Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Indian Ocean Exploration (IOE) Ltd a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner solidairement les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) et l'Etat français à lui verser une somme de 722 337 euros au titre du préjudice subi à la suite de l'exécution, selon elle déloyale et fautive, par les TAAF du contrat de vente du navire de recherches scientifiques « La Curieuse », et du refus opposé par l'Etat de lui accorder la protection contre la piraterie par une équipe embarquée, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011, avec capitalisation des intérêts. A titre reconventionnel, les TAAF demandaient la condamnation de la société IOE à leur verser la somme de 100 000 euros en raison des réparations qu'elles ont dû effectuer sur le navire après sa restitution.

Par un jugement n° 1200344 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté la demande de la société IOE et les conclusions reconventionnelles des TAAF.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 février 2015, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 9 mai, 10 juillet et 26 octobre 2017 et les 1er février, 6 mars et 4 avril 2018, la société IOE Ltd, représentée par Me de Belenet et Ferrata, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 2 octobre 2014 ;

2°) à titre principal, - de condamner solidairement les TAAF ainsi que l’Etat au paiement d’une indemnité de 660 222 euros au titre du préjudice subi, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande préalable du 20 décembre 2011, avec capitalisation des intérêts ; - de condamner l’Etat au paiement de la somme de 157 080 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande préalable du 20 décembre 2011 et capitalisation des intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner respectivement les TAAF et l’Etat français au paiement des sommes de 572 739 euros et 157 080 euros, assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande préalable du 20 décembre 2011 ;

4°) de rejeter les conclusions reconventionnelles des TAAF ;

5°) de mettre à la charge des TAAF la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. Les Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF) ont conclu le 24 avril 2009 un contrat portant sur la vente du navire de recherches scientifiques « La Curieuse » à la société de droit mauricien Indian Ocean exploration (IOE) Ltd, pour un montant de 600 000 euros. L’article 5 dudit contrat prévoyait le paiement du prix de vente par une prestation en nature consistant en la mise à disposition des TAAF du navire pendant une période de cinq ans, à raison de 90 jours par an au maximum, et 300 jours au total, pour un montant forfaitaire journalier de 2 000 euros. Une clause de réserve de propriété au profit des TAAF était stipulée pour garantir l’exécution des obligations de mise à disposition pour les campagnes annuelles de recherches aux îles Kerguelen et autres durant l’été austral. La société IOE pouvait, en dehors de ces périodes d’environ deux mois par an, exploiter le navire pour ses propres missions. En vue d'une mission de prospection sous-marine profonde en partenariat avec une société mauricienne, la société IOE a sollicité du ministre de la défense, par courrier du 15 février 2011, le bénéfice d'une équipe militaire de protection embarquée (EPE) contre la piraterie. Une décision implicite de rejet lui ayant été opposée, la société a renoncé à cette opération. Alors que la société IOE rencontrait des difficultés dans l'exploitation commerciale du navire, elle a, par courrier du 30 mai 2011, fait part au directeur des affaires internationales de la mer et de l'Antarctique des TAAF de ses inquiétudes quant à la pérennité de l'exploitation et a évoqué la possibilité de recourir à la résiliation amiable du contrat, conformément à la clause de l’article 12.1. Par courrier du 15 juin 2011, la société IOE a officiellement transmis au préfet des TAAF un courrier lui soumettant 1’hypothèse d'une résiliation amiable, à défaut d'adoption d'une des deux options de nature à modifier leur relation contractuelle, qu'elle proposait dans ledit courrier aux fins de poursuivre leur collaboration. Par une réponse en date du 23 juin 2011, le préfet des TAAF, ne retenant pas la proposition alternative de la société, a accepté la résolution amiable du contrat de vente. Malgré l'acceptation de la résolution par les TAAF, la société IOE a manifesté, par un courrier de 6 juillet 2011, la volonté de poursuivre le contrat au motif qu’elle avait trouvé une nouvelle mission, pour laquelle elle sollicitait l’accord des TAAF pour un passage du navire sous pavillon mauricien afin de pouvoir avoir recours à une société de protection privée. Le préfet, administrateur supérieur des TAAF, estimant que la résolution du contrat était devenue définitive, a opposé un refus à cette proposition le 18 juillet 2011. En conséquence, le navire a été restitué aux TAAF le 5 septembre 2011. Par jugement du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté la demande de la société IOE tendant à la condamnation solidaire des TAAF et de l'Etat au paiement d'une indemnité de 722 337 euros au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi, assortie des intérêts à compter de la réclamation préalable du 20 décembre 2011, avec capitalisation. La société IOE relève appel de ce jugement et sollicite désormais, à titre principal, la condamnation solidaire des TAAF et de l’Etat au paiement d’une indemnité de 660 222 euros au titre du préjudice subi, la condamnation de l’Etat français au paiement de la somme de 157 080 euros, et à titre subsidiaire la condamnation de la collectivité des TAAF et de l’Etat français au paiement des sommes de 572 739 euros et 157 080 euros. Les TAAF concluent au rejet de la requête et demandent également la condamnation de la société requérante à leur verser la somme de 100 000 euros en raison des réparations qu'elles ont dû effectuer sur le navire après sa restitution.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Le contrat par lequel une personne publique cède des biens faisant partie de son domaine privé est, en principe, un contrat de droit privé, sauf si le contrat a pour objet l’exécution d’un service public ou s’il comporte des clauses qui impliquent, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs.

3. Le navire « La Curieuse » appartient aux TAAF, personne publique, depuis 1989. Ce navire ancien de 25 m, de type chalutier, a été aménagé afin d’assurer un soutien aux opérations scientifiques dans les îles subantarctiques. Il assurait jusqu’en 2005 la desserte des îles Kerguelen dans le cadre des recherches menées par l’Institut polaire Paul-Emile Victor (IPEV), groupement d’intérêt public associant notamment le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, le CNRS et l’IFREMER. Il est ensuite resté à quai à l’île Maurice pendant près de cinq ans. Par convention du 24 avril 2009, les TAAF ont vendu à la société IOE Ltd le navire « La Curieuse » lequel, en dépit de l’appui logistique qu’il apportait aux programmes de recherche scientifique des territoires, doit être regardé comme appartenant au domaine privé de cette collectivité, à défaut de présenter en lui-même un intérêt patrimonial. Cependant, et d’une part, cette convention prévoit en son article 5 comme paiement du prix la mise à disposition des TAAF du navire pendant trois cent jours, sur une période de cinq ans sur la base d’un coût journalier de 2 000 euros. Ces mises à disposition correspondent à la mission d’été austral desservant entre novembre et mars les îles subantarctiques, et permettent aux TAAF d’accomplir leur mission de service public de recherche. Les TAAF, qui demeurent propriétaire jusqu’au paiement complet du prix, définissent seules les dates de ces mises à disposition et disposent, sous réserve des conditions de sécurité de navigation, de l’entière maîtrise des mouvements du navire pendant ces périodes. D’autre part, l’article 8 prévoit que pendant cette durée de cinq ans, le navire ne pourra subir aucune modification de structure sans information préalable des TAAF, devra également conserver ses capacités hydrographiques et océanographiques et son matériel scientifique, et que tout changement de pavillon sera soumis à l’agrément des TAAF. Dans ces conditions, ce contrat de vente à effet différé reconnaît des prérogatives aux Territoires qui impliquent, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs, au demeurant expressément prévu par ledit contrat.

Sur la validité du contrat :

4. Lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel. Il en est ainsi dans le cas où les agissements d’une des parties ou de leur mandataire sont caractéristiques du dol. Le mensonge et la fraude d’une des parties peuvent être regardés comme constitutifs du dol s’ils ont, en fait, déterminé le consentement de l’autre partie. Si le dol ne se présume pas, il peut être établi par tous moyens.

5. L’article 8.1 du contrat de vente stipule que « (…) le Navire sera inscrit, si possible sous son nom actuel, au Registre international français ou tout autre pavillon qui aura l’agrément des TAAF. Au-delà de la période des Mises à dispositions, IOE pourra immatriculer le Navire sous tout pavillon de son choix. Toutefois, les TAAF pourront appeler l’attention d’IOE sur le choix d’un pavillon qui pourrait limiter l’intervention du Navire dans la zone sous administration des TAAF. (…) ».

6. La société IOE Ltd se prévaut de la nullité du contrat de vente conclu avec les TAAF en invoquant le dol dont il serait entaché. Il résulte de l’instruction que la société requérante a, par courrier du 6 juillet 2011, demandé au préfet des TAAF de faire passer le navire sous pavillon mauricien afin de lui permettre de recourir à des entreprises de protection privée, ce que la législation française n’autorisait pas alors. Le préfet des TAAF a, par courrier du 14 septembre 2011, opposé à cette demande non seulement la résiliation intervenue le 23 juin 2011 mais aussi l’affectation du navire « à des missions de service public pour le compte de la France ». Pour caractériser des manœuvres dolosives, la requérante fait valoir l’impossibilité de tout changement de pavillon alors que l’article 8.1.6 du contrat de vente prévoit cette possibilité sous condition d’agrément des TAAF. Cependant, il ne résulte pas de l’instruction que la collectivité des TAAF aurait sciemment cherché à tromper la société en omettant de signaler les difficultés d’un changement de pavillon pour les missions d’été austral. Par ailleurs, la lecture d’ensemble de l’article 8.1 et l’attention attirée sur le choix d’un pavillon qui pourrait limiter l’intervention du navire dans la zone sous administration des TAAF pouvait alerter tout professionnel attentif sur ces difficultés. La condition d’agrément suppose que l’autorité administrative puisse s’opposer à la demande de changement de pavillon. Il appartenait à la société dans ce cas de se doter de tous les moyens appropriés pour analyser cette condition et ses effets, en particulier d’un point de vue juridique. En outre, aucun élément ne permet d’établir que le consentement à la vente a été déterminé par la possibilité de changer le pavillon du navire pendant la période de 5 ans. Le courriel du 23 mars 2009 dont la société fait état se borne à évoquer la possibilité d’embarquer du personnel étranger. Par suite, la société IOE Ltd n’est pas fondée à soutenir que son consentement aurait été vicié du fait de manœuvres destinées à tromper sa vigilance, assimilables à un dol. De même, le navire « La Curieuse » appartenant au domaine privé des TAAF, la requérante ne saurait utilement faire valoir que la vente ne pouvait intervenir en l’absence de déclassement préalable. Elle n’est, par suite, pas fondée à soutenir que le contrat de vente serait entaché de nullité et ne lui serait pas opposable.

Sur la responsabilité contractuelle des TAAF :

7. L'article 12.1 du contrat de vente stipule : « Dans la double hypothèse d'une part où IOE viendrait à ne plus être en mesure d'honorer ses obligations et d'autre part où les TAAF accepteraient la résolution amiable du contrat proposé par IOE, les TAAF conserveraient définitivement la propriété du navire et verseraient à IOE une contribution forfaitaire aux frais de remise en état d'exploitation du navire : (…) - rupture la troisième année : 24 000 euros (...) ».

8. La société IOE Ltd soutient qu’en prononçant le 23 juin 2011 la résiliation amiable du contrat, alors qu’elle n’avait pas donné son consentement, le préfet des TAAF a méconnu les conditions de l’article 12.1 précité. Il résulte de l’instruction que par courrier du 30 mai 2011, la société IOE Ltd a informé le directeur des affaires internationales, de la mer et de l’Antarctique des TAAF que ses difficultés commerciales ne lui permettaient pas d’honorer la mission australe 2011/2012 et qu’à ce stade, elle est « contraint(e) de solliciter les TAAF conformément à l’article 12.1 la rupture à l’amiable de la convention ». Toutefois, dans ce courrier, elle proposait également d’amodier la convention notamment en renonçant au transfert de propriété et en se proposant en qualité d’armateur et concluait en indiquant qu’il s’agissait d’une base de travail, qu’elle restait ouverte à toute suggestion ou « se tient prête à se retirer si aucune formule acceptable n’est envisageable ». Si ce courrier pouvait laisser planer un doute sur la volonté de la société IOE Ltd de résilier amiablement la convention, les courriers des 10 et 15 juin 2011 étaient en revanche dépourvus d’ambiguïté. Dans cette dernière lettre, adressée au préfet des TAAF, elle conditionne « l’appel immédiat de l’article 12.1 » au défaut d’acceptation d’une des deux options alternatives qu’elle propose et précise les conséquences pour les TAAF dans le cas du recours à l’article 12.1, notamment « l’engagement de sa responsabilité y compris morale et légale concernant l’interruption de la convention qui nous lie ». En dépit de l’emploi, parfois, du conditionnel dans le courrier du 15 juin 2011, elle conclut qu’elle « ne peut prendre le risque de poursuivre la présente architecture dans le contexte actuel ». Dans ces conditions, compte tenu de ces termes, le préfet des TAAF pouvait valablement analyser ce courrier comme une demande de résiliation amiable. Par ailleurs, contrairement à ce qu’elle soutient, les courriers des 6 juillet et 22 août 2011 ne marquent pas une contestation du recours à l’article 12.1 du contrat de vente, alors qu’elle mentionne expressément avoir sollicité son application, mais une volonté de reprendre les relations contractuelles en raison d’un projet de contrat avec la société Dropline acoustic. Par ailleurs, il résulte de l’instruction, et notamment du courrier d’acceptation du 23 juin 2011, que chacune des deux options a été examinée par les TAAF avant d’accepter la demande de résiliation, alors au demeurant que la société a manifesté dans tous ses courriers qu’elle n’était pas en mesure d’honorer ses obligations au sens de l’article 12.1, et notamment assurer la mission australe 2011/2012. De même, ainsi que l’ont fait valoir à bon droit les premiers juges, compte tenu des difficultés que cette société avait rencontrées l'année précédente, et qui l'avaient amenée à solliciter dès janvier 2010 une résiliation amiable dont elle avait par la suite demandé l'abandon, le préfet, administrateur supérieur, n'a pas, en refusant d'ajourner la mesure de résiliation, fait preuve d'abus dans la conduite de ses relations contractuelles.

9. La société IOE Ltd ne saurait utilement engager la responsabilité contractuelle de la collectivité des TAAF sur le fondement de l’article 8.1 du contrat de vente en raison du refus, intervenu postérieurement à la résiliation du contrat, de modifier le pavillon du navire « La Curieuse ».

Sur les conclusions reconventionnelles des TAAF :

10. Les TAAF ne critiquent pas les motifs du jugement attaqué par lesquels le tribunal administratif de La Réunion a rejeté leur demande reconventionnelle tendant à la condamnation de la société IOE à lui verser une indemnité de 100 000 euros au titre des préjudices financiers subis en raison d'un entretien insuffisant du navire par la société IOE. Dans ces conditions, ces conclusions reconventionnelles ne peuvent qu’être rejetées par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

Sur la responsabilité de l’Etat :

11. Par courrier du 15 février 2011, la société IOE Ltd a sollicité auprès du premier ministre une protection du navire « La Curieuse », afin de conclure un contrat d’armement avec une société mauricienne pour une mission de prospection sous-marine profonde autour de Mayotte, au sud du 12ème parallèle. Une décision implicite de rejet a été opposée à cette demande, dont il résulte de l’instruction qu’elle est motivée par un nombre important de requêtes et l’absence de caractère prioritaire de la zone autour de Mayotte. Si la société requérante ne conteste pas la légalité du motif opposé, elle fait valoir que ce refus de concours des forces armées, dès lors qu’elle remplissait les conditions pour bénéficier de la protection des forces publiques contre les actes de piraterie maritime, lui a occasionné un préjudice anormal et spécial de nature à engager la responsabilité sans faute de l’Etat.

12. Cependant, il résulte de l’instruction qu’à la date de signature du contrat de vente du navire « La Curieuse » le 24 avril 2009, l’Océan Indien était déjà une zone importante de piraterie maritime. Il résulte en particulier de la cartographie Isemar de la piraterie en 2008 que le golfe d’Aden et le canal du Mozambique étaient déjà identifiés comme des zones à risque. De surcroît, dès la fin de l’année 2008, la zone d’attaque des pirates somaliens s’était étendue au sud vers le canal du Mozambique et à l’Ouest vers la zone économique exclusive des Seychelles. Ainsi, la société IOE Ltd avait connaissance que les activités de navigation, de recherches scientifiques et d’armement qu’elle effectuerait dans l’Océan Indien étaient soumises à une recrudescence des actes de piraterie. Elle a donc pris un risque alors, ainsi que l’ont relevé à bon droit les premiers juges, qu’aucune disposition ou convention ni aucun principe n’impose à l’Etat français qu’il assure la protection individuelle des navires battant son pavillon contre la piraterie. De même, si compte tenu de la recrudescence d’actes de pirateries à l’encontre d’armateurs privés, le déploiement d’équipes militaires de protection embarquée (EPE) sur des navires civils a été autorisé depuis l’arrêté du 22 mars 2007 établissant la liste des missions en mer incombant à l’Etat, cette mise à disposition, décidée par le Premier ministre et mise en œuvre dès 2008 afin de sauvegarder la souveraineté et protéger les intérêts nationaux, ne constitue cependant pas un droit. Dans ces conditions, au regard de l’aléa afférent à l’exploitation dans cette zone, connu de la société, la perte d’un contrat d’armement consécutif au refus de protection embarquée ne peut être regardée comme ayant constitué un aléa excédant ceux que comportait l’exploitation d’un navire dans l’Océan Indien et comme emportant pour la société requérante des conséquences génératrices d’un préjudice anormal et spécial, alors même qu’elle constituerait, ce qui n’est pas établi, l’unique refus opposé pour absence de disponibilité des moyens. Au demeurant, la protection était demandée pour une mission dont la durée était importante, pouvant atteindre six mois, et dans une zone au sud du 12ème parallèle où l’intensité du risque était reconnue comme moindre. Il résulte à cet égard du propre contrat produit par la requérante qu’un supplément de prime d’assurance n’était demandé qu’en cas d’intervention au Nord du 12ème parallèle. Dans ces conditions, la responsabilité sans faute de l’Etat ne peut être engagée.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la société IOE Ltd n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ses demandes.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

14. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a lieu de mettre à la charge d’aucune des parties les sommes demandées en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Indian Ocean Exploration Ltd est rejetée. Article 2 : Les conclusions des TAAF sont rejetées.