Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société entreprise du bâtiment Dus a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la communauté de communes du Bazadais à lui verser une somme de 135 346,72 euros hors taxe au titre du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait de son éviction du marché attribué par la communauté de communes à la société SNB Dupiol.

Par un jugement n° 1202695 du 16 avril 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 juin 2014, 29 décembre 2015 et 21 janvier 2016, la société entreprise du bâtiment Dus, représentée par Me Palmier, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 avril 2014 ;

2°) de condamner la communauté de communes du Bazadais à lui verser une indemnité de 135 346,72 euros hors taxe ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Bazadais la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. La communauté de communes du Bazadais a engagé une procédure adaptée en vue de l’attribution d’un marché portant sur la réalisation de travaux de modernisation et d’extension de l’abattoir de Bazas et la création d’un atelier de découpe de viandes décomposé en dix-sept lots. Par un courrier du 16 novembre 2011, la société entreprise du bâtiment Dus a été informée du rejet de son offre portant sur le lot n°2 « Gros œuvre » et de l’attribution du lot à la société Dupiol. La société entreprise du bâtiment Dus a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la communauté de communes du Bazadais à l’indemniser du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait de son éviction irrégulière. Par un jugement du 16 avril 2014, le tribunal administratif, même s’il a estimé que la communauté de communes du Bazadais avait commis un manquement à ses obligations de mise en concurrence des candidats, a néanmoins rejeté sa demande indemnitaire au motif que l’offre de la société était irrégulière et qu’ainsi cette dernière était dépourvue de toute chance de remporter le marché. La société entreprise du bâtiment Dus relève appel de ce jugement. 2. La société soutient que les premiers juges ont à tort estimé qu’elle aurait dû joindre au dossier de sa candidature le jugement du tribunal de commerce d’Agen du 21 juillet 2011 qui avait arrêté le plan de redressement la concernant : selon elle, cette décision marque la fin du redressement judiciaire. 3. Aux termes du 3° de l’article 8 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 : « Ne peuvent soumissionner à un marché passé par un pouvoir adjudicateur : (...) Les personnes soumises à la procédure de liquidation judiciaire prévue à l'article L. 640-1 du code de commerce (…) Les personnes admises à la procédure de redressement judiciaire instituée par l'article L. 631-1 du code de commerce (….) doivent justifier qu'elles ont été habilitées à poursuivre leurs activités pendant la durée prévisible d'exécution du marché ». L’article 38 de la même ordonnance prévoit l’application de cette disposition à l’ensemble des marchés publics. Aux termes de l’article 43 du code des marchés publics applicable aux faits du litige : « Les interdictions de soumissionner aux marchés et accords-cadres soumis au présent code s'appliquent conformément aux dispositions de l'article 38 de l'ordonnance du 6 juin 2005 (..) ». L’article 52 du même code prévoit que « (…) Les candidats qui ne peuvent soumissionner à un marché en application des dispositions de l’article 43 (…) ne sont pas admis à participer à la suite de la procédure de passation du marché ». Aux termes du I de l’article 44 : « Le candidat produit à l'appui de sa candidature : / 1° La copie du ou des jugements prononcés, s'il est en redressement judiciaire ; / 2° Une déclaration sur l'honneur pour justifier qu'il n'entre dans aucun des cas mentionnés à l'article 43 ; / 3° Les documents et renseignements demandés par le pouvoir adjudicateur dans les conditions fixées à l'article 45 ». Aux termes de l’article 3.3 du règlement de la consultation du marché en litige : « « Les offres seront rédigées en langue française, seront remises et comprendront les pièces particulières (…) / Lettre de candidature (DC1) / Déclaration du candidat (DC2 et NOTI 1) / Déclaration sur l’honneur conformément aux articles 44 et 46 du code des marchés publics (…) ». 4. Aux termes de l’article L. 631-1 du code de commerce : « Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements (…). La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation (…) ». En vertu de cet article et des autres dispositions du titre III « Redressement judiciaire » du livre VI du code de commerce, notamment des articles R. 631-32 à R. 631-36, le plan de redressement est au nombre des modalités du redressement judiciaire d’une entreprise en difficulté. L’article R. 631-43 du même code prévoit d’ailleurs que la clôture de la procédure judiciaire au terme de l’exécution du plan de redressement est prononcée par une ordonnance du président du tribunal de commerce. 5. Il résulte des dispositions précitées du code des marchés publics qu’il incombe au pouvoir adjudicateur de vérifier les capacités de l’entreprise placée en redressement judiciaire à exécuter le marché compte tenu de son placement dans cette situation pour s’assurer de la recevabilité de sa candidature. Une entreprise placée en redressement judiciaire est ainsi tenue de justifier, lors du dépôt de son offre, qu’elle est habilitée, par le jugement prononçant son placement dans cette situation, à poursuivre ses activités pendant la durée d’exécution du marché, telle qu’elle ressort des documents de la consultation. 6. Cette obligation incombe à l’entreprise y compris lorsqu’elle fait l’objet d’un plan de redressement. Même si l’entreprise est alors admise, sous certaines conditions, à poursuivre son activité en dépit de sa situation débitrice, le pouvoir adjudicateur doit néanmoins pouvoir s’assurer de son aptitude à exécuter le marché proposé alors que l’entreprise est encore soumise au plan de redressement. 7. Il résulte de l’instruction que par un jugement du 8 septembre 2010, le tribunal de commerce d’Agen a prononcé le redressement judiciaire de la société Entreprise de Bâtiment Dus et autorisé celle-ci à poursuivre son activité après avoir ordonné une période d’observation de six mois qui a été renouvelée jusqu’au 1er septembre 2011. Par un jugement du 21 juillet 2011, le tribunal de commerce d’Agen a arrêté un plan de redressement. 8. Il appartenait ainsi à la société Entreprise de Bâtiment Dus de joindre à son offre une copie du jugement arrêtant le plan de redressement. Il est constant que la société requérante, qui a indiqué à tort dans le formulaire de déclaration de candidature qu’elle avait rempli qu’elle ne faisait pas l’objet d’une procédure de redressement judiciaire, n’a pas produit ce jugement avec son dossier de candidature. Par suite, le dossier de candidature de la société était incomplet et le pouvoir adjudicateur aurait été tenu d’écarter son offre qui était irrégulière. 9. Dès lors, la société Entreprise de bâtiment Dus était en tout état de cause dépourvue de toute chance de remporter le marché. Par suite, la société ne peut prétendre à aucune indemnisation du fait de son éviction. 10. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions de l’entreprise du bâtiment Dus, partie perdante dans la présente instance. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la communauté de communes du Bazadais et de mettre à la charge de la société Entreprise du bâtiment Dus la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : La requête de la société Entreprise du bâtiment Dus est rejetée.

Article 2 : La société Entreprise du bâtiment Dus versera à la communauté de communes du Bazadais une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.