Vu le recours, enregistré au greffe de la cour le 2 juillet 2010 sous le n° 10BX01594, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L’ETAT qui demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0800987-0900307 en date du 4 mars 2010 du tribunal administratif de Poitiers en tant, d’une part, qu’il décharge la commune de Vaux-sur-Mer, en droits et pénalités, des cotisations d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004, 2005, 2006 et 2007, ainsi que de la contribution sur l’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005, d’autre part, qu’il met à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rétablir les impositions, en droits et pénalités, dont le jugement susvisé a ordonné la décharge et de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif par la commune de Vaux-sur-Mer ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 24 janvier 2012 :

- le rapport de Mme D. Boulard, président assesseur ;

- les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ;

- et les observations de Me Léon-Agraso avocate de la commune de Vaux-sur-Mer ;

Considérant que la commune de Vaux-sur-Mer, après avoir exploité un terrain de camping municipal, a conclu le 26 mars 2004 un « bail emphytéotique administratif » avec la SARL Camping Nauzan Plage aux termes duquel elle a donné en location à cette société, à compter du 1er janvier 2004, pour une durée de 20 ans, « les terrains, ouvrages construits, installations et équipements » dépendant de ce camping, en contrepartie d’une redevance annuelle fixe de 100 000 euros, réduite à 70 000 euros la première année, et d’un droit d’entrée de 130 000 euros ; que l’administration fiscale a estimé qu’à raison des sommes résultant de cette convention, la commune était assujettie à l’impôt sur les sociétés et relevait de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu’à ce titre, des rappels d’impôt sur les sociétés, de contribution sur cet impôt et de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été réclamés en 2007 pour les années 2004 à 2005 et la commune a d’elle-même acquitté l’impôt sur les sociétés pour les années 2006 et 2007 ; que, saisi de demandes tendant à la décharge de ces rappels ou à la restitution des sommes acquittées spontanément par la commune de Vaux-sur-Mer, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande relative à la taxe sur la valeur ajoutée, mais a fait droit à celle présentée en matière d’impôt sur les sociétés ; qu’il a ainsi, par l’article 1er de son jugement du 4 mars 2010, déchargé la commune « en droits et pénalités, des cotisations d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004, 2005, 2006 et 2007, ainsi que de la contribution sur l’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 » ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L’ETAT fait appel de ce jugement en tant que, par l’article 1er, il prononce cette décharge et que, par l’article 2, il met à la charge de l’Etat la somme de 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par la voie de l’appel incident, la commune de Vaux-sur-Mer fait appel de ce jugement, en tant que, par l’article 3, il rejette le surplus de sa demande relative à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur l’appel incident de la commune de Vaux-sur-Mer :

Considérant que les conclusions de la commune de Vaux-sur-Mer en matière de taxe sur la valeur ajoutée, présentées après l’expiration du délai d’appel, forment un appel incident qui concerne un impôt différent de l’impôt sur les sociétés visé par le recours du ministre ; que cet appel incident soulève donc un litige distinct de l’appel principal ; qu’il est par conséquent irrecevable ;

Sur le recours du ministre :

Considérant qu’aux termes de l’article 206 du code général des impôts : « 1. (…) sont passibles de l’impôt sur les sociétés (…) les établissements publics, les organismes de l’Etat jouissant de l’autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. » ; qu’aux termes de l’article 207 du même code : « 1. Sont exonérés de l’impôt sur les sociétés : (…) 6° (…) les communes, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, syndicats de communes et syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités territoriales ou les groupements de ces collectivités ainsi que leurs régies de services publics. » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la commune de Vaux-sur-Mer n’exploitait pas elle-même, au cours des années en litige, le camping installé sur le terrain qu’elle a donné à bail en 2004 à la SARL Camping Nauzan Plage avec les équipements, constructions et installations attachés à ce terrain, afin que cette dernière les exploite moyennant une redevance fixe indépendante des résultats de cette exploitation ; que les clauses du bail invoquées par l’administration, notamment celles liées à l’affectation des biens loués et au contrôle de cette affectation par la commune, ne sont pas de nature à caractériser un mode d’exploitation du camping de nature à faire regarder cette commune, dont l’activité en litige n’était pas érigée en régie dotée de la personnalité morale ou de l’autonomie financière et n’avait pas nécessairement à l’être, comme un « organisme » né de cette activité et formé par elle relevant des dispositions précitées du I de l’article 206 du code général des impôts ; que, par suite et quand bien même les biens loués relèveraient du domaine privé de la commune, cet article ne la rend pas passible de l’impôt sur les sociétés ; qu’en tout état de cause, la commune entre, en tant que telle, et sans qu’y fasse obstacle le fait qu’elle fournisse à l’exploitant un terrain équipé, ce qui ne suffit pas à caractériser l’exploitation par elle-même d’un service industriel et commercial, dans le champ de l’exonération à l’impôt sur les sociétés défini par le 6° de l’article 207 du code précité ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par la commune de Vaux-sur-Mer et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du ministre et l’appel incident de la commune de Vaux-sur-Mer sont rejetés.

Article 2 : L’Etat versera à la commune de Vaux-sur-Mer une somme de 1 300 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.