Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société == a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la restitution d’un crédit d’impôt recherche pour un montant de 147 222 euros.

Par un jugement n°1302041 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 19 mai 2014, le 25 novembre 2014 et le 15 décembre 2015, la société ==, représentée par son président directeur général en exercice, par Me Barrois, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 mars 2014 ;

2°) d’ordonner la restitution de l’intégralité du crédit d’impôt recherche qu’elle a revendiqué au titre de l’année 2011 ;

3°) d’ordonner le versement des intérêts moratoires courant à compter de l’expiration du délai de remboursement ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre de l’article L 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :



1. La société ==, qui exerce une activité de conception et de fabrication d’accessoires de vélo innovants, a présenté une réclamation, le 13 février 2013, tendant à la restitution de crédits d’impôt recherche constatés par elle au titre de l’année 2011, à hauteur de 204 356 euros. L’administration, par une décision en date du 11 avril 2013, n’a que partiellement fait droit à cette demande, à hauteur de 57 134 euros, au motif que les dotations aux amortissements des concessions de licence devaient être exclues de l’assiette du crédit d’impôt recherche. La société == demande à la cour d'annuler le jugement du 20 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit d'impôt recherche d'un montant de 147 222 euros au titre de l'année 2011.

Sur la demande de restitution du crédit d’impôt recherche :

2. Aux termes du II de l’article 244 quater B du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l’espèce : « Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d’impôt sont : a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation d'opérations de conception de prototypes ou d'installations pilotes. Toutefois, les dotations aux amortissements des immeubles acquis ou achevés avant le 1er janvier 1991 ainsi que celles des immeubles dont le permis de construire a été délivré avant le 1er janvier 1991 ne sont pas prises en compte ; (…) e) Les frais de prise et de maintenance de brevets (…) f) Les dotations aux amortissements des brevets et des certificats d'obtention végétale acquis en vue de réaliser des opérations de recherche et de développement expérimental ».

3. Il ne résulte pas des dispositions précitées du f) du II de l’article 244 quater B du code général des impôts, éclairées par les travaux préparatoires de la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987 de finances pour 1988 dont elles sont issues, que le législateur ait entendu exclure du bénéfice du crédit d’impôt recherche les dotations aux amortissements de droits d’exploitation attachés à la qualité de concessionnaire de brevets lorsque ces droits présentent le caractère d’immobilisations répondant aux conditions définies par les dispositions précitées du a) du même article. Dès lors, le fait que la société == n’a pas acquis les brevets au titre desquels elle revendique le bénéfice du crédit d’impôt recherche ne fait pas, par lui-même, obstacle à ce qu’elle puisse obtenir cet avantage fiscal.

           4. S’agissant de brevets, seuls les droits attachés à une concession de licence d’exploitation constituant une source régulière de profits, dotés d’une pérennité suffisante et susceptibles de faire l’objet d’une cession doivent suivre le régime fiscal des éléments incorporels de l’actif immobilisé d’une entreprise.
           5. Il résulte de l’instruction que, par trois contrats conclus le 7 avril 2011, la société ==, propriétaire de trois brevets, en a concédé l’exploitation exclusive à la société ==. En vertu de ces contrats, la durée des licences ainsi consenties est égale à la durée de validité des brevets, et seul un manquement des parties à leurs obligations contractuelles respectives est susceptible de mettre fin à la concession avant son terme. Ces contrats prévoient encore que le concessionnaire peut concéder des sous-licences des brevets sans autre limitation que celle résultant de l’objet des contrats et sans autre formalité préalable que celle d’en informer le concédant. Les licences d’exploitation exclusive ainsi concédées à la société == présentent les caractéristiques permettant de les regarder comme répondant aux conditions, rappelées au point 4, auxquelles est subordonnée leur inscription à l’actif immobilisé de l’entreprise. Par suite, en l’absence de toute contestation relative aux autres conditions d’éligibilité au crédit d’impôt recherche définies par la loi, et sans que l’administration puisse utilement invoquer sa propre doctrine, la société == est fondée à demander la prise en compte des dotations d’amortissement correspondant auxdites concessions en vue de bénéficier du crédit d’impôt recherche.

6. Il résulte de ce qui précède que la société == est fondée à demander l’annulation du jugement attaqué et la restitution d’un crédit d’impôt recherche pour un montant de 147 222 euros au titre de l’année 2011.

Sur les intérêts moratoires :

7. En l’absence de litige né et actuel avec le comptable chargé du recouvrement, les conclusions tendant au versement d’intérêts moratoires en application des dispositions de l’article L. 208 du livre des procédures fiscales ne sont pas recevables.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société == de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 20 mars 2014 est annulé.

Article 2 : Il est accordé à la société == la restitution d’un crédit impôt recherche d’un montant de 147 222 euros au titre de l’année 2011.

Article 3 : L’Etat versera à la société == la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative.