Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société G= a demandé au tribunal administratif de La Réunion de lui accorder la décharge des suppléments d’impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010.

Par un jugement n°1200198 du 27 février 2014, le tribunal administratif de La Réunion lui a accordé la décharge demandée en ce qui concerne l’année 2010 et a rejeté le surplus de sa demande. Il a également mis à la charge de l’Etat le versement à la société de la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire enregistrés le 27 juin 2014 et le 22 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics (direction de contrôle fiscal sud-ouest), demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 27 février 2014 ;

2°) de rétablir la société G= à l’imposition dont elle a été déchargée par ce jugement.


Considérant ce qui suit :

1. La société G= a pour activité la vente et l’installation de chauffe-eau solaires et de centrales photovoltaïques, qu’elle exerce sur l’île de La Réunion. Elle s’est placée, pour l’imposition de ses bénéfices afférents aux exercices clos en 2009 et 2010, sous le régime d’abattement prévu à l’article 44 quaterdecies du code général des impôts. A la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration a remis en cause le bénéfice de ce régime pour ces deux exercices. Il en est résulté l’établissement d’impositions supplémentaires dont la société G= a demandé au tribunal administratif de La Réunion la décharge. Le ministre des finances et des comptes publics fait appel du jugement par lequel le tribunal a fait droit à sa demande en décharge portant sur l’année 2010.

2. Aux termes de l’article 44 quaterdecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l’espèce : « I.- Les bénéfices des entreprises provenant d'exploitations situées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion peuvent faire l'objet d'un abattement dans les conditions prévues aux II ou III lorsque ces entreprises respectent les conditions suivantes : / (…) 2° L'activité principale de l'exploitation relève de l'un des secteurs d'activité éligibles à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B (…) / Les conditions prévues aux 1° et 2° s'apprécient à la clôture de chaque exercice au titre duquel l'abattement prévu au premier alinéa est pratiqué. (…) / III.- La limite et le taux de l'abattement mentionné au II sont majorés dans les cas suivants : / (…) 3° Pour les bénéfices provenant d'exploitations situées en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion et qui exercent leur activité principale dans l'un des secteurs suivants : (…) / f) Energies renouvelables ; (…) ». Selon l’article 199 undecies B du même code : « I. Les contribuables (…) peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (…) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l’article 34. / Toutefois, n'ouvrent pas droit à la réduction d'impôt les investissements réalisés dans les secteurs d'activité suivants : / a) Commerce (…) ».

3. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées des articles 44 quaterdecies et 199 undecies B que, pour bénéficier du régime d’abattement défini à l’article 44 quaterdecies, une entreprise doit exercer à titre principal une activité agricole, industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l’article 34 du code général des impôts, et que cette activité ne doit pas relever de l’un des secteurs d’activité que le I de l’article 199 undecies B exclut du régime de réduction d’impôt qu’il prévoit. La liste des secteurs ainsi exclus a été établie, ainsi qu’il ressort des travaux préparatoires de la loi du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer dont sont issues les dispositions précitées de l’article 199 undecies B, à partir de la nomenclature des activités françaises (NAF) dans sa version en vigueur lors de l’adoption de cette loi.

4. L’administration soutient que l’activité principale de la société requérante est une activité d’achat-revente en l’état qui relève du secteur du commerce, de sorte qu’elle n’est pas éligible au régime de faveur défini à l’article 44 quaterdecies.

5. Il résulte de l’instruction que la société G= intervenait dans le domaine des centrales photovoltaïques et des chauffe-eau solaires et était notamment titulaire de l’appellation « Qualisol » (« qualité énergies renouvelables »). A hauteur de 25% environ de son chiffre d’affaires, elle a eu, au cours de l’année 2010, une activité d’achat-revente de matériels non assortie de prestations de pose, et relevant ainsi du secteur du commerce. Le reste de son activité, correspondant donc à environ 75% du chiffre d’affaires de la même année, a consisté à installer chez ses clients des centrales photovoltaïques ou des chauffe-eau solaires. Pour exercer cette activité, la société, qui employait majoritairement des « technico-commerciaux », étudiait les besoins de ses clients, leur apportait une solution technique et procédait ou faisait procéder à l’installation des équipements requis. Les équipements ainsi installés étaient constitués d’assemblages, dont le choix était fait par la société elle-même, d’éléments acquis auprès de divers fournisseurs. Elle a également participé à la conception de matériels en lien avec certains de ses fournisseurs. Au demeurant, le certificat d’inscription au répertoire des entreprises et des établissements (SIRENE) versé au dossier montre qu’il a été attribué à la société G= en 2008, comme code d’ « activité principale exercée » (APE) – lequel est défini en fonction des secteurs énumérés par la NAF – le code 4322 B correspondant à la sous-classe « travaux d’installation d’équipements thermiques et de climatisation », qui relève, dans la nomenclature NAF, non pas du secteur du commerce (secteur G), mais du secteur de la construction (secteur F).

6. Il est exact, comme le souligne l’administration, que la société G= ne fabrique pas les matériels qu’elle installe, ni ne les transforme, et que le prix des équipements installés représente une part prépondérante du prix facturé aux clients en contrepartie de l’installation de ces équipements. Mais cette double circonstance ne saurait, par elle-même, exclure cette société du bénéfice de l’article 44 quaterdecies dès lors qu’il s’agit de déterminer si son activité principale relève ou non du secteur « commerce » tel que défini par la NAF. En effet, des activités consistant à installer des équipements techniques spécialisés dans des immeubles incluent nécessairement la fourniture de ces équipements, laquelle représente une part importante du prix facturé au client. Ces activités ne relèvent pas pour autant du secteur du commerce. Enfin, il doit être observé que le fait que la société avait recours à la sous-traitance pour les prestations de pose n’a aucune incidence sur le point de déterminer à quel secteur se rattache son activité principale.

7. Il résulte de ce qui précède que, ainsi que l’ont estimé les premiers juges, l’activité principale exercée par la société G= au cours de l’année 2010 ne l’excluait pas, contrairement à ce qu’a estimé l’administration, du bénéfice du dispositif de faveur prévu par l’article 44 quaterdecies du code général des impôts.

8. Enfin, l’administration oppose à la société G= l’article 49 ZC de l’annexe III au code général des impôts, applicable à compter du 1er janvier 2010, aux termes duquel : « (…) 6. Pour l'application du f) du 3° du III de l'article 44 quaterdecies du code général des impôts, les activités suivantes relèvent du secteur des énergies renouvelables : (…) 4° Production ou pose d'équipements ou d'installations destinés à réduire la consommation d'énergie ou à améliorer la performance énergétique de tout type de construction ainsi que l'installation d'équipements thermiques, lorsque ces équipements respectent des normes d'éco-conditionnalité fixées par arrêté. ». Mais, en tout état de cause, la société a précisément pour activité, comme il a été dit, la pose d'équipements ou d'installations destinés à réduire la consommation d'énergie ou à améliorer la performance énergétique de tout type de construction ainsi que l'installation d'équipements thermiques.

9. Dans ces conditions, le ministre des finances et des comptes publics n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a accordé à la société G= la décharge du supplément d’impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l’année 2010.

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement à la société G= de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 2 : L’Etat versera la somme de 1 500 euros à la société G= au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.