Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. M== a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la récusation de M. Barrère, expert désigné par le juge des référés de ce même tribunal, par ordonnance n° 1400823 du 8 avril 2014, aux fins de procéder à une expertise sur son état de santé mentale et psychologique.

Par un jugement n° 1406078 du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de récusation présentée par M. M==.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 mai 2015 et des pièces complémentaires enregistrées le 27 octobre 2015, M. M==, représenté par Me Cabrol, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 mars 2015 ;

2°) de faire droit à sa demande de récusation de l’expert, le Dr Barrère, désigné par l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse du 8 avril 2014 3°) de nommer un nouvel expert.


Considérant ce qui suit :

1. M. M== appartient au corps des techniciens supérieurs des études et de l’exploitation de l’aviation civile de la direction générale de l’aviation civile (DGAC) et occupait en dernier lieu des fonctions de responsable de maintenance et d’entretien de site à la direction des services de la navigation aérienne à Toulouse. Le 2 octobre 2012, il a effectué une tentative de suicide sur son lieu de travail. Le comité médical a émis un avis favorable à son placement en congé de longue maladie de six mois, lequel a été prolongé pour six autres mois, avant qu’il ne soit, après expertise médicale et avis de la commission de réforme, placé en congé de longue durée. En effet, à la suite du rapport d’expertise établi le 10 juin 2013 par le Dr P==, l’administration a, le 8 octobre 2013, pris une décision de refus de reconnaissance de l’imputabilité au service des faits survenus le 2 octobre 2012, que M. M== a contestée par la voie contentieuse. Le 19 février 2014, il a également saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, afin que soient ordonnées deux nouvelles expertises. Par une ordonnance n° 1400823 du 8 avril 2014, le juge des référés a fait partiellement droit à sa demande et a désigné le Dr B==, neuropsychiatre, aux fins d’expertise. Celui-ci a rendu un pré-rapport en date du 5 septembre 2014. M. M== fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 mars 2015, qui a rejeté sa demande de récusation de cet expert.

Sur les conclusions à fin de récusation :

2. Aux termes de l’article L. 721-1 du code de justice administrative, applicable à la récusation des experts en application des dispositions de l’article R. 621-6 du même code : « La récusation d'un membre de la juridiction est prononcée, à la demande d'une partie, s'il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité ». Aux termes de l’article R. 621-6 du même: « Les experts ou sapiteurs mentionnés à l’article R. 621-2 peuvent être récusés pour les mêmes causes que les juges. (…) La partie qui entend récuser l'expert ou le sapiteur doit le faire avant le début des opérations ou dès la révélation de la cause de la récusation.(…) ». Aux termes de l’article R. 621-3 de ce code : « (…) Par le serment, l’expert s’engage à accomplir sa mission avec conscience, objectivité, impartialité et diligence. ».

3. Il appartient au juge saisi d'un moyen mettant en doute l'impartialité d'un expert de rechercher si, eu égard à leur nature, à leur intensité, à leur date et à leur durée, les relations directes ou indirectes entre cet expert et l'une ou plusieurs des parties au litige ou l’un ou plusieurs intervenants à la cause sont de nature à susciter un doute sur son impartialité. En particulier, doivent en principe être regardées comme suscitant un tel doute les relations professionnelles ou amicales s'étant poursuivies durant la période de l'expertise.

4. Par sa note produite devant le tribunal administratif, dont il a réitéré l’exacte teneur en appel, le Dr B== affirme avoir une relation d’amitié avec le Dr P==, expert psychiatre ayant réalisé l’expertise du 8 octobre 2013, et que, pour cette raison, il ne la critiquerait pas. Il indique aussi avoir également une relation d’amitié « du même niveau » avec le Dr G==, qui avait été désigné le 3 janvier 2013 par le comité médical pour procéder à une expertise de M. M==. Dans ces conditions, ce dernier est fondé à soutenir qu’il existe une raison sérieuse de mettre en doute l’impartialité du Dr B==.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que M. M== est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande de récusation.

Sur les conclusions à fin de désignation d’un nouvel expert :

6. Il appartient au président du tribunal initialement saisi de procéder à la désignation d’un nouvel expert. Il y a lieu, en conséquence, de renvoyer M. M== devant le président du tribunal administratif de Toulouse pour qu’il soit procédé au remplacement de M. B==.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400678 du tribunal administratif de Toulouse du 3 mars 2015 est annulé.

Article 2 : La demande de récusation de M. B==, expert désigné par l’ordonnance n° 1400823 du 8 avril 2014 du président du tribunal administratif de Toulouse, est acceptée

Article 3 : M. M== est renvoyé devant le président du tribunal administratif de Toulouse pour qu’il soit procédé à la désignation d’un nouvel expert.