Zone de développement de l’éolien – procédure – accord des communes dont tout ou partie du territoire est inclus dans le projet de zone.
Par Administrateur le mercredi 20 novembre 2013, 14:07 - ENVIRONNEMENT - Lien permanent
L’article 10-1 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, issu de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005, abrogé par la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013, subordonnait l’instauration des zones de développement de l’éolien à l’accord préalable des communes dont tout ou partie du territoire était inclus dans le périmètre de la zone. La circonstance que le conseil municipal d’une commune concernée par deux projets de zone ait donné son accord globalement, sans désigner chacune des zones envisagées, n’est pas susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision de créer les zones, ni de priver les habitants de la commune d’une garantie dès lors que l’assemblée délibérante s’est effectivement prononcée favorablement sur la demande dont le préfet devait être saisi.
Arrêt 13BX00790 – 5ème chambre - 19 novembre 2013 - Ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer et communauté de communes de la Basse-Marche
Vu l’ordonnance n° 355728 du 8 février 2013, enregistrée au greffe de la cour sous le n° 13BX00790, par laquelle la présidente de la 6ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d’Etat a, d’une part, annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux n° 10BX02174, 10BX02212 du 2 novembre 2011 rejetant le recours du ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer et la requête de la communauté de communes de la Basse-Marche tendant à l’annulation du jugement n° 0900240, 0900295, 0900297, 0901237 du 24 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé l’arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 4 décembre 2008 autorisant la création d’une zone de développement de l’éolien (ZDE) sur le territoire des communes d’Azat-le-Ris et de Verneuil-Moustiers, d’autre part, renvoyé l’affaire à la cour ;
Vu, I, enregistré sous le n° 10BX02174, le recours présenté le 19 août 2010 sous forme de télécopie et régularisé par courrier le 25 août 2010, présenté par le ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer ;
Le ministre demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0900240, 0900295, 0900297, 0901237 du 24 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, à la demande de M. et Mme C==, de l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, de Mme D== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin, annulé l’arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 4 décembre 2008 autorisant la création d’une zone de développement de l’éolien sur le territoire des communes d’Azat-le-Ris et de Verneuil-Moustiers ;
2°) de rejeter les demandes de M. et Mme C==, de l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, de Mme D== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin devant le tribunal administratif de Limoges ;
Vu, II, enregistrée sous le n° 10BX02212, la requête présentée le 24 août 2010 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 30 août 2010, pour la communauté de communes de la Basse-Marche, représentée par son président en exercice, par Me Huglo et Me Gossement ;
La communauté de communes de la Basse-Marche demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0900240, 0900295, 0900297, 0901237 du 24 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, à la demande de M. et Mme C==, de l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, de Mme D== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin, annulé l’arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 4 décembre 2008 autorisant la création d’une zone de développement de l’éolien sur le territoire des communes d’Azat-le-Ris et de Verneuil-Moustiers ;
2°) de rejeter les demandes de M. et Mme C==, de l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, de Mme D== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin devant le tribunal administratif de Limoges ;
3°) de mettre à la charge de chacun des requérants la somme de 3 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu la convention européenne du paysage signée à Florence le 20 octobre 2000, ratifiée par la loi n° 2005-1272 du 13 octobre 2005 ;
Vu la directive n° 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 ;
Vu le préambule de la Constitution et notamment la Charte de l’environnement auquel il renvoie ;
Vu le code de l’environnement ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;
Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative au service public de l’électricité ;
Vu la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, complétant la loi susvisée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 22 octobre 2013 :
- le rapport de M. Bayle, président-assesseur ; - les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ; - et les observations de Me Combeaud, avocat de M. et Mme C== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 30 octobre 2013, présentée pour M. et Mme C== et l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin ;
1. Considérant qu’à la demande de la communauté de communes de la Basse-Marche, le préfet de la Haute-Vienne a instauré une zone de développement de l’éolien sur le territoire des communes d’Azat-le-Ris et Verneuil-Moustiers, par arrêté du 4 décembre 2008 ; que le tribunal administratif de Limoges a, à la demande de M. et Mme C==, de l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, de Mme D== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin, annulé cet arrêté par jugement du 24 juin 2010 ; que la présente cour a rejeté, par arrêt du 2 novembre 2011, le recours formé par le ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer contre ce jugement ; que, toutefois, par ordonnance du 8 février 2013, la présidente de la 6ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d’Etat a annulé l’arrêt précité du 2 novembre 2011 et a renvoyé l’affaire à la cour ;
Sur les interventions :
2. Considérant, en premier lieu, que la région Limousin, qui a élaboré un schéma régional éolien en vue de faciliter le développement de la production d’électricité par l’implantation d’aérogénérateurs, justifie d’un intérêt à intervenir au soutien du recours du ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer ; que, par suite, son intervention est recevable ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que la société Ostwind International SAS, qui a le projet d’installer des aérogénérateurs dans l’emprise de la zone de développement de l’éolien instaurée par l’arrêté du 4 décembre 2008, a intérêt au maintien de cette zone ; que, dès lors, son intervention est également recevable ;
4. Considérant, en troisième lieu, que, si la communauté de communes de la Basse-Marche a entendu intervenir volontairement au soutien des conclusions du ministre, dans ses écrits communs avec la société précitée enregistrés le 22 avril 2013 dans la présente instance, enregistrée sous le n° 13BX00790, elle a la qualité de requérante dans cette instance ; que, dans ces conditions, son intervention, qui est irrecevable, ne peut être admise ;
Sur la régularité du jugement :
5. Considérant, en premier lieu, qu’en application de l’article R. 741-2 du code de justice administrative, le jugement doit contenir le nom des parties, l’analyse des conclusions et mémoires ainsi que le visa des dispositions législatives et réglementaires dont il fait application ; que, si la communauté de communes de la Basse-Marche soutient que le jugement n’a pas visé la circulaire interministérielle du 19 juin 2006 relative à la création des zones de développement de l’éolien, le tribunal administratif n’a pas fait application de ce texte, qu’il n’était donc pas tenu de viser ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que la communauté de communes de la Basse-Marche ne peut utilement faire valoir que les motifs du jugement attaqué sont contradictoires avec ceux d’un jugement rendu dans une autre instance par le même tribunal administratif de Limoges ;
7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l’irrégularité du jugement ne peuvent qu’être écartés ;
Sur le bien-fondé du jugement :
8. Considérant qu’en application de l’article 10 de la loi susvisée du 10 février 2000, dans sa rédaction issue de la loi également susvisée du 13 juillet 2005, en vigueur à la date de l’arrêté contesté, les installations de production d’électricité d’origine éolienne implantées dans les zones de développement de l’éolien ouvrent droit, dans les conditions prévues par cet article, à une obligation d’achat par Electricité de France et les distributeurs non nationalisés, à un tarif réglementaire, de l’électricité produite ; qu’aux termes de l’article 10-1 de la loi du 10 février 2000, ajouté par l’article 37 de la loi du 13 juillet 2005 : « Les zones de développement de l’éolien sont définies par le préfet du département en fonction de leur potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. Elles sont proposées par la ou les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé ou par un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, sous réserve de l’accord de la ou des communes membres dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé. / La proposition de zones de développement de l'éolien en précise le périmètre et définit la puissance installée minimale et maximale des installations produisant de l’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent pouvant bénéficier, dans ce périmètre, des dispositions de l’article 10. Elle est accompagnée d’éléments facilitant l’appréciation de l’intérêt du projet au regard du potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. / La décision du préfet du département intervient sur la base de la proposition dans un délai maximal de six mois à compter de la réception de celle-ci, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites et des communes limitrophes à celles dont tout ou partie du territoire est compris dans la zone de développement de l’éolien. (…) / Les zones de développement de l’éolien s’imposent au schéma régional éolien défini au I de l’article L. 553-4 du code de l’environnement » ;
9. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que la création d’une zone de développement de l’éolien, qui ouvre droit à un régime préférentiel d’achat de l’électricité produite, est subordonnée à l’existence d’un potentiel éolien significatif ; que, cependant, ni le législateur, ni le pouvoir réglementaire n’ont précisé les éléments au vu desquels doit être apprécié le potentiel éolien d’une zone ; que pour pouvoir se livrer à une telle appréciation, l’autorité préfectorale doit disposer de données recueillies selon une méthode scientifique de nature à établir le potentiel éolien de la zone à une échelle géographique et avec une précision suffisante ; qu’aux termes de l’article L. 553-4 du code de l’environnement dans sa rédaction applicable à la date de l’arrêté contesté, les régions peuvent mettre en place un schéma régional éolien qui « indique les secteurs géographiques qui paraissent les mieux adaptés à l’implantation d’installations produisant de l’électricité en utilisant l’énergie mécanique du vent » ; qu’il ressort des pièces du dossier que, pour apprécier le potentiel éolien du projet de zone, le préfet s’est fondé sur les données fournies par l’atlas du potentiel éolien dressé dans le cadre du schéma régional éolien dont la région Limousin s’est dotée le 22 juin 2006 ; que ce schéma, que le préfet a pu prendre en compte alors même qu’il s’agit d’un document purement indicatif, a été établi sur la base d’informations fournies par une modélisation réalisée par Météo-France, permettant de reconstituer, à partir des données climatiques moyennes d’un territoire, les régimes des vents, avec une précision géographique de 1 000 mètres ; que cette modélisation, dont les résultats ont été confirmées par les relevés obtenus dans quatorze stations météorologiques de la région Limousin, a conduit à une estimation de la vitesse moyenne du vent sur un an, à 80 mètres de hauteur au-dessus de la zone concernée, à un minimum de 6 mètres par seconde ; que les époux C==, les associations intimées et Mme D== ne contestent pas pertinemment la fiabilité de cette estimation en procédant à des extrapolations sur la base de coefficients proposés dans une circulaire et qui ne peuvent conduire qu’à une valeur purement indicative ; qu’il ressort des pièces du dossier que le préfet qui, pour apprécier le potentiel éolien, pouvait prendre en compte des données complémentaires, y compris des données non évoquées dans le dossier de demande, s’est également fondé sur les résultats de la campagne de mesures du vent à 70 mètres au-dessus du sol réalisée entre le 1er novembre 2006 et le 31 octobre 2008 sur le territoire de la commune d’Azat-le-Ris, à proximité de la zone en cause, par l’entreprise Deutsches Windernergie-Institut (DEWI) ; que les intimés ne démontrent pas que l’extrapolation sur le long terme des données ainsi recueillies, sur la base de l’étude des vents des stations météorologiques de Poitiers ou de Limoges, présentait un caractère trop approximatif pour permettre de déterminer, de manière globale, le potentiel éolien ; que, dans ces conditions, en jugeant que les données retenues par le préfet de la Haute-Vienne n’étaient pas suffisantes pour permettre d’évaluer le potentiel éolien de la zone en application de l’article 10-1 de la loi du 10 février 2000, le tribunal administratif a commis une erreur d’appréciation ;
10. Considérant, toutefois, qu’il appartient à la cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme C==, l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin, Mme D== et l’association pour la sauvegarde de la Gartempe ;
En ce qui concerne la légalité externe de l’arrêté du 4 décembre 2008 :
11. Considérant qu’en application de l’article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : « Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l’affaire qui en fait l’objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires » ; que la circonstance que des membres de la famille de l’épouse d’un conseil municipal, également conseiller communautaire, soient propriétaires d’une superficie importante de la zone de développement de l’éolien constituée sur les territoires des communes d’Azat-le-Ris et de Verneuil-Moustiers n’est pas de nature, à elle seule, à justifier l’annulation de la délibération du conseil municipal de Tersannes approuvant l’extension des compétences de la communauté de communes en matière d’éolienne, de la délibération du conseil communautaire du 28 novembre 2006 acceptant ce transfert et de la délibération du même conseil du 24 juillet 2007 autorisant le président de cet établissement public à solliciter du préfet l’instauration de ladite zone ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseiller municipal mis en cause par les intimés aurait été intéressé, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, à l’instauration de la zone de développement de l’éolien ; que, par suite, la participation de cet élu n’a pas affecté la légalité de ces actes ;
12. Considérant que l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin soutient que le conseil de la communauté de communes de la Basse-Marche a méconnu l’étendue de sa compétence en donnant pouvoir au bureau, par la délibération du 24 juillet 2007, de « décider de modifications mineures » du périmètre des zones ; que, toutefois, en application de l’article 10-1 de la loi du 10 février 2000, les zones de développement de l’éolien étaient définies par le préfet, seul compétent pour procéder à leur création et fixer leur périmètre ; que, dès lors, en donnant pouvoir au bureau de « décider de modifications mineures éventuelles », le conseil de la communauté de communes de la Basse-Marche, qui n’avait qu’un pouvoir de proposition, s’est borné à déléguer la possibilité de proposer à l’autorité préfectorale des modifications mineures ; qu’une telle délégation était au nombre de celles qui pouvaient être dévolues au bureau par le conseil communautaire en application de l’article L. 5214-13 du code général des collectivités territoriales alors en vigueur ;
13. Considérant qu’il résulte des dispositions précitées de l’article 10-1 de la loi du 10 février 2000, d’une part, qu’un établissement public de coopération intercommunale ne peut proposer au préfet de créer une zone de développement de l’éolien que « sous réserve de l’accord de la ou des communes membres dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre » envisagé, d’autre part, que la création d’une telle zone ne peut intervenir qu’après avis des communes limitrophes de celles dont tout ou partie est compris dans la zone ; qu’il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de la commune d’Azat-le-Ris a donné un accord aux projets portés par la communauté de communes de la Basse-Marche, dont cette commune est membre, par délibération du 27 juin 2007 ; que, si le conseil municipal ne s’est pas prononcé expressément sur les deux zones envisagées sur le territoire de la commune, il ressort de la délibération, dans les termes où elle est rédigée, qu’il a entendu donner un accord global aux projets qui lui étaient soumis ; qu’il ressort des pièces du dossier que le défaut d’accord séparé sur chacune des zones n’a pas été susceptible, dans ces conditions, d’exercer une influence sur le sens de la décision en litige, ni qu’il a privé les habitants de la commune d’une garantie ; que la circonstance que des conseillers municipaux étaient propriétaires de terrains inclus dans le projet de zone, dont le périmètre a été déterminé en fonction de critères physiques, n’est pas de nature, à elle seule, à entacher d’illégalité la délibération du conseil municipal ; qu’il n’est pas établi que, comme le soutiennent les associations, les communes concernées se soient prononcées sur un périmètre différent de celui dont a été saisi le préfet la Haute-Vienne ; que la circonstance que les délibérations par lesquelles les conseils municipaux de ces communes ont donné leur accord ou fait connaître leur avis n’aient pas été assorties d’une carte de la zone en litige est sans incidence sur la légalité de ces actes dès lors, d’une part, qu’il n’est pas établi, ni même allégué, que les conseillers municipaux aient été insuffisamment informés du périmètre de la zone, d’autre part, que les positions de ces assemblées sont dépourvues de toute ambiguïté ; que le conseil municipal de Tersannes, qui a donné son accord pour la création de deux zones sur son territoire par la délibération du 25 juillet 2008, n’a formulé aucune objection, sans toutefois se prononcer expressément, à l’instauration de la zone envisagée dans les communes voisines d’Azat-le-Ris et de Verneuil-Moustiers, projet dont il était nécessairement saisi ; que, si la commune de Tersannes n’a pas fait connaître ainsi explicitement son avis sur ces créations en dehors de son territoire, il ressort des pièces du dossier que cette circonstance n’a pu avoir aucune influence sur le sens de la décision du préfet, ni priver d’une garantie les habitants de cette commune, qui a donné son accord pour la création de deux zones sur son propre territoire ; que les associations ne peuvent faire valoir utilement que la communauté de communes de la Basse-Marche, qui était compétente en matière de proposition de création de zone de développement de l’éolien quand elle a adopté le principe d’une saisine du préfet, n’avait pas encore cette compétence lorsqu’elle a commandé une étude préalable sur le potentiel éolien de son territoire ;
14. Considérant que l’étude paysagère jointe au dossier de demande présente une analyse du paysage du Haut-Limousin sur un périmètre de dix kilomètres autour des communes concernées par les zones de développement de l’éolien, en signalant les obstacles naturels qui marquent visuellement les limites de la Basse-Marche ; que ce document dresse un état des lieux du patrimoine historique et architectural, lequel est dûment recensé ; qu’eu égard à l’objet des zones de développement de l’éolien, qui n’ont pas vocation à fixer les lieux d’implantation, le nombre et les caractéristiques des aérogénérateurs, dont la construction est soumise à permis après étude d’impact et enquête publique, cette étude paysagère, dont les cartes mentionnaient l’étang de Moustiers, était suffisante au préfet pour lui permettre d’apprécier les impacts sur le paysage que l’incitation à édifier un parc éolien était susceptible d’avoir ; que, conformément à l’application de l’article R. 414-3 du code de l’environnement, le préfet de la Haute-Vienne est nécessairement à l’origine de la désignation de l’étang de Moustiers comme site « Natura 2000 » après qu’il a été inventorié comme zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) ; que, dès lors, contrairement à que soutiennent les intimés, cette autorité ne pouvait ignorer l’intérêt écologique que présentait le secteur ;
15. Considérant que ni la loi précitée du 10 février 2000, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n’imposait à la communauté de communes de la Basse-Marche de joindre à son dossier de demande une étude sur les avantages et les inconvénients de l’instauration de la zone de développement de l’éolien contestée ;
16. Considérant que les associations, qui soutiennent que les zones de développement de l’éolien ont une incidence notable sur l’environnement, invoquent l’incompatibilité de la loi du 10 février 2000 avec les objectifs de la directive n° 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, faute de subordonner la création d’une telle zone à la réalisation d’une évaluation environnementale ;
17. Considérant que le paragraphe 1 de l’article 3 de cette directive, qui en fixe le champ d’application, prévoit qu’une évaluation environnementale doit être effectuée conformément à ses articles 4 à 9, pour les plans et programmes élaborés et/ou adoptés par, notamment, une autorité au niveau national, régional ou local et visés aux paragraphes 2, 3 et 4 dudit article 3 susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ; qu’en vertu du paragraphe 2 de l’article 3, l’évaluation environnementale doit être effectuée pour tous les plans et programmes qui sont élaborés pour les secteurs de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l’énergie, de l’industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l’eau, des télécommunications, du tourisme, de l’aménagement du territoire urbain et rural ou de l’affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel pourra être autorisée la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive n° 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, ou pour lesquels, étant donné les incidences qu’ils sont susceptibles d’avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu des articles 6 et 7 de la directive n° 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite Natura 2000 ;
18. Considérant que la transposition de cette directive du 27 juin 2001 a été assurée, en France, par une ordonnance du 3 juin 2004 qui a inséré dans le code de l’environnement notamment les articles L. 122-4 et L. 122-8 ; qu’aux termes du premier alinéa du I de l’article L. 122-4 : « Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification figurant sur une liste établie par décret en Conseil d’Etat qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation de travaux ou prescrire des projets d’aménagement, sont applicables à la réalisation de tels travaux ou projets doivent faire l’objet d’une évaluation environnementale (…) » ; que ce I ajoute que « Doivent comporter une telle évaluation : / 1° Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification adoptés par l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les établissements publics en dépendant, relatifs à l'agriculture, à la sylviculture, à la pêche, à l'énergie (…) qui ont pour objet de fixer des prescriptions ou des orientations avec lesquelles doivent être compatibles les travaux et projets d'aménagement entrant dans le champ d'application de l'étude d'impact en application de l'article L. 122-1 ; / 2° Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification adoptés par l’Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les établissements publics en dépendant, autres que ceux mentionnés au 1° du présent article, qui ont pour objet de fixer des prescriptions ou des orientations avec lesquelles doivent être compatibles des travaux ou projets d'aménagement s’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement » ; qu’aux termes de l’article L. 122-8 : « Le rapport environnemental est rendu public avant l'adoption du plan ou du document. / Le projet de plan ou de document et le rapport environnemental auquel sont annexés, le cas échéant, les avis recueillis en application de l’article L. 122-7 sont mis à la disposition du public dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat / (…) » ; que l’article R. 122-17 du code de l’environnement, pris pour l’application de ces dispositions, fixe la liste des plans, schémas, programmes et autres documents de planification mentionnés au I de l’article L. 122-4 du même code ;
19. Considérant, d’une part, que les arrêtés préfectoraux pris sur le fondement de la loi du 10 février 2000, qui ne fixent ni prescription ni orientation, ne sont pas au nombre des plans, schémas, programmes et autres documents de planification énumérés par l’article R. 122-17 ; que, d’autre part, les zones de développement de l’éolien, qui ont pour seul objet d’inciter au regroupement des parcs éoliens sur un territoire déterminé pour limiter le risque de mitage, sans créer aucune obligation pour les collectivités ou les constructeurs, ni faire obstacle, par elles-mêmes, à l’édification d’aérogénérateurs en dehors de leur périmètre, ne sauraient être regardées comme des « plans et programmes » au sens du paragraphe 1 de l’article 3 de la directive du 27 juin 2001 ; que, pour les mêmes motifs, ces zones, dont l’instauration n’a pas pour effet d’autoriser l’installation d’aérogénérateurs, n’ont pas d’incidences notables sur l’environnement ; qu’il suit de là que le moyen tiré de l’incompatibilité de la loi du 10 février 2000 avec la directive faute de prévoir une évaluation environnementale, ne peut qu’être écarté ;
20. Considérant qu’aux termes de l’article 7 de la Charte de l’environnement : « Toute personne a le droit, dans les conditions et limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement » ; qu’il ressort des pièces du dossier et il n’est d’ailleurs pas sérieusement contesté que la communauté de communes a organisé, sur le projet d’instauration des zones, des réunions publiques les 4 avril 2006 et 15 septembre 2006, cette dernière réunion ayant été suivie de la visite, le 16 septembre 2006, du parc éolien de Peyrelevade ; qu’elle a mis en place un comité local de suivi, composé d’élus, de représentants des services de l’Etat, de représentants des associations départementales de protection de l’environnement, d’un porteur de projet et d’habitants ; que ce comité, animé par un prestataire de service, s’est réuni les 19 décembre 2006, 9 mai 2007 et 13 juin 2007 ; que, compte tenu du caractère limité de la zone dont s’agit, et alors que l’instauration d’une telle zone n’a nullement pour effet d’autoriser des travaux, la concertation ainsi organisée, qui ne saurait être regardée comme insuffisante du seul fait de l’absence de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin, a satisfait aux obligations posées par les prescriptions précitées de la Charte de l’environnement ;
21. Considérant que, contrairement à ce que soutenaient les demandeurs devant les premiers juges, le service départemental du patrimoine et de l’architecture a été consulté et a rendu un avis favorable le 23 juillet 2008 : que le défaut de visa de cette réponse dans l’arrêté attaqué est sans incidence sur sa légalité ;
22. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que les membres de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, dans sa formation spécialisée « sites et paysages », ont été convoqués par lettre du 7 novembre 2008, pour la séance qui s’est tenue le 20 novembre suivant ; que le délai ainsi accordé était suffisant pour permettre aux membres de cette commission, qui ont d’ailleurs souhaité un vote à bulletin secret, de prendre connaissance des projets ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les documents qui leur ont été soumis ne leur permettaient pas de se prononcer en connaissance de cause ; que la circonstance que l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en haut-Limousin ou autres n’aient pas été invités à participer aux travaux de cette commission n’est pas de nature à entacher d’irrégularité l’avis de cette dernière ;
En ce qui concerne la légalité interne de l’arrêté du 4 décembre 2008 :
23. Considérant que les articles 10 et 10-1 de la loi du 10 février 2000 ne permettaient pas à l’autorité préfectorale de subordonner la création de la zone au résultat favorable d’une analyse comparative entre différentes sources d’énergie renouvelable dans le département ;
24. Considérant que l’article 10-1 de la loi du 10 février 2000 impose à l’autorité préfectorale de prendre en considération, dans la délivrance des autorisations de zone de développement de l’éolien, la protection des paysages, des monuments historiques comme des sites remarquables et protégés ; que, si les associations font valoir que le préfet n’a pris en compte ni le risque de co-visibilité entre zones de développement de l’éolien, ni celui de l’atteinte aux paysages et aux monuments protégés, la création de telles zones ne préjuge pas des lieux d’implantation des aérogénérateurs, de leur nombre et de leurs caractéristiques ; que les associations ne démontrent pas, par les pièces produites, que, sur la zone en litige, toute édification d’éoliennes impacterait de manière significative, par une visibilité excessive des ouvrages, les paysages environnants ou les monuments protégés situés aux alentours ; que les intimés, qui ne peuvent utilement arguer du coût de l’électricité produite par l’énergie éolienne, n’établissent pas davantage que, par elle-même, l’instauration de la zone porterait atteinte à la propriété privée ; qu’en créant plusieurs zones à une relative proximité, en raison d’un potentiel éolien estimé significatif, le préfet de la Haute-Vienne n’a pas favorisé le mitage du territoire, ni méconnu l’objectif de cohérence au sein du département ;
25. Considérant que l’identification de l’étang de Moustiers comme zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF), identification qui est dépourvue par elle-même de portée normative, ne faisait nullement obstacle à l’instauration d’une zone de développement de l’éolien à proximité ; qu’il en est de même de la désignation de ce lac comme site « Natura 2000 », au demeurant postérieurement à l’arrêté attaqué ; qu’ainsi qu’il a été dit, le préfet ne pouvait ignorer la désignation dudit étang comme ZNIEFF ; que la création de la zone de développement de l’éolien, dont aucune partie n’est incluse dans la ZNIEFF, ne préjugeant pas du lieu d’implantation des aérogénérateurs, les associations, M. et Mme C== et Mme D== ne soutiennent pas pertinemment, s’ils ont entendu soulever ce moyen, que l’arrêté du 4 décembre 2008 est entaché d’erreur dans l’appréciation de ses conséquences sur l’environnement écologique, faunistique et floristique du secteur ;
26. Considérant que les intimés ne peuvent utilement invoquer la circulaire interministérielle du 19 juin 2006, qui ne comporte pas de dispositions à caractère réglementaire en ce qui concerne la protection des paysages et des sites ; que les pièces du dossier ne font pas ressortir que le préfet ait mal apprécié les effets de la zone sur la protection des paysages, des sites et des monuments, les lieux d’installation des aérogénérateurs, leur nombre et leurs caractéristiques n’étant pas déterminés, et qu’il ait, ainsi, méconnu les stipulations de la convention européenne du paysage ;
27. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et la communauté de communes de la Basse-Marche sont fondées à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé l’arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 4 décembre 2008 ;
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
28. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l’Etat et de la communauté de communes de la Basse-Marche les sommes dont M. et Mme C==, l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, Mme D== et l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin demandent le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la communauté de communes de la Basse-Marche tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code précité ;
29. Considérant que la région Limousin comme la société Ostwind International SAS qui sont intervenantes, n’ont pas la qualité de partie à l’instance ; que, par suite, elles ne sont pas recevables à demander, sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, que soient mises à la charge de M. et Mme C==, de l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, de Mme D== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin les sommes qu’elles ont exposées non comprises dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : L’intervention de la région Limousin et de la société Ostwind International SAS est admise.
Article 2 : L’intervention de la communauté de communes de la Basse-Marche n’est pas admise.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges n° 0900240, 0900295, 0900297, 0901237du 24 juin 2010 est annulé.
Article 4 : Les demandes de M. et Mme C==, de l’association pour la sauvegarde de la Gartempe, de Mme D== et de l’association pour la sauvegarde du patrimoine et des paysages en Haut-Limousin devant le tribunal administratif de Limoges sont rejetées.
Article 5 : Les conclusions des parties et des intervenantes tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.