Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2012, présentée pour la communauté d’agglomération du Grand Montauban, dont le siège est Hôtel de Ville BP 764 à Montauban Cedex (82013), par Me Goutal, avocat ;

La communauté d’agglomération du Grand Montauban demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0702028 du 27 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a d’une part, annulé la décision de la commission d’appel d’offres en date du 22 février 2007 rejetant les offres de la société « Les compagnons paveurs » en vue de l’attribution du lot n° 4 du marché relatif à l’aménagement de l’espace Ligou-Prax-Paris et la décision du président de la communauté de Montauban Trois Rivières du 5 mars 2007 de signer ce marché avec la société Sud Ouest Pavage, et d’autre part a enjoint au groupement de commande de la communauté de Montauban Trois Rivières / Ville de Montauban, à défaut de résolution amiable du contrat passé avec la Société Sud Ouest Pavage, de saisir le juge du contrat dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande de la société Les compagnons paveurs ;

3°) de mettre à la charge de cette société une somme de 2 500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

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1. Considérant que le groupement de commande constitué de la communauté de Montauban les Trois Rivières (CMTR) et de la ville de Montauban, aux droits duquel vient la communauté d’agglomération du Grand Montauban, a, en vue de conclure un marché de travaux relatif à l’aménagement de l’espace Ligou-Prax-Paris, publié un avis d’appel public à la concurrence au Journal officiel de l’Union européenne et au bulletin officiel des annonces des marchés publics le 13 décembre 2006 ; que s’agissant du lot n° 4 « revêtement de surface », quatre candidats ont déposé des offres ; que par lettre du 22 février 2007, la société Les compagnons paveurs a été informée du rejet de son offre par la commission d’appel d’offres de la communauté d’agglomération du Grand Montauban ; que le 27 février 2007, cette société a sollicité des informations sur l’offre retenue ; qu’en réponse, elle a obtenu, le 13 mars 2007, la communication du nom de l’entreprise retenue et du montant de son offre, ainsi que des extraits du rapport d’analyse des offres ; que le marché a été signé par la présidente de la communauté d’agglomération avec la société Sud Ouest Pavage le 5 mars 2007 ; que la communauté d’agglomération du Grand Montauban relève appel du jugement n° 0702028 du 27 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a d’une part, annulé la décision de la commission d’appel d’offres en date du 22 février 2007 rejetant les offres de la société Les compagnons paveurs en vue de l’attribution du lot n° 4 du marché relatif à l’aménagement de l’espace Ligou-Prax-Paris et la décision du président de la communauté de Montauban Trois Rivières du 5 mars 2007 de signer ce marché avec la société Sud Ouest Pavage et d’autre part, a enjoint au groupement de commande Communauté de Montauban Trois Rivières / Ville de Montauban, à défaut de résolution amiable du contrat passé avec la Société Sud Ouest Pavage, de saisir le juge du contrat dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu’aux termes de l’article R.741-2 du code de justice administrative : « La décision (…) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. » ;

3. Considérant qu’en se bornant à indiquer que le jugement attaqué ne vise et n’analyse qu’imparfaitement les conclusions des parties, la communauté d’agglomération du Grand Montauban n’assortit le moyen tiré de la méconnaissance des exigences précitées de l’article R.741-2 du code de justice administrative d’aucune précision permettant à la cour d’en apprécier le bien fondé ; que, dans ces conditions, la communauté d’agglomération n’est pas fondée à soutenir que le jugement, qui comporte l’analyse des mémoires présentés, serait entaché d’irrégularité ;

Sur la recevabilité de la demande :

4. Considérant que la communauté d’agglomération du Grand Montauban reproche aux premiers juges d’avoir écarté la fin de non recevoir tirée de l’absence de caractère décisoire de la mesure de notification du 22 février 2007, en soutenant que cette mesure est distincte de la décision de la commission d’appel d’offres intervenue la veille, qui seule peut faire l’objet d’un recours en annulation ;

5. Considérant cependant, que dans sa demande enregistrée le 24 avril 2007, la société Les compagnons paveurs sollicitait l’annulation des décisions du groupement de commande du 22 février 2007 rejetant son offre et attribuant le marché à la société Sud Ouest Pavage, ainsi que l’annulation de la procédure de passation du marché de travaux relatif au lot n° 4 ; que si la société Les compagnons paveurs était irrecevable à demander l’annulation de la procédure d’appel d’offres, laquelle ne constitue pas, par elle-même, un acte susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, elle était en revanche recevable à solliciter l’annulation de l’acte détachable que constitue la décision prise par la commission d’appel d’offres de rejeter son offre, décision portée à sa connaissance par une lettre du 22 février 2007 qui lui a été notifiée le 26 février ; que, par suite, c’est à bon droit que les premiers juges ont écarté cette fin de non recevoir ;

Sur la légalité de la décision de la commission d’appel d’offres :

6. Considérant que le tribunal a considéré que le marché en litige avait été conclu en violation des principes d’égalité de traitement et de transparence de la procédure au motif que le pouvoir adjudicateur n’aurait pas déterminé, conformément à l’article 50 du code des marchés publics, les exigences minimales que doivent respecter les variantes ; que la communauté d’agglomération fait valoir que cette motivation résulte d’une part, d’une erreur d’interprétation de l’article 50 du code des marchés publics, et d’autre part, d’une mauvaise appréciation des faits de l’espèce, dès lors que les variantes, applicables aux seuls éléments techniques de l’offre, étaient soumises au respect des dispositions techniques particulières applicables au marché, imposées par le règlement de la consultation, le cahier des clauses techniques particulières commun à tous les lots et le cahier des clauses techniques particulières propres au lot n° 4 ;

7. Considérant d’une part, qu’aux termes de l’article 50 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au marché en litige : « Lorsque le pouvoir adjudicateur se fonde sur plusieurs critères pour attribuer le marché, il peut autoriser les candidats à présenter des variantes. / Le pouvoir adjudicateur indique dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation s'il autorise ou non les variantes ; à défaut d'indication, les variantes ne sont pas admises. / Les documents de la consultation mentionnent les exigences minimales que les variantes doivent respecter ainsi que les modalités de leur présentation. Seules les variantes répondant à ces exigences minimales peuvent être prises en considération. / Les variantes sont proposées avec l'offre de base. / Pour les marchés de fournitures ou de services, une variante ne peut être rejetée au seul motif qu'elle aboutirait, si elle était retenue, respectivement soit à un marché de services au lieu d'un marché de fournitures, soit à un marché de fournitures au lieu d'un marché de services. » ;

8. Considérant d’autre part, que l’article 1.3.1 du règlement de la consultation du marché dispose que : « les variantes libres sont autorisées pour les lots suivants : lots 1 et 4 (elles pourront notamment porter sur la conception de la structure, sur la nature du revêtement des trottoirs place Alexandre 1er et rue Jean Monnet). / (…) Les offres variantes seront obligatoirement présentées dans la seconde enveloppe sous la forme d’autant de dossiers spécifiques que de variantes, intitulés « variant N° ». Ce dossier devra obligatoirement préciser l’objet de sa variante, ses caractéristiques techniques, le respect des exigences minimales indiquées ci-dessus. En outre l’annexe financière de l’acte d’engagement (imprimé DC8) devra obligatoirement être jointe, dûment remplie et signée par le candidat. En cas de non respect de ces dispositions, ainsi qu’en cas d’offre variante ne respectant pas les exigences minimales définies ci-dessus, l’offre variante ne sera pas prise en considération. » ; que selon l’article 45.0 du cahier des clauses techniques particulières applicables au marché : « Variantes : les variantes décrites ci-dessous consistent à remplacer des surfaces en enrobés initialement prévues dans le marché, par des surfaces en pavés de granit de récupération 20x14x8. / Ces variantes comprennent la fourniture et la pose complète de pavés. / La fourniture est conforme aux prescriptions décrites dans le présent CCTP aux articles suivants : 41.3 Conformité aux documents officiels ; 41.2 Qualité des matériaux mis en œuvre ; 41.3 Prescriptions particulières. / La pose est conforme aux prescriptions techniques générales décrites à l’article 44.3 Pose de pavés et bordures en granit de récupération. » ; que les articles 45.1 à 45.3 précisent les caractéristiques techniques que doivent respecter les trois variantes obligatoires citées par l’article 1.3.1 du règlement de la consultation du marché, la «variante n° 1 : place Jean Monet en pavé de granit de récupération 20x14x8 », la « variante n° 2 place Jean Monnet et rues entourant Ligou et Prax Paris en pavés de Granit de récupération 20x14x8 » et la « variante n° 3 : place Jean Monnet, rues entourant Ligou et Prax Paris et rue Jean Monnet en pavés de granit de récupération 20x14x8 » ;

9. Considérant que les stipulations précitées des articles 45.0 à 45.3 du cahier des clauses techniques particulières du lot n° 4 énoncent uniquement les exigences techniques minimales que doivent respecter les trois variantes obligatoires imposées par l’article 1.3.1 du règlement de la consultation ; que contrairement à ce que soutient la communauté d’agglomération, ces exigences techniques décrites par le cahier des clauses techniques particulières commun et le cahier des clauses techniques particulières du lot n° 4 ne s’appliquent pas aux variantes libres ; qu’en effet, l’article 1.3.1 se borne à préciser que les variantes libres peuvent porter sur la conception même de la structure ou la nature du revêtement mais n’apporte aucune précision sur la nature ou l’étendue des variantes que le pouvoir adjudicateur se proposait d’admettre ni ne définit les caractéristiques minimales de ces variantes, ainsi que l’exigent pourtant les dispositions précitées de l’article 50 du code des marchés publics ; que si la communauté d’agglomération soutient que les variantes devaient en tout état de cause respecter les stipulations du cahier des clauses administratives générales et du cahier des clauses techniques particulières commun à tous les lots, ces stipulations générales ne comportent pas de définition des exigences minimales attendues en termes de nature des prestations du lot n°4 ; que, dans ces conditions, compte tenu du non respect de cette exigence, qui constitue un manquement aux obligations de transparence de la procédure et d'égalité de traitement des candidats, les variantes libres proposées n’auraient pas dû être prises en considération par le pouvoir adjudicateur lors de l’examen des offres ; qu’il résulte cependant de l’instruction, et en particulier du rapport de la commission d’appel d’offres, que la communauté d’agglomération du Grand Montauban a retenu l’offre variante libre présentée par la société Sud Ouest Pavage, laquelle portait, selon les termes de la lettre de la présidente de la communauté de Montauban Trois Rivières (CMTR) portant les caractéristiques de l’offre retenue à la connaissance de la société Les compagnons paveurs, « sur une structure légèrement différente de celle décrite au CCTP sur la nature du produit de pose, mais jugée techniquement recevable par la maîtrise d’œuvre » ; qu’ainsi, le vice entachant la procédure de passation litigieuse était susceptible de modifier le choix de l’attributaire du marché ; que c’est dès lors à bon droit que le tribunal a considéré que ce vice était de nature à justifier l’annulation de la décision de la commission d’appel d’offres rejetant les offres de la société Les compagnons paveurs ;

Sur la légalité de la décision par laquelle le président de la communauté d’agglomération du Grand Montauban a décidé d’attribuer le marché à la société Sud Ouest Pavage :

10. Considérant que la communauté d’agglomération reproche aux premiers juges d’avoir également retenu, pour annuler la décision de signer le marché en litige, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 80 du code des marchés publics qui prévoit un délai dit de « stand still », en soutenant que la société Les compagnons paveurs n’avait pas été privée de la possibilité d’introduire un référé précontractuel mais qu’elle y avait délibérément renoncé, se bornant à introduire une demande d’annulation des actes détachables du contrat le 26 avril 2007 ;

11. Considérant qu’aux termes de l’article 80 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au marché : « I. - 1° Pour les marchés et accords-cadres passés selon une des procédures formalisées, le pouvoir adjudicateur avise, dès qu'il a fait son choix sur les candidatures ou sur les offres, tous les autres candidats du rejet de leurs candidatures ou de leurs offres, en indiquant les motifs de ce rejet. / Un délai d'au moins dix jours est respecté entre la date à laquelle la décision de rejet est notifiée aux candidats dont l'offre n'a pas été retenue et la date de signature du marché ou de l'accord-cadre. / En cas d'urgence ne permettant pas de respecter ce délai de dix jours, il est réduit dans des proportions adaptées à la situation (…) » ;

12. Considérant que les dispositions précitées font obligation à la personne responsable du marché d’informer les candidats du rejet de leur candidature ou de leur offre ; que cette information a pour objet de permettre aux intéressés, éventuellement, de contester le rejet qui leur est opposé, notamment devant le juge du référé précontractuel saisi en application des dispositions de l’article L. 551-1 du code de justice administrative ; que dès lors que ce dernier ne peut statuer lorsque le contrat est signé, il en résulte que ces dispositions imposent nécessairement que l’information qu’elles prévoient soit donnée dans un délai raisonnable avant la signature du contrat par la personne responsable du marché, afin d’assurer l’effectivité du recours au juge du référé précontractuel ; qu’il est constant que le président de la communauté d’agglomération du Grand Montauban a signé le marché en litige sans avoir respecté le délai imposé par les dispositions précitées pour permettre aux candidats évincés de saisir le juge du référé précontractuel ; qu’ainsi, c’est à bon droit que les premiers juges ont annulé, pour ce motif, l’acte par lequel le président de la communauté d’agglomération du Grand Montauban a décidé de signer ce marché avec la société Sud Ouest Pavage ;

Sur les conséquences de l’annulation de ces actes détachables :

13. Considérant que la communauté d’agglomération du Grand Montauban fait valoir que ces irrégularités, à les supposer établies, ne justifient pas que soit saisi le juge du contrat à défaut de résolution amiable du marché, dans la mesure où cette résolution serait particulièrement complexe et coûteuse, compte tenu notamment de l’exécution intégrale des prestations et du fait qu’elle priverait l’administration des garanties post-contractuelles, telle que la garantie décennale, attachées à l’existence même du marché ;

14. Considérant que l’annulation d’un acte détachable d’un contrat n’implique pas nécessairement l’annulation de ce contrat ; qu’il appartient au juge de l’exécution, après avoir pris en considération la nature de l’illégalité commise, soit de décider que la poursuite de l’exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, d’enjoindre à la personne publique de résilier le contrat, le cas échéant avec effet différé, soit, eu égard à une illégalité d’une particulière gravité, d’inviter les parties à résoudre leurs relations contractuelles ou, à défaut d’entente sur cette solution, à saisir le juge du contrat afin qu’il en règle les modalités s’il estime que la résolution peut être une solution appropriée ; que, dans la détermination des mesures rendues nécessaires par l’annulation, le juge de l’exécution n’est pas tenu par celles demandées par le requérant ;

15. Considérant que le vice entachant la décision annulée, tiré de l’absence d’information des candidats sur les exigences minimales des variantes libres, a affecté gravement la régularité de la mise en concurrence et la légalité du choix de l’attributaire du marché ; que, toutefois, cette illégalité, qui n’affecte ni le consentement de la personne publique ni le bien fondé du marché, et en l’absence de toutes circonstances particulières révélant notamment une volonté de la personne publique de favoriser un candidat, ne justifie pas que soit recherchée une résolution du contrat ; que par suite, la communauté d’agglomération du Grand Montauban est fondée à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a enjoint au groupement de commande de la Communauté de Montauban Trois Rivières / Ville de Montauban, à défaut de résolution amiable du contrat passé avec la société Sud Ouest Pavage, de saisir le juge du contrat dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement afin qu’il prenne les mesures appropriées ;

16. Considérant néanmoins que ce vice impliquerait, par sa gravité et en l’absence de régularisation possible, qu’il soit enjoint aux parties de résilier le marché ; que toutefois, ce marché de travaux étant entièrement exécuté, une telle injonction est dépourvue d’objet ; que, par suite, les conclusions aux fins d’injonction présentées par la société Les compagnons paveurs devant le tribunal administratif ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la communauté d’agglomération du Grand Montauban tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0702028 du tribunal administratif de Toulouse du 27 juillet 2012 est annulé en tant qu’il a enjoint au groupement de commande de la communauté de Montauban Trois Rivières / Ville de Montauban, à défaut de résolution amiable du contrat passé avec la société Sud Ouest Pavage, de saisir le juge du contrat dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement. La demande d’injonction présentée par la société Les compagnons paveurs devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la communauté d’agglomération du Grand Montauban est rejeté.