Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme Christiane M== a demandé au tribunal administratif de Toulouse, en premier lieu, d’annuler la décision du 15 juin 2012 par laquelle le directeur du centre départemental de l’enfance et de la famille (CDEF) de la Haute-Garonne a refusé de lui accorder l’indemnité mensuelle compensatrice de concession de logement ainsi que la décision implicite de rejet de sa réclamation préalable indemnitaire formée par lettre du 15 novembre 2013, en deuxième lieu, d’enjoindre au CDEF de la Haute-Garonne de lui accorder le bénéfice d’une concession de logement par nécessité absolue de service ou de lui accorder l’indemnité compensatrice mensuelle et, en troisième lieu, de condamner cet établissement public à lui verser, d’une part, la somme totale de 40 729,21 euros, à parfaire, en réparation de son préjudice matériel ou, à défaut, une somme correspondant au solde de l’indemnité mensuelle au jour du jugement et après celui-ci, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 4 juin 2013, et, d’autre part, la somme de 1 500 euros en réparation de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1305199 du 12 octobre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 décembre 2016, Mme M==, représentée par Me D==, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 12 octobre 2016 ;

2°) d’annuler la décision du 15 juin 2012 et la décision implicite de rejet de sa réclamation préalable indemnitaire formée par lettre du 15 novembre 2013 ;

3°) d’enjoindre au centre départemental de l’enfance et de la famille de la Haute Garonne de lui accorder le bénéfice d’une concession de logement par nécessité absolue de service ou de lui accorder l’indemnité compensatrice mensuelle ;

4°) de condamner ledit centre à lui verser, d’une part, la somme totale de 48 238,80 euros en réparation du préjudice matériel qu’elle estime avoir subi du fait du non versement de l’indemnité compensatrice mensuelle depuis janvier 2010 ou, à défaut, une somme correspondant au solde de l’indemnité mensuelle au jour du jugement et après celui-ci, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 4 juin 2013, et, d’autre part, la somme de 1 500 euros en réparation de son préjudice moral ;

5°) de mettre à la charge du centre départemental de l’enfance et de la famille de la Haute-Garonne la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

……………………………………………………………………………………

Considérant ce qui suit :

1. Mme M==, fonctionnaire titulaire du grade de cadre socio-éducatif, alors affectée depuis le 1er avril 2002 au Centre départemental de l’enfance et de la famille du département (CDEF) de la Haute-Garonne, établissement d'accueil d'urgence des mineurs isolés, des femmes enceintes et des mères isolées avec enfant(s) de moins de trois ans, était chargée du service Pôle mères-enfants lorsque, par un courrier du 4 juin 2012 signé conjointement avec les cinq autres cadres de l’établissement, elle a notamment sollicité le bénéfice de l’indemnité compensatrice mensuelle de logement à compter du 8 janvier 2010, en se prévalant de ce qu’elle était amenée à réaliser chaque année au moins soixante journées de garde de direction. Le directeur du centre ayant, par une décision du 15 juin 2012, rejeté sa demande, Mme M== a, par courrier du 15 novembre 2013, sollicité la réparation des préjudices qu’elle estime avoir subis du fait de l’illégalité de cette décision. S’étant vu opposer un refus implicite, Mme M== a demandé au tribunal administratif de Toulouse, en premier lieu, d’annuler la décision du 15 juin 2012 susmentionnée, en deuxième lieu, d’enjoindre au CDEF de la Haute Garonne de lui accorder le bénéfice d’une concession de logement par nécessité absolue de service ou de lui accorder l’indemnité compensatrice mensuelle et, en troisième lieu, de condamner cet établissement public à lui verser, d’une part, la somme de 40 729,21 euros, à parfaire, en réparation de son préjudice matériel ou, à défaut, une somme correspondant au solde de l’indemnité mensuelle, et, d’autre part, la somme de 1 500 euros en réparation de son préjudice moral. Mme M== relève appel du jugement du 12 octobre 2016 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande et sollicite que la somme due au titre de son préjudice matériel soit désormais portée à 48 238,80 euros.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D’une part, aux termes de l’article 77 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : « Les fonctionnaires régis par le présent titre ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l'article 20 du titre Ier du statut général. / Un décret fixe la liste des catégories de fonctionnaires astreints, du fait de leurs fonctions, à résider dans ou à proximité de l'établissement. Les établissements ne pouvant assurer le logement de ces fonctionnaires leur versent une indemnité compensatrice. (…). ». Aux termes de l’article 1 du décret du 8 janvier 2010 susvisé : « Dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, les concessions de logement sont attribuées par nécessité absolue de service à certains fonctionnaires, dans les conditions prévues par le présent décret. ». Aux termes de l’article 2 de ce décret : « I. ― Les fonctionnaires occupant les emplois dont le statut est prévu par les décrets du 2 août 2005 susvisés ou appartenant au corps dont le statut est fixé par le décret du 26 décembre 2007 susvisé bénéficient de concessions de logement par nécessité absolue de service. / II. - Les fonctionnaires occupant les emplois ou appartenant aux corps mentionnés ci-après, astreints à des gardes de direction, en vertu d'un tableau établi, dans chaque établissement, par le directeur ou, le cas échéant, par l'autorité compétente pour les établissements non dotés de la personnalité morale, bénéficient également de concessions de logement par nécessité absolue de service, lorsqu'ils assurent un nombre annuel minimum de journées de garde fixé par un arrêté des ministres chargés de la santé, du budget et de la fonction publique : (…) ― cadres socio-éducatifs ; / ― cadres de santé ; (…). ». Aux termes de l’article 3 dudit décret : « Les fonctionnaires bénéficiant de concessions de logement par nécessité absolue de service sont logés par priorité dans le patrimoine de l'établissement. / A défaut, lorsque ce patrimoine ne permet pas d'assurer leur logement, ils bénéficient, au choix de l'établissement dont ils relèvent : ― soit d'un logement locatif mis à leur (…), dont la localisation est compatible avec la mise en œuvre de gardes de direction ; / ― soit d'une indemnité compensatrice mensuelle, dont les montants sont fixés par arrêté des ministres chargés de la santé, du budget et de la fonction publique pour chacune des zones relatives au classement des communes (…) ». En vertu de l’article 10 de ce même décret : « Le bénéfice individuel des concessions de logement est attribué par décision du directeur d'établissement (…). ». L’article 1 de l’arrêté du 8 janvier 2010 susvisé fixant les conditions dans lesquelles certains fonctionnaires hospitaliers participant à la mise en œuvre de gardes de direction ou techniques peuvent bénéficier d’une concession de logement par nécessité absolue de service a précisé que le nombre annuel de journées de gardes de direction ou techniques à assurer par certains fonctionnaires, prévu à l'article 2 du décret du 8 janvier 2010, ouvrant droit aux concessions de logement, ne peut, en aucun cas, être inférieur à 40 journées.

3. D’autre part, aux termes de l’article 20 du décret du 4 janvier 2002 susvisé : « Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle l'agent, qui n'est pas sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, a l'obligation d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'établissement. La durée de chaque intervention, temps de trajet inclus, est considérée comme temps de travail effectif. / Le recours aux astreintes a pour objet, pour des corps, des grades ou des emplois dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé de faire face au caractère exceptionnel de certaines interventions incombant aux établissements dans le cadre de leurs missions de soins, d'accueil et de prise en charge des personnes. / Les astreintes visent également à permettre toute intervention touchant à la sécurité et au fonctionnement des installations et des équipements y concourant, lorsqu'il apparaît que ces prises en charge, soins et interventions ne peuvent être effectués par les seuls personnels en situation de travail effectif dans l'établissement. / Le chef d'établissement établit, après avis du comité technique d'établissement ou comité technique, la liste des activités, des services et des catégories de personnels concernés par les astreintes, ainsi que le mode d'organisation retenu, compte tenu de l'évaluation des besoins, notamment du degré de réponse à l'urgence, des délais de route et de la périodicité des appels. / Les dispositions des articles 20 à 25 ne sont pas applicables aux astreintes auxquelles sont soumis, en raison de leurs fonctions, les personnels de direction ainsi que les cadres, désignés par le chef d'établissement, qui bénéficient soit d'une concession de logement pour nécessité absolue de service, soit d'une indemnité compensatrice définies par décret. ». L’article 25 de ce même décret dispose : « Le temps passé en astreinte donne lieu soit à compensation horaire, soit à indemnisation. / (…). ». Selon l’article 1 du décret du 11 mai 2007 susvisé : « Le présent décret s'applique aux cadres socio éducatifs en fonction dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. Ils constituent un corps classé en catégorie A. ». Aux termes de l’article 3 de ce décret : « Les agents du grade de cadre socio-éducatif exercent des fonctions correspondant à leur qualification et consistant à encadrer les personnels éducatifs et sociaux d'une unité ou d'un établissement. / Sous l'autorité du directeur d'établissement, ils sont responsables de l'organisation et du fonctionnement du service social ou du service éducatif de cette unité ou de cet établissement. / Ils participent à l'élaboration du projet de l'unité ou de l'établissement ainsi que des projets sociaux et éducatifs. / Ils participent à la définition des orientations relatives à la collaboration avec les familles et les institutions (…). ».

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu’il appartient au chef d’un établissement de santé de définir, afin d’assurer notamment la continuité du service public et la sécurité de ses usagers, les modalités d’organisation des astreintes ordinaires auxquelles sont assujettis les cadres socio-éducatifs qui y sont affectés, et qui ont notamment pour objet, en vertu de l’article 20 du décret du 4 janvier 2002, de faire face au caractère exceptionnel de certaines interventions incombant aux établissements dans le cadre de leurs missions de soins, d'accueil et de prise en charge des personnes et de permettre toute intervention touchant à la sécurité et au fonctionnement des installations et des équipements y concourant. Les cadres socio-éducatifs astreints à des gardes de direction, en vertu d'un tableau établi par le directeur de l’établissement, bénéficient pour leur part, conformément à l’article 2 du décret du 8 janvier 2010, d’un droit à concession de logement par nécessité absolue de service dans l’établissement qui les emploie dès lors qu’ils effectuent un nombre annuel minimum de quarante journées de garde et, dans l’hypothèse où l’établissement n’est pas en mesure d’assurer leur logement, d’une indemnité compensatrice mensuelle destinée à compenser les sujétions induites par ces gardes de direction. En l’absence de définition, par le chef d’établissement de santé concerné du régime auquel sont soumis les agents de permanence, il appartient à ceux qui s’en prévalent de démontrer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, qu’ils ont accomplis des services relevant du régime des astreintes ordinaires ou des gardes de direction, dont la rémunération correspondante est exclusive l’une de l’autre.

5. En l’espèce, il est constant que le directeur du centre départemental de l’enfance et de la famille de la Haute-Garonne, supérieur hiérarchique de Mme M==, n’a pas défini de régime d’astreinte distinguant les astreintes de droit commun et les gardes de direction, et n’a pas davantage astreint la requérante à des gardes de direction en vertu d’un tableau ayant explicitement cet objet, ni ne l’a soumise au régime de concession de logement par nécessité absolue de service.

6. Pour soutenir que les permanences qu’elle a effectuées à la suite de l’entrée en vigueur du décret susmentionné du 8 janvier 2010, sur la base d’une fréquence temporelle d’une semaine sur six et d’un weekend sur six, pour un total cumulé de 60 en 2010, 66 en 2011 et 58 jours en 2012, constituent des gardes de direction et doivent être rémunérées en tant que telles, Mme M== se prévaut de ce que les fiches de poste et fiches de rôle et de responsabilité des chefs de services du CDEF mettent en évidence sa participation à l’équipe de direction, au titre de laquelle sa responsabilité civile et pénale est susceptible d’être engagée, que dans le cadre de ses permanences, elle bénéficie d’une délégation de signature et de compétence qui se matérialise notamment dans les relations entre les cadres de permanences et le Parquet, et intervient au-delà de son service, tant d’un point de vue matériel que territorial, en gérant l’ensemble du personnel et des usagers du centre, et que les tableaux de permanences et astreintes ne distinguent pas les astreintes et permanences des chefs de services et celles des directeurs. Toutefois, et ainsi que l’a rappelé le directeur du centre départemental de l’enfance et de la famille de la Haute-Garonne dans la décision contestée du 15 juin 2012, il ressort des pièces du dossier qu’au cours desdites périodes, trois niveaux différents de responsabilité hiérarchique et fonctionnelle concourent à la continuité du service public et la sécurité des usagers du service. D’abord, les cadres de l’établissement - au nombre desquels figurent un cadre de santé et quatre cadres socio-éducatifs - sont chargés notamment d’exercer à tour de rôle leur compétence de chef de service sur l’ensemble des personnels éducatifs et sociaux des unités éducatives. Ensuite, il incombe aux directeurs de l’établissement de prendre en charge, à tour de rôle, les situations humaines et matérielles les plus délicates susceptibles de survenir, ce qui les conduit à être joignables immédiatement par les cadres de permanence à cet effet. Enfin, l’atelier du centre départemental assure pour sa part une astreinte d’ordre technique. S’il est constant que Mme M== s’est vu attribuer, dans ce cadre ainsi délimité, une délégation afin d’encadrer les services placés sous sa responsabilité et qui ne se limitent pas, ainsi qu’elle le souligne, à l’unité éducative dont elle a habituellement la charge, la requérante ne démontre pas que, lors de ces périodes de permanence, ladite délégation l’habilitait à signer tous documents administratifs ou tous actes et décisions relevant de la compétence du directeur, en lieu et place de celui-ci. Au contraire, tant l’extrait du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 17 novembre 2011 dont elle se prévaut, évoquant la « posture et le rôle du cadre de permanence », qui indique que « il y a toujours un directeur de garde au-dessus du cadre de permanence (…). Un directeur assure également une permanence de second rideau et il est sollicité si nécessaire (…) », que la fiche portant sur la « définition des rôles et des responsabilités des chefs de service du CDEF, qui précise que les chefs de service « sont tenus d’informer dans tous les cas le directeur et/ ou son adjoint, de tout évènement particulier, ainsi que les responsables de permanence et les membres de l’équipe de direction éventuellement concernés », établissent que si les cadres socio-éducatifs sont effectivement associés à la direction de l’établissement, les permanences auxquelles ils sont astreints ne les conduisent pas à se substituer aux membres du corps de direction de l’établissement, à qui il incombe de gérer les cas les plus problématiques. Cette répartition des rôles est confirmée par la requérante, qui indique que sur l’ensemble des astreintes et permanences des cadres entre janvier 2010 et septembre 2013, 108 interventions ont entrainé l’appel de l’un des directeurs sur 1 348 jours de permanence, soit 8 % des interventions. En outre, il résulte des dispositions précitées de l’article 3 du décret du 11 mai 2007 que la mission d’encadrement des personnels éducatifs et sociaux d'une unité ou de l’établissement lui-même relève des attributions courantes qui sont dévolues aux membres du corps des cadres socio-éducatifs. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que la requérante n’est présente sur le site du Centre départemental qu’entre 17 h 00 et 19 h 00 les semaines et weekends en cause et qu’elle peut quitter son lieu de travail entre 19 h et 9 h du matin, sa seule obligation étant alors d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'établissement, ce qui constitue l’une des caractéristiques mêmes des astreintes ordinaires. Ainsi que l’ont relevé à juste titre les premiers juges, ni la circonstance que la fiche de candidature au poste de cadre de santé exercé par l’une de ses collègues indique que le cadre est membre de l’équipe de direction et, à ce titre, assure des permanences administratives, ni la circonstance, à la supposer établie, que les cadres auraient été invités à résider à une quinzaine de minutes de l’établissement, ne sauraient suffire à démontrer que les astreintes que Mme M== a été amenée à effectuer les semaines et weekends en cause seraient assimilables à des gardes de direction. Par suite, en refusant de verser à Mme M== l’indemnité compensatrice mensuelle prévue par le décret du 8 janvier 2010, au motif tiré de ce qu’elle n’avait pas effectué quarante journées de garde de direction par an au sens dudit décret, le directeur du centre départemental de l’enfance et de la famille de la Haute-Garonne n’a pas entaché les décisions contestées d’erreur de droit ni, davantage, d’erreur d’appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme M== n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation desdites décisions. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d’injonction et ses conclusions indemnitaires doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre départemental de l’enfance et de la famille de la Haute-Garonne, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une quelconque somme à verser à Mme M== au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme M== est rejetée.