Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Sau Val Dou a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision par laquelle le préfet de l’Aveyron a implicitement rejeté sa demande tendant au retrait de l'autorisation de droit d'eau délivrée à M.== le 9 mars 1983 aux fins d'exploiter une microcentrale hydraulique sur la rivière le Dourdou sur le territoire de la commune de Montlaur.

Par un jugement n° 1203492 du 11 janvier 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2016, l’association Sau Val Dou, représentée par Me Faure-Pigeyre, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 janvier 2016 ;

2°) d’annuler la décision implicite de rejet prise par le préfet de l’Aveyron et de constater en conséquence que l’autorisation préfectorale délivrée à M.== le 9 mars 1983 est devenue sans objet et devait être retirée ou abrogée ;

3°) de rejeter les demandes présentées à son encontre par les autres parties au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 mars 1983, le préfet de l’Aveyron a autorisé M.== à disposer de l’énergie de la rivière le Dourdou, pour une durée de quarante ans, au moyen d’une micro-centrale hydraulique, dite du Moulin Neuf, située sur le territoire de la commune de Montlaur. A la suite d’une crue survenue au début de l’année 2003, la rivière est sortie de son lit et a cessé d’alimenter la micro-centrale exploitée par M.==. Le 27 mars 2012, l’association Sauvegarde de la Vallée du Dourdou de Camarès (Sau Val Dou) a saisi le préfet de l’Aveyron d’une demande tendant à ce qu’il soit mis fin à l’arrêté du 9 mars 1983 au motif que la micro-centrale hydraulique a été laissée à l’abandon, faute d’un entretien régulier. L’association Sau Val Dou a demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler la décision par laquelle le préfet a implicitement rejeté sa demande du 27 mars 2012. Elle relève appel du jugement rendu le 11 janvier 2016 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la légalité de la décision implicite de rejet du préfet de l’Aveyron :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Aux termes de l’article 5 de la loi du 11 juillet 1979, applicable en l’espèce : « Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (…) ». 3. Il ne ressort des pièces du dossier que l’association Sau Val Dou ait demandé au préfet de l’Aveyron de lui communiquer les motifs de la décision implicite de rejet de son recours gracieux, formulé le 27 mars 2012, à l’encontre de l’autorisation délivrée à M.== le 9 mars 1983. Dans ces conditions, et en tout état de cause, l’association n’est pas fondée à soutenir que cette décision implicite est illégale du fait de son absence de motivation.

En ce qui concerne la légalité interne :

4. En premier lieu, la demande présentée par l’association requérante le 27 mars 2012 se fondait sur l’article L. 214-4 du code de l'environnement qui, aux termes de sa version alors applicable, était ainsi rédigé : « II. - L'autorisation peut être abrogée ou modifiée, sans indemnité de la part de l'Etat exerçant ses pouvoirs de police, dans les cas suivants : 1° Dans l'intérêt de la salubrité publique, et notamment lorsque cette abrogation ou cette modification est nécessaire à l'alimentation en eau potable des populations ; 2° Pour prévenir ou faire cesser les inondations ou en cas de menace pour la sécurité publique ; 3° En cas de menace majeure pour le milieu aquatique, et notamment lorsque les milieux aquatiques sont soumis à des conditions hydrauliques critiques non compatibles avec leur préservation ; 4° Lorsque les ouvrages ou installations sont abandonnés ou ne font plus l'objet d'un entretien régulier (…) ».

5. A l’appui de sa demande dirigée contre l’arrêté du 9 mars 1983, l’association Sau Val Dou a fait valoir que la micro-centrale du Moulin Neuf avait cessé toute activité depuis le mois de janvier 2004 et que l’état d’abandon dans lequel elle se trouve favorise un ensablement des lieux de nature à aggraver l’érosion de la rive droite du cours d’eau.

6. En vertu des dispositions précitées du II de l’article L. 214-4 du code de l'environnement, le préfet ne peut abroger une autorisation que dans les cas qu’elles visent. Toutefois, même si l’un de ces cas est constitué, le préfet conserve un pouvoir d’appréciation et n’est donc pas tenu de faire droit à la demande d’abrogation dont il est saisi.

7. La rivière le Dourdou étant sortie de son lit à la suite d’une crue survenue début 2003, la micro-centrale exploitée par M.== sur le fondement de l’autorisation préfectorale du 9 mars 1983 a cessé de fonctionner faute d’être alimentée en eau. Il résulte de l’instruction que le 11 mars 2003, M.== a sollicité du préfet une autorisation de réaliser des travaux permettant au cours d’eau de retrouver son tracé initial. Toutefois, ces travaux n’ont pu être réalisés en raison du refus de M.==, propriétaire riverain du Dourdou en amont de l’ouvrage mais aussi membre de l’association requérante, d’autoriser le passage des engins de chantier sur sa propriété. M.==, estimant que M.== était responsable de la cessation d’activité de son installation, a assigné ce dernier devant le juge judiciaire afin qu’il soit condamné à remettre les berges en état pour permettre au cours d’eau de retrouver son lit initial. Par un arrêt du 23 janvier 2008, confirmé en cassation, la cour d’appel de Montpellier a jugé que M.== était seul responsable des dommages subis par M.== en tant que propriétaire de la micro centrale et l’a condamné, sous astreinte, à remettre les lieux dans leur état initial. Cette décision était motivée par le fait que les berges de la rivière avaient été fragilisées par l’abattage de plusieurs arbres effectués en 1999 par M.==, ce qui a provoqué leur effondrement à la suite de la crue de 2003. Au cours des années 2013, 2014 et 2015, les juridictions de l’ordre judiciaire ont, à la demande de M.==, liquidé l’astreinte dont était assortie l’injonction de l’arrêt de la cour d’appel du 23 janvier 2008. Les différentes actions entreprises, d’ailleurs avec succès, par M.== pour faire valoir ses droits devant le juge judiciaire démontrent sa volonté de reprendre l’exploitation de sa micro-centrale dont l’interruption a eu pour origine une cause extérieure à la volonté de l’exploitant. Dans ces circonstances particulières, cet ouvrage ne peut être considéré comme ayant été abandonné au sens du 4° précité de l’article L. 214-4 du code de l'environnement.

8. Par ailleurs, il ne résulte pas de l’instruction, et notamment du constat d’huissier réalisé le 10 avril 2013 à la demande de l’association requérante, que la micro-centrale du Moulin Neuf présentait un état particulier de délabrement. Au contraire, les pièces et documents photographiques produits par le préfet en première instance montrent que M.== a fait procéder, dans le courant de l’année 2015, à des travaux d’entretien du plan d’eau et des ouvrages de sa micro-centrale. Il est vrai que ces travaux n’établissent pas, à eux seuls, que l’ouvrage aurait fait l’objet d’un entretien régulier au sens du 4° précité de l’article L. 214-4 du code de l'environnement depuis qu’il a cessé de fonctionner en 2004. Toutefois, comme dit au point précédent, cette cessation d’activité est extérieure à la volonté de M.== dès lors qu’elle est exclusivement imputable à M.== qui a en outre refusé le passage sur sa propriété des engins nécessaires aux travaux destinés à permettre la remise en route de la micro-centrale. Compte tenu de cette circonstance particulière, le préfet de l’Aveyron ne peut être regardé, du seul fait de l’absence d’entretien régulier, comme ayant commis une erreur d'appréciation en rejetant la demande présentée par l’association Sau Val Dou à l’encontre de l’arrêté d’autorisation du 9 mars 1983.

9. En deuxième lieu, l’article 24 de l’arrêté du 9 mars 1983 prévoit également que le préfet peut mettre fin à l’autorisation dans l’hypothèse où l’entreprise cesse d’être exploitée pendant une durée de deux ans. Si tel est le cas en l’espèce, il résulte des circonstances particulières de l’espèce, telles que rappelées aux points 6 à 8, que le préfet n’a pas commis d’erreur d’appréciation en rejetant la demande de l’association.

10. En troisième lieu, en se bornant à soutenir que l’arrêté du 9 mars 1983 est illégal, de sorte que le préfet était tenu de le retirer, au motif que « les dispositions de l’article L. 214-4 du code de l'environnement n’ont pas été strictement reprises dans les prescriptions dudit arrêté », l’association requérante n’assortit pas son moyen de précisions suffisantes permettant à la cour d’en apprécier le bien-fondé.

11. En quatrième lieu, la circonstance que le certificat ouvrant droit à obligation d’achat d’électricité dont bénéficiait M.== auprès d’EDF n’ait pas été renouvelé à compter du 9 octobre 2012 n’implique pas que ce dernier aurait renoncé à poursuivre son exploitation. Par suite, l’association ne saurait utilement s’en prévaloir pour soutenir que le préfet a commis une illégalité en rejetant sa demande d’abrogation.

12. En cinquième lieu, il résulte des points qui précèdent que le préfet n’a pas, en rejetant la demande de l’association, entendu favoriser les intérêts privés d’un administré et porté atteinte au principe d’égalité de traitement entre les usagers de l’administration.

13. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué n’est pas établi.

14. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les fins de non recevoir, que l’association Sau Val Dou n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l’association Sau Val Dou est rejetée.