Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’association « Terre de Bas, Sé Nou Tout » a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d’annuler l’arrêté du 14 février 2013 par lequel la préfète de la Guadeloupe a donné acte au Syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe de sa déclaration déposée en application de l’article L. 214-3 du code de l’environnement et relative au système d’assainissement de Petite-Anse sur le territoire de la commune de Terre-de-Bas.

Par un jugement n° 1300399 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de la Guadeloupe a fait droit à cette demande en annulant l’arrêté du 14 février 2013.

Procédure devant la cour :

Par un recours, enregistré le 7 juin 2016, la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer demande à la cour d’annuler ce jugement du tribunal administratif du 7 avril 2016.




Considérant ce qui suit :

1. Le 14 mars 2012, le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG) a déposé en préfecture un dossier de déclaration au titre des articles L. 214-1 à L. 214-6 du code de l'environnement pour l’implantation d’une station d’épuration dans le quartier « Petites-Anses » sur le territoire de la commune de Terre de Bas. Par un arrêté du 14 février 2013, le préfet de la Guadeloupe a donné acte au SIAEAG de sa déclaration en application de l’article L. 214-3 du code de l'environnement et a fixé des prescriptions générales s’appliquant à l’ouvrage. L’association « Terre de Bas, Sé Nou Tout » a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d’annuler l’arrêté préfectoral du 14 février 2013. Le ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer relève appel du jugement rendu le 7 avril 2016 par lequel le tribunal a fait droit à cette demande.

Sur la légalité de l’arrêté du 14 février 2013 :

2. Aux termes de l’article L. 211-1 du code de l'environnement, inclus dans le Titre Ier « Eaux et milieux aquatiques et marins » du Livre II du code de l'environnement : « I. - Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion (…) vise à assurer : (…) 2° La protection des eaux et la lutte contre toute pollution par déversements, écoulements, rejets, dépôts directs ou indirects de matières de toute nature (…) II. - La gestion équilibrée doit permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique (…) Elle doit également permettre de satisfaire ou concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences : 1° De la vie biologique du milieu récepteur (…) 3° (…) du tourisme, de la protection des sites, des loisirs (…) ». Aux termes de l’article L. 214-1 du même code : « Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations ne figurant pas à la nomenclature des installations classées, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux (…) ». Aux termes de l’article L. 214-3 dudit code : « I. – Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux (…) de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles. (…) II. – Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3 ». Par ailleurs, l’article L. 123-5 du code de l'urbanisme, applicable aux plans locaux d'urbanisme, dispose que : « Le règlement et ses documents graphiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, pour la création de lotissements et l'ouverture des installations classées (…) ».

3. En application des dispositions précitées de l’article L. 123-5, les plans locaux d'urbanisme sont opposables aux travaux et constructions régis par la législation sur l’urbanisme ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l'environnement. Il en résulte que les plans locaux d'urbanisme ne sont pas opposables aux travaux et constructions autorisés ou déclarés en application des dispositions précitées de l’article L. 214-3 du code de l'environnement dès lors que ces derniers, soumis à la législation distincte sur l’eau, n’appartiennent pas à la catégorie des installations classées pour la protection de l'environnement visée à l’article L. 123-5 du code de l'urbanisme.

4. Par suite, le plan local d'urbanisme de la commune de Terre-de-Bas n’est pas opposable à l’arrêté du 14 février 2013 par lequel le préfet de la Guadeloupe a donné acte au SIAEAG de sa déclaration en application de l’article L. 214-3 du code de l'environnement.

5. Il en résulte que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l’arrêté en litige au motif que le projet de station d’épuration a méconnu le règlement de la zone NC du plan d'occupation de sols de la commune de Terre-de-Bas.




6. Il appartient à la cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par l’association « Terre de Bas, Sé Nou Tout » devant le tribunal administratif de la Guadeloupe.

7. En premier lieu, les pièces composant le dossier de déclaration sont limitativement énumérées par l’article R. 214-32 du code de l'environnement. Cet article n’impose pas au pétitionnaire de joindre à sa demande un document attestant qu’il dispose de la maîtrise foncière du terrain sur lequel son projet doit être réalisé. Par suite, le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de déclaration déposé par le SIAEAG manque en droit.

8. En deuxième lieu, la circonstance, à la supposer établie, que le préfet aurait refusé d’adresser à l’association « Terre de Bas, Se Nou Tout » des documents administratifs, relatifs à l’instruction de la demande du SIAEAG, communicables en application de l’article L. 124-1 du code de l'environnement et de la loi du 17 juillet 1978, est sans incidence sur la légalité de l’arrêté du 14 février 2013 en litige.

9. En troisième lieu, aucune disposition législative ou règlementaire, et notamment pas l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales, n’interdit qu’un territoire non encore couvert par un schéma directeur d’assainissement puisse accueillir un projet de station d’épuration soumis à déclaration au titre de la loi sur l’eau.

10. En quatrième lieu, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit que la déclaration d'utilité publique de la station d’épuration aurait dû intervenir préalablement à l’arrêté du 14 février 2013 en litige à peine d’irrégularité de celui-ci.

11. En cinquième lieu, l’arrêté du 14 février 2013 porte sur un projet relevant de la rubrique 2.1.1.0. de la nomenclature annexée à l’article R. 214-1 du code de l'environnement, laquelle soumet à déclaration les stations d’épuration des agglomérations devant traiter une charge brute journalière de pollution organique supérieure à 12 kg de DBO5 et inférieure ou égale à 600 kg de DBO5. La station d’épuration projetée par le SIAEAG est prévue pour traiter quotidiennement 36 kg de DBO5, soit l’équivalent de 600 habitants. Elle doit être implantée dans le quartier « Petites Anses » à proximité immédiate de la Grande Ravine qui se jette dans l’océan depuis le littoral rocheux. La décision contestée du 14 février 2013 rappelle, dans son article 2, que le projet doit respecter les prescriptions générales fixées par l’arrêté du 22 juillet 2007 relatif à la collecte, au transport et au traitement des eaux usées des agglomérations d'assainissement ainsi qu'à la surveillance de leur fonctionnement et de leur efficacité, lequel comporte notamment des obligations de surveillance de la qualité des eaux de baignade. Son article 3 énumère les dispositifs de surveillance et les équipements dont doit disposer la station d’épuration pour atteindre les performances minimales escomptées. Enfin, l’article 4 énonce des prescriptions spécifiques concernant les postes de refoulement, les réseaux, les systèmes d’auto-surveillance et de télégestion. De son côté, l’association « Terre-de-Bas, Se Nou Tout », qui se borne à dresser une liste d’interrogations sur certains points du dossier de déclaration présenté par le SIAEAG, n’apporte aucun élément permettant d’estimer que les prescriptions dont est assorti l’arrêté du 14 février 2013 seraient insuffisantes pour garantir le fonctionnement de la station d’épuration dans le respect des intérêts environnementaux protégés par l’article L. 211-1, précité, du code de l'environnement.

12. En sixième lieu, par décret n° 2011-1610 du 22 novembre 2011, le schéma d'aménagement régional de la Guadeloupe, valant schéma de mise en valeur de la mer, a été approuvé. Ce document constitue une directive territoriale d’aménagement au sens des articles L. 113-1 et suivants du code de l'urbanisme. Aux termes de l’article L. 146-1 du code de l'urbanisme : « Les directives territoriales d'aménagement (…) sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers, la création de lotissements et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, pour l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais. Elles sont également applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement. ». Il résulte de ces dispositions que les directives territoriales d’aménagement sont opposables aux demandes d’autorisation d’occupation ou d’utilisation du sol qu’elles visent à l’exclusion des décisions d’autorisation ou de déclaration prises en application de la législation sur l’eau dès lors qu’en vertu du X de l’article L. 212-1 du code de l'environnement, ces dernières ne doivent être compatibles qu’avec les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux, lesquels constituent des documents distincts des schéma de mise en valeur de la mer. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par l’arrêté du 14 février 2013, du schéma de mise en valeur de la mer de la Guadeloupe est inopérant.

13. En septième lieu, il résulte des points 3 à 5, que le moyen tiré de la méconnaissance du plan d'occupation de sols par l’arrêté du 14 février 2013 en litige doit être écarté comme inopérant.

14. En huitième lieu et dernier lieu, si l’association « Terre-de-Bas, Sé Nou Tout » allègue que le projet de station d’épuration méconnait le règlement du plan de prévention des risques naturels de la commune de Terre-de-Bas, son moyen n’est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre à la cour d’en apprécier le bien-fondé.

15. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé l’arrêté préfectoral du 14 février 2013. Dès lors, il y a lieu d’annuler ce jugement et de rejeter les conclusions présentée par l’association « Terre-de-Bas, Sé Nou Tout » devant le tribunal administratif.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1300399 du tribunal administratif de la Guadeloupe du 7 avril 2016 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l’association « Terre-de-Bas, Sé Nou Tout » devant le tribunal administratif de la Guadeloupe est rejetée.