Autorisation de défrichement – Conditions dans lesquelles elle peut être modifiée
Par mariecath le vendredi 23 juin 2017, 15:43 - URBANISME - Lien permanent
1. La circonstance qu’un permis de construire a été accordé après une autorisation de défrichement ne fait pas obstacle à ce que le préfet modifie ensuite l’autorisation de défrichement, dès lors que le projet n’est pas substantiellement modifié, notamment lorsque la superficie à défricher est réduite. 2. L’examen au cas par cas de la nécessité d’une étude d’impact n’avait pas à être renouvelé lors de la délivrance d’une autorisation de défrichement modificative, dans les mêmes conditions. 3. La visite des lieux facultative prévue à l’article R.341-1 du code forestier n’avait pas davantage à être renouvelée.
Arrêt n° 16BX01833 -1ère chambre -22 juin 2017- Société Clairsienne
Les pourvois formés devant le Conseil d’Etat contre cet arrêt ont été rejetés (Décision n°400311, 413655 du 17 décembre 2018)
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association « Sainte-Thérèse Préservée », M. G== A==, M. J==-L== B==, Mme M== F==, M. J==-P== N==, M. J==-P== P==, Mme L== H==, M. A== P== et M. A== M== ont demandé au tribunal administratif de Pau d’annuler l’arrêté du 22 avril 2014 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a autorisé la société « La Foncière du Pays basque » à défricher des parcelles d'une superficie de 39 455 m² sur le territoire de la commune de Ciboure, ainsi que la décision modificative du 19 juin 2015 ramenant notamment la surface à défricher à 35 496 m², et d’annuler les arrêtés du 18 février 2014 et du 9 avril 2015 par lesquels le maire de Ciboure a délivré aux sociétés Clairsienne et La foncière du Pays Basque un permis de construire et un permis de construire modificatif pour un ensemble immobilier comprenant des logements collectifs et individuels et des commerces d’une surface de plancher de 29 887,39 m².
Par un jugement n° 1401303, 1401343,1501204 et 1501777 du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Pau a admis l’intervention de la société Clairsienne contre les autorisations de défrichement, a annulé ces autorisations, ensemble et par voie de conséquence les permis de construire, pour lesquels il a en outre relevé d’autres illégalités.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 juin 2016, et des mémoires enregistrés les 14 avril et 15 mai 2017, la société Clairsienne, représentée par la SCP CGCB (Me Gauci), demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 29 mars 2016 en tant qu’il annule les autorisations de défricher ;
2°) de rejeter les demandes des requérants ;
3°) de mettre à la charge des requérants de première instance la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, et les entiers dépens en ce compris le droit de plaidoirie ;
Considérant ce qui suit :
1. La société La Foncière du Pays Basque et la société d’HLM Clairsienne ont conçu le projet d’aménager sur un ensemble de parcelles situées à Ciboure, d’une superficie totale de 9,5 hectares, un ensemble immobilier de 29 887 m² comportant 460 logements, dont 40% à vocation sociale, ainsi que des commerces. La société La Foncière du Pays Basque et la société Clairsienne ont déposé une demande de défrichement portant sur 3,94 hectares, et obtenu le 22 avril 2014 du préfet des Pyrénées-Atlantiques une autorisation subordonnée au financement d'opérations de boisements et aménagements en espaces boisés naturels au titre des mesures compensatoires prévues à l'article L. 341-6 du code forestier, les modalités d'exécution de ces opérations étant fixées dans une convention annexée à cette décision, passée entre la commune de Ciboure et les pétitionnaires, qui prévoyait le reboisement d’environ un hectare et la réhabilitation de trois chemins communaux envahis de végétation. Après le retrait, par délibération du 25 mars 2015, de la délibération du 3 mars 2014 ayant autorisé le maire à signer cette convention, la société La Foncière du Pays Basque et la société Clairsienne ont sollicité le 11 juin 2015 la modification, d’une part de la superficie à défricher pour la ramener à 3,54 hectares, et d’autre part des mesures compensatoires pour appliquer les nouvelles dispositions de l’article L. 341-6 du code forestier issues de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014. Par une décision modificative du 19 juin 2015, le préfet a approuvé ces modifications et prescrit le versement de 39 045 euros au Fonds stratégique de la forêt et du bois en lieu et place des mesures prévues à la convention avec la commune. Saisi par plusieurs voisins, constitués en association dénommée « Sainte Thérèse préservée » et en leur nom personnel, de demandes d’annulation de ces deux décisions, le tribunal administratif de Pau a joint ces requêtes ainsi que celles dirigées par les mêmes requérants contre les deux permis de construire et permis modificatif accordés subséquemment les 18 février 2014 et 9 avril 2015, et annulé l’ensemble de ces décisions. La société Clairsienne, dont l’intervention a été admise par le jugement attaqué en ce qui concerne les autorisations de défrichements, demande à la cour d’annuler ce jugement en tant qu’il annule les autorisations de défrichement.
Sur les conclusions principales :
2. La société Clairsienne soutient à titre principal que c’est à tort que le tribunal a écarté les fins de non recevoir qu’elle avait opposées aux demandes des requérants. S’agissant de l’association « Sainte Thérèse préservée », des extraits des statuts concernant son objet, qui comprend notamment la défense du cadre de vie à Sainte Thérèse, et à l’article 10 bis les pouvoirs de représentation en justice de son président, qui sont précis contrairement à ce que soutient la requérante, ont été produits dans les instances concernant les autorisations de défrichement, et le préfet, défendeur à ces instances, n’en a pas contesté l’authenticité. Dans ces conditions, le tribunal, qui n’était pas tenu d’exiger la production d’un exemplaire intégral des statuts, a pu à bon droit reconnaître l’intérêt de l’association et la qualité pour agir de son président, dont il ne lui appartenait pas de vérifier la régularité de l’élection.
3. S’agissant des autres requérants, le tribunal a retenu « qu’eu égard à leurs adresses, complétées par les indications historiques qu’ils exposent en ce qui concerne leur installation dans le quartier, que ni le préfet auteur de l’acte ni la société « La Foncière du Pays basque » qui en est la bénéficiaire ne contestent, dont rien aux dossiers ne suggère le caractère erroné et qui, au demeurant, ont fait l’objet des justifications requises dans le cadre des requêtes introduites contre les permis de construire, les requérants sont tous domiciliés dans le quartier Sainte-Thérèse ; que les autorisations de défrichement litigieuses affectent entre 38 et 41 % de la superficie d’un terrain boisé, parfois de façon remarquable, et dont une bonne part est située dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, situé précisément dans ce quartier et dont il constitue un élément du cadre de vie ». La circonstance, pour regrettable qu’elle soit, que les requérants n’aient pas cru devoir produire également dans les instances relatives aux défrichements les justifications d’adresses produites dans celles relatives aux permis de construire n’apparaît pas dans les circonstances de l’espèce, eu égard à l’identité de parties et à l’absence de toute contestation par la société Clairsienne de la communication par le tribunal de ces justificatifs, comme de nature à entacher le jugement d’une irrégularité ou d’une erreur de fait. La société ne conteste nullement la proximité que révèlent ces adresses. Par suite, elle n’est pas fondée à soutenir que les personnes physiques requérantes n’auraient pas eu intérêt pour agir.
Sur les conclusions subsidiaires :
4. Pour annuler les autorisations de défrichement en litige, le tribunal s’est fondé d’une part sur le retrait de la délibération autorisant le maire à signer une convention de compensation, qu’il a estimée constituer une condition substantielle de l’autorisation préfectorale du 22 avril 2014, et d’autre part sur l’absence de possibilité de régulariser l’illégalité qu’il a ainsi constatée a posteriori, au regard des effets qu’emporte une autorisation de défricher sur le permis de construire dont elle conditionne l’obtention.
5. Toutefois, la légalité d’une décision s’appréciant à la date à laquelle elle a été prise, la circonstance que l’une des conditions posées à son octroi s’avère irréalisable du fait de la survenance d’évènements postérieurs à son édiction, si elle est de nature à faire obstacle à son exécution, n’est pas de nature à en affecter la légalité. Au demeurant, le retrait de la délibération autorisant le maire à signer la convention ne pouvait par lui-même affecter la validité de la convention, qui a été ultérieurement résolue le 1er octobre 2015, et ne pouvait en tout état de cause avoir aucun effet sur les conditions posées par le préfet, qui demeuraient celles fixées par son arrêté se référant à la convention. Par ailleurs, aucune disposition du code forestier, seul applicable aux autorisations de défrichement, ne fait obstacle à ce que le préfet modifie les conditions de délivrance d’une autorisation de défrichement en cours de validité et non exécutée, dès lors que le projet n’est pas substantiellement modifié, sans que l’autorité compétente ait à s’interroger sur l’articulation de la modification de l’autorisation de défrichement avec le permis de construire délivré subséquemment. Par suite, la société Clairsienne est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal a retenu l’illégalité de la décision du 22 avril 2014 du seul fait que la délibération du conseil municipal de Ciboure du 25 mars 2015 a retiré celle du 3 mars 2014, pour ensuite annuler la décision d’autorisation de défrichement du 19 juin 2015 comme dépourvue de base légale du fait de l’illégalité de la décision qu’elle entendait modifier.
6. Il appartient à la cour, saisie par l’effet dévolutif de l’appel, de statuer sur les autres moyens présentés par les requérants de première instance devant le tribunal et la cour.
En ce qui concerne la composition du dossier :
7. Aux termes de l’article R. 341-1 du code forestier, la demande d’autorisation de défrichement est accompagnée d’un dossier comportant les informations et documents suivants : « 1° Les pièces justifiant que le demandeur a qualité pour présenter la demande et, hors le cas d'expropriation, l'accord exprès du propriétaire si ce dernier n'est pas le demandeur ou, en cas d'application des articles L. 323-4 et L. 433-6 du code de l'énergie et de l'article L. 555-27 du code de l'environnement, l'accusé de réception de la notification au propriétaire de la demande d'autorisation ; 2° L'adresse du demandeur et celle du propriétaire du terrain si ce dernier n'est pas le demandeur ; 3° Lorsque le demandeur est une personne morale, l'acte autorisant le représentant qualifié de cette personne morale à déposer la demande ; 4° La dénomination des terrains à défricher ; 5° Un plan de situation permettant de localiser la zone à défricher ; 6° Un extrait du plan cadastral ; 7° L'indication de la superficie à défricher par parcelle cadastrale et du total de ces superficies ; 8° S'il y a lieu, l'étude d'impact définie à l'article R. 122-5 du code de l'environnement lorsqu'elle est requise en application des articles R. 122-2 et R. 122-3 du même code ; 9° Une déclaration du demandeur indiquant si, à sa connaissance, les terrains ont été ou non parcourus par un incendie durant les quinze années précédant l'année de la demande;10° La destination des terrains après défrichement ; 11° Un échéancier prévisionnel dans le cas d'exploitation de carrière ».
8. Ni ces dispositions ni aucune autre ne prévoient que le dossier doive comporter un recensement individuel des arbres à abattre ou la mention de toutes les servitudes d’urbanisme telles que notamment la zone de bruit à proximité d’une autoroute, ou encore l’existence d’un risque de retrait-gonflement des argiles. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance du dossier sur ces points ne peut qu’être écarté.
En ce qui concerne la nécessité d’une étude d’impact :
9. Les dispositions précitées de l’article R. 341-1 du code forestier subordonnent la production au dossier d’une étude d’impact à la condition qu’elle soit requise en application de l'article R. 122-2 du code de l’environnement. Cet article prévoyait, dans sa version applicable au 7 juin 2013, que les travaux, ouvrages ou aménagements relevant d'une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé sont soumis à une étude d’impact, de façon systématique ou après un examen au cas par cas, en application du II de l'article L. 122-1, en fonction des critères précisés dans ce tableau. Ledit tableau prévoyait à la rubrique 51° que sont soumis de façon systématique à une étude d’impact les défrichements portant sur une superficie totale, même fragmentée, égale ou supérieure à 25 hectares, et à un examen au cas par cas ceux soumis à autorisation au titre de l’article L. 311-2 du code forestier et portant sur une superficie totale, même fragmentée, inférieure à 25 hectares, cette dernière disposition ayant été allégée ultérieurement pour en exclure les défrichements de moins de 0,5 hectares. Aux termes de l’article R. 122-3 du même code : « Pour les projets relevant d'un examen au cas par cas en application de l'article R. 122-2, le maître d'ouvrage décrit les caractéristiques de l'ensemble du projet, y compris les éventuels travaux de démolition ainsi que les incidences notables que son projet est susceptible d'avoir sur l'environnement et la santé humaine. Il décrit également, le cas échéant, les mesures et les caractéristiques du projet destinées à éviter ou réduire les effets négatifs notables de son projet sur l'environnement ou la santé humaine. La liste détaillée des informations à fournir est définie dans un formulaire de demande d'examen au cas par cas dont le contenu est précisé par arrêté du ministre chargé de l'environnement. (…) III. – Dès réception du formulaire complet, l'autorité environnementale le met en ligne sans délai sur son site internet. / IV.-L’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement dispose d’un délai de trente-cinq jours à compter de la réception du formulaire complet pour informer, par décision motivée, le pétitionnaire ou le maître d’ouvrage de la nécessité ou non de réaliser une étude d’impact. (…) / V.-Tout recours contentieux contre la décision imposant la réalisation d’une étude d’impact doit, à peine d’irrecevabilité, être précédé d’un recours administratif préalable devant l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement qui a pris la décision. / (…) » ;
10. Il ressort des pièces du dossier qu’un examen au cas par cas a conduit le préfet des Pyrénées-Atlantiques à dispenser, par une décision du 7 juin 2013, le projet d’une étude d’impact. L’association Sainte Thérèse préservée et les autres demandeurs soutiennent que cette décision est entachée d’illégalité. La société Clairsienne fait valoir que, s’agissant d’une décision individuelle, elle serait définitive et son illégalité ne pourrait être alléguée par voie d’exception. Toutefois, si la décision imposant la réalisation d’une étude d’impact est, en vertu du V de l’article R. 122-3 du code de l’environnement, un acte faisant grief susceptible d’être déféré au juge de l’excès de pouvoir après exercice d’un recours administratif préalable, tel n’est pas le cas de l’acte par lequel l’autorité de l’Etat compétente en matière d’environnement décide de dispenser d’étude d’impact le projet mentionné à l’article R. 122-2 du code de l’environnement. Un tel acte a le caractère d’une mesure préparatoire à la décision prise sur le projet, insusceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir, eu égard tant à son objet qu’aux règles particulières prévues au V de l’article R. 122-3 du code de l’environnement pour contester la décision imposant la réalisation d’une étude d’impact . La décision de dispense d’étude d’impact ne peut donc être contestée qu’à l’occasion de l’exercice d’un recours contre la décision approuvant le projet en cause. Au demeurant, la société Clairsienne n’apporte aucune précision sur les conditions effectives de publicité de cette dispense en se bornant à souligner que la décision elle-même a prévu sa publication sur les sites Internet de la préfecture et de la DREAL. Dans ces conditions, aucun délai n’a pu courir et le moyen est recevable.
11. En premier lieu, les demandeurs de première instance font valoir que le projet ne relevait pas initialement d’un examen au cas par cas car il n’était pas soumis à autorisation de défrichement au titre de l’article « L. 311-1 » du code forestier, celui-ci exemptant les défrichements de moins de 4 hectares, ce qui impliquait que seule la deuxième demande aurait dû être soumise à un examen au cas par cas, qui n’a pas alors été réalisé. Toutefois, les dispositions d’exemption sont fixées par le nouveau code forestier en vigueur depuis 2012 à l’article L. 342-1, lequel exempte d’autorisation les défrichements envisagés « 1° Dans les bois et forêts de superficie inférieure à un seuil compris entre 0,5 et 4 hectares, fixé par département ou partie de département par le représentant de l'Etat, sauf s'ils font partie d'un autre bois dont la superficie, ajoutée à la leur, atteint ou dépasse ce seuil ». En l’espèce, il ressort des pièces du dossier, et notamment du formulaire de demande, que le terrain en cause, d’une superficie de plus de 9 hectares, a fait l’objet d’une demande indiquant initialement une superficie à défricher supérieure à 4 hectares. En outre, il fait partie d’un ensemble boisé dont le terrain, ajouté au sien, a d’ailleurs conduit le préfet à imposer ultérieurement une étude d’impact sur le défrichement que la commune entendait réaliser sur le terrain voisin. Par suite, le défrichement était soumis à autorisation au titre du code forestier, et la première autorisation a régulièrement fait l’objet d’un examen au cas par cas, lequel n’appelait de renouvellement qu’en cas de modification substantielle du projet. La circonstance, pour regrettable qu’elle soit, que dans la décision de dispense, le préfet ait visé de façon erronée le contenu de la rubrique 51 a) figurant dans la colonne du tableau relative aux soumissions systématiques à étude d’impact, alors qu’il convenait de viser la rubrique 51 a) figurant dans la colonne relative aux examens au cas par cas, n’a pu avoir aucune influence sur le sens de sa décision, qui visait bien à opérer, par sa nature même, l’examen au cas par cas requis par ces dispositions. 12. En deuxième lieu, l’association Sainte Thérèse préservée et autres font valoir que le projet ayant été modifié dans son ampleur, une nouvelle décision de défrichement était nécessaire, et un nouvel examen au cas par cas indispensable. Toutefois, si les pétitionnaires ont ajouté deux parcelles à la liste primitivement présentée de douze parcelles, le total de la superficie à défricher a été ramené de 3,9455 hectares à 3,5496 hectares, ce qui n’est pas susceptible en l’espèce d’aggraver les incidences du projet. Les requérants de première instance ne sauraient à cet égard invoquer une « réduction factice » entre les deux demandes alors qu’ils font état de déboisements illégaux remontant bien avant la première d’entre elles. Dans ces conditions, un nouvel examen au cas par cas de la nécessité d’une étude d’impact n’apparaissait pas nécessaire pour modifier au 19 juin 2015 l’autorisation accordée.
13. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande aurait inexactement présenté le terrain comme comportant des landes à fougères, des ronciers et des boisements constitués d’espèces invasives ou exotiques échappées des propriétés alentours, seuls les grands chênes au sud et les boisements de types ripisylve bordant le ruisseau en fond de vallon présentant un intérêt certain et devant être conservés. En prenant acte de cet engagement de conservation partielle, le préfet n’a donc pas inexactement apprécié les atteintes que le défrichement était susceptible de porter à l’environnement. De même, la circonstance que la demande ne mentionnait ni la situation de la zone en risque sismique modéré ou en aléa fort de retrait-gonflement des argiles, ni la zone de bruit délimitée à partir de l’autoroute A63 n’apparaît pas de nature à avoir privé le préfet d’éléments utiles à son appréciation. Enfin, la demande n’avait pas à faire état des projets publics situés à proximité, tant pour le giratoire au carrefour de la RD 704 et du chemin de Sainte Croix, sous maîtrise d’ouvrage conjointe de la commune et du département, que pour le lotissement communal qui n’avait pas alors fait l’objet d’une autorisation. La circonstance que le préfet ait, par une décision ultérieure du 2 décembre 2014, soumis le projet de lotissement communal à une étude d’impact en raison de ses effets sur l’environnement cumulés avec ceux du projet en litige n’est pas de nature à démontrer que ce dernier aurait dû par lui-même se voir imposer une telle étude.
14. En quatrième lieu, le préfet a bien pris en compte la localisation du projet pour partie en site inscrit SIN0000228 « Mamelons dominant la baie de Saint Jean de Luz » et en Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager (ZPPAUP) « le vallon et les pentes entre Sainte Anne et Sainte Croix », et à environ 1 km du site Natura 2000 FR7200785 « la Nivelle » et des Zones Naturelles d'Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) associées, de type 1 « Barthes de la basse vallée de la Nivelle » et de type 2 « Réseau hydrographique de la Nivelle », et a relevé que le pétitionnaire restait soumis aux prescriptions réglementaires afférentes et devrait produire une étude « loi sur l’eau » intégrant une évaluation des incidences Natura 2000. Dans ces conditions, en estimant « qu'au vu des incidences du projet sur le milieu, et notamment au regard de l'ensemble des éléments fournis par le pétitionnaire et des connaissances disponibles à ce stade, le projet n'est pas susceptible d'impacts notables sur l'environnement », pour conclure qu’elle n’était pas soumise à étude d’impact, le préfet n’a pas inexactement apprécié les faits de l’espèce.
15. Si les requérants de première instance font en outre valoir que le projet de lotissement comporterait une voie privée de desserte, laquelle relevait d’un examen au cas par cas au titre de la rubrique 6 d) du tableau évoqué au point 6, un tel moyen est en tout état de cause inopérant à l’encontre de l’autorisation de défrichement, qui ne porte pas sur cette voie .
En ce qui concerne le bien fondé de l’autorisation :
16. Aux termes de l’article L. 341-5 du code forestier : « L'autorisation de défrichement peut être refusée lorsque la conservation des bois et forêts ou des massifs qu'ils complètent, ou le maintien de la destination forestière des sols, est reconnu nécessaire à une ou plusieurs des fonctions suivantes :1° Au maintien des terres sur les montagnes ou sur les pentes ;2° A la défense du sol contre les érosions et envahissements des fleuves, rivières ou torrents ; 3° A l'existence des sources, cours d'eau et zones humides, et plus généralement à la qualité des eaux (…) ;6° A la salubrité publique ; (…)8° A l'équilibre biologique d'une région ou d'un territoire présentant un intérêt remarquable et motivé du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l'écosystème ou au bien-être de la population ;9° A la protection des personnes et des biens et de l'ensemble forestier dans le ressort duquel ils sont situés contre les risques naturels, notamment les incendies et les avalanches. » L’article L.341-6, dans sa version applicable en 2015, dispose : « L'autorité administrative compétente de l'Etat subordonne son autorisation à l'une ou plusieurs des conditions suivantes : 1° L'exécution, sur d'autres terrains, de travaux de boisement ou reboisement pour une surface correspondant à la surface défrichée, assortie, le cas échéant, d'un coefficient multiplicateur compris entre 1 et 5, déterminé en fonction du rôle économique, écologique et social des bois et forêts objets du défrichement, ou d'autres travaux d'amélioration sylvicoles d'un montant équivalent. Le représentant de l'Etat dans le département peut imposer que le boisement compensateur soit réalisé dans un même massif forestier ou dans un secteur écologiquement ou socialement comparable ; 2° La remise en état boisé du terrain lorsque le défrichement a pour objet l'exploitation du sous-sol à ciel ouvert ; 3° L'exécution de travaux de génie civil ou biologique en vue de la protection contre l'érosion des sols des parcelles concernées par le défrichement ; 4° L'exécution de travaux ou mesures visant à réduire les risques naturels, notamment les incendies et les avalanches. L'autorité administrative compétente de l'Etat peut également conditionner son autorisation à la conservation sur le terrain de réserves boisées suffisamment importantes pour remplir les rôles utilitaires définis à l'article L. 341-5. Le demandeur peut s'acquitter d'une obligation mentionnée au 1° du présent article en versant une indemnité équivalente, dont le montant est déterminé par l'autorité administrative et lui est notifié en même temps que la nature de cette obligation. Le produit de cette indemnité est affecté à l'établissement mentionné à l'article L. 313-1 du code rural et de la pêche maritime pour alimenter le fonds stratégique de la forêt et du bois mentionné à l'article L. 156-4 du présent code, dans la limite du plafond prévu à l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. » L’article R.431-4 prévoit enfin que « Lorsque le préfet estime, compte tenu des éléments du dossier, qu'une reconnaissance de la situation et de l'état des terrains est nécessaire, il porte le délai d'instruction à six mois et en informe le demandeur dans les deux mois suivant la réception du dossier complet. Il peut, par une décision motivée, proroger ce délai d'une durée complémentaire de trois mois, notamment lorsque les conditions climatiques ont rendu la reconnaissance impossible. »
17. L’autorisation de défricher a été délivrée après une reconnaissance contradictoire de l’état des bois effectuée le 17 octobre 2013, au terme de laquelle le rédacteur a constaté l’existence de pentes importantes, mais relevé que « Dans le cadre des travaux d'aménagement, une majorité des arbres seront maintenus sur les zones les plus pentues. Les bâtiments seront aussi encastrés et serviront au maintien des terres ». L’agent de la direction départementale des territoires et de la mer a mentionné la présence de saules à conserver comme le pétitionnaire le prévoyait, et a donc été en mesure d’apprécier, même si l’expression n’est pas employée, l’existence d’un milieu humide, sans être lié par les objectifs sur ce point de l’article L. 341-5 du code forestier, et alors que l’existence d’une zone humide au sens de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, qui implique la présence simultanée de végétation hygrophile mais aussi de sols habituellement inondés ou gorgés d’eau, n’est pas établie en l’espèce. En outre, il a souligné, que « Le projet n’est pas situé en zone Natura 2000. Le boisement ne présente pas de vocation récréative. Les terrains ne sont pas entretenus ; ils s’apparentent par endroits à une friche avec envahissement de ronciers et développement d’espèces invasives et exotiques. En termes d’intérêt pour le paysage, une partie de l’emprise du futur aménagement se trouve dans la zone de protection du patrimoine architecturale et paysager (ZPPAUP) « les vallons et les pentes entre Sainte Anne et Sainte Croix ». Un avis conforme de l’architecte des bâtiments de France a été obtenu dans le cadre du permis de construire. Le demandeur précise dans son dossier que les arbres remarquables et sains existants en périphérie du projet seront conservés. Ces arbres sont identifiés sur un plan masse reçu le 20 décembre 2013 ». Il a par suite donné un avis favorable, et la légère réduction de la superficie à défricher, même déplacée sur deux nouvelles parcelles, n’imposait pas une nouvelle visite sur les lieux, laquelle présente un caractère facultatif au regard des dispositions de l’article R. 341-1 du code forestier. Par ailleurs, si le règlement de la zone de protection du patrimoine urbain et paysager recommande que « Les tracés et aménagements urbains, les divisions parcellaires veilleront à conserver le caractère paysager du secteur ainsi que les végétaux intéressants de haut jet », il n’interdit pas tout abattage et envisage en outre la plantation d’arbres de haut jet. Les requérants n’apportent au demeurant aucune démonstration sur l’existence d’arbres remarquables qui ne seraient pas conservés. Par suite, la circonstance que certains arbres de haut jet devraient être abattus pour permettre la réalisation du bassin de rétention d’eaux pluviales et de bâtiments, à la supposer même établie, n’est pas de nature à démontrer qu’en accordant l’autorisation sollicitée, par les décisions du 22 avril 2014 modifiée le 19 juin 2015, qui ont tenu compte de la nécessaire étude « loi sur l’eau » qui serait effectuée avec appréciation des conséquences sur la ZNIEFF voisine, le préfet aurait fait une inexacte application du code forestier.
En ce qui concerne les mesures de compensation :
18. Il résulte de ce qui a été dit aux points 1 et 5 que la modification de l’autorisation de défricher a fait disparaître les conditions posées par la décision du 22 avril 2014, dont les irrégularités ne peuvent dès lors plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’autorisation initiale. Par suite, les moyens tirés de l’irrégularité de la procédure d’adoption de la convention passée entre la commune et les pétitionnaires ou de la méconnaissance de l’équivalence des superficies à défricher et à reboiser prévue par l’article L. 341-6 du code forestier, ne peuvent qu’être écartés comme inopérants à l’encontre de la décision du 22 avril 2014. Quant aux mesures de compensation ordonnées par la décision du 19 juin 2015, le calcul de l’indemnité à verser, en application de l’article L. 341-6 du même code, au Fonds stratégique de la forêt et du bois n’est pas contesté.
En ce qui concerne les autres moyens :
19. Sont inopérants les moyens tirés d’une part de l’illégalité du plan local d’urbanisme de Ciboure ou des permis de construire accordés, ou de la méconnaissance de l’article L. 110 du code de l’urbanisme, dès lors que l’autorisation de défrichement n’est délivrée qu’au regard du code forestier, d’autre part de la méconnaissance de la « démocratie environnementale » dès lors que les dispositions de l’article L. 120-1 du code de l’environnement imposant une communication préalable au public ne s’appliquent pas aux décisions individuelles, ou enfin de l’existence sur le terrain d’assiette du projet de lotissement d’un remblai illégal barrant depuis 2005 le cours d’eau dit Erreka Zahar et de l’absence de recherche de responsabilités sur le dépérissement de chênes que les requérants imputent à cette décharge .
20. Il résulte de tout ce qui précède que la société Clairsienne est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé les autorisations de défricher accordées par le préfet des Pyrénées-Atlantiques.
Sur les conclusions au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :
21. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties sur le fondement de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°s 1401303, 1401343,1501204 et 1501777 du 29 mars 2016 du tribunal administratif de Pau est annulé en tant qu’il a, par l’article 1er, annulé les autorisations de défrichement accordées par le préfet des Pyrénées-Atlantiques les 22 avril 2014 et 19 juin 2015.
Article 2 : Les demandes de l'association « Sainte Thérèse Préservée », M. G== A==, M. J==-L== B==, Mme M== F==, M. J==-P== N==, M. J==-P== P==, Mme L== H==, M. A== P== et M. A== M== présentées devant le tribunal administratif sous les n°s 1401303 et 1501777 et le surplus de leurs conclusions d’appel sont rejetés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Clairsienne est rejeté.