Aucun texte ni aucun principe n'interdit, en raison de sa nature, à une personne publique, de se porter candidate à l'attribution d'un marché public ou d'un contrat de délégation de service public. Afin que soient respectés tant les exigences de l'égal accès aux marchés publics que le principe de liberté de la concurrence qui découle notamment de l'ordonnance du 1er décembre 1986, l'attribution d'un marché public à un établissement administratif suppose, d'une part, que le prix proposé par cet établissement public administratif soit déterminé en prenant en compte l'ensemble des coûts directs et indirects concourant à la formation du prix de la prestation objet du contrat, d'autre part, que cet établissement public n'ait pas bénéficié, pour déterminer le prix qu'il a proposé, d'un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de sa mission de service public et, enfin, qu'il puisse, si nécessaire, en justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen d'information approprié.
Un grand port maritime comme celui de Bordeaux est un établissement public chargé, sous le contrôle de l’Etat, d’une mission de service public consistant notamment à maintenir les accès maritimes, sans préjudice de l’exercice d’activités connexes ne relevant pas du service public. S’agissant des dépenses relatives aux engins de dragage, elles sont supportées par l’Etat en vertu des dispositions de l’article L. 111-4 du code des ports maritimes alors en vigueur et leur montant est arrêté chaque année par le ministre chargé des ports maritimes en vertu des dispositions de l’article L. 111-5 de ce code. Au titre de l’année 2009, le montant des dépenses correspondant à l’entretien des accès et ouvrages maritimes à la charge de l’Etat s’est élevé à la somme de 13 861 000 euros HT, représentant environ le quart du budget de fonctionnement du Grand port maritime de Bordeaux, ce dernier ayant bénéficié à ce seul titre d’une dotation de l’Etat d’un montant de 9 741 000 euros correspondant à la compensation des frais directement pris en charge par l’établissement portuaire pour assurer le maintien des accès maritimes.
Toutefois, une partie des dépenses du Grand port maritime de Bordeaux exposées à raison d’opérations de dragage n’est pas prise en charge par l’Etat et ne relève pas de sa mission de service public mais découle de prestations effectuées pour le compte de tiers, notamment dans le cadre de marchés publics auxquels l’établissement public soumissionne. La cour a considéré en l’espèce que la comptabilité analytique produite pour la première fois en appel, distinguait clairement les coûts imputables à la charge de l’Etat, pour une part d’ailleurs très marginale de l’ordre de 5%, de ceux imputables à la charge du Grand port maritime de Bordeaux ou à la charge des tiers bénéficiaires de prestations.
S’agissant plus particulièrement de la drague utilisée dans le cadre des travaux de dragage et la finition des souilles du port de Bayonne, objet du marché public contesté, le coût imputable à la charge des tiers porte sur l’ensemble des charges internes et externes, directes ou indirectes, se rattachant à l’activité exercée dans le cadre de cette affectation. La cour a donc considéré que la différence de prix entre les offres présentées respectivement par l’établissement public et une société concurrente s’expliquait par la mise en œuvre de techniques différentes pour l’exécution des prestations de dragage, de sorte qu’il ne résultait pas de l’instruction que le Grand port maritime de Bordeaux aurait utilisé cette dotation de l’Etat pour abaisser ses prix et fausser la concurrence.
Arrêt 12BX01145-12BX01160 – 6ème chambre - 25 novembre 2013 - Chambre de commerce et d’industrie de Bayonne-Pays basque et Grand port maritime de Bordeaux
Le pourvoi en cassation N°374923 n'est pas admis. Décision du CE du 14 octobre 2014