Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B== B== a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes, à titre subsidiaire, la réduction de ses bases d’imposition à l’impôt sur le revenu au titre des années 2007 et 2008 à des montants respectifs de 70 893 euros et 21 703 euros et à due concurrence, la décharge des cotisations et des pénalités correspondant à cette réduction.

Par un jugement n°1100197 du 19 février 2015, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 20 avril 2015, 5 avril 2016 et 10 juin 2016, Mme B==, représenté par Me de Vibraye, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. Mme B== relève appel du jugement du 19 février 2015 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la décharge des impositions supplémentaires à l’impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, à la réduction de ces impositions et pénalités.

Sur les conclusions à fin de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

2. Mme B== présente des conclusions tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 2007 et 2008. Mais ces conclusions sont nouvelles en appel et sont, pour ce motif, irrecevables.

Sur les conclusions à fin de décharge des impositions supplémentaires à l’impôt sur le revenu :

Sur la régularité de la procédure d’imposition : 3. En premier lieu, aux termes de l’article L. 73 du livre des procédures fiscales : « Peuvent être évalués d'office : (…) 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (…) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2°» . Aux termes de l’article L. 68 du même livre : « «La procédure de taxation d'office (…) n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure (…) »

4. Il résulte de l’instruction que Mme B== n’a pas déposé la déclaration de son bénéfice non commercial de l’année 2007 dans le délai légal, que le 29 juillet 2008, le service lui a adressé une mise en demeure n° 2116-M dont l’intéressée ne soutient pas ni même n’allègue qu’elle ne l’aurait pas reçue et que cette dernière n’a adressé au service la déclaration n° 2035 « déclaration contrôlée BNC » afférente à l’année 2007 que le 18 décembre 2009. Mme B== ne peut utilement soutenir, en se référant au document intitulé « demande de déclaration/mise en demeure » que lui a adressé l’administration le 21 septembre 2009, qu’une lettre valant mise en demeure de produire son bénéfice non commercial de l’année 2007 ne lui aurait pas été notifiée régulièrement alors que ce document concernait ses revenus d’ensemble des années 2006, 2007 et 2008.

5. Il résulte encore de l’instruction que la requérante n’a pas davantage souscrit sa déclaration de bénéfice non commercial de l’année 2008 dans le délai légal et qu’elle a été destinataire d’une mise en demeure de la déposer dans un délai d’un mois par lettre du 17 juillet 2009 dont elle a accusé réception le 5 août 2009. La lettre comportait au verso, contrairement aux allégations de la requérante, l’indication des sanctions encourues à défaut de réponse du contribuable. Mme B== n’a déposé la déclaration de ses bénéfices non commerciaux de l’année 2008 que le 14 avril 2010.

6. Par suite, l’administration a pu régulièrement, pour chacune des deux années d’imposition en litige, évaluer d’office les bénéfices non commerciaux résultant de l’activité exercée par Mme B== sur le fondement du 2° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales.

7. En deuxième lieu, le recours à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires est exclu en cas de mise en œuvre d’une procédure d’imposition d’office autre que celle prévue par l’article L. 69 du livre des procédures fiscales. Par suite, Mme B==, qui a, ainsi qu’il a été dit au point précédent, régulièrement fait l’objet de la procédure d’évaluation d’office de ses revenus catégoriels prévue à l’article L. 73 du livre des procédures fiscales et taxée d’office à l’impôt sur le revenu, ne peut utilement soutenir qu’elle aurait été privée d’une garantie substantielle tenant en la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires.

8. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 76 du livre des procédures fiscales : « Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. »



9. Il résulte de l’instruction que, le 12 février 2010, l’administration a adressé à Mme B== une proposition de rectification portant à la fois sur les revenus professionnels et le revenu global de Mme B== de l’année 2007. Le pli, adressé à l’adresse personnelle de l’intéressée, Résidence Bellevue du Fort, rue du Fort Fleur d’Epée au Gosier, a été retourné à l’administration, revêtu des mentions « « non réclamé » et « avisé le 19 février 2010 ».

10. La requérante n’est pas fondée à soutenir que l’envoi à l’adresse de son domicile de cette proposition de rectification qui portait en partie sur son bénéfice non commercial rendrait la procédure irrégulière dès lors qu’aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit qu’une proposition de rectification relative aux revenus catégoriels doive être adressée au lieu d’exercice de la profession.

11. La proposition de rectification doit en principe être adressée à la dernière adresse que le contribuable a lui-même fait connaître au service compétent dans ses déclarations ou communications. Si Mme B== soutient qu’elle a déménagé dans le courant de l’année 2008 et qu’elle a informé l’administration de son changement d’adresse, ce que confirmeraient son avis d’imposition sur les revenus 2008 et son avis d’imposition à la taxe d’habitation 2010 puisque sa nouvelle adresse y figure, ces documents, d’ailleurs postérieurs à la date à laquelle la proposition de rectification en litige lui a été adressée, ne permettent pas d’établir qu’elle aurait fait part en temps utile à l’administration de sa nouvelle adresse.

12. L’administration produit l’avis de réception à l’adresse de Mme B==, portant la date manuscrite de présentation du 19 février 2010 et l’enveloppe contentant le pli recommandé portant les mentions manuscrites « non réclamé « et « avisé le 19 février 2010 ». Ces éléments sont suffisamment clairs, précis et concordants pour établir que Mme B== avait été régulièrement avisée, dès le 19 février 2010 que ce pli était à sa disposition au bureau de poste dont elle relevait, alors même que, contrairement à ce qu’exige pourtant l’instruction postale du 6 septembre 1990 dans ses dispositions relatives à la distribution des plis recommandés, le préposé n’avait pas reporté l’adresse dudit bureau sur l’enveloppe contenant le pli recommandé et retournée à l’expéditeur à l’expiration du délai de mise en instance.

13. En quatrième lieu, il résulte de l’instruction que les bases de l’impôt sur le revenu au titre de l’année 2008 ont été notifiées à Mme B== par lettre du 17 novembre 2009 dont elle a accusé réception le 19 novembre 2009. La requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que cette proposition de rectification ne satisferait pas aux exigences de l’article L. 76 du livre des procédures fiscales en l’absence de précisions suffisantes sur les « activités similaires s’exerçant dans des conditions comparables » à partir desquelles son bénéfice non commercial avait été évalué d’office dès lors que l’administration a ultérieurement renoncé à cette méthode d’évaluation par comparaison et s’est fondée sur les déclarations de l’intéressée. En effet, il résulte de l’instruction que le service a notifié une proposition de rectification modificative du 12 février 2010 relative aux bases d’imposition de l’année 2007 qui indique que les bénéfices non commerciaux ont été évalués sur la base des éléments déclarés par Mme B==, repris sous forme de tableau, et que le revenu global était taxé d’office pour défaut de déclaration. Contrairement aux allégations de la requérante, la proposition de rectification en litige précise que l’intéressée ne peut pas prétendre à l’exonération prévue à l’article 44 octies A du code général des impôts et qu’en conséquence son bénéfice non commercial sera soumis à l’impôt sur le revenu. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation des lettres des 17 novembre 2009 et 12 février 2010 notifiant les bases de la taxation d’office doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

14. Aux termes de l’article 44 octies A du code général des impôts : « I. les contribuables qui (…) entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2011, exercent des activités dans les zones franches urbaines définies au deuxième alinéa du B du 3 de l’article 42 de la même loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’o... sont exonérés d’impôt sur le revenu (…) à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu’au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu’au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l’une de ces zones. Ces bénéfices sont soumis à l’impôt sur le revenu (…) à concurrence de 40%, 60% ou 80% de leur montant selon qu’ils sont réalisés respectivement au cours des cinq premières, de la sixième et septième ou de la huitième et neuvième périodes de douze mois suivant cette période d’exonération / (…) d. Son activité soit être (…) une activité professionnelle non commerciale au sens du 1 de l’article 92. (…) / II. – L’exonération s’applique au bénéfice d’un exercice ou d’une année d’imposition, déclaré selon les modalités prévues aux articles 50-0, 53 A, 96 à 100, 102 ter et 103 (…) ». Aux termes de l’article 97 du même code : « Les contribuables soumis obligatoirement ou sur option au régime de la déclaration contrôlée sont tenus de souscrire chaque année, dans des conditions et délais prévus aux articles 172 et 175, une déclaration dont le contenu est fixé par décret ».

15. Il résulte des dispositions précitées que le manquement aux obligations déclaratives prévues aux articles 53A et 175 du code général des impôts entraîne de ce seul fait l’exclusion du bénéfice du régime de faveur prévu au I de l’article 44 octies A du code général des impôts.

16. Aux termes de l’article 302 nonies du code général des impôts applicable aux faits du litige: « Les allégements d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés prévus aux articles (…) 44 octies A(…) ne s’appliquent pas lorsqu’une ou des déclarations de chiffre d’affaires se rapportant à l’exercice concerné n’ont pas été souscrites dans les délais et qu’il s’agit de la deuxième omission successive ».

17. Il résulte de l’instruction que l’administration a arrêté les bénéfices non commerciaux des années 2007 et 2008 de la requérante selon les éléments figurant sur les déclarations modèle 2035 établies par cette dernière, mais qu’elle a remis en cause le bénéfice du régime de l’article 44 octies A précité.

18. Ainsi que cela a été établi précédemment, Mme B== a omis de satisfaire à ses obligations déclaratives en matière de résultats. Ce motif suffisait à justifier l’exclusion du bénéfice des dispositions précitées de l’article 44 octies A du code général des impôts. La circonstance, invoquée par la requérante, que deux omissions successives de déclarations de chiffre d’affaires ne pouvaient lui être reprochées, est inopérante dès lors que la tolérance prévue par l’article 302 nonies du code général des impôts en matière de déclarations de chiffre d’affaires ne peut bénéficier qu’aux contribuables qui ont par ailleurs respecté leurs obligations déclaratives en matière de résultats.

19. Enfin, les stipulations de l’article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales sont applicables aux seules procédures contentieuses suivies devant les juges statuant en matière pénale ou tranchant des contestations sur les droits et obligations de caractère civil. La remise en cause de l’allégement d’impôt prévu par les dispositions de l’article 44 octies du code général des impôts du seul fait que le contribuable a omis de satisfaire à ses obligations déclaratives, ne revêt pas le caractère d’une sanction. Ainsi, Mme B== ne peut utilement soutenir que les dispositions du 44 octies A du code précité méconnaîtraient les stipulations de l’article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Pour le même motif, le moyen tiré de ce que l’administration aurait prononcé une sanction dont l’application exige une motivation et qui est subordonnée au principe de proportionnalité ne peut qu’être écarté. 20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B== n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à la mise en œuvre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative

21. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante à l’instance, la somme que demande Mme B== au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B== est rejetée.