Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande enregistrée sous le n° 1301685, la société Jas Hennessy et Cie a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d’une part, la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2011 et la réduction à hauteur de 97 653 euros de la cotisation primitive de taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de cette même année dans les rôles de la commune de Cherves-Richemont à raison de son établissement dénommé Bagnolet, d’autre part, la condamnation de l’Etat au paiement d’intérêts moratoires en application de l’article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par une deuxième demande enregistrée sous le n° 1301693, cette même société a sollicité, d’une part, la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 à 2009 dans les rôles de la commune de Cherves-Richemont à raison de son établissement dénommé Bagnolet, la décharge de la cotisation supplémentaire foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2010 et la réduction à hauteur de la somme de 67 195 euros de la cotisation foncière des entreprises primitive à laquelle elle a été assujettie au titre de cette même année, d’autre part, la condamnation de l’Etat au paiement d’intérêts moratoires en application de l’article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par une troisième demande enregistrée sous le n° 1402252, cette même société a sollicité la décharge de la cotisation supplémentaire à la taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2012 et la réduction à hauteur de 99 842 euros de la cotisation primitive de taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de cette même année dans les rôles de la commune de Cherves-Richemont à raison de son établissement dénommé Bagnolet, ainsi que la condamnation de l’Etat au paiement d’intérêts moratoires en application de l’article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement unique n° 1301685-1301693-1402252 du 15 octobre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a donné acte du désistement partiel des conclusions de la société présentées à titre subsidiaire tendant à la réduction à hauteur de la somme de 137 556 euros de la cotisation de taxe foncière de l’année 2011, de la somme de 70 492 euros de la cotisation de taxe professionnelle de l’année 2007, de la somme de 75 948 euros de la cotisation de taxe professionnelle de l’année 2008, de la somme de 84 723 euros de la cotisation de taxe professionnelle de l’année 2009, de la somme de 34 978 euros de la cotisation foncière des entreprises de l’année 2010 et de la somme de 140 153 euros de la cotisation de taxe foncière de l’année 2012, et a rejeté le surplus des conclusions en décharge.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2015, et des mémoires présentés les 26 juillet 2016 et 25 janvier 2017, la société JAS Hennessy et Cie, représentée par Me Goarant-Moraglia et Me Barreau, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 15 octobre 2015 en tant qu’il a rejeté le surplus de ses demandes ;

2°) de la décharger de la taxe professionnelle et de la cotisation foncière des entreprises mises à sa charge au titre des années 2007 à 2010 à hauteur de la valeur locative foncière résultant de la requalification en locaux industriels de ses chais de vieillissement à barriques situés sur son site de Bagnolet ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761 1 du code de justice administrative.


Considérant ce qui suit :

1. La SCS Jas Hennessy et Cie dispose, dans le cadre de son activité d’élaboration et de vente de cognac, d’un établissement situé sur le site de Bagnolet, sur la commune de Cherves-Richemont, qui comprend exclusivement des chais de Cognac appelés « chais de vieillissement à barriques ». A l’issue d’une vérification de comptabilité, remettant en cause la nature commerciale de ces chais, l’administration a apprécié leur valeur locative par le biais de la méthode dite comptable applicable aux établissements industriels et prévue à l’article 1499 du code général des impôts. Les rehaussements de base d’imposition en résultant ont donné lieu à l’établissement notamment de suppléments de taxe professionnelle et de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2007 à 2010. Par trois demandes distinctes, la société a demandé au tribunal administratif de Poitiers, en particulier, la décharge de ces impositions. Après avoir joint les trois demandes, le tribunal administratif, par un jugement du 15 octobre 2015, a donné acte du désistement partiel des conclusions présentées à titre subsidiaire par la société et a rejeté le surplus de ses conclusions en décharge. La société Jas Hennessy et Cie relève appel de ce jugement en demandant à être déchargée de la taxe professionnelle et de la cotisation foncière des entreprises mises à sa charge au titre des années 2007 à 2010 en tant qu’elles procèdent de la requalification en locaux industriels de ses chais de vieillissement à barriques situés sur son site de Bagnolet.

Sur la régularité de l’établissement de l’impôt :

2. Il résulte des dispositions de l’article 1505 du code général des impôts que la commission communale des impôts directs, ou le cas échéant la commission intercommunale, doit être saisie en principe lors de chaque modification par l’administration de l’évaluation des locaux commerciaux et biens divers relevant de l’article 1498 de ce code. Les impositions contestées procèdent de ce que l’administration a entendu évaluer la valeur locative de l’établissement litigieux, non pas selon la méthode définie à cet article 1498, mais selon la méthode comptable définie à l’article 1499 du même code pour les établissements industriels. Par suite et en l’espèce, la consultation de ces commissions n’était pas requise. Dès lors, la société requérante ne saurait se prévaloir utilement de l’article 1505 du code général des impôts.

3. La société requérante ne saurait non plus se prévaloir utilement de la circulaire du 28 février 2008 relative aux informations fiscales utiles à la préparation des budgets primitifs locaux pour 2008, laquelle ne prévoit pas, en tout état de cause, la compétence de cette commission concernant les évaluations foncières des établissements industriels.

Sur le bien-fondé de l’impôt :

4. Aux termes du 1° de l’article 1469 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition 2007 à 2009, la valeur locative des immobilisations corporelles entrant dans l’assiette de la taxe professionnelle est calculée, pour les biens passibles de la taxe foncière, suivant les règles fixées pour l’établissement de cette taxe. De même, aux termes de l’article 1467 du même code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition 2010, la valeur locative des biens passibles d’une taxe foncière est calculée, pour l’établissement de la cotisation foncière des entreprises, suivant les règles fixées pour l’établissement de cette taxe. Les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont différemment définies, à l’article 1496 du code général des impôts pour ce qui est des « locaux affectés à l’habitation ou servant à l’exercice d’une profession autre qu’agricole, commerciale, artisanale ou industrielle », à l’article 1498 en ce qui concerne « tous les biens autres que les locaux d’habitation ou à usage professionnel visés à l’article 1496-I et les établissements industriels visés à l’article 1499 », et à l’article 1499 s’agissant des « immobilisations industrielles ».

5. Revêtent un caractère industriel, au sens de l’article 1499 du code général des impôts, les établissements dont l’activité nécessite d’importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d’une autre activité, est prépondérant.

6. Il résulte de l’instruction que les chais litigieux comportent essentiellement des barriques d’élevage entreposées sur des racks. Si ces éléments ne sauraient être regardés comme des « outillages » et n’impliquent aucune force motrice, ils constituent néanmoins des matériels et installations techniques pour l’application de l’article 1499 du code général des impôts. La valeur des barriques entreposées dans ces chais a été estimée à la somme non contestée de 31 245 313 euros et celle des racks et de leurs accessoires au montant de 4 107 073 euros. D’une part, et même en tenant compte de ce que les fûts de vieillissement sont utilisés durant plusieurs décennies, les chais en cause comprennent ainsi des moyens techniques importants. D’autre part, ces moyens, essentiels dans le processus de fabrication du cognac, jouent un rôle prépondérant dans l’activité exercée dans l’établissement. Dans ces conditions, c’est à bon droit que l’administration a estimé que l’établissement situé sur le site de Bagnolet à Cherves-Richemont revêtait un caractère industriel, au sens de l’article 1499 du code général des impôts.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’ordonner une visite des lieux, que la société Jas Hennessy et Cie n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté le surplus de ses demandes.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. L’Etat n’étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par la société Jas Hennessy et Cie au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ne peuvent être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Jas Hennessy et Cie est rejetée.