Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. P== C== a demandé au tribunal administratif de la Guyane d’annuler la décision du 13 avril 2016 par laquelle le maire de Kourou a mis fin à ses fonctions de directeur général des services et d’enjoindre à la commune de le rétablir dans ses fonctions.

Par un jugement n° 1600327 du 4 mai 2017, le tribunal administratif de la Guyane a annulé cette décision et a enjoint à la commune de Kourou de réintégrer M. C== à la date d’effet de la décision de licenciement du 1er mai 2016 jusqu’au 30 septembre 2017, date de l’échéance normale de son contrat.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête enregistrée le 19 juillet 2017 sous le n° 17BX02310, et un mémoire présenté le 20 octobre 2017, la commune de Kourou, représentée par Me Gondran de Robert, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 4 mai 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C== devant le tribunal administratif de la Guyane ;

3°) de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


II) Par une requête enregistrée le 19 juillet 2017 sous le n° 17BX02316, et un mémoire présenté le 20 octobre 2017, la commune de Kourou, représentée par Me Gondran de Robert, demande à la cour d’ordonner le sursis à l’exécution du jugement n° 1600327 du tribunal administratif de la Guyane du 4 mai 2017 et de rejeter les conclusions de M. C== tendant à ce qu’une somme de 1 500 euros soit mise à sa charge au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. M. P==C==a été recruté par la commune de Kourou le 2 juin 2014, pour une durée de six mois, afin d’exercer l’intérim des fonctions de directeur général des services. Par un contrat conclu le 23 septembre 2014, la commune lui a confié les fonctions de directeur général des services pour une durée de trois ans à compter du 1er octobre 2014. Par une décision du 13 avril 2016, le maire de Kourou a prononcé son licenciement pour perte de confiance à compter du 1er mai 2016. Par une première requête enregistrée sous le n° 17BX02310, la commune de Kourou relève appel du jugement n° 1600327 du 4 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a annulé cette décision et lui a enjoint de réintégrer M. C== pour la période allant du 1er mai 2016, date d’effet de son licenciement, au 30 septembre 2017, date de l’échéance normale de son contrat. Par une seconde requête enregistrée sous le n° 17BX02316, la commune demande à la cour de surseoir à l’exécution de ce jugement.

2. Ces requêtes étant relatives au même jugement, il y lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la légalité du licenciement de M. C== :

3. Aux termes de l’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : « Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l’Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, à l’exception de ceux réservés aux magistrats de l’ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l’ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. ». Aux termes de l’article 3-3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : « Par dérogation au principe énoncé à l’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et sous réserve de l’article 34 de la présente loi, des emplois permanents peuvent être occupés de manière permanente par des agents contractuels dans les cas suivants : (…) 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A lorsque les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient et sous réserve qu’aucun fonctionnaire n’ait pu être recruté dans les conditions prévues par la présente loi (…). / Les agents ainsi recrutés sont engagés par contrat à durée déterminée d’une durée maximale de trois ans (…). ». L’article 47 de la même loi dispose : « Par dérogation à l’article 41, peuvent être pourvus par la voie du recrutement direct, dans les conditions de diplômes ou de capacités fixées par décret en Conseil d’Etat, les emplois suivants : (…) / Directeur général des services et directeur général des services techniques des communes de plus de 80 000 habitants (…) / L’accès à ces emplois par la voie du recrutement direct n’entraîne pas titularisation dans la fonction publique territoriale. ». Selon l’article 53 de cette loi : « Lorsqu’il est mis fin au détachement d’un fonctionnaire occupant un emploi fonctionnel mentionné aux alinéas ci-dessous et que la collectivité ou l’établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, celui-ci peut demander à la collectivité ou l’établissement dans lequel il occupait l’emploi fonctionnel soit à être reclassé dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis, soit à bénéficier, de droit, du congé spécial mentionné à l’article 99, soit à percevoir une indemnité de licenciement dans les conditions prévues à l’article 98. / Ces dispositions s’appliquent aux emplois : (…) de directeur général des services, de directeur général adjoint des services des communes de plus de 2 000 habitants ; (…) Il ne peut être mis fin aux fonctions des agents occupant les emplois mentionnés ci-dessus, sauf s’ils ont été recrutés directement en application de l’article 47, qu’après un délai de six mois suivant soit leur nomination dans l’emploi, soit la désignation de l’autorité territoriale (…) ». Aux termes de l’article 1er du décret n° 87-1101 du 30 décembre 1987 portant dispositions statutaires particulières à certains emplois administratifs de direction des collectivités territoriales et des établissements publics locaux assimilés : « I.- Les dispositions du présent décret sont applicables aux emplois suivants : 1. Directeur général des services des communes de 2 000 habitants et plus et secrétaire général ou directeur des établissements publics dont la liste est mentionnée à l’article 53 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée (…). ». L’article 4 du même décret dispose : « Les fonctionnaires nommés dans l’un des emplois mentionnés à l’article 1er et qui ne sont pas recrutés suivant les modalités de l’article 47 de la loi du 26 janvier 1984 précitée sont placés en position de détachement dans les conditions et suivant les règles statutaires prévues pour cette position dans leur cadre d’emplois, corps ou emploi d’origine (…) ». Enfin, aux termes de l’article 7 de ce décret : « Seuls les fonctionnaires de catégorie A peuvent être détachés dans un emploi de : 1. Directeur général des services d’une commune de 2 000 à 40 000 habitants (…) ».

4. En premier lieu, si l’article 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 autorise le recrutement direct, sans publicité de la création ou de la vacance de l’emploi dont il s’agit ni concours, de fonctionnaires ou d’agents non titulaires pour occuper les emplois fonctionnels dont il dresse une liste, celle-ci ne mentionne pas l’emploi de directeur général des services d’une commune de moins de 80 000 habitants. S’agissant des autres emplois fonctionnels, l’article 53 de la loi du 26 janvier 1984 et les dispositions du décret du 30 décembre 1987 prises pour son application prévoient uniquement le détachement de fonctionnaires. Selon l’article 7 de ce décret, seuls peuvent ainsi être détachés sur l’emploi de directeur général des services dans une commune de 2 000 à 40 000 habitants, les fonctionnaires de catégorie A. Il en résulte que la commune de Kourou, qui comprend environ 26 000 habitants, ne pouvait pas légalement recruter M. C==, qui n’avait pas la qualité de fonctionnaire, sur l’emploi de directeur général des services créé par la délibération du 6 novembre 2007, alors même que cet emploi répondait effectivement aux besoins de la commune.

5. En second lieu, si le contrat de recrutement d’un agent de droit public crée des droits au profit de ce dernier, les clauses de son contrat qui s’avèrent contraires aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ne peuvent légalement lui être opposées. Ainsi qu’il a été dit au point précédent, M. C== ne pouvait être affecté, en tant qu’agent contractuel, sur l’emploi de directeur général des services de la commune de Kourou. Par suite, cette nomination, prononcée en méconnaissance des dispositions précitées, n’a pas eu pour effet d’exclure M. C== du champ des dispositions du décret du 15 février 1988 applicables aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale. Ainsi, seuls les motifs de licenciement prévus par les articles 39 et suivants de ce décret pouvaient lui être opposés. Dès lors, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le motif tiré de la perte de confiance, qui ne peut être opposé qu’aux titulaires des emplois fonctionnels, ne pouvait légalement justifier le licenciement de M. C==.

6. Il résulte de ce qui précède que la commune de Kourou n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a annulé la décision ayant prononcé le licenciement de M. C== et lui a enjoint de réintégrer ce dernier dans ses fonctions entre la date à laquelle il a été irrégulièrement licencié, jusqu’au terme de son contrat, le 30 septembre 2017.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

7. Le présent arrêt statuant sur la requête n° 17BX02310 tendant à l’annulation du jugement n° 1600327 du 4 mai 2017 du tribunal administratif de la Guyane, les conclusions de la requête n° 17BX02316 tendant au sursis à exécution de ce même jugement sont devenues sans objet.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties en application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la commune de Kourou à fin de sursis à exécution présentées dans la requête n° 17BX02316.

Article 2 : La requête n° 17BX02310 de la commune de Kourou est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. C== tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.