Vu, I, la requête, enregistrée le 28 juillet 2011 sous le n° 11BX01899, présentée pour M. Mourad F== demeurant == ;

M. F== demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1100504-1100502 en date du 19 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 27 décembre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français dans le délai d’un mois et fixé le pays de destination ;

2°) d’annuler l’arrêté contesté ;

3°) d’enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « visiteur » ou « vie privée et familiale » dans le délai de 15 jours suivant la notification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l’Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu, II, la requête, enregistrée le 28 juillet 2011 sous le n° 11BX01900, présentée pour Mme Fatiha B== épouse F== demeurant == ;

Mme F== demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1100504-1100502 en date du 19 juillet 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 27 décembre 2010 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligée à quitter le territoire français dans le délai d’un mois et fixé le pays de destination ;

2°) d’annuler l’arrêté contesté ;

3°) d’enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « visiteur » ou « vie privée et familiale » dans le délai de 15 jours suivant la notification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l’Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l’emploi et au séjour en France de ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 21 février 2012 :

- le rapport de Mme F. Rey-Gabriac, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme F==, ressortissants algériens nés respectivement en 1949 et 1956, ont fait l’objet de deux arrêtés en date du 27 décembre 2010 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai d’un mois et a fixé l’Algérie comme pays de destination ; que, par un jugement en date du 19 juillet 2011, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes dirigées contre ces arrêtés ; qu’ils font appel, par deux requêtes qu’il y a lieu de joindre, de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d’annulation des arrêtés du 27 décembre 2010 :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par une lettre du 28 juillet 2009, le préfet de la Haute-Garonne a indiqué à M. et Mme F== qu’il envisageait, à titre dérogatoire et exceptionnel, de régulariser leur situation administrative en leur délivrant des certificats de résidence portant la mention « visiteur » ; que, par une lettre en date du 23 novembre 2009 adressée aux époux F==, le préfet a précisé, d’une part, que cette régularisation ne s’appliquait pas aux enfants majeurs du couple et notamment au fils ainé qui se maintenait illégalement sur le territoire français malgré la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre le 18 septembre 2009, d’autre part, qu’il ne procèderait à la délivrance des titres de séjours que dans la mesure où les époux F== apporteraient la preuve que leur fils a effectivement quitté le territoire français et ce, dans les meilleurs délais ; que, le 1er septembre 2010, M. et Mme F== ont sollicité la délivrance de titres de séjour ; que, par les arrêtés attaqués du 27 décembre 2010, le préfet a décidé de rejeter leurs demandes en relevant à titre principal qu’ils avaient sollicité leur régularisation « sans contrepartie » et qu’ils n’avaient pas respecté les « conditions » énoncées dans la lettre du 23 novembre 2009 ;

Considérant que les dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile précisant les cas dans lesquels les étrangers présents sur le territoire national ont droit à la délivrance d’un titre de séjour, ne font pas obligation au préfet de refuser un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas l’ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit sauf lorsque les textes l’interdisent expressément ; que, dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire qui lui est ainsi confié, il appartient au préfet d’apprécier, compte tenu de l’ensemble des éléments de la situation personnelle de l’intéressé et des conditions non remplies, l’opportunité d’une mesure de régularisation ; que, dans le cas où il refuse une telle régularisation, il revient au juge de l’excès de pouvoir de contrôler, lorsque la légalité de ce refus est contestée devant lui, si la décision ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et n’est pas entachée d’erreur de droit, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir ;

Considérant qu’en refusant de régulariser la situation de M. et Mme F== au motif qu’ils ne présentaient pas de contrepartie à leurs demandes de titres de séjour puisqu’ils n’avaient pas respecté les conditions fixées dans la lettre du 23 novembre 2009, alors que le respect de ces conditions ne dépendait pas de la volonté des intéressés et que la situation de leurs enfants majeurs au regard du droit au séjour était sans lien avec leur situation personnelle, le préfet de la Haute-Garonne a commis une erreur de droit ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait pris les mêmes décisions s’il n’avait retenu que les autres motifs contenus dans ses arrêtés ; que les refus de séjour opposés par ces arrêtés ne peuvent, par suite, qu’être annulés ; que cette annulation prive de base légale l’obligation de quitter le territoire français faite aux intéressés, ainsi que les décisions fixant le pays de renvoi qui doivent donc être annulées ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. et Mme F== sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions à fin d’injonction et d’astreinte :

Considérant que le motif d’annulation retenu par le présent arrêt n’implique pas qu’un titre de séjour soit nécessairement délivré à chacun des requérants, mais seulement que le préfet réexamine leur situation ; qu’il y a lieu d’enjoindre au préfet de procéder à ce réexamen dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans assortir cette injonction d’une astreinte ;

Sur l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner l’Etat à verser à Me Laspalles, avocat de M. et Mme F==, la somme de 1 500 euros en application du 2ème alinéa de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Laspalles renonce à percevoir la part contributive de l’Etat ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 19 juillet 2011 est annulé, de même que les arrêtés du préfet de la Haute-Garonne en date du 27 décembre 2010.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer la situation de M. et Mme F== dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L’Etat versera à Me Laspalles la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Laspalles renonce à percevoir la part contributive de l’Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.