Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M.M=== ont demandé au tribunal administratif de Mayotte d’annuler les arrêtés du préfet de Mayotte des 22 août et 2 septembre 2016 fixant les modalités de recevabilité des candidatures en vue de l’élection des membres de la chambre de métiers et de l’artisanat de Mayotte ainsi que l’arrêté du préfet de Mayotte du 10 octobre 2016 fixant l’organisation de l’élection des membres de la chambre de métiers et de l’artisanat de Mayotte, d’annuler l’élection des membres de la chambre de métiers et de l’artisanat de Mayotte clôturée le 14 octobre 2016 et de mettre à la charge de l’Etat les sommes de 2 500 euros à verser à M. B===, M. M=== et M. A===.

Par un jugement n° 11600842, 1600844 et 1600849 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Mayotte a annulé les élections des membres de la chambre de métiers et de l’artisanat de Mayotte du 14 octobre 2016 et a rejeté le surplus des conclusions des protestations.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2017, M. S===, représenté par Me Souhaïli, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Mayotte du 1er décembre 2016 en tant qu’il prononce l’annulation des élections clôturées le 14 octobre 2016 ;

2°) de rejeter les conclusions tendant à l’annulation des élections clôturées le 14 octobre 2016 ;

3°) de mettre les entiers dépens à la charge de MM. B===, M=== et A===.

Par ordonnance du 28 février 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 28 avril 2017.

Un mémoire présenté par le ministre de l’économie et des finances a été enregistré le 15 mai 2017.

Un mémoire présenté pour M. S=== a été enregistré le 24 mai 2017.


Considérant ce qui suit :

1. Le scrutin en vue du renouvellement des membres de la chambre de métiers et de l’artisanat de région de Mayotte a été clôturé le 14 octobre 2016. A l’issue de ces élections qui ont eu lieu, conformément à l’article 4 bis du décret du 27 mai 1999 relatif à la composition des établissements du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat et de leurs délégations et à l'élection de leurs membres, au scrutin de liste régional à un tour, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation, par l'ensemble des électeurs de la région, ont été proclamés élus aux vingt-cinq sièges à pourvoir les candidats de la liste « Walezi Capeb FMBTP », seule liste à avoir été enregistrée par le préfet de Mayotte, qui a remporté la totalité des 447 suffrages exprimés. Saisi de trois protestations, le tribunal administratif de Mayotte a annulé ces élections. M. S===, agissant en qualité de tête de la liste « Walesi Capeb FMBTP », relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l’article 4 bis du décret du 27 mai 1999 relatif à la composition des établissements du réseau des chambres de métiers et de l'artisanat et de leurs délégations et à l'élection de leurs membres : « (…) II. - Les membres des chambres de métiers et de l'artisanat de région sont élus en même temps, au scrutin de liste régional à un tour, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation, par l'ensemble des électeurs de la région. / Pour être complète, chaque section départementale de liste régionale doit comprendre un nombre de candidats au moins égal à trente-cinq. / Chaque liste comporte au moins quatre candidats pour chacune des catégories qui regroupent les activités figurant en annexe du décret du 2 avril 1998 susvisé parmi les dix-huit premiers candidats de chacune des listes. / Au moins un candidat inscrit dans la section métiers d'art du répertoire des métiers figure parmi les sept premiers candidats de chacune des listes (…) ». L’article 18 de ce décret dispose que : « (…) II. - La déclaration de candidature résulte du dépôt à la préfecture d'une liste répondant aux conditions fixées par le présent décret. / La liste déposée comporte expressément : (…) 3° L'attestation délivrée par la chambre de métiers et de l'artisanat départementale ou la chambre de métiers et de l'artisanat interdépartementale ou la chambre de métiers et de l'artisanat de région des personnes inscrites dans la section des métiers d'art du répertoire des métiers (…) ».

3. Il résulte de l’instruction que la liste « Walezi Capeb FMBTP » comportait en septième position M. V===, dont le nom figure sur la liste, à jour au mois d’août 2016, établie par la chambre de métiers et de l’artisanat, des artisans inscrits dans la section des métiers d’art du répertoire des métiers de Mayotte. Il résulte également de l’instruction, et notamment des pièces produites par le préfet de Mayotte devant le tribunal administratif, que le dossier de candidature de M. V=== comportait une attestation établie le 9 septembre 2016 par la chambre de métiers et de l’artisanat de Mayotte certifiant qu’il était inscrit au répertoire des métiers dans la section des métiers d’art. Ainsi, la liste « Walezi Capeb FMBTP » remplissait la condition prévue à l’article 4 bis précité du décret du 27 mai 1999 relative à la présence, parmi les sept premiers candidats de la liste, d’un candidat inscrit dans la section des métiers d’art du répertoire des métiers. Le juge administratif n’est, en application de l’article 14 du décret du 27 mai 1999, pas compétent pour statuer sur la régularité des inscriptions sur la liste électorale. Il ne résulte d’aucun élément de l’instruction que l’absence de mention, sur la liste électorale, de la qualité d’artisan d’art de M. V=== ait constitué une manœuvre. Dans ces conditions, c’est à tort que, pour annuler les élections en litige, les premiers juges se sont fondés sur l’existence d’une manœuvre de nature à avoir altéré les résultats du scrutin, ayant consisté dans l’enregistrement d’une candidature malgré la contradiction entre les attestations établies par la chambre de métiers et de l’artisanat concernant ce candidat et la liste électorale non actualisée.

4. Il appartient toutefois à la cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par les protestataires devant le tribunal administratif de Mayotte.

5. Devant le tribunal administratif, M. M=== a soulevé l’exception d’illégalité de l’arrêté du préfet de Mayotte du 22 août 2016 fixant les modalités de recevabilité des candidatures en vue du scrutin et de l’arrêté modificatif du 2 septembre 2016 en invoquant, d’une part, leur caractère tardif voire rétroactif et, d’autre part, l’inapplicabilité à Mayotte de la règle posée à l’article 3 de l’arrêté du 22 août 2016 imposant au moins un candidat inscrit dans la section des métiers d'art du répertoire des métiers parmi les sept premiers candidats de chaque liste, compte tenu du très faible nombre d’artisans inscrit dans cette section.

6. L’arrêté du 22 août 2016 se borne à rappeler les règles de recevabilité des candidatures posées par le décret du 27 mai 1999 dans sa version issue du décret n° 2016-628 du 18 mai 2016 s’agissant, notamment, du nombre de candidats minimum que doit comporter chaque liste et de l’exigence d’un candidat inscrit dans la section des métiers d’art. Si l’arrêté modificatif rectifiant le nombre minimum de candidats que doit comporter chaque liste, initialement mentionné comme étant de vingt-cinq au lieu de trente-cinq, n’a été pris que le 2 septembre 2016 alors que le dépôt des candidatures était ouvert depuis la veille, il ne résulte d’aucun élément de l’instruction que cette circonstance, qui n’entache pas l’arrêté préfectoral d’illégalité, traduise une manœuvre destinée à entraver le dépôt de candidatures. Le très faible nombre d’artisans, alors au nombre de deux, inscrits au répertoire des métiers de Mayotte dans la section des métiers d’art, n’entache d’illégalité ni les arrêtés préfectoraux mentionnés ci-dessus ni le décret du 27 mai 1999.

7. La liste « Tous ensemble », conduite par M. M===, déposée le 13 septembre 2016 à la préfecture de Mayotte, a fait l’objet d’un refus d’enregistrement au motif qu’elle ne comportait que vingt-cinq candidats mais également aux motifs que les candidats n’avaient pas fourni l’attestation de la chambre de métiers et de l’artisanat certifiant qu’ils remplissaient les conditions d’éligibilité, exigée par l’article 6 du décret du 27 mai 1999, que plusieurs des candidats de la liste n’étaient d’ailleurs pas inscrits au répertoire des métiers de Mayotte, qu’une déclaration individuelle de candidature n’était pas signée et qu’aucun candidat de la liste n’était inscrit au répertoire des métiers dans la section des métiers d’art, M. H===, bijoutier et quatrième candidat de la liste, n’étant pas inscrit dans cette section, contrairement à ce qu’il a indiqué dans sa déclaration individuelle de candidature. Ainsi, à supposer que M. M=== ait entendu contester à l’occasion de sa protestation le refus d’enregistrement de la liste qu’il conduisait, ce grief doit être écarté.

8. Devant le tribunal, M. B===, qui conduisait la liste « Développement concerté espoir partagé », a contesté le refus d’enregistrement de sa candidature et a soutenu que les inscriptions sur le répertoire des métiers de Mayotte dans la section des métiers d’art avaient été opérées de manière à écarter la présentation de listes concurrentes de la liste « Walezi Capeb FMBTP ».

9. Il résulte de l’instruction que la liste conduite par M. B=== ne comportait aucun candidat inscrit au répertoire des métiers de Mayotte dans la section des métiers d’art. A supposer même que M. M=== et Mme A===, candidats de la liste conduite par M. B===, exerceraient des activités relevant des métiers d’art au sens de l’article 20 de la loi du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat et de l’arrêté du 24 décembre 2015 fixant la liste des métiers d'art, en application de cet article, il ne résulte d’aucun élément de l’instruction qu’ils auraient sollicité leur inscription au répertoire des métiers de Mayotte dans la section des métiers d’art ni, en tout état de cause, qu’une décision de refus leur aurait été opposée pour un motif infondé. Si M. B=== a soutenu par ailleurs devant le tribunal que M. V===, candidat de la liste « Walezi Capeb FMBTP », n’exerçait plus à Mayotte mais à la Réunion, il est constant qu’à la période à laquelle se sont déroulées les opérations électorales, il était inscrit au répertoire des métiers de Mayotte et figurait sur la liste des électeurs et le protestataire n’a apporté aucun élément permettant de douter de sa qualité d’électeur et de candidat éligible. Par ailleurs, et ainsi qu’il a été dit ci-dessus, la circonstance que la liste électorale ne mentionnait pas sa qualité d’artisan inscrit dans la section des métiers d’art ne faisait pas obstacle à la validité de la candidature de la liste sur laquelle il figurait et ne traduit à elle seule aucune manœuvre.

10. MM. M=== et A===, candidats de la liste « CGPME Mayotte », ont soulevé dans leur protestation le grief tiré de ce que la liste électorale ne mentionnait pas l’inscription de M. V===, candidat de la liste « Walesi Capeb FMBTP », dans la section des métiers d’art. Ainsi qu’il a été dit ci-dessus, cette circonstance n’entache pas la candidature de cette liste d’irrégularité.

11. MM. M=== et A=== ont soutenu qu’il serait impossible d’identifier M. D===, quatrième candidat sur la liste « Walezi Capeb FMBTP », dès lors qu’il s’est présenté comme inscrit dans la catégorie « Fabrication » et qu’aucun électeur ne figure dans la liste électorale à ce nom dans cette catégorie, tandis que deux électeurs figurent dans la liste électorale à ce nom dans les catégories « Bâtiment » et « Services ». Toutefois, les deux électeurs inscrits sous le même nom dans les catégories « Bâtiment » et « Services » ne peuvent être confondus, dès lors que leurs dates et lieux de naissance, notamment, qui diffèrent, sont mentionnés sur la liste électorale. Il ne résulte par ailleurs pas de l’instruction et il n’est d’ailleurs pas allégué que la déclaration de candidature de M. M=== n’aurait pas comporté les mentions obligatoires portant en particulier sur ses date et lieu de naissance, qui permettaient de vérifier son inscription sur la liste électorale. A supposer même qu’une erreur ait entaché la déclaration de candidature de M. M=== quant à la catégorie à laquelle appartient son activité, il résulte de l’instruction que, même sans tenir compte de M. M===, la liste élue « Walezi Capeb FMBTP » comportait, conformément à l’article 4 bis du décret du 27 mai 1999, parmi les dix-huit premiers candidats, au moins quatre candidats relevant des catégories fixées dans l’annexe au décret du 2 avril 1998 relatif à la qualification artisanale et au répertoire des métiers. Le grief ne peut, par suite, qu’être écarté.

12. Il ne résulte pas de l’instruction que l’absence d’actualisation de la liste électorale quant à la mention de l’inscription de certains électeurs au répertoire des métiers dans la section des métiers d’art aurait constitué une manœuvre de nature à avoir altéré les résultats du scrutin, dès lors que cette absence d’actualisation, si elle a pu rendre plus difficile la constitution de listes valides de candidats, n’a pas rendu impossible cette constitution, la chambre de métiers et de l’artisanat et la préfecture, à laquelle les informations utiles avaient été transmises, étant susceptibles de communiquer aux représentants de listes les noms des artisans de Mayotte justifiant d’une inscription dans la section des métiers d’art, au nombre de deux. Il n’est d’ailleurs pas allégué que les représentants de listes, auxquels il appartenait de vérifier la qualité de leurs candidats, auraient sollicité en vain la communication de ces informations. Au surplus, les futurs candidats pouvaient solliciter en vue du scrutin leur inscription dans la section des métiers d’art dès après l’entrée en vigueur du décret du 18 mai 2016 qui a posé la règle concernant la présence d’au moins un candidat inscrit dans cette section parmi les sept premiers candidats de chaque liste et les électeurs étaient avertis de la date du scrutin par l’arrêté ministériel du 22 juillet 2016 convoquant les électeurs et paru au Journal officiel de la République française du 29 juillet 2016.

13. Si le nom de M. M===, élu de la liste « Walezi Capeb FMBTP », figure trois fois sur la liste électorale, cette circonstance est par elle-même sans aucune incidence sur la validité de sa candidature. Il en va de même des erreurs dont la liste électorale est entachée quant au nom de jeune fille de certaines électrices, dont Mme A=== M===, également élue de la liste « Walezi Capeb FMBTP ». A supposer même que M. M=== ait voté trois fois, cette circonstance serait, compte tenu du mode de scrutin et de l’enregistrement de la candidature d’une seule liste aux élections, sans aucune incidence sur les résultats du scrutin.

14. MM. M=== et A=== ne contestent pas que Mme H===, candidate figurant sur leur liste « CGPME Mayotte », ne remplissait pas la condition d’immatriculation au répertoire des métiers depuis au moins deux ans mais soutiennent que les représentants de leur liste ont été induits en erreur par l’attestation délivrée le 9 septembre 2016 par la chambre de métiers et de l’artisanat attestant que la candidate remplissait les conditions d’éligibilité et ont été dans l’impossibilité de faire en temps utile le nécessaire pour la remplacer. Toutefois, quelle que soient les circonstances dans lesquelles Mme H=== a obtenu l’attestation erronée de la chambre de métiers et de l’artisanat et malgré l’impossibilité dans laquelle ses co-listiers se seraient trouvés de la remplacer, le préfet a, à bon droit, rejeté la candidature de la liste « CGPME Mayotte », déposée l’avant-dernier jour de la période ouverte pour le dépôt des listes, dès lors qu’elle ne remplissait pas les conditions de validité fixées par le décret du 27 mai 1999. En l’absence de manœuvre, le grief doit être écarté.

15. Ainsi qu’il a été dit ci-dessus, l’intervention, le 2 septembre 2016, d’un arrêté préfectoral modificatif indiquant que le nombre minimum de candidats par liste devait être de trente-cinq et non de vingt-cinq, ne constitue ni une illégalité ni une manoeuvre de nature à avoir entravé le dépôt de candidatures valides dès lors notamment que cette règle relative au nombre minimum de candidats avait été antérieurement posée par le décret du 27 mai 1999 modifié par celui du 18 mai 2016.

16. Si la publication des listes de candidats est intervenue le lendemain de l’expiration du délai prévu par l’article 19 du décret du 27 mai 1999, ce retard n’a pu avoir aucune incidence sur la sincérité et les résultats du scrutin.

17. Les irrégularités mentionnées sur le procès-verbal de dépouillement des votes par la commission d’organisation des élections, à savoir le dépouillement opéré par le bureau de vote à Chirongui, l’ouverture de l’urne avant le dépouillement à Mtsangamouji et Bandraboua et l’absence de signatures des listes d’émargement et des listes électorales dans sept bureaux de vote, n’ont pu avoir, compte tenu du mode de scrutin et de la présence d’une seule liste de candidats, aucune incidence sur les résultats de l’élection.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. S=== est fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif a annulé les résultats du scrutin clôturé le 14 octobre 2016 et à demander, par suite, l’annulation du jugement en tant qu’il prononce cette annulation et le rejet des protestations présentées devant le tribunal administratif.

19. La présente instance n’ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions de M. S=== tendant à ce que les dépens soient mis à la charge des protestataires de première instance ne peuvent être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : L’article 1er du jugement du tribunal administratif de Mayotte du 1er décembre 2016 est annulé.

Article 2 : Les protestations de M. M===, de M. B=== et de MM. M=== et A=== tendant à l’annulation du scrutin clôturé le 14 octobre 2016 sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.