Vu la requête enregistrée au greffe de la cour sous le n° 11BX02996 le 14 novembre 2011 sous forme de télécopie et le 2 décembre suivant en original, présentée pour M. Florent A==, demeurant chez Mlle Fatou B== A== ;

M. A== demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1104060 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux, en date du 10 octobre 2011, en tant qu’il a rejeté sa demande dirigée contre l’arrêté du préfet de la Gironde du 7 octobre 2011 l’obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi, et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans ;

2°) d’annuler l’arrêté contesté ;

3°) de lui accorder l’aide juridictionnelle provisoire et de condamner l’Etat à verser à son avocat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 6 mars 2012 :

- le rapport de M. A. de Malafosse, président de chambre ;

- et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

Considérant que, par un arrêté du 7 octobre 2011, le préfet de la Gironde a fait obligation à M. A==, de nationalité ivoirienne, de quitter le territoire français sans lui impartir un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans ; que par un arrêté du même jour, il a décidé de placer l'intéressé en rétention administrative pour une durée de cinq jours ; que M. A== fait appel du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux du 10 octobre 2011 en tant qu’il a rejeté sa demande dirigée contre le premier de ces arrêtés ;

Sur l’aide juridictionnelle provisoire :

Considérant que la demande d’aide juridictionnelle présentée par M. A== ayant été déclarée caduque par le bureau d’aide juridictionnelle, il ne peut être fait droit à sa demande tendant au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, (…), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A== est entré en France irrégulièrement, en juin 2004 selon ses déclarations ; qu’il n’a jamais sollicité de titre de séjour auprès des autorités compétentes ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant au préfet de la Gironde de l'obliger à quitter le territoire français ;

Considérant que l'arrêté du 7 octobre 2011, qui vise les textes sur lesquels il se fonde et les éléments de fait propres à la situation de M. A==, est suffisamment motivé ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. A== était âgé de 30 ans en 2004, année au cours de laquelle il serait entré en France ; que ses deux enfants résident dans son pays d’origine ; qu’il n’établit pas avoir des attaches, notamment familiales, en France ; qu’il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire national sans jamais déposer de demande d’asile ou de titre de séjour ; que, dès lors, la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut être regardée comme portant, au regard des buts en vue desquels elle a été prise, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et comme méconnaissant de ce fait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;




En ce qui concerne le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

Considérant qu’aux termes du 4 de l’article 7, relatif au départ volontaire, de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier : « S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les États membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours » ; que la même directive prévoit, au 7) de son article 3, qu'il faut entendre par risque de fuite « le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite » ; qu’aux termes du paragraphe II de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction issue de la loi du 16 juin 2011 : « Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (…) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (…) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (…) » ; que, contrairement à ce que soutient M. A==, ces dispositions du paragraphe II de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sur lesquelles s’est fondé le préfet, qui fixent des critères objectifs permettant de penser que l’étranger faisant l’objet de la mesure d’éloignement est susceptible de prendre la fuite, tout en réservant l’hypothèse de circonstances particulières, ne sont pas incompatibles avec celles précitées de la directive n° 2008/115/CE ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. A== n’a jamais été en situation régulière en France ; qu’il est dépourvu de papiers d’identité ; qu’il n’a pas de domicile stable ni de ressources connues ; que, dans ces conditions, le préfet n’a pas méconnu les dispositions précitées du f) de l’article L. 511-1 II du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en décidant que l’intéressé était obligé de quitter sans délai le territoire français ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

Considérant qu’aux termes du III de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (…) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (…) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (…) » ;

Considérant que M. A== ne démontre pas l’intensité des liens qu’il aurait établis en France alors que ses deux enfants résident dans son pays d’origine ; qu’à supposer qu’il soit entré en France en 2004, il n’y a jamais été en situation régulière ; que, dès lors, en lui interdisant de revenir sur le territoire français pendant une période de trois ans, le préfet n’a pas porté à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peut, dès lors, qu’être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que, si M. A== fait valoir que la décision fixant le pays à destination duquel il est renvoyé est contraire à l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, il n’apporte aucun élément probant au soutien de ses allégations selon lesquelles il serait exposé à des risques pour sa vie ou sa liberté en cas de retour dans son pays d’origine ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que l’Etat n’étant pas la partie perdante, les conclusions présentées au titre des frais exposés ne peuvent qu’être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A== est rejetée.