Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. S== P==a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler les opérations électorales pour la désignation des membres des chambres de commerce et d’industrie de la région Nouvelle Aquitaine (CCIR) et territoriale de Lot-et-Garonne (CCIT) qui se sont déroulées du 20 octobre au 2 novembre 2016.



Par un jugement n° 1604826 du 23 décembre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa protestation.

Procédure devant la cour :

Par une protestation et un mémoire enregistrés respectivement les 20 janvier et 28 avril 2017, M. P==, représenté par Me Lamarque, demande à la cour : 1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 23 décembre 2016 ;



2°) d’annuler les opérations électorales pour la désignation des membres des chambres de commerce et d’industrie de la région Nouvelle Aquitaine (CCIR) et territoriale de Lot-et-Garonne (CCIT) qui se sont déroulées du 20 octobre au 2 novembre 2016 ; 3°) d’annuler la décision du 8 novembre 2016 proclamant les résultats de l’élection des membres des chambres de commerce et d’industrie de la région Nouvelle Aquitaine (CCIR) et territoriale de Lot-et-Garonne (CCIT) qui se sont déroulées en 2016 ;

4°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d’industrie territoriale de Lot-et-Garonne (CCIT) la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.




Par des mémoires en défense enregistrés respectivement les 25 avril et 24 mai 2017, M. B== et autres, représentés par la SCP Lyon Caen et Thiriez, concluent au rejet de la protestation et à ce que soit mise à la charge de M. Pujol une somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par des mémoires en défense, enregistrés respectivement les 27 mars, 9 mai et 10 mai 2017, la chambre de commerce et d’industrie territoriale de Lot-et-Garonne, représentée par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. Pujol une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. A l’issue des opérations électorales qui se sont déroulées du 20 octobre au 2 novembre 2016, pour la désignation des membres des chambres de commerce et d’industrie de la région Nouvelle Aquitaine (CCIR) et territoriale de Lot-et-Garonne (CCIT), les candidats du groupement « Agir pour l’entreprise » ont obtenu 3 sièges à la CCIR et 35 à la CCIT contre un siège à la CCIR Nouvelle Aquitaine et 7 à la CCIT de Lot-et-Garonne pour les candidats du groupement « CCI 47 – votre nouvelle équipe » que conduisait M. S== P==. M. P== relève appel du jugement du 23 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa protestation tendant à l’annulation de ces opérations électorales.

Sur la régularité du jugement attaqué :



2. M. P== soutient que les premiers juges n’ont pas répondu au grief tiré de ce que des suffrages n’auraient pas été pris en compte. Or le requérant n’a pas soulevé en première instance ce grief qui est différent de celui tiré de la difficulté d’obtention de la liste d’émargement. Dès lors, les premiers juges, qui étaient seulement tenus de répondre aux griefs soulevés devant eux, n’ont entaché à cet égard leur jugement ni d’omission à statuer ni de défaut de motivation.

Sur les griefs relatifs à la campagne électorale : 3. Aux termes de l’article R. 713-2 du code de commerce : « Le préfet du département du siège de la chambre met à la disposition du public, du 16 juillet au 25 août inclus, (…) au siège de la chambre de commerce et d'industrie territoriale, un exemplaire des listes électorales sur support papier, sur support physique électronique ou par accès à un fichier numérique. (…) / Tout électeur est autorisé à prendre communication des listes électorales et à en prendre copie à ses frais, sur support papier ou, le cas échéant, sur support physique électronique, auprès de la chambre de commerce et d'industrie territoriale ». M. P== soutient que les difficultés qu’il a rencontrées dans la communication d’une copie de la liste électorale ne lui ont pas permis de conduire sa campagne de façon satisfaisante. Il résulte de l’instruction que, si les candidats du groupement « CCI 47 - votre nouvelle équipe » ont demandé aux services de la chambre consulaire communication des listes électorales par lettre datée du 28 juillet 2016, reçue le 2 août 2016 par la CCI, M. P== a obtenu communication des listes électorales le 2 août 2016. Le grief tiré de ce qu’il n’a pu avoir un accès normal à la liste électorale ne peut dès lors qu’être écarté.

4. Aux termes de l’article R. 713-10 du code de commerce : « (…) / La campagne électorale débute le cinquième jour ouvré suivant la date limite de dépôt des candidatures et prend fin la veille du dernier jour du scrutin, à zéro heure ». Aux termes de l’article 1er de l’arrêté du 10 mai 2016 portant convocation des électeurs et relatif au dépôt des candidatures pour l'élection des membres des chambres de commerce et d'industrie : « Les électeurs mentionnés aux articles L. 713-1 à L. 713 3 du code de commerce sont appelés à voter à compter du jeudi 20 octobre 2016. / La date de clôture du scrutin est fixée au mercredi 2 novembre 2016 à minuit. ». Aux termes de l’article L. 49 du code électoral, applicable aux élections litigieuses en vertu de l’article L. 713-17 du code de commerce : « A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents. / A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est également interdit de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale ».

5. M. P== soutient qu’en violation de l’article L. 49 du code électoral, le groupement « Agir pour l’entreprise » a adressé le 21 octobre 2016 un courriel de propagande électorale aux électeurs, alors que le scrutin débutait le 20 octobre 2016. Toutefois, la campagne électorale des élections consulaires se déroulant sur deux semaines, la veille du scrutin doit nécessairement s’entendre, pour ces élections, comme la veille du dernier jour du scrutin, tel qu’expressément prévu par l’article R. 713-10 du code de commerce. Ainsi, le groupement « Agir pour l’entreprise » pouvait, sans aucune méconnaissance des dispositions de l’article L. 49 du code électoral, adresser aux électeurs un courriel de propagande électorale le 21 octobre 2016, soit plus de dix jours avant la veille du dernier jour du scrutin à zéro heure. Par conséquent, la diffusion de ce courriel ne constitue pas une irrégularité.



6. M. P== soutient que le personnel de la chambre de commerce et d’industrie territoriale de Lot-et-Garonne, pendant la période de vote, a incité, par voie d’appels téléphoniques, les électeurs à voter, ce qui a nécessairement eu un impact sur le déroulement du scrutin. Toutefois, la réalisation par la CCIT de Lot-et-Garonne d'une campagne de communication en faveur de l'incitation à voter constitue une action à caractère institutionnel dénuée de tout caractère de propagande politique de sorte que l’on ne peut considérer que cette campagne aurait été de nature à influencer le corps électoral sur le sens du vote. Au surplus, le grief de M. P== n’étant pas suffisamment étayé sans production notamment d’un témoignage ou d’élément permettant d’estimer que le message aurait pu avoir le caractère de propagande électorale, il n’est donc pas établi que cette pratique ait été de nature à altérer la sincérité du scrutin. Ainsi ce grief ne peut qu’être écarté.

7. M. P== reproche au président de la CCIT de Lot-et-Garonne d’avoir organisé, le 19 octobre 2016, dans le prolongement de l’assemblée générale statutaire et budgétaire, une rétrospective économique à laquelle étaient conviés tous les élus de la chambre de commerce et d’industrie. Il n’est toutefois pas établi par M. P== que l’organisation de cette manifestation aurait constitué une campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion de l’équipe sortante de la CCIT de Lot-et-Garonne, puisque simplement réservée aux membres élus de l’assemblée générale, qu’elle aurait été l’occasion de discours de campagne ou de promotion du bilan du président sortant de la CCIT, ou qu’elle aurait constitué une manœuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin. Ainsi, ce grief doit être écarté.

8. La production par M. P== d’un seul témoignage émanant de Mme C== qui indique que son entreprise n’était pas inscrite sur les listes électorales, est insuffisante pour établir que plusieurs électeurs n’auraient pu obtenir leur matériel de vote. Ce grief ne peut donc qu’être écarté.

Sur le grief tiré de la composition irrégulière de la commission d’organisation des élections : 9. Aux termes de l’article R. 713-13 du code de commerce : « La commission prévue à l'article L. 713-17, dénommée "commission d'organisation des élections", compétente pour organiser, dans la circonscription de la chambre de commerce et d'industrie territoriale, les élections des membres de la chambre de commerce et d'industrie de région, de la chambre de commerce et d'industrie territoriale (…) est présidée par le préfet du département où est situé le siège de la chambre de commerce et d'industrie territoriale ou son représentant et comprend : / 1° Le président de la juridiction de première instance compétente en matière commerciale dans le ressort de laquelle est situé le siège de la chambre de commerce et d'industrie territoriale ou son représentant ; / 2° Le président de la chambre de commerce et d'industrie territoriale ou les présidents des chambres de commerce et d'industrie territoriales lorsque l'élection est faite dans le cadre d'une chambre de commerce et d'industrie territoriale issue d'une fusion. Chaque président peut se faire représenter par un membre qu'il désigne ; / 3° Un membre de la chambre de commerce et d'industrie de région désigné par le président de celle-ci. ». Outre qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’interdit que le président de la CCIT désigne, pour le représenter au sein de la commission d’organisation des élections, un membre de la CCIT candidat sur une liste, si la désignation d’un membre de la commission administrative prévue par l’article R. 713-13 du code de commerce est susceptible de faire naître un doute quant à l’impartialité de cette commission, il appartient au juge administratif, eu égard à son office, d’apprécier uniquement si une telle circonstance, prise isolément ou avec d’autres, a constitué une manœuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin. Or, il n’est pas établi que la seule présence dans cette commission administrative, présidée par le préfet, qui n’est d’ailleurs pas exclusivement composée de membres de la chambre de commerce, et qui au demeurant comprenait un représentant du groupement de candidats « CCI 47 – votre nouvelle équipe », d’un membre de la CCIT de Lot-et-Garonne candidat sur une liste concurrente à celle de M. P== ait été de nature à perturber le fonctionnement régulier de cette commission. Ainsi, le grief tiré de l’influence qu’aurait pu avoir la composition de la commission sur le déroulement du scrutin ne peut qu’être écarté.

Sur le grief tiré de la consultation tardive des listes d’émargements :



10. Aux termes de l’article L. 68 du code électoral : « (…) les listes d'émargement déposées à la préfecture ou à la sous-préfecture sont communiquées à tout électeur requérant pendant un délai de dix jours à compter de l'élection ». M. P== se plaint de n’avoir pu consulter dans des délais raisonnables les listes d’émargement. Il résulte de l’instruction que le protestataire a pu consulter les listes d’émargement le lundi 14 novembre 2016 à 14h00, soit au jour et à l’heure auxquels il avait souhaité effectuer cette consultation, par un courriel adressé à la préfecture le 10 novembre 2016 à 19h07, comme l’ont relevé à bon droit les juges de première instance. Les allégations de M. P== relatives aux difficultés rencontrées pour obtenir la consultation des listes d'émargement ne sont assorties d'aucun commencement de justification.

11. Aux termes de l’article R. 713-28 du code de commerce : « Les recours en annulation des élections aux chambres de commerce et d'industrie territoriales et de région peuvent être formés par tout électeur et par le préfet dans les conditions prévues aux articles L. 248, et R. 119 à R. 122 du code électoral. Toutefois, le délai de cinq jours prévu au premier alinéa de l'article R. 119 de ce code court à compter de la proclamation des résultats ». Les griefs qui ne sont pas d’ordre public, sont irrecevables en appel s’ils n’ont pas été soulevés en première instance. Si M. P== fait valoir qu’après consultation de la liste d’émargement, il a relevé que le vote de cinq candidats de la liste « CCI 47 – votre nouvelle équipe » n’aurait pas été pris en compte, ce grief, distinct de celui analysé au point 11 ci-dessus, n’est pas recevable car invoqué pour la première fois en appel.

Sur les griefs tirés du dépouillement du scrutin :

12. M. P== soutient que des enveloppes ont été écartées à tort du dépouillement au motif qu’elles ne comportaient pas le cachet de la poste puisque l’ensemble de ces enveloppes qui étaient préaffanchies, ne nécessitaient donc pas de cachet de la poste. Or, l’article R. 713-16 du code de commerce rappelle que « pour le vote par correspondance, le cachet de la poste fait foi ». Ainsi, seules les enveloppes arrivées avant le terme du scrutin, soit le 2 novembre 2016 à minuit, peuvent être valablement comptabilisées lors du dépouillement et seul le cachet de la poste permet de déterminer avec précision la validité du vote. Ainsi c’est à bon droit, que le tribunal administratif a constaté que les enveloppes ne comportant pas de cachet de la poste ne pouvaient figurer au nombre des suffrages valablement exprimés.

13. S’il résulte de l’instruction que certaines difficultés ont été rencontrées lors des opérations de dépouillement du vote par voie électronique, mis en place à l’occasion de l’élection litigieuse, M. P== n’établit toutefois pas, par les éléments qu’il apporte, que les dysfonctionnements rencontrés ont été de nature à influer sur les résultats du scrutin, compte tenu de la circonstance que le travail de saisie des résultats du vote n’a été interrompu que pendant quelques minutes, la proclamation publique des résultats par les membres de la commission d’organisation des élections, ayant eu lieu le 7 novembre 2016 à 19h00, après signature du procès-verbal des opérations électorales sans que des observations aient été portées au procès-verbal notamment de la part du protestataire ou d’un candidat du groupement « CCI 47 – votre nouvelle équipe ». Ainsi, le blocage momentané de l’application de la plateforme de vote électronique est resté sans incidence sur les résultats du scrutin.

14. Si M. P== se plaint de ce qu’aucune proclamation des résultats n’aurait eu lieu car une partie des scrutateurs n’aurait pas signé le procès-verbal, il résulte de l’instruction et notamment du procès verbal du recensement général des opérations électorales du 7 novembre 2016, qui n’a d’ailleurs fait l’objet d’aucune contestation, notamment de M. P== ou des candidats de son groupement qui n’étaient pas présents lors de cette proclamation, qu’il est signé en dernière page de l’ensemble des membres de la commission d’organisation des élections nommément désignés en application des dispositions de l’article R. 713-27-1 du code du commerce, sans que la signature des scrutateurs soit une condition de régularité dudit procès-verbal. Ainsi, ce grief tiré de l’absence de signature du procès-verbal de proclamation des résultats par des scrutateurs, ne peut qu’être écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la protestation, que le requérant n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa protestation.




Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Ces dispositions font obstacle à ce que la chambre de commerce et d’industrie territoriale de Lot-et-Garonne, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à M. P== la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. P== la somme demandée par la chambre de commerce et d’industrie territoriale de Lot-et-Garonne et par M. B== et les autres parties sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.




DECIDE :




Article 1er : La requête de M. P== est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la chambre de commerce et d’industrie territoriale de Lot-et-Garonne ainsi que celles de M. B== et des autres parties présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.