Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Vincent G== a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l’État à lui payer les heures de décharge de service qu’il a travaillées, telles qu’elles sont comptabilisées dans une lettre du 14 janvier 2015 et d’enjoindre au recteur de l’académie de Bordeaux de procéder au calcul de sa rémunération et des charges correspondantes.

Par un jugement n° 1500561 du 3 février 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 8 avril 2016 et les 5 juillet et 31 août 2017, M. G==, représenté par Me S==, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du 3 février 2016 ;

2°) de condamner l’État à lui payer les heures de décharge telles que résultant de la lettre du 27 août 2014 ;

3°) d’enjoindre au recteur de l’académie de Bordeaux de procéder au calcul de sa rémunération et des charges afférentes dans le délai de huit jours à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l’État la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Considérant ce qui suit :

1. M. G==, maître de l’enseignement privé, enseignant les sciences physiques au lycée privé Largenté à Bayonne, relève appel du jugement du 3 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’État à lui payer les heures de décharge de service dont il aurait dû bénéficier pour les années 2009/2010, 2010/2011, 2011/2012, 2012/2013 et 2013/2014 et à ce qu’il soit enjoint au recteur de l’académie de Bordeaux de procéder au calcul de sa rémunération et des charges correspondantes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article R. 613-3 du code de justice administrative : « Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction. (…) ». Lorsque, postérieurement à la clôture de l’instruction, le juge est saisi d’une production, d’un mémoire ou d’une pièce, émanant d’une partie à l’instance, il lui appartient de prendre connaissance de cette production pour déterminer s’il y a lieu de rouvrir l’instruction afin de la soumettre au débat contradictoire et de pouvoir en tenir compte dans le jugement de l’affaire. S’il s’abstient de rouvrir l’instruction, le juge doit se borner à viser la production sans l’analyser et ne peut la prendre en compte sans entacher sa décision d’irrégularité.

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le recteur de l’académie de Bordeaux a produit un mémoire en défense enregistré au greffe le 18 janvier 2016, postérieurement à la clôture d’instruction. Le tribunal administratif de Pau qui n’a pas communiqué ce mémoire à M. G==, l’a visé sans l’analyser. Il ne ressort pas des pièces du dossier et il n’est au demeurant pas allégué que le tribunal se serait fondé, dans les motifs de son jugement, sur des éléments de droit ou de fait qui n’auraient été contenus que dans ce mémoire et que M. G== n’aurait pas eu la possibilité de discuter.

4. Par ailleurs, il appartient au juge administratif de se prononcer sur le bien-fondé des moyens dont il est saisi et, le cas échéant, d'écarter de lui-même, quelle que soit l'argumentation du défendeur, un moyen qui lui paraît infondé, au vu de l'argumentation qu'il incombe au requérant de présenter au soutien de ses prétentions. En statuant ainsi, le juge ne relève pas d'office un moyen qu'il serait tenu de communiquer aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, et ne statue pas au delà des conclusions dont il est saisi.

5. Il ne ressort pas des motifs du jugement attaqué - qui se fondent, du reste, sur une argumentation similaire à celle exposée, contrairement à ce que M. G== prétend, dans les décisions contestées du 27 août 2014 et du 14 janvier 2015 - que le tribunal administratif de Pau, à qui il appartenait de faire application des textes et de la jurisprudence en vigueur, et qui se borne à répondre au moyen invoqué par M. G==, aurait soulevé d’office un moyen dont les parties n’auraient pu discuter et, par suite, entaché son jugement d’irrégularité. Il suit de là que M. G== n’est pas fondé à soutenir que la procédure suivie devant le tribunal aurait méconnu les dispositions de l’article R. 611-7 du code de justice administrative ou le principe du caractère contradictoire de la procédure, faute d’avoir été invité à produire ses observations sur les motifs retenus par les premiers juges pour rejeter sa demande.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

6. Aux termes de l’article L. 914-1 du code de l’éducation : « Les règles générales qui déterminent les conditions de service et de cessation d'activité des maîtres titulaires de l'enseignement public, ainsi que les mesures sociales et les possibilités de formation dont ils bénéficient, sont applicables également et simultanément aux maîtres justifiant du même niveau de formation, habilités par agrément ou par contrat à exercer leur fonction dans des établissements d'enseignement privés liés à l’État par contrat. (...) ». Aux termes de l’article L. 442-5 du même code : « Les établissements d'enseignement privés du premier et du second degré peuvent demander à passer avec l’État un contrat d'association à l'enseignement public (…) Dans les classes faisant l'objet du contrat, l'enseignement est dispensé selon les règles et programmes de l'enseignement public. Il est confié, en accord avec la direction de l'établissement, soit à des maîtres de l'enseignement public, soit à des maîtres liés à l’État par contrat. Ces derniers, en leur qualité d'agent public, ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l’État, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié (…) ». Par ailleurs, en application de l’article R. 914-85 du même code : « Les heures supplémentaires assurées sur autorisation de l'autorité académique pour les enseignements compris dans les programmes de l'enseignement public sont payées au taux en vigueur pour le personnel correspondant de l'enseignement public dans les mêmes conditions que la rémunération principale. (…) Ces heures peuvent être assurées, à la demande du chef d'établissement et sur autorisation de l'autorité académique, par des maîtres appartenant au secteur privé de l'établissement ».

7. En vertu de l’article 1er du décret du 25 mai 1950 portant règlement d'administration publique pour la fixation des maximums de service hebdomadaire du personnel enseignant des établissements d'enseignement du second degré, les membres du personnel enseignant non agrégés, enseignant des disciplines littéraires ou scientifiques dans les établissements du second degré, sont tenus de fournir, sans rémunération supplémentaire, dans l'ensemble de l'année scolaire, un service hebdomadaire dont le maximum est fixé à dix-huit heures. Aux termes de l'article 8 du même décret : « (...) Dans les établissements où n'existe ni professeur attaché au laboratoire (ex-préparateur) ni agent de service affecté au laboratoire, le maximum de service des professeurs qui donnent au moins huit heures d'enseignement en sciences physiques ou sciences naturelles est abaissé d'une heure ».



8. Ainsi que l’ont rappelé les premiers juges, il résulte de ces dispositions que l’État est tenu de prendre en charge la rémunération à laquelle ont droit, après service fait, les enseignants des établissements privés sous contrat et qui comprend les mêmes éléments que celle des enseignants de l’enseignement public ainsi que les avantages et indemnités dont ceux-ci bénéficient. Cette obligation trouve à s’appliquer, même en l’absence de service fait, à l’égard des enseignants qui bénéficient de décharges d’activité. Toutefois il n’appartient pas à l’État de prendre en charge la rémunération des heures supplémentaires effectuées, au-delà des obligations de service, à la demande du directeur d’un établissement d’enseignement privé ou acceptées par celui-ci et sans autorisation de l'autorité académique.

9. M. G== reprend en appel le moyen tiré de ce que les heures de décharge qu’il a réalisées sont statutaires et ne constituent pas des heures supplémentaires effectuées à la demande d’un chef d’établissement. S’il est constant que l’intéressé a assuré un service hebdomadaire de 18 heures d’enseignement, alors qu’il bénéficiait en l’absence de préparateur dans l’établissement d’une heure de décharge due au titre du laboratoire de sciences physiques pour les années scolaires de 2009/2010 à 2013/2014, il n’appartient pas à l’État, ainsi qu’il a été dit au point précédent, de prendre en charge la rémunération de l’heure supplémentaire d’enseignement qu’il a effectuée par semaine au-delà des 17 heures correspondant à ses obligations réglementaires de service, dès lors que cette heure a été assurée à la demande du directeur de l’établissement ou acceptée par celui-ci, sans autorisation de l'autorité académique, et alors qu’il était en droit de percevoir et a d’ailleurs perçu une rémunération correspondant à 18 heures de service hebdomadaires. Si l’appelant se prévaut d’un document intitulé « ventilation de services » adressé par les établissements à chaque rentrée scolaire dans lequel son emploi du temps et l’intégralité des heures qu’il a assurées sont récapitulées afin de permettre la mise en paiement des salaires des enseignants, ledit document permet uniquement d’attester que les maîtres concernés effectuent leurs obligations réglementaires de service. Par suite, son envoi au recteur ne peut tenir lieu de demande d'autorisation de l'accomplissement par ces maîtres d'heures supplémentaires ni, a fortiori, le silence gardé par celui-ci comme valant tacitement autorisation de cette heure supplémentaire.

10. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le ministre de l’éducation nationale, que M. G== n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions en injonction et tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. G== est rejetée.