Vu la requête enregistrée le 13 décembre 2013, présentée pour M. M==, élisant de domicile au cabinet de son conseil, par Me de Boyer Montégut ;

M. M== demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1302605 du 14 novembre 2013 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant, d’une part, à l’annulation de l’arrêté du 16 avril 2013 du préfet de la Haute-Garonne portant refus d’un titre de séjour, obligation de quitter sans délai le territoire français, interdiction de retourner en France pendant une période de trois ans et fixation du pays de renvoi et, d’autre part, à ce qu’il soit enjoint à ce même préfet, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ou « salarié » ou, à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation administrative ;

2°) d’annuler cet arrêté ;

3°) d’enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ou « salarié » ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

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1. Considérant que M. M==, ressortissant de nationalité bangladaise né en 1976, a déclaré être entré en France le 1er août 2001 ; que sa demande d’asile a été rejetée par une décision du 15 novembre 2001 de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée le 6 mai 2002 par la Commission de recours des réfugiés ; que par un arrêté du 16 juillet 2002, le préfet de la Seine-Saint-Denis a prononcé un refus de séjour à son encontre ; que compte tenu de son état de santé, M. M== a bénéficié d’autorisations provisoires de séjour du 12 février au 25 juin 2003 ; que par un arrêté du 11 juillet 2003, le préfet de police de Paris a refusé de renouveler son autorisation provisoire de séjour et a prononcé un refus de séjour assortie d’une invitation à quitter le territoire français dans le délai d’un mois ; qu’à la suite du rejet de sa demande de réexamen au titre de l’asile par une décision du 19 juillet 2004 de l’OFPRA, confirmée le 25 juillet 2005 par la Commission de recours des réfugiés, l’intéressé a fait l’objet d’un nouveau refus de séjour assortie d’une invitation à quitter le territoire français ; que M. M==, qui s’est maintenu irrégulièrement sur le territoire, a demandé, le 7 novembre 2006, son admission au séjour en qualité d’étranger malade ; que par un arrêté du 30 juillet 2008, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté cette demande et a fait obligation à l’intéressé de quitter le territoire national ; que le recours formé par celui-ci à l’encontre de cet arrêté a été rejeté par un jugement du 2 décembre 2008 du tribunal administratif de Toulouse et par un arrêt de la cour du 17 mars 2009 ; que M. M== ayant sollicité le 2 septembre 2008 le réexamen de sa demande d’asile, le préfet de la Haute-Garonne lui a notifié un refus d’admission au séjour ; que l’OFPRA a rejeté sa demande de réexamen par une décision du 7 novembre 2008 ; qu’à la suite de son interpellation le 10 novembre 2009, le préfet de la Haute Garonne a ordonné sa reconduite à la frontière, fixé le pays de renvoi et décidé de son placement en rétention administrative ; que par un jugement du 13 novembre 2009, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions dirigée contre la mesure de reconduite à la frontière, mais a annulé la décision fixant le pays de renvoi et celle portant placement en rétention administrative ; que par une décision du 8 février 2010, la Cour nationale du droit d’asile a rejeté le recours formé par M. M== contre la décision précitée du 7 novembre 2008 de l’OFPRA ; que saisi par l’intéressé d’une demande exceptionnelle au séjour par le travail, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que le recours formé par M. M== contre cet arrêté a été rejeté par un jugement du 2 décembre 2010 du tribunal administratif de Toulouse ; que le 16 avril 2012, se prévalant de l’ancienneté de son séjour en France, de l’absence de rattachement familial dans son pays d’origine et d’une promesse d’embauche, l’intéressé a demandé son admission exceptionnelle au séjour ; que le préfet de la Haute-Garonne a, par un arrêté du 28 août 2012, refusé la délivrance d’un titre de séjour, fait obligation à l’intéressé de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, lui a fait interdiction de retour pendant une durée de trois ans et fixé le pays de renvoi ; que le 12 février 2013, M. M== a sollicité une nouvelle fois son admission exceptionnelle au séjour en se prévalant de son ancienneté de résidence et d’un contrat de travail établi le 1er juin 2012 ; que par un arrêté du 16 avril 2013, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande d’admission au séjour, l’a obligé de quitter le territoire français sans délai, lui a fait interdiction de revenir sur le territoire français pendant trois ans et a fixé le pays de renvoi ; que M. M== fait appel du jugement du 14 novembre 2013 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant, d’une part, à l’annulation de cet arrêté du 16 avril 2013 et, d’autre part, à ce qu’il soit enjoint à ce même préfet, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ou « salarié » ou, à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation administrative ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L.313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. » ;

3. Considérant qu’il est constant qu’à la date de sa dernière demande d’admission exceptionnelle au séjour, le 12 février 2013, M. M== justifiait résider en France habituellement depuis plus de dix ans, et que l’autorité préfectorale n’a pas soumis sa demande pour avis à la commission du titre de séjour ;

4. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie ; que l’application de ce principe n’est pas exclue en cas d’omission d’une procédure obligatoire, à condition qu’une telle omission n’ait pas pour effet d’affecter la compétence de l’auteur de l’acte ;

5. Considérant que la consultation obligatoire de la commission du titre de séjour, telle qu’elle est prévue par les dispositions de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, et qui a pour objet d'éclairer l’autorité administrative sur la possibilité de régulariser la situation administrative d’un étranger, constitue pour ce dernier une garantie substantielle ; qu’à l’appui de sa nouvelle demande d’admission exceptionnelle au séjour, M. M== s’est prévalu d’une part, de la demande d’autorisation de travail présentée le 11 février 2013 par la société Dehli Spicee en vue de son recrutement en qualité de cuisinier, et, d’autre part, tant des dispositions de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers que de celles de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l’intérieur portant sur les conditions d’examen des demandes d’admission exceptionnelle au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, comme l’établit l’attestation du 12 février 2013 de dépôt de sa demande de titre de séjour ; que compte tenu de ces éléments nouveaux, et alors même que la commission du titre du séjour s’est prononcée le 7 juin 2012 sur une précédente demande de titre présentée sur le même fondement de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour et du droit d’asile, soit antérieurement à l’intervention de la circulaire précitée du 28 novembre 2012, le préfet de la Haute-Garonne était tenu de saisir pour avis la commission du titre de séjour visée par les dispositions précitées de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; que, faute de consultation de la commission du titre de séjour, M. M== a été privé d’une garantie de sorte que l’arrêté litigieux, intervenu à l’issue d’une procédure irrégulière, est entaché d’illégalité ; que, par suite, M. M== est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l’arrêté contesté du 16 avril 2013 ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

6. Considérant qu’eu égard à son motif, l’annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement le réexamen de la situation de M. M== ; qu’il y a lieu d’enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d’y procéder dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu’il n’y a pas lieu, en revanche, d’assortir cette injonction d’une astreinte ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l’Etat, une somme de 1 500 euros à verser à M. M== au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1302605 du 14 novembre 2013 du tribunal administratif de Toulouse, ensemble l’arrêté du 16 avril 2013 du préfet de la Haute-Garonne rejetant la demande d’admission au séjour présentée par M. M==, l’obligeant à quitter le territoire français sans délai, lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français pendant trois ans et fixant le pays de renvoi sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer la situation de M. M== dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L’Etat versera à M. M== la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. M== est rejeté.