Règlement départemental d’aide sociale - Allocation personnalisée d’autonomie - Dépenses à prendre en compte pour le calcul de l’allocation
Par Administrateur1 le mardi 4 décembre 2012, 17:43 - AIDE SOCIALE - Lien permanent
S’il incombe aux départements d’organiser et d’assurer le financement des prestations sociales autres que celles relevant de la compétence de l’Etat, le pouvoir réglementaire qui leur est attribué leur permet seulement, sur le fond, de décider de conditions et de montants plus favorables que ceux prévus par les lois et règlements nationaux (article L.121-4 du code de l’action sociale et des familles). Par ailleurs, les dépenses prises en compte pour déterminer le montant de l’allocation personnalisée d’autonomie sont énumérées à l’article R.232-8 du code de l’action sociale et des familles. Méconnaît les limites du pouvoir réglementaire des départements comme les règles fixant le montant de cette allocation, la délibération du conseil général qui retient, comme charges à prendre en compte, des « indemnités de sujétions particulières » et des « frais spécifiques », lesquels ne sont pas au nombre des dépenses visées par l’article R.232-8 et, en revanche, exclut la rémunération des services rendus par l’accueillant, que cet article cite. Enfin, l’article R.231-4 du même code prévoyant que le placement d’une personne âgée ou handicapée à titre onéreux chez un particulier donne lieu à une prise en charge, au titre de l’aide sociale, en considération d’un plafond constitué notamment par la rémunération et les indemnités de congés payés de l’accueillant, le département ne peut, sans méconnaître les limites de son pouvoir réglementaire et l’article précité, décider de limiter cette prise en charge au coût le plus élevé en structure privée sur le territoire de cette collectivité.
Arrêt 11BX01663 - 4 décembre 2012 - 5ème chambre - Association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne
Le pourvoi en cassation n° 365733 a té rejeté par le CE le 28 novembre 2014
Vu la requête enregistrée sous forme de télécopie le 11 juillet 2011 et régularisée par courrier le 18 juillet 2011 présentée pour l’association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne » dont le siège social est situé 4825 route de Vignarnaud à Montauban (82000), représentée par son président en exercice, par Me Debaisieux ;
L’association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne » demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0603181 en date du 10 mai 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du président du conseil général de Tarn-et-Garonne du 13 juillet 2006, refusant d’abroger la délibération de cette assemblée du 27 juin 2005 portant additif au règlement départemental d’aide sociale ;
2°) d’annuler la décision du 13 juillet 2006 ;
3°) d’enjoindre au président du conseil général, sous astreinte s’il y a lieu, de saisir cette assemblée aux fins d’abrogation de la délibération du 27 juin 2005 ;
4°) de mettre à la charge du département de Tarn-et-Garonne le versement de la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu l’ordonnance du 6 avril 2012 fixant la clôture de l’instruction au 27 avril 2012 à 12 h 00 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 6 novembre 2012 :
- le rapport de M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur ; - les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ; - et les observations de Me Debaisieux, avocat de l’association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne » ;
1. Considérant que, par délibération du 27 juin 2005, le conseil général de Tarn-et-Garonne a modifié le règlement d’aide sociale en ce qui concerne l’accueil en famille des personnes âgées ou handicapées, en décidant, d’une part, que l’allocation personnalisée d’autonomie allouée à un bénéficiaire accueilli en famille couvrira les dépenses liées à la dépendance, à savoir les indemnités de sujétions particulières et les frais spécifiques, d’autre part, que les dépenses couvertes par l’aide sociale seront limitées au coût le plus élevé d’un accueil en structure privée en Tarn-et-Garonne et qu’elles seront constituées de l’ensemble des frais portés sur les divers éléments du contrat pour les personnes handicapées et les mêmes frais pour les personnes âgées à l’exception des compléments pour sujétion déjà couverts par l’allocation personnalisée d’autonomie ; que, par le jugement du 10 mai 2011, contre lequel l’association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne » forme régulièrement appel, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de cette dernière tendant à l’annulation de la décision du président du conseil général du 13 juillet 2006 refusant de saisir l’assemblée délibérante de l’abrogation de la délibération précitée ;
Sur la légalité de la délibération :
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 121-3 du code de l’action sociale et des familles : « Dans les conditions définies par la législation et la réglementation sociales, le conseil général adopte un règlement départemental d’aide sociale définissant les règles selon lesquelles sont accordées les prestations sociales relevant du département » ; qu’aux termes de l’article L. 121-4 de ce code : « Le conseil général peut décider de conditions et de montants plus favorables que ceux prévus par les lois et règlements applicables aux prestations mentionnées à l’article L. 121-1. Le département assure la charge financière de ces décisions… » ; qu’en vertu des articles L. 232-2 et suivants du code mentionné ci-dessus et des articles L. 131-1 et suivants du même code, l’aide personnalisée d’autonomie et l’aide sociale constituent des prestations sociales dont la charge incombe aux départements ;
En ce qui concerne les dispositions relatives à l’allocation personnalisée d’autonomie :
3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 232-5 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002, alors applicable : « Pour l’application de l’article L. 232-3, sont considérées comme résidant à domicile les personnes accueillies dans les conditions fixées par les articles L. 441-1 à L. 443-10… » et qu’aux termes de l’article L. 442-1 de ce code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002, applicable : « Toute personne accueillie au domicile d’un accueillant familial (…) passe avec ledit accueillant un contrat écrit… Ce contrat précise la nature ainsi que les conditions matérielles et financières de l’accueil. Il prévoit, notamment : 1° une rémunération journalière des services rendus ainsi qu’une indemnité de congé calculée conformément aux dispositions de l’article L. 223-11 du code du travail ; 2° Le cas échéant, une indemnité en cas de sujétions particulières ; 3° Une indemnité représentative des frais d’entretien courant de la personne accueillie ; 4° Une indemnité représentative de mise à disposition de la ou des pièces réservées à la personne accueillie… » ; qu’aux termes de l’article R. 232-8 du même code : « L’allocation personnalisée d’autonomie est affectée à la couverture des dépenses de toute nature figurant dans le plan d’aide élaboré par l’équipe médico-sociale mentionnée à l’article L. 232-3. / Ces dépenses s’entendent notamment de la rémunération de l’intervenant à domicile, du règlement des frais d’accueil temporaire, avec ou sans hébergement, dans des établissements ou services autorisés à cet effet, du règlement des services rendus par les accueillants familiaux mentionnés à l’article L. 441-1 ainsi que des dépenses de transports, d’aides techniques, d’adaptation du logement et de toute autre dépense concourant à l’autonomie du bénéficiaire » ;
4. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que, pour l’attribution et la détermination du montant de l’aide personnalisée d’autonomie, la personne accueillie au domicile d’un accueillant familial doit être considérée comme résidant à domicile ; que l’aide personnalisée d’autonomie à laquelle cette personne peut prétendre doit couvrir, par application de l’article R. 232-8 précité du code de l’action sociale et des familles, les services rendus par les accueillants familiaux ; que, par suite, en décidant, par la délibération attaquée, que l’allocation personnalisée d’autonomie ne couvrira que les indemnités de sujétions particulières et les frais spécifiques, sans prendre en compte la rémunération des services rendus par les accueillants familiaux dans ce cadre, le conseil général de Tarn-et-Garonne, qui ne peut utilement se prévaloir de notes d’information du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité et du ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées, dépourvues de caractère réglementaire, a, en violation de l’article L. 121-4 de ce code, instauré un régime moins favorable que celui prévu par l’article R. 232-8 du code de l’action sociale et des familles et méconnu les dispositions de ce dernier article ;
En ce qui concerne les dispositions relatives à l’aide sociale à l’hébergement :
5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 231-4 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne âgée qui ne peut être utilement aidée à domicile peut être placée, si elle y consent, dans des conditions précisées par décret, soit chez des particuliers, soit dans un établissement de santé ou une maison de retraite publics, ou, à défaut dans un établissement privé. / En cas de placement dans un établissement public ou un établissement privé, habilité par convention à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale, le plafond de ressources précisé à l’article L. 231-2 sera celui correspondant au montant de la dépense résultant dudit placement. Le prix de la journée dans cet établissement est fixé selon la réglementation en vigueur dans les établissements de santé » ; qu’aux termes de l’article R. 231-4 de ce code : « Le placement à titre onéreux chez un particulier au titre de l’aide sociale donne lieu à une prise en charge déterminée par la commission d’admission à l’aide sociale, compte tenu : 1° D’un plafond constitué par la rémunération et les indemnités mentionnées aux 1° et 2° de l’article L. 442-1, le cas échéant selon la convention accompagnant l’habilitation à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ; 2° Des ressources de la personne accueillie, y compris celles résultant de l’obligation alimentaire… » ;
6. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que, lorsqu’une personne âgée ou handicapée bénéficie d’un placement à titre onéreux chez un accueillant, la prise en charge à laquelle elle peut prétendre au titre de l’aide sociale, fixée par la commission d’admission à l’aide sociale, doit être déterminée en considération d’un plafond constituée par la rémunération des services rendus par l’accueillant et les indemnités de congé auquel ce dernier a droit, ainsi que, le cas échéant, l’indemnité pour sujétions particulières, telles que prévues par le contrat conclu entre la personne âgée ou handicapée et l’accueillant par application de l’article L. 442-1 du code de l’action sociale et des familles ; que, par suite, le conseil général de Tarn-et-Garonne ne pouvait, sans méconnaître l’article R. 231-4 de ce code, décider que la prise en charge par l’aide sociale des personnes âgées ou handicapées bénéficiant d’un accueil familial serait plafonnée au coût le plus élevé d’un accueil en structure privée dans le département ;
7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, l’association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne », dont la demande devant les premiers juges était recevable dès lors que la lettre du président du conseil général de Tarn-et-Garonne du 13 juillet 2006 révélait le refus de cette autorité de saisir l’assemblée délibérante de la demande d’abrogation de la délibération du 27 juin 2005, est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d’injonction :
8. Considérant que le présent arrêt implique que, nécessairement, le président du conseil général de Tarn-et-Garonne saisisse cette assemblée délibérante aux fins de lui soumettre l’abrogation de la délibération du 27 juin 2005 modifiant le règlement départemental d’aide sociale ; que, dès lors, il y a lieu d’enjoindre au président du conseil général de soumettre à l’assemblée délibérante l’abrogation de la délibération précitée ;
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que, dans les circonstances de l’affaire, il y a lieu de mettre à la charge du département de Tarn-et-Garonne le versement de la somme de 1 500 euros à l’association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne » au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 10 mai 2011 et la décision du président du conseil général de Tarn-et-Garonne du 13 juillet 2006 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au président du conseil général de Tarn-et-Garonne de saisir cette assemblée délibérante de l’abrogation de la délibération du 27 juin 2005 modifiant le règlement départemental d’aide sociale.
Article 3 : Le département de Tarn-et-Garonne versera la somme de 1 500 euros à l’association « Accueil familial en Tarn-et-Garonne » en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.