Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les sociétés Orange et Bouygues Telecom ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler les décisions implicites du maire de Ramonville-Saint-Agne rejetant leurs demandes tendant à l’abrogation de la délibération du 28 novembre 2013 portant approbation du plan local d’urbanisme en tant qu’elle instaure des sites d’exclusion des antennes relais de téléphonie mobile.

Par un jugement n° 1402534 et 1406283 du 24 juin 2016, le tribunal administratif de Toulouse a annulé ces décisions implicites ainsi que le premier alinéa du 15° de l’article 2 des dispositions communes du règlement du plan local d’urbanisme et l’annexe graphique 4.7.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 septembre 2016, la commune de Ramonville Saint Agne, représentée par la SCP Courrech & associés, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 juin 2016 ;

2°) de rejeter les demandes des sociétés Orange et Bouygues Telecom ;

3°) de mettre à la charge solidaire des sociétés Orange et Bouygues Telecom une somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 28 novembre 2013, le conseil municipal de Ramonville-Saint-Agne a approuvé la révision générale du plan local d’urbanisme. Les sociétés Orange et Bouygues Telecom ont demandé l’abrogation de ce document en tant qu’il crée des « sites d’exclusion » pour l’implantation des antennes-relais de téléphonie mobile. La commune de Ramonville-Saint-Agne relève appel du jugement du 24 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions implicites de rejet de ces demandes d’abrogation ainsi que le premier alinéa du point 15 de l’article 2 des dispositions communes du règlement du plan local d’urbanisme et son annexe graphique 4.7.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. En premier lieu, d’une part, aux termes de l’article 5 de la Charte de l’environnement : « Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

3. D’autre part, selon l’article L. 121-1 du code de l’urbanisme, dans sa version applicable au litige, les plans locaux d’urbanisme « déterminent les conditions permettant d'assurer, dans le respect des objectifs du développement durable : (…) 2° La diversité des fonctions urbaines et rurales et la mixité sociale dans l'habitat, en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs de l'ensemble des modes d'habitat, d'activités économiques, touristiques, sportives, culturelles et d'intérêt général ainsi que d'équipements publics et d'équipement commercial, en tenant compte en particulier des objectifs de répartition géographiquement équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services, d'amélioration des performances énergétiques, de développement des communications électroniques, de diminution des obligations de déplacements et de développement des transports collectifs ; / 3° La réduction des émissions de gaz à effet de serre, la maîtrise de l'énergie et la production énergétique à partir de sources renouvelables, la préservation de la qualité de l'air, de l'eau, du sol et du sous-sol, des ressources naturelles, de la biodiversité, des écosystèmes, des espaces verts, la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques, et la prévention des risques naturels prévisibles, des risques miniers, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature ». Aux termes de l’article L. 123-1-5 du même code, dans sa version applicable au litige, le règlement d’un plan local d’urbanisme « I.- (…) fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définit, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions. / II.-Le règlement peut fixer les règles suivantes relatives à l'usage des sols et la destination des constructions : / 1° Préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées ; / 2° Définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées (…) ».

4. S’il résulte de ces dispositions qu’un conseil municipal est compétent pour fixer les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées sur son territoire, parmi lesquelles figurent les antennes relais de téléphonie mobile et, s’il lui appartient de veiller au respect du principe de précaution découlant de l’article 5 de la Charte de l’environnement, ces dernières dispositions ne permettent pas en revanche, indépendamment des procédures d’évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d’être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de faire légalement obstacle à l’implantation des antennes de téléphonie mobile à proximité de certains bâtiments en l’absence d’éléments circonstanciés faisant apparaître, en l’état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier une telle exclusion.

5. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport de présentation, que, en se fondant sur le principe de précaution, le conseil municipal de Ramonville-Saint-Agne a identifié des sites sensibles autour desquels la modification ou l’implantation des antennes relais seraient proscrites. Cet objectif a été traduit au premier alinéa du point 15 de l’article 2 des dispositions communes du règlement du plan en litige, aux termes duquel « l’implantation et la modification des antennes-relais sont autorisées à condition d’être situées en dehors des sites d’exclusion définis autour des secteurs sensibles (cf. annexes du PLU) », et par délimitation, sur un plan figurant à l’annexe 4.7 du règlement de « périmètres d’exclusion » autour de « sites sensibles accueillant du public » ayant même valeur règlementaire.

6. La commune de Ramonville-Saint-Agne n’invoque aucune circonstance locale particulière et il ne ressort des pièces du dossier aucun élément circonstancié de nature à établir l’existence, en l’état des connaissances scientifiques, d’un risque pouvant résulter, pour le public, de son exposition aux champs électromagnétiques émis par les antennes relais de téléphonie mobile et justifiant que, indépendamment des procédures d’évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d’être mises en œuvre par les autorités compétentes, la commune règlemente l’implantation de ces antennes dans les conditions rappelées au point précédent. Dès lors, ces dispositions, dont l’abrogation est demandée, sont illégales.

7. En second lieu, si le conseil municipal est seul compétent pour abroger tout ou partie du plan local d'urbanisme de la commune, c'est au maire qu'il revient d'inscrire cette question à l'ordre du jour d'une réunion du conseil municipal. Par suite, le maire a compétence pour rejeter une demande tendant à l'abrogation du plan local d’urbanisme ou de certaines de ses dispositions. Toutefois, il ne peut légalement prendre une telle décision que si les dispositions dont l'abrogation est sollicitée sont elles-mêmes légales. Dans l'hypothèse inverse, en effet, il est tenu d'inscrire la question à l'ordre du jour du conseil municipal, pour permettre à celui-ci, seul compétent pour ce faire, de prononcer l'abrogation des dispositions illégales. Par conséquent, eu égard à ce qui vient d’être dit au point précédent, c’est à tort que le maire a rejeté les demandes d’abrogation dont il était saisi, dès lors qu’il était tenu d’inscrire la question à l’ordre du jour du conseil municipal.

8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Ramonville-Saint-Agne n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé partiellement son plan local d’urbanisme ainsi que les décisions implicites de son maire rejetant les demandes d’abrogation des dispositions en litige.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des sociétés Orange et Bouygues Telecom, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Ramonville-Saint-Agne au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Ramonville-Saint-Agne une somme de 1 500 euros à verser à la société Orange en application de ces mêmes dispositions. Enfin, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Ramonville-Saint-Agne la somme demandée par la société Bouygues Telecom sur ce même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Ramonville-Saint-Agne est rejetée.

Article 2 : La commune de Ramonville-Saint-Agne versera à la société Orange une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la société Bouygues Telecom tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.