Vu la requête, enregistrée le 14 août 2013, présentée pour la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion (CGSSR), dont le siège social est situé 4 boulevard Doret à Saint-Denis (97704), par Me Sammarcelli, avocat ;

La caisse générale de sécurité sociale de La Réunion demande à la cour :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 1201125 du 20 juin 2013 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Saint-Denis rejetant sa demande tendant à l’annulation de la décision du 9 octobre 2012 par laquelle le chef de l’antenne interrégionale de la mission de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale a annulé la décision du 28 septembre 2012 de la commission de recours amiable accordant à M. R=== le bénéfice de la législation sur les risques professionnels ;

2°) d’annuler ladite décision du 9 octobre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


1. Considérant que la SARL Chercam - NJ décor Réunion a adressé à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion une déclaration d’accident de travail, établie le 28 novembre 2011, concernant un de ses salariés, M. R===, qui exerçait une activité de monteur - poseur ; que, par décision du 15 février 2012, cette caisse a refusé la prise en charge de l’accident de l’intéressé au titre de la législation sur les risques professionnels au motif du défaut de justification de la survenance de l’accident au temps et au lieu du travail ; que, saisie d’une réclamation contre ce refus par M. R===, la commission de recours amiable de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion a décidé, lors de sa séance du 28 septembre 2012, d’accorder à ce dernier le bénéfice de ladite législation ; que, toutefois, la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale a, par décision du 9 octobre 2012, annulé la décision de la commission de recours amiable ; que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion interjette appel de l’ordonnance du 20 juin 2013 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté, comme étant manifestement irrecevable, sa demande tendant à l’annulation de la décision de la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale ;

Sur la régularité de l’ordonnance :

2. Considérant que le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Saint-Denis, dont l’ordonnance repose sur le 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté la demande de la caisse nationale de sécurité sociale de La Réunion au motif que la voie de recours prévue par l’article L. 142-1 du code de la sécurité sociale faisait obstacle à ce qu’à l’appui de sa contestation de la décision de la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale, cette caisse soulève, comme elle l’a fait exclusivement, des moyens fondés sur l’application de la législation de sécurité sociale ;

3. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 151-1 du code de la sécurité sociale : « Les décisions des conseils ou des conseils d’administration des caisses primaires d’assurance maladie, des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail des travailleurs salariés, des caisses d’allocations familiales et des unions de recouvrement sont soumises au contrôle de l’autorité compétente de l’Etat. / L’autorité compétente de l’Etat peut annuler ces décisions lorsqu’elles sont contraires à la loi… » ; qu’en vertu de l’article R. 155-1 de ce code, le contrôle de légalité prévu par les dispositions précitées est assuré par la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale créée par arrêté du 9 novembre 2009 susvisé ;

4. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article L. 142-1 du code de la sécurité sociale : « Il est institué une organisation du contentieux général de la sécurité sociale. / Cette organisation règle les différends auxquels donnent lieu l’application des législations et réglementations de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole, et qui ne relèvent pas, par leur nature, d’une autre contentieux » ; qu’aux termes de l’article R. 142-1 du même code : « Les réclamations relevant de l’article L. 142-1 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d’administration de chaque organisme… » ;

5. Considérant que la voie de recours offerte aux employeurs et assurés sociaux par l’article L. 142-1 du code de la sécurité sociale pour le règlement des litiges qui les opposent aux caisses de sécurité sociale fait obstacle à ce que ces personnes présentent devant le juge administratif, à l’appui du recours pour excès de pouvoir dirigé contre une décision de la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale, une contestation de l’application qui leur a été faite de la législation et de la réglementation de sécurité sociale ; que, toutefois, cette voie de recours ne permet pas aux organismes de sécurité sociale, qui n’en disposent pas, de contester les actes par lesquels la mission nationale de contrôle et d’audit a annulé leurs propres décisions ; que, dès lors, ces organismes sont recevables à invoquer devant le juge administratif des moyens relatifs à l’application de la législation et de la réglementation de sécurité sociale, les difficultés sérieuses pouvant s’élever à cette occasion devant être portées, par la voie d’une question préjudicielle, devant le juge judiciaire ; que, par suite, c’est à tort que le président de la 2ème chambre du tribunal administratif a considéré que les moyens invoqués par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion, tirés de l’application de la législation de sécurité sociale relative aux accidents du travail, étaient irrecevables et a rejeté la demande de celle-ci sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative ; que l’ordonnance attaquée doit donc être annulée ;

6. Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion ;

Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision :

7. Considérant qu’aux termes de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale : « Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise » ;

8. Considérant que, dans la déclaration d’accident de travail établie au nom de M. R===, la SARL Chercam - NJ Décor Agencement, employeur de l’intéressé, a mentionné que la blessure à la main droite dont ce dernier avait été victime s’était produite le 28 novembre 2011, à 9 heures 30, à l’occasion de travaux de pose de mobilier de sécurité routière, sous la forme de silhouettes noires, au « Quartier français – Saint-André » ; que ces informations sur la date et l’heure ont été confirmées par l’attestation d’un participant auxdits travaux, qui aurait été témoin oculaire de l’accident ; que l’employeur a d’ailleurs précisé, ultérieurement, que M. R=== avait arrêté son activité le 28 novembre 2011 ; que, toutefois, le certificat médical relatif à l’accident de travail, qui constate une section au trois quart de la pulpe du quatrième doigt de la main droite, date cet événement du 29 novembre 2011 ; qu’un autre participant aux travaux de sécurité routière, qui a précisé n’avoir pas été témoin visuel de l’accident, a d’abord attesté, le 19 janvier 2012, de la survenance de l’événement ce même 29 novembre 2011 vers 10 heures 30, avant d’indiquer les date et heure du 28 novembre 2011, 9 heures 30, dans une seconde attestation, établie le 27 février 2012 ; que, si M. R=== fait valoir, en produisant un communiqué de presse, que la campagne de prévention des risques routiers pour laquelle étaient disposées des silhouette noires en bordure de voie, devait être lancée le mardi 29 novembre 2011, cette circonstance ne rapporte pas par elle-même la preuve de la survenance de l’accident ce 29 novembre ; que les contradictions dans la détermination de la date et de l’heure de l’accident ne permettent pas d’établir que celui-ci s’est produit par le fait ou à l’occasion du travail ; que, dans ces conditions, la décision de la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale n’est pas entachée d’erreur de fait ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède et sans qu’il ait lieu de poser une question préjudicielle, que la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision du 9 octobre 2012 de la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présence instance, la somme dont la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L’ordonnance n° 1201125 du 20 juin 2013 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Saint-Denis est annulée.

Article 2 : La demande de la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion devant le tribunal administratif de Saint-Denis ainsi que ses conclusions en appel au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.