bordeaux, se fondant notamment sur le rapport de l’expertise ordonnée en référé, a condamné le centre hospitalier de Périgueux à verser à M. et Mme M== la somme de 15 000 euros chacun et à la caisse primaire d’assurance maladie de la Dordogne la somme de 95 142,67 euros, ainsi que la somme de 1 015 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion. Le centre hospitalier de Périgueux a relevé appel de ce jugement.

Sur l’appel du centre hospitalier de Périgueux :

2. Par son arrêt du 16 juin 2015, la cour a jugé que l’état de l’enfant à la naissance ne trouvait pas son origine dans une maladie génétique ou dans une souffrance fœtale pendant la grossesse mais résultait de lésions médullaires liées à la manœuvre d’extraction, qui étaient la cause directe et certaine de la mort de l’enfant. Elle a estimé qu’elle ne disposait pas d’éléments suffisants pour se prononcer sur le caractère de faute de nature à engager la responsabilité de l’établissement, que pouvait présenter le recours à la méthode de Mauriceau lors d’un accouchement par césarienne ou sur le caractère exceptionnel de l’accident qui s’était produit, susceptible d’engager la responsabilité sans faute de l’établissement, eu égard à la date de l’intervention, qu’il appartenait à la cour de soulever d’office. Elle a donc décidé de surseoir à statuer sur la requête et de procéder, en application de l’article R. 625-2 du code de justice administrative, à une mesure d’instruction sous la forme d’un avis technique.

3. Cet avis technique portait sur les points de savoir si l’utilisation par un obstétricien de la manœuvre de Mauriceau, lors d’un accouchement par césarienne, était de nature à révéler un choix inapproprié faisant courir à l’enfant des risques inutiles, d’une part et, d’autre part, si le risque de torsion cervicale provoquant des lésions médullaires, qui s’est réalisé en l’espèce et qui est connu, peut être regardé comme présentant un caractère exceptionnel.

4. Lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité. La circonstance que le risque qui s’est réalisé ne soit pas commun à une catégorie d’actes médicaux n’est pas une condition de l’engagement de la responsabilité sans faute du service public hospitalier.

5. Il résulte de l’avis technique donné en exécution de l’arrêt du 16 juin 2015 de la cour que si le risque de torsions provoquant des lésions médullaires est connu et redouté, en cas d’accouchements dystociques d’enfants se présentant par le siège, sa réalisation lors d’un tel accouchement par césarienne est exceptionnelle. Il est vrai que tous les enfants se présentant par le siège sont exposés à un risque de lésions. Toutefois, le risque le plus souvent encouru est celui de lésions n’ayant pas des conséquences aussi dramatiques qu’en l’espèce et le recours à un accouchement par voie haute est précisément destiné à les prévenir ou à les minimiser. Comme il est dit au point 2, l’état de l’enfant à la naissance ne trouvait pas son origine dans une maladie génétique ou dans une souffrance fœtale pendant la grossesse. Ainsi, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier de Périgueux, l’état d’Océane M== à sa naissance et son décès doivent être regardés comme sans rapport avec son état initial comme avec l'évolution prévisible de cet état. Par suite, les conditions de l’engagement de la responsabilité sans faute du service public hospitalier sont réunies.

6. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Périgueux n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par son jugement du 3 décembre 2013, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Bordeaux, l’a condamné à verser à M. et Mme M== la somme de 15 000 euros chacun et à la CPAM de la Dordogne la somme de 95 142,67 euros, ainsi que la somme de 1 015 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion.

Sur les frais de l’avis technique :

Les frais et honoraires de l’avis technique, taxés et liquidés à la somme de 600 euros, doivent être mis à la charge du centre hospitalier de Périgueux.

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Dans les circonstances de l’espèce et en application de cet article, il y a lieu de condamner le centre hospitalier de Périgueux à verser à M. et Mme M== une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Périgueux est rejetée.

Article 2 : Les frais et honoraires de l’avis technique, d’un montant de 600 euros, sont mis à la charge du centre hospitalier de Périgueux.

Article 3 : Le centre hospitalier de Périgueux versera à M. et Mme M== la somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.