Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier d'Embrun a demandé au tribunal administratif de Poitiers d’annuler la décision du 22 décembre 2010 par laquelle le directeur du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres a rejeté son recours gracieux contre la décision du 22 octobre 2010 refusant le transfert de la provision constituée au titre du compte épargne-temps de M. B==.

Par un jugement n° 1102395 du 5 février 2014, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 avril 2014, le centre hospitalier d'Embrun, représenté par Me Clément, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 février 2014 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision contestée ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui payer le montant de 51 497,53 euros à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de mettre à sa charge la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2015, le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres, représenté par la SCP Pielberg-Kolenc, conclut au rejet de la requête et à la condamnation du centre hospitalier d'Embrun à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. M. B==, directeur de l’hôpital local de Mauléon dans les Deux-Sèvres, a été nommé au centre hospitalier d'Embrun à compter du 1er mars 2009. Le 4 octobre 2010, le directeur de l’établissement a demandé à l’hôpital de Mauléon de lui transférer la provision constituée au titre des droits à congés épargnés par l’intéressé lors des années 2002 à 2009 sur son compte épargne-temps. Par un courrier du 22 octobre 2010, confirmé sur recours gracieux le 22 décembre suivant, le directeur du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres a rejeté cette demande. Le centre hospitalier d'Embrun relève appel du jugement du 5 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l’annulation de ce refus de transfert.

Sur la régularité du jugement :

2. La décision du 22 octobre 2010, constatant l’impossibilité de procéder « ni à un paiement, ni à un transfert de financement de ces journées de CET » est uniquement fondée sur le défaut de constitution de la provision en cause. Le courrier du 22 décembre suivant confirme que « les crédits n’ayant pas été prévus, je ne peux procéder à aucun transfert de financement ». Dans ses écritures en défense de première instance, le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres ne contestait pas l’obligation juridique de transfert. 3. Toutefois, il appartient au juge administratif de se prononcer sur le bien-fondé des moyens dont il est saisi et, le cas échéant, d’écarter de lui-même, quelle que soit l’argumentation du défendeur, un moyen qui lui paraît infondé, au vu de l’argumentation qu’il incombe au requérant de présenter au soutien de ses prétentions. En l’espèce, les premiers juges ont estimé qu’il ne résultait pas du décret du 3 mai 2002, invoqué par le centre hospitalier d’Embrun à l’appui de sa demande, ni du décret du 19 janvier 2004, que « la provision constituée pour le financement des droits à congés qu’un agent a portés sur son compte épargne-temps devait, avant l’intervention de l’article 5 du décret du 6 décembre 2012, être transférée par le centre hospitalier l’ayant constituée à l’établissement dans lequel cet agent était ultérieurement muté ». En statuant ainsi, ils n’ont pas méconnu leur office ni « statué ultra petita ». Le jugement n’est donc pas entaché de l’irrégularité alléguée.

4. Par un courrier du 21 juin 2013, le centre hospitalier d'Embrun a reçu l’information prévue à l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, en vertu de laquelle la clôture serait susceptible d’intervenir à compter du 1er septembre 2013 sans information préalable. L’instruction a ensuite été close, sur le fondement des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du même code par une ordonnance du 30 décembre 2013 portant clôture d’instruction immédiate. Si le centre hospitalier d'Embrun fait valoir que le tribunal a méconnu les droits de la défense en refusant de rouvrir l’instruction en dépit de sa demande du 3 janvier 2014, alors que le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres avait produit de nouveaux éléments qui lui avaient été communiqués le 30 octobre 2013, il ne conteste pas sérieusement avoir été mis à même de présenter des observations en réponse.

Sur la légalité du refus de transfert de la provision :

5. Le décret du 3 mai 2002 prévoit que les agents relevant de la fonction publique hospitalière peuvent demander l’ouverture d’un compte épargne-temps sur lequel sont épargnés des droits à congé, valables pendant un délai de dix ans à partir de la date à compter de laquelle les agents peuvent exercer les droits épargnés, et rémunérés comme une période d’activité. En vertu de l’article 11 de ce décret, l'agent conserve les droits acquis au titre du compte épargne-temps, notamment en cas de changement d'établissement. Le décret du 19 janvier 2004 relatif au financement par le fonds pour l’emploi hospitalier du compte épargne-temps des personnels médicaux et non médicaux exerçant dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 a institué des modalités de financement des droits à congés portés dans un compte épargne-temps et prévu, par son article 3, que les crédits versés aux centres hospitaliers à cet effet font l’objet d’un suivi particulier au sein de la comptabilité de chaque établissement et sont imputés au terme de l’exercice sur un compte de provision spécifique dans l’attente de leur utilisation.

6. Il résulte des dispositions combinées des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979, alors en vigueur, que les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des décisions qui : « -restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; -infligent une sanction -subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; -retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; -opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; -refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; -refusent une autorisation (…) ; rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ». Le refus de transfert en cause n’entre dans aucun des cas prévus par ces dispositions. 7. Ni les dispositions des décrets susmentionnés, ni celles de l’arrêté ministériel du 25 mars 2004 précisant les règles de financement des comptes épargne-temps, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire en vigueur à la date du refus de transfert en litige ne prévoient qu’un établissement hospitalier soit débiteur, vis-à-vis de l’établissement dans lequel a été nommé un de ses agents disposant de droits à congés acquis au titre de son compte épargne-temps, du montant de crédits qui lui ont été alloués et qu’il avait provisionnés en vue de faire face au versement éventuel à l’agent concerné d’une indemnité au titre de son compte épargne-temps. Ainsi, et alors même que M. B== disposait, lors de son changement d’établissement, d’un total de 119 jours épargnés et était donc susceptible de solliciter une indemnisation à raison de ces droits à congés, le directeur du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres a pu légalement refuser de procéder au transfert de provision sollicité par le centre hospitalier d'Embrun, auquel il appartenait, s’il s’y croyait fondé, de solliciter le directeur de l’agence régionale de santé en vue d’obtenir des crédits sur la dotation prévue par l’article 3 du décret mentionné ci-dessus du 19 janvier 2004 relatif au financement par le fonds pour l'emploi hospitalier du compte épargne-temps des personnels médicaux et non médicaux exerçant dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

8. Le centre hospitalier d'Embrun ne peut se prévaloir de la réponse faite le 6 août 2009 par la directrice de l’hospitalisation et de l’organisation des soins au délégué général de la fédération hospitalière de France, que son caractère impératif entache d’incompétence et qui n’a, en tout état de cause, fait l’objet d’aucune publicité, notamment dans les conditions prévues par le décret du 8 décembre 2008.

9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur la recevabilité de la demande de première instance, que le centre hospitalier d’Embrun n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d’injonction et celles présentées au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’affaire, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres.

DECIDE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier d’Embrun est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.