Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société APR Services a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 2008 au 30 avril 2011, et la restitution de la partie de ce complément de taxe qu’elle a acquittée, à tort selon elle, à titre de régularisation sur le fondement de l’article L. 62 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1300107 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2014, la société APR Services, représentée par Me O==, demande à la cour :


Considérant ce qui suit :

1. La société APR Services fournit des services à la personne. Elle a fait l’objet d’une vérification de comptabilité au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2008 et le 30 avril 2011. L’administration fiscale a remis en cause le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 5,5 % que la société a estimé pouvoir appliquer pour des prestations de services facturées à certaines personnes morales, principalement des sociétés d’assurances spécialisées dans l’assistance à personne. La société s’est vu réclamer des rappels de TVA. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 16 octobre 2015 qui a rejeté la demande en décharge de ces impositions.

Sur l’application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : « I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ». Aux termes de l'article 278 dudit code, dans sa rédaction applicable aux faits du litige : « Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 19,60 % ». Aux termes de l’article 279 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur jusqu’au 1er mai 2008 : « La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit (…) en ce qui concerne : (…) i. les prestations de services fournies par des entreprises agréées en application de l'article L. 129-1 du code du travail (…) ». Aux termes de ce même article dans sa rédaction applicable du 1er mai 2008 au 31 décembre 2009 : « La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit (…) en ce qui concerne : (…) i. les prestations de services fournies par des entreprises agréées en application des articles L. 7232-1 à L. 7232-4 du code du travail (…) ». Pour les prestations de services rendues à compter du 25 juillet 2010, l’article 279 prévoit que : « La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit (…) en ce qui concerne : (…) i. Les prestations de services fournies à titre exclusif, ou à titre non exclusif pour celles qui bénéficient d'une dérogation à la condition d'activité exclusive selon l'article L. 7232-1-2 du code du travail, par des associations, des entreprises ou des organismes déclarés en application de l'article L. 7232-1-1 du même code, et dont la liste est fixée par décret (…) ».

3. L’article L. 7232-6 du code du travail modifié dispose : « Les personnes morales ou les entreprises individuelles mentionnées aux articles L. 7232-1, L. 7232-1-1 et L. 7232-1-2 peuvent assurer leur activité selon les modalités suivantes : 1° Le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs ainsi que, pour le compte de ces dernières, l'accomplissement des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi de ces travailleurs ; 2° Le recrutement de travailleurs pour les mettre, à titre onéreux, à la disposition de personnes physiques. (…); 3° La fourniture de prestations de services aux personnes physiques. ». Aux termes de l’article L. 7233-2 du même code : « L'association ou l'entreprise agréée qui exerce une activité de services à la personne rendus aux personnes physiques bénéficie : 1° Du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée prévu au i de l'article 279 du code général des impôts (…) ».

4. Il résulte de l’instruction et notamment de la proposition de rectification du 15 décembre 2011 que la société APR Services fournit des services à la personne tels que la garde d’enfants, le soutien scolaire, le ménage, l’assistance informatique, le petit bricolage, l’entretien des jardins ou le transport. Elle dispose à cette fin d’un agrément. Le service a remis en cause l’application du taux réduit de TVA à des prestations de services que la société ne fournissait pas directement à des particuliers mais à des sociétés « plates-formes » de services ou à des organismes tels que les sociétés d’assurances ou des mutuelles sur la base de conventions de sous-traitance. La société APR Services se voyait confier par ses partenaires une mission d’assistance à la personne auprès des clients de ces derniers. La société recevait généralement un ordre de mission. Le service était facturé à l’organisme recourant à la société comme sous-traitant et non au particulier bénéficiaire du service.

5. Ainsi que l’a jugé à bon droit le tribunal administratif, il résulte des dispositions précitées du code général des impôts, qui doivent être interprétées strictement s’agissant d’une dérogation à l’application du taux normal de taxe sur la valeur ajoutée, que le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée ne s’applique qu’aux prestations de services d’assistance à la personne fournies par des opérateurs agréés à la personne physique elle-même qui en est alors le preneur au sens de l’article 259 du code général des impôts et qui les rémunère soit directement, soit par tiers-payant, notamment lorsque le preneur bénéficie d’une aide sociale de la collectivité garantissant ainsi le paiement du service au prestataire.

6. Par suite, la société APR Services, même si elle est titulaire d’un agrément l’habilitant à intervenir chez des particuliers, ne peut pas prétendre à l’application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée pour les services qu’elle fournit non pas directement à des particuliers mais dans le cadre d’une sous-traitance à des plates-formes ou des organismes d’assurances qui en sont les preneurs et qui les rémunèrent, quand bien même des personnes physiques, clientes de ces plates-formes ou de ces organismes d’assurance, en sont concrètement les bénéficiaires.

7. C’est donc à tort que la société APR Services affirme que ces organismes ayant recours à sa sous-traitance la rémunèrent « pour le compte de leurs clients ou adhérents » alors que les personnes physiques chez qui sont réalisées les prestations ne sont pas nommément identifiées dans les conventions comme étant les preneurs des services qu’elle fournit comme sous-traitant et ne sont pas non plus ses clients puisqu’elle ne leur facture aucun service.

8. La société APR Services ne peut donc pas non plus se prévaloir d’une différence de traitement discriminatoire du fait que l’administration a admis l’application du taux réduit aux prestations rémunérées avec l’intervention d’un tiers-payant ou d’un organisme de tutelle. Dans ce cas, en effet, ainsi que l’administration l’a justement précisé dans la réponse aux observations du contribuable du 22 février 2012, le preneur de la prestation n’est pas la collectivité faisant office de tiers-payant ou l’organisme de tutelle agissant comme intermédiaire mais demeure la personne physique dûment identifiée comme personne protégée ou bénéficiaire d’une aide sociale destinée au règlement des prestations.

9. C’est ainsi à bon droit que l’administration a soumis cette prestation au taux normal de taxe sur la valeur ajoutée sur le terrain de la loi fiscale.

Sur l’application de la doctrine :

10. Aux termes de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. ».

11. La société requérante, à supposer qu’elle les invoque, ne peut pas utilement se prévaloir de l’instruction 3 C-6-06 du 30 mai 2006 actualisée par l’instruction 3 C-1-12 du 8 février 2012 et du document d’instruction DGIS n°1-2012 du 26 avril 2012 dont il ne résulte aucune interprétation différente de la loi fiscale. Pas davantage la société ne peut-elle tirer parti de la position de l’administration à propos de la taxation des services dont le paiement est assuré par les départements ou les organismes de tutelle, pour les motifs déjà précisés au point 8 ci-dessus, cette position ne pouvant pas être regardée comme une prise de position formelle, au sens de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales, sur la situation différente de la société.

12. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par l’administration, que la société APR Services n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande en décharge et en restitution.

Sur l’application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme demandée par la société APR Services au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : La requête de la société APR Services est rejetée.