Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme M=== a demandé au tribunal administratif de Poitiers d’annuler la décision du 24 janvier 2013 par laquelle le directeur du centre hospitalier universitaire de Poitiers l’a obligée à reprendre son activité d’aide soignante pour une durée de 20 jours sur la période estivale du 1er juillet au 25 août 2013, ensemble la décision du 19 juin 2013 rejetant son recours gracieux ainsi que l’article 7 de son contrat de promotion professionnelle prévoyant son rappel en service durant le temps de sa formation signé le 11 janvier 2011.



Par un jugement n° 1301446 du 11 mars 2015, le tribunal administratif de Poitiers a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 mai 2015, le centre hospitalier universitaire de Poitiers, représenté par la SCP Pielberg-Kolenc, demande à la cour : 1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 mars 2015 ;



2°) de rejeter la demande présentée par Mme M=== ;

3°) de mettre à la charge de Mme M=== le versement d’une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761 1 du code de justice administrative.




Considérant ce qui suit :

1. Mme M=== qui exerçait les fonctions d'aide-soignante au centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers a suivi, dans le cadre de son droit à formation professionnelle et du dispositif d'études promotionnelles, une formation à l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de ce même centre hospitalier. Le directeur du centre hospitalier a demandé, par décision du 24 janvier 2013 confirmée sur recours gracieux le 19 juin 2013, à Mme M=== de reprendre son service d’aide-soignante durant une partie de sa période de congés universitaires du 1er juillet au 25 août 2013. Mme M=== a sollicité auprès du tribunal administratif de Poitiers l’annulation de ces deux décisions ainsi que de l’article 7 de son contrat d’études promotionnelles, signé avec le centre hospitalier le 11 janvier 2011, en tant qu'il prévoit la possibilité de son rappel dans les services de soins par l'employeur durant le temps de sa formation au cours des périodes où elle n’est ni en cours ni en stage clinique. Le CHU de Poitiers relève appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 mars 2015 qui a fait droit à la demande de Mme M===.

2. Aux termes de l’article 1er du décret du 4 janvier 2002, relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : « La durée du travail est fixée à 35 heures par semaine dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum ». Aux termes de l'article 1er du décret du 4 janvier 2002 relatif aux congés annuels des agents des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : « Tout fonctionnaire d'un des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée en activité a droit, dans les conditions et sous les réserves précisées aux articles ci-après, pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre, à un congé annuel d'une durée égale à cinq fois ses obligations hebdomadaires de service. / Cette durée est appréciée en nombre de jours ouvrés, sur la base de 25 jours ouvrés pour l'exercice de fonctions à temps plein (…) ». Aux termes de l'article 8 du décret du 21 août 2008 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de la fonction publique hospitalière : « Les agents qui suivent une formation inscrite au plan de formation de l'établissement bénéficient, pendant leur temps de travail, du maintien de leur rémunération. Lorsqu'ils ont la qualité de fonctionnaire ils sont maintenus en position d'activité ou, le cas échéant, de détachement. / Dans les cas prévus aux 3° et 4° de l'article 1er, les agents conservent leur traitement, leur indemnité de résidence et leurs indemnités à caractère familial. Ils conservent les autres indemnités et primes lorsque la durée totale l'absence pendant les heures de service n'excède pas en moyenne une journée par semaine dans l'année. ». Aux termes de l’article 12 de ce même décret : « Les actions inscrites au plan de formation ont lieu pendant le temps de travail (...) ». Aux termes de l’article 39 de l’arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’Etat d’infirmier : « La durée de la formation des infirmiers est de trois années, soit six semestres de vingt semaines chacun, équivalant à 4 200 heures. / La répartition des enseignements est la suivante : / 1° La formation théorique de 2 100 heures, sous la forme de cours magistraux (750 heures), travaux dirigés (1 050 heures) et travail personnel guidé (300 heures) ; / 2° La formation clinique de 2 100 heures. Le travail personnel complémentaire est estimé à 900 heures environ, soit 300 heures par an. L'ensemble, soit 5 100 heures, constitue la charge de travail de l'étudiant. ». Il résulte de ces dispositions que, d’une part, les agents qui bénéficient d’études promotionnelles préparatoires au diplôme d’Etat d’infirmier sont maintenus en position d'activité et restent soumis pour la détermination de leur droit à congés annuels aux dispositions de l’article 1er précité du décret n° 2002-8 du 4 janvier 2002 et que, d’autre part, le temps de travail personnel complémentaire à la formation théorique et pratique, qui est estimé par l’article 39 de l’arrêté du 31 juillet 2009 à 300 heures par an, s’il participe de la charge de travail des étudiants, telle qu’elle est évaluée notamment dans le cadre du système européen de transferts de crédits, conformément à l’article D. 611-2 du code de l’éducation, ne peut être assimilé à une action de formation au sens de l’article 12 précité du décret du 21 août 2008, devant être prise en compte au titre du temps de travail effectif d’un agent de la fonction publique hospitalière. Dans le cas où les heures de formation proprement dites, en l’espèce les 1 400 heures annuelles de formation théorique et pratique, n’atteignent pas le nombre d’heures de travail d’un agent en position d’activité, soit en l’espèce 1 607 heures en application du décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002, rien ne s’oppose donc, sous réserve du respect des droits à congés de l’agent, à ce que ce dernier soit appelé à reprendre son service durant les congés universitaires, indépendamment des heures qu’il consacre au travail personnel lié à la formation.



3. Eu égard à ce qui vient d’être dit, c’est à bon droit que le centre hospitalier n’a pas pris en compte le temps de travail personnel de Mme M=== pour déterminer le temps de formation des agents qui suivent la préparation au diplôme d’Etat d’infirmier. Ainsi, Mme M=== ne pouvant prétendre à un congé annuel d’une durée supérieure à cinq fois ses obligations hebdomadaires de service, soit 25 jours ouvrés, en application des dispositions de l’article 1er du décret n° 2002-8 du 4 janvier 2002, le directeur du CHU de Poitiers, en lui imposant de reprendre son service d’aide-soignante pendant une partie de sa période de congés universitaires, n’a pas porté atteinte au droit à la formation que l’intéressée tenait de son statut.

4. Les agents qui bénéficient du dispositif de formation en études promotionnelles, en l’espèce au diplôme d’infirmier, sont maintenus en position d’activité et ne se trouvent pas placés dans la même situation que les autres agents demeurant dans les services de soins. Ils ne sont pas non plus placés sous le même régime juridique que les autres étudiants qui ne sont pas régis par le dispositif de formation. Par conséquent, Mme M=== ne saurait invoquer une prétendue méconnaissance du principe d’égalité du fait qu’elle devrait accomplir tout ou partie du travail personnel lié à la préparation du diplôme d’Etat d’infirmier en sus du temps de travail statutaire.

5. Il résulte de ce qui précède que le CHU de Poitiers est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a retenu une rupture d’égalité pour annuler la décision du 24 janvier 2013 obligeant Mme M=== à reprendre son activité d’aide soignante pour une durée de 20 jours sur la période estivale du 1er juillet au 25 août 2013

6. Ainsi qu’il a été dit ci-dessus, l’obligation faite à Mme M=== de reprendre son service durant une partie de la période estivale ne méconnaît pas les dispositions légales et réglementaires régissant la situation de l’agent. Dès lors, en prévoyant, à l’article 7 de son contrat de promotion professionnelle, son rappel en service en dehors des périodes de cours et de stage, le centre hospitalier ne lui a pas imposé d’autres obligations que celles résultant des dispositions légales et règlementaires applicables à sa situation. Par suite, c’est également à tort que le tribunal administratif a retenu, pour annuler cet article 7, une méconnaissance de la position statutaire et réglementaire de l’agent.



7. Il appartient à la cour, saisie par l’effet dévolutif de l’appel de se prononcer sur les autres moyens présentés par la demanderesse de première instance devant le tribunal administratif.

Sur les conclusions à fin d’annulation des décisions des 24 janvier et 19 juin 2013 du directeur du CHU de Poitiers :

8. La décision du 19 juin 2013 confirmant la reprise d’activité de la requérante et rejetant son recours gracieux a été signée par Mme Y===, directrice adjointe chargée des ressources humaines au CHU de Poitiers, laquelle avait reçu une délégation de signature, pour « tous courriers, actes, décisions (…) relevant de la gestion du personnel non médical ainsi que pour toutes les décisions et correspondances relatives au déroulement de carrière de ces mêmes agents » en cas d’empêchement de Mme X=== directrice des ressources humaines, par décision n° 14-038, émanant du directeur général du CHU de Poitiers, régulièrement publiée le 14 mars 2013. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de la décision du 19 juin 2013 doit être écarté.



9. Mme M=== soutient que le temps de travail personnel complémentaire estimé à 300 heures annuelles, accompli par les élèves infirmiers, doit être pris en compte dans le calcul de la durée annuelle du temps de travail réservé à la formation, soit un total de 1 700 heures, ce qui est supérieur à la durée maximale de travail statutaire de 1 607 heures. Or, ainsi qu’il a été dit au point 3 du présent arrêt, il résulte des dispositions susvisées que c’est à bon droit que le centre hospitalier n’a pas pris en compte le temps de travail personnel de Mme M=== pour déterminer son temps de travail effectif dans le cadre de la préparation au diplôme d’Etat d’infirmier, sans que soit porté atteinte au droit à la formation que l’intéressée tenait de son statut. La requérante n’est donc pas fondée à soutenir que les décisions en litige auraient pour conséquence un dépassement de la durée statutaire du travail. Le moyen tiré de l’erreur de droit doit donc être écarté.

10. Si Mme M=== soutient que le CHU de Poitiers se livrerait à un « détournement de fonds » en la faisant travailler pendant la période estivale sans régler son traitement, il ressort des pièces du dossier que c’est bien le centre hospitalier de Poitiers et non l’association pour la formation permanente du personnel hospitalier qui procède au règlement du traitement de Mme M=== lors de ses reprises d’activité en tant qu’aide-soignante au sein des services du centre hospitalier. Ainsi le détournement de fonds allégué n’est pas établi.



Sur les conclusions à fin d’annulation de l’article 7 du « contrat de promotion professionnelle » signé le 11 janvier 2011 :

11. Les conclusions de la requête, assorties des mêmes moyens que ceux analysés ci-dessus, tendant à ce que le tribunal prononce l’annulation des stipulations de l’article 7 du « contrat de promotion professionnelle », signé le 11 janvier 2011 par Mme M===, prévoyant que l’intéressée exercera en qualité d’aide-soignante dans les services de soins de l’établissement en dehors du temps de sa formation d’infirmière en cas de nécessité de continuité de service tout en respectant les 25 jours de congés annuels, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

12. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de Mme M=== tendant à l’annulation des décisions attaquées doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :



13. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme M=== la somme demandée par le CHU de Poitiers sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.



DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 11 mars 2015 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme M=== est rejetée.

Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Poitiers présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.