Vu le recours, enregistré le 17 février 2014 présenté par le préfet de la Dordogne ; Le préfet de la Dordogne demande à la cour : 1°) d’annuler le jugement n° 1303835 du 23 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a, d’une part, annulé ses décisions du 26 septembre 2013 portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi prises à l’encontre de M. A== et, d’autre part, condamné l’Etat au paiement de la somme de 1000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


1. Considérant que le préfet de la Dordogne relève appel du jugement du 23 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 26 septembre 2013 en tant qu’il porte obligation, pour M. A==, ressortissant marocain, de quitter le territoire français et qu’il fixe le pays de renvoi au motif que le préfet de la Dordogne n’avait pas justifié avoir examiné, avant l’édiction de la décision portant obligation de quitter le territoire, s’il y avait lieu de reconduire M. A== en priorité vers l’Italie ou de le réadmettre dans cet Etat ; que, par la voie de l’appel incident, M. A== demande l’annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour et de la décision fixant le pays de destination ; Sur l’appel principal du préfet de la Dordogne : 2. Considérant, d’une part, qu’aux termes du I de l’article L. 511-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « I - L’autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d’un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour (…) peut assortir sa décision d’une obligation de quitter le territoire français (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 531-1 dudit code : « Par dérogation aux articles (…) L. 511-1 à L. 511-3, (…) l’étranger non ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 31 2 peut être remis aux autorités compétentes de l’Etat membre qui l’a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l’Union européenne. (…) » ; qu’en vertu du troisième alinéa de l’article L. 531-2 de ce code, les dispositions de l’article L. 531-1 sont applicables à l’étranger détenteur d’un titre de résident de longue durée-CE en cours de validité accordé par un autre Etat membre qui a fait l’objet d’une mesure d’éloignement du territoire français ; qu’aux termes du I de l’article R. 531-10 du même code : « Les dispositions du troisième alinéa de l’article L. 531-2 sont applicables à l’étranger titulaire du statut de résident longue durée-CE accordé par un autre Etat membre de l’Union européenne qui aura soit séjourné sur le territoire français plus de trois mois consécutifs sans se conformer aux dispositions de l’article L. 313-4-1, soit fait l’objet d’un refus de délivrance ou de renouvellement d’une carte de séjour temporaire en application de l’article L. 313-4-1 ou du retrait d’une carte de séjour temporaire délivrée en application de l’article L. 313-4-1. » ; 3. Considérant que le champ d’application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d’un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l’un de l’autre et que le législateur n’a pas donné à l’une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l’autre ; qu’ainsi, lorsque l’autorité administrative envisage une mesure d’éloignement à l’encontre d’un étranger dont la situation entre dans le champ d’application de l’article L. 531-1 ou des deuxième à quatrième alinéas de l’article L. 531-2, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l’Etat membre de l’Union Européenne ou partie à la convention d’application de l’accord de Schengen d’où il provient, sur le fondement des articles L. 531-1 et suivants, soit l’obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l’article L. 511-1 ; que ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce que l’administration décide de prononcer une décision faisant obligation de quitter le territoire bien qu’elle ait initialement envisagé de demander la réadmission de l’étranger à un autre Etat membre de l’Union Européenne ; que, toutefois, ainsi que l’a jugé le Conseil d’Etat dans son avis « Préfet de la Haute-Savoie » du 18 décembre 2013 ( n°371994), si l’étranger demande à être éloigné vers l’Etat membre de l’Union européenne ou partie à la convention d’application de l’accord de Schengen d’où il provient, ou s’il est résident de longue durée dans un Etat membre ou titulaire d’une « carte bleue européenne » délivrée par un tel Etat, il appartient au préfet d’examiner s’il y a lieu de reconduire en priorité l’étranger vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat ; 4. Considérant, d’autre part, qu’aux termes du premier paragraphe de l’article 7 de la directive susvisée du 25 novembre 2003 : « Afin d’acquérir le statut de résident de longue durée, le ressortissant de pays tiers concerné introduit une demande auprès des autorités compétentes de l’Etat membre dans lequel il réside » ; qu’aux termes du paragraphe 3 de l’article 8 de cette directive : « Le permis de séjour de résident longue durée - CE peut être émis sous forme de vignette adhésive ou de document séparé. Il est émis selon les règles et le modèle type prévus par le règlement (CE) n° 1030/2002 du Conseil du 13 juin 2002 établissant un modèle uniforme de titre de séjour pour les ressortissants de pays tiers. Sous la rubrique « catégorie du titre de séjour », les Etats membres inscrivent « résident de longue durée – CE » ; que cette dernière inscription, dont la nécessité de l’indication précise est rappelée au point 6.4. du a) de l’annexe au règlement du 13 juin 2002 susvisé, est, selon la version italienne de la directive, « soggiornante di lungo periodo-CE » ; 5. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. A== était, à la date de la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée, titulaire d’un titre de séjour « à durée indéterminée » délivré par les autorités italiennes le 24 septembre 2003 ; que ce titre de séjour comporte la mention « carta di soggiorno per stranieri a tempo indeterminato » et non l’inscription « soggiornante di lungo periodo-CE » prévue par la rubrique 6.4 du a) de l’annexe au règlement du 13 juin 2002 ; que, dès lors, le titre de séjour dont il s’agit ne répond pas aux exigences de la directive du 25 novembre 2003 et du règlement du 13 juin 2002 et ne constitue pas une carte de résident longue durée-CE ; que si, dans le cadre particulier de l’établissement du code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières (code frontières Schengen) issu du règlement (CE) du 15 mars 2006 susvisé et pris pour la création d’un espace de libre circulation, la liste des titres de séjour prévue à l’article 34 de ce règlement, précise, pour l’Italie, que « la carte de séjour à validité permanente délivrée avant l'entrée en vigueur du décret-loi n° 3 du 8 janvier 2007 est conforme à la directive 2003/109/CE et est assimilée par ce décret-loi au titre de séjour délivré aux résidents de longue durée-CE », cette assimilation, faite dans le cadre de l’établissement d’un espace commun de libre circulation et des règles de contrôle aux frontières, est sans incidence sur la mise en œuvre de la procédure particulière de réadmission prévue aux articles L. 531-1 et L. 531-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; que, par suite, c’est à tort que les premiers juges ont considéré, au point 9 de leur jugement, que M. A== devait être regardé comme étant titulaire d’un titre de résident de longue durée-CE ; 6. Considérant, toutefois, et ainsi qu’il a été dit au point 3, qu’il appartient au préfet lorsqu’un étranger est résident de longue durée dans un Etat membre d’examiner s’il y a lieu de le reconduire en priorité vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat ; qu’il est constant que M. A== est titulaire d’une carte de séjour à validité permanente délivrée par les autorités italiennes ; qu’il est ainsi résident de longue durée en Italie ; que, par suite, le préfet de la Dordogne se devait d’examiner, avant de prendre sa décision portant obligation de quitter le territoire, si M. A== devait être reconduit en priorité en Italie ou réadmis dans cet Etat ; qu’il ne justifie pas, ainsi que l’ont retenu les premiers juges, avoir procédé à cet examen ; que, par suite, c’est à bon droit que le tribunal a accueilli le moyen de M. A== tiré de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire était entachée d’erreur de droit ; 7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Dordogne n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la mesure d'éloignement prise à l’encontre de M. A== ainsi que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de destination ; Sur l’appel incident de M. A== : En ce qui concerne le refus de titre de séjour : 8. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de l’accord franco-algérien, modifié, susvisé : « (…) Le certificat de résidence d’un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…)5° Au ressortissant algérien qui n’entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) » ; qu’aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (…) » ; 9. Considérant que, pour soutenir que la décision de refus de titre de séjour porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale, M. A== fait valoir qu’il vit en France depuis 2009 et, qu’ayant été abandonné par ses parents, il n’a plus d’attaches en Algérie, non plus qu’en Italie, pays où il vivait depuis 1989 et qu’il a dû quitter suite à des menaces ; qu’il ajoute que la communauté de vie avec sa compagne a été rompue contre sa volonté et qu’il a été victime de violences conjugales de la part de sa compagne ; 10. Considérant que l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d’une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; qu’il suit de là que les dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont, à l’exception de certaines dispositions de procédure qui s’appliquent à tous les étrangers qui n’ont pas été écartées par une disposition contraire expresse contenue dans ledit accord, pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent des règles fixées par ledit accord ; que M. A==, qui au demeurant n’était pas marié avec Mme R== avec qui il avait conclu un pacte civil de solidarité, ne peut, en tout état de cause, utilement, pour contester la légalité du refus de renouveler son titre de séjour, invoquer les dispositions de l’article L. 313-12 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoyant que lorsque la communauté de vie a été rompue à l’initiative de l’étranger en raison des violences conjugales qu’il a subies de la part de son conjoint, le préfet peut accorder le renouvellement du titre de séjour ; que, toutefois, il appartient au préfet, dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, d’apprécier, compte tenu de l’ensemble des éléments de la situation personnelle de l’intéressé, notamment eu égard à l’examen des violences conjugales alléguées, l’opportunité d’une mesure de régularisation ; 11. Considérant qu’il n’est pas contesté qu’à la date à laquelle le préfet s'est prononcé sur la demande du renouvellement du certificat de résidence, aucune communauté de vie n’existait entre M. A== et Mme R== depuis la dissolution du pacte civil de solidarité à l’initiative de cette dernière en février 2013 ; qu’ainsi, M. A==, célibataire et sans enfant, ne pouvait se prévaloir d’aucun lien privé et familial en France pour obtenir le renouvellement de son certificat de résidence sur le fondement de l’article 6-5 de l’accord franco-algérien ; que si M. A== soutient avoir dû quitter le domicile de Mme R== en raison des violences physiques et psychologiques qu’elle lui infligeait et s’il fait valoir sa bonne insertion en France où il a travaillé dès son arrivée, de telles circonstances, à les supposer vérifiées, ne sauraient à elles seules suffire à établir, compte tenu du caractère récent du séjour en France de M. A== et de l’absence d’attaches en France autre que son ex-compagne, qu’en refusant de lui renouveler son titre de séjour, le préfet de la Dordogne aurait méconnu les dispositions de l’article 6-5 de l’accord franco-algérien et les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu’au vu de ces éléments, il n’a pas davantage commis une erreur manifeste dans l’appréciation de l’opportunité de procéder à la régularisation de M. A== ; En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination : 12. Considérant qu’ainsi qu’il a été dit au point 7, le présent arrêt confirme le jugement attaqué en tant qu’il a annulé la décision d’éloignement et, par voie de conséquence, celle fixant le pays de destination ; que, par suite, M. A== ne peut demander l’annulation de cette décision ; 13. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A== n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision du 26 septembre 2013 lui refusant un titre de séjour ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; DECIDE Article 1er : La requête du préfet de la Dordogne est rejetée. Article 2 : Les conclusions d’appel incident de M. A== sont rejetées.