Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Ambulances Médica Services a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner le centre hospitalier de Mauléon à lui verser la somme de 6 604,73 euros correspondant au règlement de prestations de services impayées et la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice que lui a causé la résistance abusive de ce centre.

Par un jugement n° 1401428 du 29 juin 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté la demande de la société Ambulances Médica Services comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 26 août 2015, le 5 septembre 2016 et le 28 février 2017, la société Ambulances Médica Services, représentée par Me Neu puis par Me Gallardo, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 29 juin 2015 ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Mauléon à lui verser la somme de 6 604,73 euros.


Considérant ce qui suit :

1. La société Ambulances Médica Services a demandé au centre hospitalier de Mauléon la rémunération des prestations de transports sanitaires qu’elle soutient avoir réalisées au bénéfice de cet établissement durant la période comprise entre le 19 mars 2009 et le 21 février 2011. Sa demande ayant été rejetée, elle a saisi le tribunal administratif de Pau d’une requête tendant à la condamnation du centre hospitalier à lui verser la somme de 6 604,73 euros représentant le prix de ses prestations de transports sanitaires ainsi qu’une somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices liés à la résistance abusive dudit centre. Par jugement rendu le 29 juin 2015, le tribunal a rejeté la demande de la société Ambulances Médica Services comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître. La société Ambulances Médica Services relève appel de ce jugement.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Aux termes de l’article L. 142-1 du code de la sécurité sociale : « Il est institué une organisation du contentieux général de la sécurité sociale. Cette organisation règle les différends auxquels donnent lieu l'application des législations et réglementations de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole, et qui ne relèvent pas, par leur nature, d'un autre contentieux (…) ». Aux termes de l’article L. 142-2 du même code : « Le tribunal des affaires de sécurité sociale connaît en première instance des litiges relevant du contentieux général de la sécurité sociale (…) ».

3. Par ailleurs, aux termes de l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale : « L'assurance maladie comporte : (…) 2°) La couverture des frais de transport de l'assuré ou des ayants droit se trouvant dans l'obligation de se déplacer pour recevoir les soins ou subir les examens appropriés à leur état ainsi que pour se soumettre à un contrôle prescrit en application de la législation de sécurité sociale, selon les règles définies par les articles L. 162-4-1 et L. 322-5 et dans les conditions et limites tenant compte de l'état du malade et du coût du transport fixées par décret en Conseil d'Etat ». Aux termes de l’article L. 332-5-2 du même code : « Les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les entreprises de transports sanitaires sont définis par une convention nationale conclue pour une durée au plus égale à cinq ans entre une ou plusieurs organisations syndicales nationales les plus représentatives des ambulanciers et l'Union nationale des caisses d'assurance maladie. Cette convention détermine notamment : (…) 5° (…) les modalités de détermination des sommes dues aux entreprises (…) ».

4. La convention conclue en application de l’article L. 332-5-2 est destinée à organiser les rapports entre les entreprises de transports sanitaires privées et les caisses d'assurance maladie. Elle permet notamment de fixer par voie conventionnelle les tarifs applicables aux transports sanitaires, d'établir le montant des sommes prises en charge par l'assurance maladie en cas de transport sanitaire ainsi que la participation des assurés sociaux au financement de ces frais.

5. Il résulte de ces dispositions, et de celles de l’article R. 322-10-1 du code de la sécurité sociale et de l’article R. 6312-6 du code de la santé publique, que les litiges relatifs au paiement de prestations de transports sanitaires effectuées par des entreprises agréées au moyen d’une ambulance ou d’un véhicule sanitaire léger relèvent du contentieux général de la sécurité sociale lorsque lesdites prestations sont prises en charge par l’assurance maladie.

6. En revanche, aux termes de l’article 2 de la loi n°2001-1168 du 11 décembre 2001 : « Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. (…) ». Aux termes de l’article L. 142-3 du code de la sécurité sociale : « Les dispositions de l'article L. 142-2 ne sont pas applicables : (…) 3°) aux recours formés contre les décisions des autorités administratives ou tendant à mettre en jeu la responsabilité des collectivités publiques à raison de telles décisions ».

7. Ainsi, les litiges afférents au paiement de prestations de transports sanitaires prises en charge exclusivement par un centre hospitalier relevant de la catégorie des établissements publics administratifs, n’appartiennent pas au contentieux général de la sécurité sociale. Il en va ainsi dès lors que de tels litiges, relatifs à l’exécution de prestations accomplies par un tiers au profit d’une personne publique, se rattachent à l’exécution d’un marché public au sens de l’article 1er du code des marchés publics, dans sa version applicable en l’espèce, et aux termes duquel : « « Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services. (…) Les marchés publics de services sont les marchés conclus avec des prestataires de services qui ont pour objet la réalisation de prestations de services. ».

8. La société Ambulances Médica Services a effectué des prestations de transports sanitaires pour le compte du centre hospitalier de Mauléon dans le cadre d’un marché à bons de commande qui n’a pas été renouvelé en 2007. Néanmoins, le centre hospitalier de Mauléon a continué de faire occasionnellement appel aux services de la société lorsque le titulaire du marché était dans l’incapacité de répondre à une commande. Il résulte de l’instruction que la charge financière représentée par ces prestations était supportée par le centre hospitalier et que lesdites prestations n’étaient donc pas au nombre de celles qui étaient prises en charge directement par l’assurance maladie dans le cadre de la législation sur la sécurité sociale. Ainsi, en application des dispositions précitées, il appartient au juge administratif de connaître des conclusions de la société Ambulances Médica Services qui tendent au paiement de services de transports sanitaires qu’elle soutient avoir réalisées au profit du centre hospitalier de Mauléon et dont celui-ci refuse le paiement.

9. Par conséquent, c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté la demande de la société Ambulances Médica Services comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître. Dès lors, il y a lieu d’annuler ce jugement et, par la voie de l’évocation, de statuer sur la demande présentée par la société requérante devant le tribunal administratif de Pau.

Sur les droits de la société Ambulances Médica Services :

En ce qui concerne la prescription quadriennale :

10. Aux termes de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : « Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes (…) toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai (…) les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. ». Aux termes de l’article 2 de la même loi : « La prescription est interrompue par : Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (…) Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. (…) ».

11. Ainsi qu’il a été dit au point 1 du présent arrêt, la société requérante demande le paiement de prestations de transports sanitaires réalisées entre le 19 mars 2009 et le 21 février 2011. Il résulte des dispositions précitées de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968 que les créances invoquées par la société à l’encontre du centre hospitalier de Mauléon étaient, en ce qui concerne les prestations effectuées en 2009, 2010 et 2011, prescrites respectivement le 31 décembre 2013, le 31 décembre 2014 et le 31 décembre 2015.

12. Il résulte toutefois de l’instruction que le 9 avril 2011, soit avant l’expiration du délai de prescription, la société Ambulances Médica Services a adressé au centre hospitalier de Mauléon une demande écrite en vue d’obtenir le paiement de ses prestations. En application de l’article 2 précité de la loi du 31 décembre 1968, cette réclamation a interrompu le délai de la prescription quadriennale et un nouveau délai a commencé à courir à compter du 1er janvier 2012. Ce délai a été, à son tour, interrompu par la demande que la société requérante a présentée devant le tribunal administratif de Pau le 15 juillet 2014. A cette date, la créance litigieuse n’était pas atteinte par la prescription quadriennale et l’exception de prescription opposée en défense doit ainsi être écartée.

En ce qui concerne le montant dû à la société :

13. Il résulte de l’instruction que les prestations réalisées par la société requérante ont résulté de commandes, au moins verbales, du centre hospitalier ainsi qu’en attestent les courriers échangés entre les parties durant la période considérée. Et le centre hospitalier de Mauléon ne produit devant la cour aucun élément de nature à remettre en cause l’existence de telles commandes.

14. Il ne résulte pas de l’instruction que le centre hospitalier se serait opposé, lors des premières prestations réalisées par la société, aux prix pratiqués par elle ni que la somme de 6 604,73 euros demandée par cette dernière pour la rémunération de vingt-sept transports réalisés entre mars 2009 et février 2011 ne correspondrait pas aux modalités de fixation des prix ainsi tacitement convenues entre les parties. Il en va d’autant plus ainsi que le centre hospitalier avait antérieurement accepté de rémunérer la société requérante sur la base de factures dont il n’est pas allégué que le prix qu’elles comportent aurait été fixé différemment de ceux dont le paiement est demandé dans le présent litige. Dans ces conditions, il y a lieu de condamner le centre hospitalier de Mauléon à verser à la société requérante la somme de 6 604,73 euros qu’elle demande.

15. Il ne résulte pas de l’instruction que la société requérante aurait subi un préjudice résultant de la « résistance abusive » dont aurait fait preuve le centre hospitalier en rejetant ses demandes. Par suite, la demande de la société Ambulances Medica Services tendant à la condamnation du centre hospitalier de Mauléon à lui verser la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts doit être rejetée.

16. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Mauléon doit être condamné à verser à la société Ambulances Médica la somme de 6 604,73 euros.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le centre hospitalier de Mauléon à l’encontre de la société Ambulances Médica Services sur le fondement de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1401428 du tribunal administratif de Pau du 29 juin 2015 est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier de Mauléon est condamné à verser à la société Ambulances Médica Services la somme de 6 604,73 euros et le surplus des conclusions de la demande de première instance de cette société et de ses conclusions d’appel est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Mauléon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.