Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2012, présentée pour la SCI de Bordeneuve, dont le siège est Lieu-dit Maribaut à Fabas (09230), par Me Boillot, avocat ;

La SCI de Bordeneuve demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0802168 du 15 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l’arrêté du 19 mars 2008 par lequel le préfet de l’Ariège a opposé un refus à sa demande de créer un lotissement sur le territoire de la commune de Fabas ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d’enjoindre au préfet de l’Ariège de réexaminer sa demande de permis de lotir, dans un délai de deux mois suivant l’arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 500 euros au titre de l’article L.761 1 du code de justice administrative ;


1. Considérant que la SCI de Bordeneuve est propriétaire de parcelles agricoles d’une superficie totale de 192 457 mètres carrés au lieu-dit « Bordeneuve » sur le territoire de la commune de Fabas ; qu’elle a conçu un projet de réalisation, sur ces parcelles, de « village aéronautique » dénommé « des vaches et des avions », comprenant des habitations et un aérodrome privé ; que par une délibération du 15 novembre 2005, le conseil municipal de Fabas a donné un avis favorable à la réalisation de ce projet de hameau aéronautique, situé en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune ; que par un arrêté du 23 novembre 2005, assorti de prescriptions, le préfet de l’Ariège a autorisé la SCI à créer un aérodrome privé sur ce terrain ; que la même autorité lui a délivré le 26 janvier 2006 un certificat d’urbanisme positif ; que par un arrêté du 14 janvier 2008, le préfet a refusé à la société le renouvellement de l’autorisation de créer un aérodrome privé ; que par un arrêté du 19 mars 2008, le préfet de l’Ariège a refusé de lui délivrer l’autorisation de créer un lotissement ; que la SCI de Bordeneuve relève appel du jugement n° 0802168 du 15 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté portant refus de lotir ;

2. Considérant, en premier lieu, que la société requérante soutient que le jugement attaqué n’aurait pas répondu à l’ensemble de ses moyens ; que, toutefois, ce moyen de régularité du jugement, qui n’est pas d’ordre public, a été présenté dans un mémoire enregistré devant la cour le 11 mars 2013, après l’expiration du délai d’appel ; que contrairement à ce que fait valoir la SCI de Bordeneuve, sa requête d’appel ne comportait aucune critique de la régularité du jugement attaqué, seule étant critiquée la manière dont le tribunal a répondu au fond au moyen tiré de l’erreur de droit à n’avoir pas pris en compte la délibération du conseil municipal autorisant une dérogation à l’inconstructibilité des secteurs situés en dehors des parties urbanisées de la commune ; que par suite, et ainsi que le soutient la ministre de l’égalité des territoires et du logement, ce moyen n’est pas recevable ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que l’arrêté attaqué a été signé par M. Jean-Marc Duché, secrétaire général de la préfecture, qui bénéficiait, en vertu d’un arrêté du préfet de l’Ariège du 26 février 2007, régulièrement publié au recueil des actes de la préfecture paru le 9 mars 2007, d’une délégation aux fins de signer « tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l’Etat dans le département de l’Ariège, à l’exception des décisions relatives à l’élévation des conflits » ; que cette délégation de signature, qui ne présentait pas de caractère général de nature à l’entacher l’illégalité, n’a pas été consentie sous réserve d’absence ou d’empêchement du préfet ; que dans ces conditions la SCI de Bordeneuve ne peut en tout état de cause utilement soutenir que le tribunal aurait inversé à son détriment la charge de la preuve d’un empêchement ; que le moyen tiré de l’incompétence du signataire de l’arrêté ne peut ainsi qu’être écarté ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article L.111-1-2 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de l’arrêté attaqué : « En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : (…) 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes ; 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publique, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l’article L. 110 et aux dispositions des chapitres V et VI du titre IV du livre Ier ou aux directives territoriales d'aménagement précisant leurs modalités d'application. » ;

5. Considérant qu’il est constant que le terrain d’assiette du projet de lotissement de la SCI de Bordeneuve est situé en dehors des parties urbanisées de la commune de Fabas, laquelle n’est pas dotée de plan local d’urbanisme ou de carte communale ; que par sa délibération du 15 novembre 2005, le conseil municipal de Fabas a émis un avis favorable au projet de la société consistant en un « hameau aéronautique » comportant plusieurs habitations et un aérodrome privé ; que la SCI de Bordeneuve s’est vue opposer, par un arrêté préfectoral du 14 janvier 2008, immédiatement exécutoire, un refus de renouvellement de l’autorisation de créer un aérodrome privé sur le terrain en cause ; qu’ainsi que l’ont relevé les premiers juges, en l’absence, à la date de l’arrêté attaqué, d’autorisation de créer un aérodrome privé, le projet de lotissement de la société requérante ne répondait plus aux caractéristiques de celui sur lequel le conseil municipal de Fabas avait émis un avis favorable ; que dans ces conditions, au regard du changement de nature du projet envisagé, le préfet de l’Ariège a pu légalement s’abstenir de prendre en considération la délibération du conseil municipal de Fabas du 15 novembre 2005, et considérer que le projet de la société n’entrait pas dans les prévisions de l’article L.111-1-2 4° du code de l’urbanisme ; que contrairement à ce que soutient la société requérante, le préfet ne pouvait être tenu d’examiner le projet de lotissement aéronautique indépendamment de l’autorisation de la piste, un tel nouveau projet, qui n’aurait alors porté que sur des maisons d’habitation, ne comportant au demeurant pas davantage d’installation incompatible avec le voisinage des zones habitées au sens du 3° de l’article L.111-1-2 précité ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes du III de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme, relatif aux principes d’aménagement et de protection en zone de montagne : « Sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants. (…). Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas dans les cas suivants (…) c) Dans les communes ou parties de commune qui ne sont pas couvertes par un plan local d'urbanisme ou une carte communale, des constructions qui ne sont pas situées en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants peuvent être autorisées, dans les conditions définies au 4° de l'article L. 111-1-2, si la commune ne subit pas de pression foncière due au développement démographique ou à la construction de résidences secondaires et si la dérogation envisagée est compatible avec les objectifs de protection des terres agricoles, pastorales et forestières et avec la préservation des paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel prévus aux I et II. » ; que dès lors que le projet de lotissement de la société, situé en discontinuité des secteurs bâtis de la commune de Fabas, n’entre pas dans les prévisions du 4° de l’article L.111-1-2 du code de l’urbanisme, pour les motifs exposés au point 5, et alors même que la commune ne subirait aucune pression foncière et que le projet ne porterait pas atteinte au principe de préservation des terres agricoles, le préfet de l’Ariège s’est à bon droit fondé sur les dispositions précitées pour refuser l’autorisation sollicitée ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu’aux termes de l’article R. 111-8 du code de l’urbanisme : « L'alimentation en eau potable et l'assainissement des eaux domestiques usées, la collecte et l'écoulement des eaux pluviales et de ruissellement ainsi que l'évacuation, l'épuration et le rejet des eaux résiduaires industrielles, doivent être assurés dans des conditions conformes aux règlements en vigueur. » ; que l’article R. 111-9 du même code précise : « Lorsque le projet prévoit des bâtiments à usage d'habitation, ceux-ci doivent être desservis par un réseau de distribution d'eau potable sous pression raccordé aux réseaux publics. » ; qu'il ressort des termes du courrier du syndicat des eaux du Couserans du 24 octobre 2007 que la desserte en eau potable du projet de lotissement de la SCI de Bordeneuve nécessite l'extension sur 600 mètres linéaires du réseau communal de distribution d'eau, laquelle n’est pas prévue par la commune ; que par suite, et en dépit du fait que la société requérante avait offert de prendre à sa charge les travaux d’extension du réseau, et alors qu’il n’est pas allégué que la commune aurait pris une délibération instaurant une participation pour réseaux, le préfet de l'Ariège a pu légalement refuser le permis sollicité au motif que le projet ne satisfaisait pas aux conditions posées par les dispositions précitées des articles R. 111-8 et R. 111-9 du code de l’urbanisme ;

8. Considérant, en sixième lieu, qu’aux termes de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme : « Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. » ; qu’il résulte de ces dispositions que le certificat d'urbanisme garantit uniquement le maintien pendant dix-huit mois des dispositions d'urbanisme qu'il mentionne ; qu’ainsi, et dès lors que le refus attaqué ne remet pas en cause les dispositions d’urbanisme existant à la date du 27 janvier 2006 à laquelle un certificat d’urbanisme opérationnel a été délivré à la société requérante, cette dernière n’est pas fondée à soutenir que l’arrêté attaqué aurait été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme ;

9. Considérant, enfin, qu’il résulte de l’instruction que le préfet de l’Ariège aurait pris la même décision s’il s’était fondé sur les seuls motifs, légalement opposés à la société, tenant à la méconnaissance, par le projet de lotissement, des conditions prévues aux articles L. 111-1-2, L. 145-3, R. 111-8 et R. 111-9 du code de l’urbanisme ; que dès lors, les motifs de l’arrêté fondés sur la méconnaissance, par le projet, des dispositions des articles R. 111-14, R. 111-15, R. 111-2 et L. 111-10 du code de l’urbanisme, ne peuvent être utilement critiqués ;

10. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SCI de Bordeneuve n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 19 mars 2008 portant refus de permis de lotir ; que, par suite, ses conclusions aux fins d’injonction et d’astreinte et celles tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI de Bordeneuve est rejetée.