Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’EURL Cap Liberty a demandé au tribunal administratif de Poitier de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2014.

Par un jugement n° 1601424 du 15 mai 2018 le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 13 juillet 2018 et le 15 mars 2019, l’EURL Cap Liberty, représentée par Me Taran, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitier du 15 mai 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ;

3°) de mettre la somme de 6 000 euros à la charge de l’Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que : - son activité peut être qualifiée de « jeux et manèges forains » au sens du point b) bis de de l’article 279 du code général des impôts ; il s’agit d’une notion large et évolutive ; son activité est exploitée de manière itinérante et est habituellement proposées à la clientèle des fêtes foraines ; elle justifie avoir participé à des évènements pouvant être assimilés à des fêtes foraines ; - les différents commentaires administratifs de la loi fiscale ne visent pas l’activité de saut à l’élastique mais comptent au nombre des « jeux et manèges forains » des activités similaires à la sienne.


Considérant ce qui suit :

1. L'EURL Cap Liberty a pour activité l’organisation de sauts à l'élastique. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, étendue en taxe sur la valeur ajoutée jusqu’au 30 septembre 2014 à l’issue de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été réclamés au titre de toute la période concernée. Elle relève appel du jugement en date du 15 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande de décharge.

2. Aux termes de l’article 279 du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : « La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit … en ce qui concerne : / (...) b bis. Les spectacles suivants : / (...) jeux et manèges forains à l’exception des appareils automatiques autres que ceux qui sont assimilés à des loteries foraines en application de l’article 7 de la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries (...) ».

3. Il résulte des dispositions citées au point 2 que la taxe sur la valeur ajoutée est en principe perçue au taux réduit sur les jeux et les manèges forains. L’application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée aux recettes provenant des droits d’entrée, d’accès ou de participation aux jeux et manèges forains n’est pas subordonnée à la condition que ces jeux et manèges soient exploités dans l’enceinte d’une fête foraine.

4. S’agissant d’une attraction exploitée en dehors d’une fête foraine, la qualification de jeu ou de manège forain peut notamment résulter, outre du caractère ludique ou récréatif inhérent au jeu ou au manège, de ce que les installations ou les matériels utilisés sont aisément démontables ou déplaçables, de ce que l’activité est exploitée de manière itinérante par son organisateur et de ce qu’elle est semblable à celles habituellement proposées à la clientèle des fêtes foraines.

5. Il appartient au juge de l’impôt d’apprécier, au vu de l’instruction, si les recettes réalisées par un contribuable entrent dans le champ d’application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée ou dans celui du taux normal de cette taxe, eu égard aux conditions concrètes dans lesquelles sont effectuées ses opérations.

6. Il résulte de l’instruction que l’activité de l’EURL Cap Liberty, au cours de la période en litige, a principalement consisté à organiser, sur réservation, des sauts à l’élastique à partir du Viaduc de la Recoumène au Monastier sur Gazeille (Haute-Loire). Cette activité qui nécessite d’utiliser une infrastructure fixe dominant une rivière de près de 65 mètres, ne peut être regardée comme assimilable à une activité ludique ou récréative réalisée au moyen d’installations démontables. Dans ces conditions, les prestations facturées pour ce type de saut ne peuvent alors être assimilées à des « jeux et manèges forains » au sens des dispositions précitées du point b) bis de l’article 279 du code général des impôts et étaient donc soumises au taux normal de taxe sur la valeur ajoutée.

7. Ainsi que l’ont relevé les premiers juges, et à supposer que l’EURL Cap Liberty ait entendu se prévaloir des termes de la doctrine administrative notamment du rescrit n° 2008/27 du 18 novembre 2008, repris dans le BOI-TVA-LIQ-30-20-50, publiée le 12 septembre 2012, de la réponse ministérielle à la question écrite n° 18071, publié le 25 août 2011, et de l’instruction BOI-TVA-LIQ-30-20-50 n° 210 publiée le 6 mars 2014, ces doctrines ne comportent pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application. Au surplus, le BOI-TVA-LIQ-30-20-50 n° 210 publié le 6 mars 2014 précité, n’est, en tout état de cause, pas applicable aux impositions antérieures au 5 mars 2014.

8. En revanche, la société pouvait bénéficier du taux réduit de TVA pour les prestations de saut qu’elle a organisées au cours de la période contrôlée au moyen d’une grue démontable qu’elle exploitait de manière itinérante, dès lors que cette activité pouvait être assimilée à des « jeux et manèges forains » au sens des dispositions précitées du point b) bis de l’article 279 du code général des impôts. Toutefois, elle ne justifie de la facturation de telles prestations qu’en ce qui concerne des sauts à l’élastique fournis au public pour le compte de la commune de Thiers (facture du 7 septembre 2012 de 243 euros HT) et de la commune de Cholet (factures du 3 juin 2013 et du 3 juin 2014, de 7699,06 euros HT et de 6769,10 euros HT).

9. Il résulte de tout ce qui précède que l’EURL Cap Liberty est seulement fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge dans la limite de l’application du taux réduit de TVA aux trois prestations mentionnées au point précédent.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :



10. L’Etat n’étant pas la partie perdante pour l’essentiel, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l’EURL Cap Liberty au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : L’EURL Cap Liberty est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2014 dans la limite de l’application du taux réduit de TVA aux prestations de saut à l’élastique facturées à la commune de Thiers (facture du 7 septembre 2012 de 243 euros HT) et à la commune de Cholet (factures du 3 juin 2013 et du 3 juin 2014, de 7699,06 euros HT et de 6769,10 euros HT).

Article 2 : Le jugement n° 1601424 du 15 mai 2018 du tribunal administratif de Poitiers est réformé en ce qu’il a de contraire à l’article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l’EURL Cap Liberty est rejeté.