Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL GTM Guadeloupe et les sociétés BDM Architecte, Michel Corbin Architecte, EGIS Bâtiment Antilles-Guyane et ETEC ont demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner l’hôpital local de Capesterre-Belle-Eau à verser, en réparation des préjudices qu’elles estiment avoir subis en raison de leur éviction irrégulière de la consultation portant sur la conception-réalisation du nouvel hôpital local, les sommes de : - 3 467 542,94 euros à la société GTM Guadeloupe ; - 264 228,73 euros à la société BDM Architecture ; - 74 255,58 euros à la société Michel Corbin ; - 227 565,50 euros à la société EGIS Bâtiment Antilles-Guyane ; - 11 308,99 euros à la société ETEC.

Par un jugement n° 1201020 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de la Guadeloupe a condamné le centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau à verser, en raison de leur éviction irrégulière du marché en litige, les sommes de : - 1 091 547,88 euros à la société GTM Guadeloupe ; - 148 010,73 euros à la société BDM Architectes ; - 13 043,74 euros à la société Michel Corbin Architectes ; - 120 956,77 euros à la société EGIS Bâtiment Antilles-Guyane ; - 11 308,95 euros à la société ETEC. Il a également condamné le centre hospitalier à verser à chacune de ces sociétés la somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative.




Procédure devant la cour :

I] Par une requête enregistrée le 17 février 2016,sous le n°16BX00695, et deux mémoires présentés les 17 mai et 17 juin 2016, le Centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau, représenté par Me Sarah Beau, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 19 novembre 2015 ;

2°) de rejeter les demandes de première instance présentées par les sociétés GTM Guadeloupe, BDM Architecte, Michel Corbin Architecte, EGIS Bâtiment Antilles-Guyane et ETEC ;

3°) de mettre à la charge du groupement constitué par ces sociétés la somme de 10 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


II] Par une requête enregistrée le 17 février 2016, sous le n° 16BX00696, le centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau demande à la cour : - de surseoir à l’exécution du jugement n° 1201020 rendu le 19 novembre 2015 par le tribunal administratif de Guadeloupe ; - de mettre à la charge des sociétés GTM Guadeloupe, BDM Architecte, Michel Corbin Architecte, EGIS Bâtiment Antilles-Guyane et ETEC, une somme de 10 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il reprend les mêmes moyens que ceux exposés dans l’instance enregistrée sous le n° 16BX00695


Considérant ce qui suit :

1. Par deux avis d’appel public à la concurrence publiés au BOAMP du 7 juin 2006 et au Journal officiel de l’Union européenne du 8 juin 2006, l’hôpital local de Capesterre-Belle-Eau a lancé une procédure d’appel d’offres restreint portant sur la construction d’un nouvel hôpital local dans la commune. Le marché de conception-réalisation de cet hôpital a été attribué le 2 février 2007 au groupement ayant pour mandataire la société Alfa Bâtiment, dont l’offre a été jugée la meilleure, et, le même jour, le groupement constitué par la SARL GTM Guadeloupe, mandataire du groupement, et les sociétés BDM Architecte, Michel Corbin Architecte, EGIS Bâtiment Antilles-Guyane et ETEC, a été informé du rejet de son offre. Saisi par ces cinq sociétés d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision d’attribuer le marché au groupement représenté par la société Alfa Bâtiment et celle de signer le marché avec ce dernier, le tribunal administratif de la Guadeloupe a, par un jugement du 10 novembre 2011, annulé ces décisions en se fondant sur le vice de procédure tenant à la modification de la composition du jury en cours d’instance mais a rejeté les conclusions tendant à ce que le contrat soit déclaré nul. Par lettre du 11 juin 2012 adressée à l’établissement public hospitalier le 29 mai 2012, les sociétés GTM Guadeloupe, BDM Architecte, Michel Corbin Architecte, EGIS Bâtiment et ETEC, ont demandé à être indemnisées des préjudices subis en raison de leur éviction irrégulière du marché. Par un jugement n° 1201020 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de la Guadeloupe a condamné l’hôpital local à verser une indemnité de 1 091 547,88 euros à la société GTM Guadeloupe, de 148 010,73 euros à la société BDM Architectes, de 13 043,74 euros à la société Michel Corbin Architectes, de 120 956,77 euros à la société EGIS Bâtiment Antilles-Guyane et de 11 308,95 euros à la société ETEC. Il a également condamné le centre hospitalier à verser à chacune de ces sociétés la somme de 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une première requête enregistrée sous le n° 16BX00695, l’hôpital local de Capesterre-Belle-Eau relève appel de ce jugement en tant qu’il a prononcé ces condamnations. Par une seconde requête enregistrée sous le n° 16BX00696, il demande à la cour de surseoir à l’exécution de ce jugement.

2. Les requêtes n°s 16BX00695 et 16BX00696, dirigées contre le même jugement, sont jointes pour y statuer par un seul arrêt.

Sur l’exception de prescription quadriennale soulevée par le centre hospitalier :

3. Le centre hospitalier soutient que le marché ayant été conclu en 2007, les créances des requérantes étaient prescrites le 1er janvier 2012 dans la mesure où le groupement évincé n’a pas présenté de recours relatif au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement des créances litigieuses avant le 29 mai 2012.

4. Aux termes de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics : «Sont prescrites, au profit de l’Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n’ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis./ Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d’un comptable public». En vertu de l’article 2 de la même loi : «La prescription est interrompue par : / Tout recours formé devant une juridiction relatif au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l’auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître et si l’administration qui aura finalement la charge du règlement n’est pas partie à l’instance / Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l’interruption. Toutefois, si l’interruption résulte d’un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ».

5. Comme il a été précisé au point 1, les membres du groupement ayant pour mandataire la SARL GTM Guadeloupe ont formé devant le tribunal administratif un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du directeur de l’hôpital local d’attribuer le marché au groupement représenté par la société Alfa Bâtiment. La notification de la décision de ne pas retenir l’offre du groupement ayant pour mandataire la société GTM Guadeloupe a constitué le fait générateur des créances invoquées par les membres de ce groupement. Dès lors que cette décision est le corollaire de celle attribuant le marché au groupement représenté par la société Alfa Bâtiment dont l’offre a été jugée comparativement meilleure, le recours pour excès de pouvoir formé contre cette dernière décision doit être regardé comme portant sur le « fait générateur » des créances invoquées à l’encontre de l’hôpital local, au sens et pour l’application des dispositions précitées de l’article 2 de la loi du 31 décembre 1968. Ce recours, formé le 21 mars 2007, a interrompu le cours de la prescription qui n’a recommencé à courir qu’à compter du 1er janvier de l’année qui a suivi celle au cours de laquelle a expiré le délai d’appel contre le jugement du tribunal administratif du 10 novembre 2011. Par suite, la créance des sociétés évincées de ce marché n'était pas prescrite lorsqu’elles ont présenté, le 29 mai 2012, une demande d’indemnisation. Dès lors, c’est à juste titre que le tribunal administratif a écarté l’exception de prescription quadriennale opposée par le centre hospitalier.

Sur le caractère irrégulier de l’éviction du marché :

6. Faisant application des dispositions du III de l’article 53 et de l’article 35 du code des marchés publics dans leur rédaction issue du décret n° 2006-975 du 1er août 2006, le tribunal administratif a estimé que l’offre du groupement Alfa était inacceptable dès lors qu’elle ne prévoyait que 210 places de stationnement alors que le projet de conception/réalisation du nouvel hôpital local impliquait, pour satisfaire aux prescriptions de l’article 1NA 12 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune, la création de 278 emplacements de stationnement.

7. Aux termes du III de l’article 53 du code des marchés publics issu du décret n° 2006 975 du 1er août 2006 : « Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. Les autres offres sont classées par ordre décroissant. L'offre la mieux classée est retenue. ». En vertu de l’article 35.I.1° de ce code issu de ce même décret : « (…) Une offre est inacceptable si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur (…) ». Enfin, aux termes du III de l’article 8 de ce décret du 1er août 2006 : « Les marchés publics pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d'appel public à la concurrence envoyé à la publication antérieurement à la date d'entrée en vigueur du présent décret demeurent régis, pour leur passation, par les dispositions du code des marchés publics dans leur rédaction antérieure aux dispositions annexées au présent décret. Leur exécution obéit aux dispositions annexées au présent décret. ».

8. Il résulte des dispositions précitées du III de l’article 8 du décret du 1er août 2006, que ce décret régit uniquement la passation des marchés dont la consultation a été engagée à une date postérieure à son entrée en vigueur le 1er septembre 2006. En l’espèce, l’avis d’appel public à la concurrence ayant été publié en juin 2006, la passation du marché en litige devait respecter les dispositions du code des marchés publics issues du décret du 7 janvier 2004. Par suite, en faisant application, pour retenir l’irrégularité de la procédure de passation du marché, de dispositions qui n’étaient pas encore applicables, le tribunal administratif a méconnu le champ d’application de la loi. Il appartient dès lors à la cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les moyens par lesquels les sociétés GTM Guadeloupe, BDM Architecte, Michel Corbin Architecte, EGIS Bâtiment Antilles-Guyane et ETEC ont sollicité la condamnation de l’hôpital local de Capesterre-Belle-Eau à les indemniser des préjudices découlant de leur éviction du marché.

9. Quand bien même le code des marchés publics dans sa version applicable en l’espèce ne définissait pas la notion d’offre inacceptable, devait être regardée comme telle une offre qui, si elle avait été retenue, aurait conduit à la signature d’un contrat dont les conditions d’exécution auraient été contraires à la loi. Par suite, une offre méconnaissant les règles d’urbanisme applicables sur le territoire d’implantation du projet de construction constituant l’objet du contrat, même si ces règles ne se rapportent pas à la passation des marchés publics, devait être regardée comme inacceptable et ne pouvait dès lors qu’être rejetée.

10. L’hôpital local soutient que le projet du groupement Alfa Bâtiment ne méconnait pas les exigences de l’article 1NA 12 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune alors applicable dès lors que cet article, en son point 4, prévoit la possibilité d’adaptations en cas d’impossibilité de réaliser le nombre de places de stationnement requis, et que ce nombre d’emplacements n’ayant été indiqué qu’à l’occasion d’une visite de site réalisée le 15 septembre 2006, il ne constituait pas une exigence du dossier de consultation.

11. Aux termes de l’article 1NA 12 du règlement du plan d’occupation des sols de Capesterre-Belle-Eau, relatif au stationnement des véhicules : « 12.1 – Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations est assuré en dehors des voies publiques. / 12.2. – Les normes de stationnement sont ainsi définies : (…) / 12.2-5 – Constructions à usage d’activité : 1 place pour 60 m² de SHOB (…). / 12.3 La règle applicable aux constructions et installations non prévues ci-dessus est celle à laquelle ces établissements sont le plus directement assimilables. / 12.4 Dans le cas où le constructeur ne peut réaliser sur son terrain le nombre de places de stationnement correspondant aux normes ci-dessus, il lui sera demandé soit une participation à la construction d’un parking collectif correspondant au nombre de places de stationnement que son projet ne peut fournir, soit la concession à long terme dans un parc public existant ou en cours de réalisation pour le nombre de places manquantes (L. 421-3 du code de l’urbanisme) ».

12. D’une part, il résulte de l’instruction que l’hôpital local projeté devait comporter principalement des locaux de soins, d’hébergement, des bureaux et des locaux techniques. Ce projet, qui n’entre dans aucune des catégories visées par l’article 1NA 12 du plan d’occupation des sols de la commune, devait donc se voir appliquer, en vertu de l’article 12.3 précité, la règle concernant les établissements auxquels il peut être assimilé. Eu égard à sa nature, c’est à bon droit que les premiers juges ont considéré que ce projet devait être assimilé à une construction à usage d’activité et qu’il devait ainsi prévoir une place de stationnement pour 60 m² de surface hors œuvre brute, comme l’avait d’ailleurs admis le maître d’ouvrage dans sa réponse n° 6 apportée à une question des candidats à la suite d’une visite du site réalisée le 15 septembre 2006.



13. D’autre part, il résulte de l’instruction que le projet proposé par le groupement attributaire du marché prévoyait la création de 16 705 m² de surface hors œuvre brute (SHOB). Il devait ainsi, en application des dispositions précitées du règlement du plan d’occupation des sols, prévoir la réalisation de 279 emplacements de stationnement. Or, selon le projet graphique produit par le groupement Alfa Bâtiment, seules 210 places de stationnement avaient été prévues par ce dernier. Si l’hôpital local se prévaut des dispositions précitées de l’article 1NA 12 du plan d’occupation des sols permettant au constructeur de se soustraire aux obligations imposées par un document d’urbanisme en matière de réalisation d’aires de stationnement, il ne soutient ni même n’allègue qu’il existerait, en l’espèce, une impossibilité technique de se conformer à ses obligations, alors au demeurant que le projet du groupement représenté par la société GTM Guadeloupe respectait le nombre d’emplacements de stationnement requis par le plan d’occupation des sols. Dans ces conditions, c’est à bon droit que le tribunal a estimé que l’offre du groupement Alfa aurait dû être rejetée comme inacceptable en vertu du principe énoncé au point 9 du présent arrêt. 14. Il résulte de ce qui précède qu’en n’excluant pas l’offre du groupement représenté par la société Alfa Bâtiment et en lui attribuant le marché, le centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau a entaché d’irrégularité la procédure d’attribution de ce marché.

Sur la réparation :

15. Lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le marché. Dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité. Dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre. Il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché. Dans un tel cas, l'entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre qui n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique.

En ce qui concerne la chance sérieuse du groupement évincé à remporter le contrat :

16. Le centre hospitalier soutient que le groupement évincé n’avait pas de chance sérieuse de remporter le marché et ne saurait dès lors prétendre à être indemnisé de son manque à gagner dès lors que pour les critères 2, 3, 4 et 5 représentant 75% de la notation, son offre n’avait pas été classée en première position.

17. Cependant, il résulte de l’instruction, et en particulier du rapport du jury, que l’offre du groupement représenté par la société GTM Guadeloupe est arrivée en seconde position, derrière celle du groupement attributaire, pour l’ensemble des critères, et que, concernant les critères 2, 3, 4 et 5, son offre avait, au regard des notes retenues, été qualifiée de « satisfaisante ». Ce groupement avait ainsi obtenu la note de 82,47 sur 100. La commission technique avait d’ailleurs souligné le caractère satisfaisant du projet de ce groupement, s’agissant des surfaces prévues et de sa fonctionnalité. Dans ces conditions, c’est à juste titre que les premiers juges ont estimé que ce groupement aurait eu une chance sérieuse de remporter ce marché si l’offre du groupement attributaire avait été rejetée. Par suite, les sociétés constituant le groupement évincé sont fondées à solliciter l’indemnisation de leur manque à gagner.

En ce qui concerne le montant des préjudices :

18. Contrairement à ce que soutient l’hôpital local, le chiffre d’affaires attendu de la réalisation du marché par les entreprises qui en ont été irrégulièrement évincées doit être évalué à partir des mentions de l’acte d’engagement qu’elles ont signé dans le cadre de l’offre qu’elles ont elles-mêmes présentée.

S’agissant de la société GTM Guadeloupe :

19. En vertu de l’acte d’engagement du groupement, la quote-part du marché de travaux qui aurait dû être réalisée par la SARL GTM Guadeloupe s’élève à la somme de 42 034 884,85 euros hors taxe. Il convient de déduire, de ce chiffre d’affaires attendu, le chiffre d’affaires réalisé par cette société, lequel est constitué de la quote-part de la prime versée au groupement évincé, quote-part qui s’élève à 11 223,83 euros hors taxe. En revanche, les frais exposés par cette société pour l'établissement de l’offre, en l'absence de stipulations contractuelles prévoyant leur prise en charge par le maître d'ouvrage, sont au nombre de ceux qui lui incombaient normalement d'engager pour obtenir l'attribution du marché et qui devaient trouver leur contrepartie dans la rémunération afférente à la réalisation de ce dernier. Cette société n’est dès lors pas fondée à en demander l'indemnisation. Dans ces conditions, le chiffre d’affaires perdu par cette société s’élève à la somme de 42 023 661,02 euros hors taxes. Afin de déterminer le bénéfice net que cette société aurait dû percevoir si l’offre de son groupement avait été retenue, il convient d’appliquer, à ce dernier montant, son taux de marge nette durant les années au cours desquelles aurait dû être exécuté ce marché. D’après les soldes intermédiaires de gestion produits par la société GTM, qui font apparaître son chiffre d’affaires et le résultat courant avant impôt, le taux de marge nette moyen sur les trois exercices 2007 à 2009 s’établit à 3,08 %. Par suite, le manque à gagner de la société GTM Guadeloupe s’établit à un montant supérieur à celui de l’indemnité allouée par le jugement attaqué, jugement dont la société ne demande pas la réformation.

S’agissant de la société BDM Architectes :

20. En vertu de l’acte d’engagement du groupement, la quote-part du marché de travaux qui aurait dû être réalisée par la société BDM Architecte s’élève à la somme de 1 179 724, 56 euros hors taxe. Comme précédemment, il convient de déduire de ce chiffre d’affaires attendu, la quote-part de la prime versée au groupement en qualité de candidat évincé, soit la somme de 67 339,45 euros hors taxe. En revanche, et ainsi qu’il a été dit au point précédent, les frais exposés par cette société pour l'établissement de l’offre ne peuvent faire l’objet d’une indemnisation. Dans ces conditions, le chiffre d’affaires perdu par cette société s’élève à la somme de 1 112 385,11 euros. Dans ses écritures devant la cour, la société BDM Architectes revendique un taux de marge nette de 4,71%. Il s’ensuit que le manque à gagner de cette société doit être évalué à la somme de 52 393,34 euros hors taxes. Par suite, il y a lieu de ramener à ce montant l’indemnité que l’hôpital local a été condamné à verser à la société BDM Architectes.

S’agissant de la société Michel Corbin Architectes :

21. En vertu de l’acte d’engagement du groupement, la quote-part du marché de travaux qui aurait dû être réalisée par la société Michel Corbin Architectes s’élève à la somme de 839 351,71 euros hors taxe, de laquelle il convient de déduire la quote-part de la prime versée au groupement en qualité de candidat évincé, soit 16 834,86 euros hors taxe. Ainsi qu’il a été dit au point précédent, les frais exposés par cette société pour l'établissement de l’offre ne peuvent faire l’objet d’une indemnisation. Dans ces conditions, le chiffre d’affaires perdu par cette société s’élève à la somme de 822 516,85 euros. Il convient d’appliquer à ce dernier montant le taux de marge nette, qui s’établit, d’après les bilans comptables produits, à 1,26 % en moyenne pour les trois exercices 2007 à 2009. Par suite, l’indemnité que le tribunal a condamné l’hôpital local à verser à la société Michel Corbin Architectes doit être ramenée à la somme de 10 363,71 euros.

S’agissant de la société EGIS Bâtiment Antilles-Guyane :

22. En vertu de l’acte d’engagement du groupement, la quote-part du marché de travaux qui aurait dû être réalisée par la société EGIS Bâtiment Antilles-Guyane s’élève à la somme de 1 426 803,26 euros hors taxe, de laquelle il convient de déduire la prime en qualité de candidat évincé, soit la somme de 13 467,89 euros hors taxe. En revanche, et ainsi qu’il a été dit au point précédent, les frais exposés par cette société pour l'établissement de l’offre, ne peuvent faire l’objet d’une indemnisation. Dans ces conditions, le chiffre d’affaires perdu par cette société s’élève à la somme de 1 413 335,37 euros. Il convient d’appliquer à ce dernier montant le taux de marge nette, soit, d’après les soldes intermédiaires produits par cette société, un taux moyen sur les trois exercices 2007 à 2009 de 7,86 %. Par suite, il y a lieu de ramener l’indemnité que le tribunal a condamné l’hôpital local à verser à la société EGIS Bâtiment Antilles-Guyane à la somme de 111 088,16 euros hors taxes.

S’agissant de la société ETEC :

23. Le tribunal a condamné l’hôpital local de Capesterre-Belle-Eau à verser une indemnité de 11 308,95 euros toutes taxes à la société ETEC au titre des dépenses d’ingénieur, de projeteurs, de secrétariat et d’autres dépenses diverses que cette société établit avoir exposées pour l’attribution de ce marché et qu’elle avait d’ailleurs chiffrées à la somme totale de 13 790 euros. En défense, l’hôpital local ne conteste pas le bien-fondé de cette condamnation. Par suite, le jugement ne peut qu’être confirmé sur ce point.

24. Il résulte de tout ce qui précède que l’hôpital local de Capesterre-Belle-Eau est seulement fondé à demander que les indemnités attribuées par le jugement attaqué aux sociétés BDM Architectes, Michel Corbin Architectes et EGIS Bâtiment Antilles-Guyane soient ramenées aux montants respectifs de 52 393,34 euros, 10 363,71 euros et 111 088,16 euros.

Sur la demande tendant au sursis à exécution du jugement attaqué :

25. Le présent arrêt statue au fond sur les conclusions d’appel du centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau. Par suite, les conclusions de cet hôpital tendant au prononcé du sursis à exécution du jugement n° 1201020 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de la Guadeloupe deviennent sans objet.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

26. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties en application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Les indemnités que le tribunal administratif de la Guadeloupe a condamné le centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau à verser à la société BDM Architectes, Michel Corbin Architectes et EGIS Bâtiment Antilles-Guyanne sont réduites aux sommes respectives de 52 393,34 euros, 10 363,71 euros et 111 088,16 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1201020 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de la Guadeloupe est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 16BX00696 du centre hospitalier de Capesterre-Belle-Eau tendant à ce qu’il soit sursis à l’exécution du jugement n° 1201020 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de la Guadeloupe.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.