Vu le recours, enregistré le 27 novembre 2013 sous forme de télécopie et régularisé par courrier le 29 novembre suivant, présenté par la garde des sceaux, ministre de la justice, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201176 du 26 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a condamné l'Etat à payer au fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions une somme de 70 000 euros, assortie des intérêts légaux ;

2°) de rejeter la demande présentée par le fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions devant le tribunal administratif ;


1. Considérant que le 5 janvier 2009, Mme P== a été abattue par un coup de feu tiré par un mineur dont le juge des enfants avait, sur le fondement de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, ordonné le placement dans un foyer ; que, par un jugement du 4 mars 2010, le tribunal pour enfants de Cayenne, statuant sur l’action civile, a alloué, en réparation de leur préjudice moral, les indemnités de 25 000 euros à la mère de la victime, 18 000 euros à son frère, 12 000 euros à chacune de ses trois sœurs, 20 000 euros à sa compagne, 6 000 euros à la fille de celle-ci et 6 000 euros à sa nièce ; que les ayants droit de la victime ont ensuite saisi la commission d’indemnisation des victimes d’infractions près le tribunal de grande instance de Cayenne ; que, le 8 août 2011, le président de la commission a homologué les transactions conclues avec six d’entre eux pour le versement d’indemnités d’un montant total de 87 000 euros ; que, se prévalant de la subrogation prévue à l’article 706-11 du code de procédure pénale, le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions a saisi le tribunal administratif de Cayenne d’une demande tendant à la condamnation de l’Etat à lui rembourser cette somme ; que la garde des sceaux, ministre de la justice, fait appel du jugement du 26 septembre 2013 par lequel le tribunal a condamné l'Etat au paiement d'un montant de 70 000 euros assorti des intérêts légaux ;

2. Considérant que peut être recherchée, devant la juridiction administrative, la responsabilité de l’Etat en raison du risque spécial créé pour les tiers du fait de la mise en œuvre d’une des mesures de liberté surveillée prévues par l’ordonnance du 2 février 1945 ; que, toutefois, la seule circonstance que les dommages causés par le mineur soient survenus alors que celui-ci faisait encore l’objet, en droit, de cette mesure de liberté surveillée, ne suffit pas à qualifier de direct le lien qui rattache ces dommages à la mise en œuvre d’une telle méthode d’éducation ;

3. Considérant qu’en l’espèce, il est constant que le mineur, qui n’avait pas rejoint l’établissement où il avait été placé par ordonnance du juge des enfants du 29 septembre 2008, a commis le meurtre le 5 janvier 2009, soit plus de trois mois après sa fugue ; que, dans ces conditions, l'existence d'un lien direct de causalité entre le fonctionnement du service et les préjudices subis par les ayants droit de la victime de ce meurtre n’est pas établie ; que, dès lors, et sans qu’il soit besoin de statuer ni sur la régularité du jugement ni sur la fin de non-recevoir tirée de ce que le fonds de garantie ne justifie pas de sa qualité de subrogé, la garde des sceaux, ministre de la justice, est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cayenne a condamné l’Etat à verser une indemnité au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions ;

4. Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 26 septembre 2013 du tribunal administratif de Cayenne est annulé.

Article 2 : La demande présentée par le fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions devant le tribunal administratif de Cayenne et ses conclusions d’appel sont rejetées.