Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2013, présentée pour M. G M==, par le cabinet d'avocats Nicolas Rousseau ;

M. M== demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1103444 du 23 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision en date du 4 juillet 2011 par laquelle le maire de Bordeaux lui a refusé un permis de construire ;

2°) d’annuler ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bordeaux une somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


1. Considérant que, par décision du 4 juillet 2011, le maire de Bordeaux a refusé le permis de construire sollicité par M. M== pour la régularisation de travaux entrepris sans autorisation dans le secteur sauvegardé du centre de Bordeaux ; que l’intéressé relève appel du jugement n° 1103444 du 23 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d’annulation de cette décision ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : « Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation, à des membres du conseil municipal » ; que, par un arrêté régulièrement publié en date du 21 novembre 2008, qui n’avait pas à être mentionné dans les visas de la décision en litige à peine d’irrégularité de cette décision, le maire de Bordeaux a délégué M. Bousquet, conseiller municipal, auprès de Mme Touton, adjointe au maire en charge du logement, de l’aménagement urbain et des transports, pour le droit des sols, et lui a directement délégué sa signature pour les permis de construire ; qu’ainsi, la délégation consentie à M. Bousquet dans ce domaine n’était pas subordonnée, comme pour les autres actes relevant de la délégation accordée à Mme Touton, au cas d'absence ou d'empêchement de celle-ci ; que par suite M. M==, qui en tout état de cause aurait eu, contrairement à ce qu’il soutient, la charge d’établir que l’adjointe au maire n’aurait pas été absente ou empêchée, n’est pas fondé à soutenir que la décision aurait été signée par une autorité incompétente ;

3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 313-1 du code de l’urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : « I.-Des secteurs dits " secteurs sauvegardés " peuvent être créés lorsqu'ils présentent un caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la restauration et la mise en valeur de tout ou partie d'un ensemble d'immeubles bâtis ou non. / II.-L'acte qui crée le secteur sauvegardé prescrit l'élaboration d'un plan de sauvegarde et de mise en valeur et met en révision le plan local d'urbanisme lorsqu'il existe. / Le plan de sauvegarde et de mise en valeur peut en outre comporter l'indication des immeubles ou parties intérieures ou extérieures d'immeubles : (…) b) Dont la démolition ou la modification pourra être imposée par l'autorité administrative à l'occasion d'opérations d'aménagement publiques ou privées. » ; qu’aux termes de l’article L. 313-2 du code de l’urbanisme : « A compter de la publication de la décision administrative créant le secteur sauvegardé, tout travail ayant pour effet de modifier l'état des immeubles est soumis à permis de construire ou à déclaration, dans les conditions prévues par le livre IV, après accord de l'architecte des bâtiments de France » ; qu’aux termes de l'article R. 423-54 du même code : « Lorsque le projet est situé dans un secteur sauvegardé dont le périmètre a été délimité, l'autorité compétente recueille l'accord de l'architecte des bâtiments de France » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire dans un secteur sauvegardé ne peut être délivré qu'après avis conforme de l'architecte des bâtiments de France ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article US.0.4 du plan de sauvegarde et de mise en valeur de Bordeaux approuvé en 1988 et révisé en 1993, relatif aux occupations du sol protégées : « Sont distingués : (…) Les immeubles ou parties d'immeuble dont la démolition ou la modification est prévue, à des fins de salubrité publique ou de mise en valeur, entourés sur le plan d'un trait fin discontinu et pochés en jaune (...). Leur démolition peut être imposée par l'administration, à l'occasion de toute opération d'aménagement publique ou privée (...) » ; qu'aux termes des dispositions de l'article US.9.3 relatif à l'emprise au sol : « Les cours seront : a) maintenues, sans construction, quand elles ont été sauvegardées » ;

5. Considérant que si M. M== soutient que le terrain sur lequel il entend démolir l’immeuble existant pour en reconstruire un nouveau n’est pas situé dans une cour intérieure « libre », il ressort des plans et des photographies produites par le pétitionnaire à l'appui de sa demande de permis de construire que l'immeuble en cause, qui présente un état avancé de délabrement, était situé en fond de parcelle dans un vaste espace délimité par les façades arrières des immeubles mitoyens riverains des rues Courbin, Entre deux murs, Jouarmet et Saint Rémi, dans le secteur sauvegardé de Bordeaux ; que cet espace constitue la cour intérieure de cet îlot urbain, même s’il n’appartient pas à une seule propriété, mais est commun à l’ensemble des immeubles de l’îlot ;

6. Considérant que le projet envisagé nécessitait la démolition de l'immeuble existant, suivie de la construction d'un nouveau bâtiment ; que cet immeuble, situé dans un espace poché en jaune dans le plan de sauvegarde et de mise en valeur de Bordeaux, est de ceux dont la démolition peut être ordonnée à l'occasion de toute opération d'aménagement publique ou privée, même s’il existait antérieurement à l’approbation du plan de sauvegarde et de mise en valeur ; que, dès lors, la cour intérieure où la construction est envisagée doit être regardée comme une cour intérieure sauvegardée au sens des dispositions du plan de sauvegarde et de mise en valeur et devant être maintenue libre de construction par application des dispositions de l’article US.9.3 du règlement de ce plan ;

7. Considérant que M. M== soutient que son projet ne constituait pas une opération d’aménagement, et fait référence pour lui dénier cette qualité aux dispositions de l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme, lesquelles sont pourtant seulement relatives à la procédure de concession d’aménagement ; que la définition des opérations d’aménagement se trouve à l’article L.300-1 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, aux termes duquel : « Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objet de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. /L'aménagement, au sens du présent livre, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations. » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’elles ne définissent pas les opérations d’aménagement privées ; que toutefois, celles-ci, nécessairement de plus faible ampleur, peuvent s’inspirer des mêmes objectifs que les opérations d’aménagement menées par les personnes publiques ; que la construction envisagée après démolition de l’immeuble existant répond à la finalité de lutter contre l'insalubrité et de permettre le renouvellement urbain ; qu’elle doit ainsi être regardée comme une opération d’aménagement au sens du règlement du plan de sauvegarde et de mise en valeur ;

8. Considérant que l’immeuble en cause est situé dans un secteur du plan de sauvegarde et de mise en valeur dans lequel les constructions situées dans des cours intérieures sauvegardées ne sont pas admises en application de l’article US.9.3 ; que la décision en litige, prise sur l’avis conforme de l’architecte des bâtiments de France, n’est donc pas entachée d’erreur de fait au regard de la nécessaire démolition de l’immeuble délabré, laquelle préserve la cour conformément aux finalités du plan, ni d’erreur de droit sur la possibilité de construire sur l’emplacement de l’immeuble démoli ;

9. Considérant enfin qu'aux termes des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : « La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié. / Peut également être autorisée, sauf dispositions contraires des documents d'urbanisme et sous réserve des dispositions de l'article L. 421-5, la restauration d'un bâtiment dont il reste l'essentiel des murs porteurs lorsque son intérêt architectural ou patrimonial en justifie le maintien et sous réserve de respecter les principales caractéristiques de ce bâtiment » ;

10. Considérant que M. M== n’est pas fondé à se prévaloir de ces dispositions, dès lors d’une part que les dispositions spécifiques de l'article US.9.3 applicables au terrain d'assiette proscrivent, ainsi qu’il a été dit, la reconstruction de l’immeuble situé dans une cour intérieure sauvegardée et font donc obstacle à l’application de cette disposition de caractère général, d’autre part, que la construction envisagée n’est pas identique à l’immeuble démoli tant en ce qui concerne la superficie au sol que la surface hors œuvre, et enfin, que le bâtiment démoli ne présentait aucun intérêt architectural ou patrimonial ;

11. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. M== n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de commune de Bordeaux, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. M== au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. M== la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Bordeaux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. M== est rejetée.

Article 2 : M. M== versera à la commune de Bordeaux la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.