Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2012, présentée pour la société G== par Me C==, avocat ;

La société ==demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0804731 du 5 octobre 2012 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu’il n’a reconnu la responsabilité de la société S== qu’à hauteur de la moitié des conséquences dommageables des désordres affectant la couverture du bâtiment des abattoirs de Lacaune et a limité à 101 891 euros HT la somme allouée en réparation de ces désordres ;

2°) de condamner la société S== à lui verser la somme de 203 782, 89 euros HT en réparation des préjudices subis par la commune de Lacaune, dans les droits de laquelle elle est subrogée ;

3°) de mettre à la charge de la société S== une somme de 2 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;


1. Considérant que la commune de Lacaune a fait procéder, au cours des années 1992 et 1993, à des travaux de rénovation des abattoirs municipaux ; qu’elle a confié à la société B== des travaux d’installation d’une couverture en tôles pré-laquées, dont la réception est intervenue le 23 juin 1993, pour lesquels elle a souscrit une police d’assurance dommage-ouvrage auprès de la société G== ; que des désordres sont apparus en 1997, consistant en une corrosion de la sous-face des bacs en acier de la couverture du bâtiment ; que le rapport d’expertise établi le 13 décembre 1997 par M. T==, diligenté par l’assureur de la commune, a préconisé des travaux de réparation sous forme d’un traitement des surfaces corrodées par application de peintures spécifiques aux atmosphères humides ; que la commune a confié ces travaux de peinture à la société S== par un marché conclu le 16 septembre 1999, pour un prix de 19 366,39 euros, porté par avenant du 17 décembre 1999 à 23 981,18 euros en raison de l’augmentation du degré d’enrouillement du support à peindre ; qu’au cours de l’année 2002, de nouveaux désordres sont apparus, consistant en une corrosion généralisée de la sous-face des bacs des abattoirs ; que les rapports d’expertise amiable établis les 9 décembre 2002 et 8 février 2003 par M. T== ont préconisé la réalisation de nouveaux travaux de traitement de la surface corrodée par application de peintures spécifiques, étant spécifié que l’exploitation des locaux devait être totalement interrompue durant leur exécution, et évalué leur coût à la somme de 203 782,89 euros HT ; que le même expert, à nouveau désigné en juin 2005 à la suite de l’aggravation des désordres, a remis le 5 février 2007 un rapport préconisant la réalisation de travaux, chiffrés au montant total de 510 278, 54 euros HT, de remplacement des bacs et des voûtes translucides et de modification du système de ventilation du bâtiment ; qu’après avoir réglé à la commune de Lacaune, le 24 juillet 2007, une somme de 510 278 euros, la société G==, agissant en qualité d’assureur subrogé dans les droits de la commune, a recherché la responsabilité de la société S== sur le fondement des principes dont s’inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que la société G== relève appel du jugement n° 0804731 du 5 octobre 2012 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu’il n’a reconnu la responsabilité de la société S== qu’à hauteur de la moitié des conséquences dommageables des désordres affectant la couverture du bâtiment des abattoirs municipaux et a limité à 101 891 euros HT euros la somme allouée en réparation de ces désordres, et demande à la cour de condamner la société S== à lui verser une somme de 203 782, 89 euros HT ; que, par la voie de l’appel incident, la société S== demande l’annulation du même jugement en tant qu’il l’a condamnée ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 121-12 du code des assurances : « L’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur. L’assureur peut être déchargé, en tout ou partie, de sa responsabilité, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l’assuré, s’opérer en faveur de l’assureur.» ; que le recours de l’assureur contre le tiers responsable du dommage ne peut toutefois s’exercer que dans la limite de la garantie dont il est lui-même tenu envers son client, qui n’est pas nécessairement égale à l’étendue du dommage ; 3. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article L. 114-1 du même code : « Toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance. » ; 4. Considérant que la société S== fait valoir que la société G==, qui aurait pu opposer à son assurée, la commune de Lacaune, la prescription découlant de l’article L. 114-1 précité du code des assurances, ne peut être regardée comme subrogée dans les droits et actions de la commune à raison des désordres litigieux ; que, toutefois, il est constant que la société G== a versé le 24 juillet 2007 à la commune de Lacaune, en exécution du contrat d’assurance, la somme de 510 278 euros au titre du dommage tenant à la corrosion généralisée de la sous-face des bacs aciers des abattoirs municipaux ; qu’il n’est pas contesté que ce paiement est intervenu dans la limite de la garantie à laquelle l’assureur était tenu en vertu de ce contrat d’assurance ; que la prescription prévue à l’article L. 114-1 du code des assurances n’a d’incidence que sur l’exigibilité de la dette de l’assureur à l’égard de son assuré, mais est sans effet sur l’existence même de cette dette ; que, dans ces conditions, et alors même qu’elle aurait pu opposer à son assurée cette prescription, la société G== était, du fait dudit paiement, subrogée à concurrence de la somme de 510 278 euros dans les droits de la commune de Lacaune ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société S== ne peut qu’être écartée ; Sur la responsabilité : En ce qui concerne le caractère décennal des désordres : 5. Considérant qu’il résulte de l’instruction, notamment des rapports de l’expert désigné dans le cadre de la police d’assurance dommage-ouvrage, qu’au cours de l’année 2002 est apparue une corrosion généralisée des bacs en acier de la sous-face de la toiture des abattoirs municipaux de Lacaune qui entraîne la chute de particules corrodées dans les locaux et sur la chaîne d’abattage ; qu’eu égard à leur ampleur et à leur consistance, ces désordres sont de nature à rendre l’ouvrage impropre à sa destination et engagent la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale ; En ce qui concerne l’imputation des désordres : 6. Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de l’instruction, notamment des rapports d’expertise mentionnés au point 5 et du procès-verbal établi le 20 novembre 2002 par l’Institut national de recherche et d’études de la finition (IREF), que la société S== a procédé, avant la pose des peintures anticorrosives, à un simple grattage mécanique des surfaces corrodées, technique ne permettant pas une élimination complète de la corrosion d’éléments métalliques ; que le recours à ce procédé a contribué à l’inefficacité des travaux de traitement des zones de corrosion et à la survenance ultérieure d’un phénomène de corrosion généralisée ; que la société S== n’est ainsi pas fondée à soutenir que les désordres ne lui seraient pas imputables ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que si la société S== soutient que le phénomène de corrosion de la couverture des abattoirs a pour origine un défaut de conception du système de ventilation du bâtiment, qui a pour effet de soumettre le local aux conditions climatiques extérieures, elle n’est cependant pas fondée à se prévaloir de l’imputabilité des désordres à un autre constructeur pour demander l’exonération de sa responsabilité, mise en jeu en application des principes dont s’inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;

8. Considérant, enfin, qu’il résulte notamment du courrier de la société A== du 13 novembre 2006 à la commune de Lacaune que l’activité d’abattage implique l’utilisation de produits particulièrement agressifs compromettant une résistance durable des revêtements ; que la commune de Lacaune n’a pourtant pas informé la société S== de cette circonstance ; qu’il résulte en outre du procès-verbal de l’IREF que l’atmosphère très humide d’un abattoir en activité compromet l’efficience d’un traitement par pose de peintures anticorrosives, lesquelles s’avèrent inefficaces lorsque le degré d’hygrométrie est trop élevé ; que les rapports de l’expert d’assurance précisaient d’ailleurs qu’une nouvelle pose de peintures spécifiques devait impérativement s’accompagner d’une interruption de l’activité des abattoirs municipaux ; qu’il résulte de l’instruction que, durant la période de réalisation des travaux de réfection par la société S==, effectués l’après-midi, la commune de Lacaune n’a pas interrompu l’activité d’abattage, la chaîne d’abattage continuant à fonctionner chaque matin ; que, dans ces conditions, les désordres litigieux sont, pour partie, imputables aux fautes de la commune de Lacaune ;

9. Considérant que, compte tenu ce qui a été dit précédemment, la société G==, subrogée dans les droits de la commune de Lacaune, et la société S== ne sont pas fondées à se plaindre de ce que le tribunal a mis à la charge de la société S== la moitié des conséquences dommageables de la corrosion des bacs en acier de la couverture des abattoirs municipaux de Lacaune telle que constatée en 2002 ;

Sur la réparation :

10. Considérant que les parties ne discutent pas, en appel, du montant des travaux nécessaires pour remédier aux désordres constatés en 2002, fixé par le tribunal à la somme de 203 782 euros HT, qui correspond à l’évaluation faite par l’expert en 2003 ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société G== et les conclusions de la société S== sont rejetées.