Vu la requête, enregistrée le 22 février 2013 par télécopie, régularisée le 25 février 2013, présentée pour la société Pyla Camping, dont le siège social est route de Biscarosse, Pyla sur mer à La Teste-de-Buch (33260), par Me Roche, avocat ;

La société Pyla Camping demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n°1001848, 1001849 du 6 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté, après les avoir jointes, ses demandes tendant à l’annulation des refus implicites nés du silence gardé, d’une part, par le maire de La Teste-de-Buch sur sa demande de permis d’aménager présentée le 14 août 2008, d’autre part, par le ministre de l’écologie et du développement et de la mer sur la demande de délivrance d’une autorisation spéciale prévue par les dispositions de l’article L. 341-10 du code de l'environnement ;

2°) d’annuler les décisions attaquées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le décret du 28 juin 1994 portant classement parmi les sites du département de la Gironde de l'ensemble formé par le site de la dune du Pyla et la forêt usagère sur la commune de La Teste-de-Buch ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 31 octobre 2013 :

- le rapport de M. Didier Péano, président-assesseur ; - les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ; - et les observations de Me Roche, avocat de la société Pyla Camping et celles de Me Pessey, avocat de la commune de la Teste-de-Buch ;

1. Considérant que par avis émis le 20 mai 2008, la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de la Gironde a validé le « Guide de gestion des campings de la Dune du Pilat » incitant les gestionnaires des cinq campings inclus dans le périmètre du site classé de la dune du Pyla à régulariser les aménagements effectués sans autorisation, au moyen de demandes de permis de construire et d'aménager ; que le 14 août 2008, la société Pyla Camping, qui exploite un camping inclus dans ce périmètre, a présenté une demande de permis d’aménager ; que par un courrier du 27 août 2008, le maire de La Teste-de-Buch l’a informée que son projet nécessitait l’autorisation spéciale du ministre chargé des sites et que l’expiration du délai d’un an d’instruction de sa demande signifierait le rejet de celle-ci en l’absence d’accord exprès du ministre ; que le ministre n’a pas pris de décision expresse avant l’expiration le 4 septembre 2009 du délai d’instruction de la demande de la société ; qu’une décision implicite de refus est née du silence gardé par le maire de La Teste-de-Buch sur la demande de permis d’aménager présentée le 14 août 2008 ; que la société Pyla Camping a saisi le tribunal administratif de deux demandes tendant à l’annulation des refus implicites nés du silence gardé, d’une part, par le maire de La Teste-de-Buch sur sa demande de permis d’aménager présentée le 14 août 2008, d’autre part, par le ministre de l’écologie et du développement et de la mer sur la demande de l’autorisation spéciale requise au titre de la législation relative aux sites classés ; qu’elle relève appel du jugement nos 1001848, 1001849 du 6 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes ;

Sur la fin de non recevoir opposée par le ministre :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 341-10 du code de l’environnement : « Les monuments naturels ou les sites classés ne peuvent ni être détruits ni être modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale. » ; qu’il résulte de l’article R. 425-17 du code de l’urbanisme que lorsqu’un projet est situé dans un site classé ou en instance de classement, la décision prise sur la demande de permis de construire ou d’aménager ou sur la déclaration préalable ne peut intervenir qu'avec l'accord exprès du ministre prévu par l’article L. 341-10 du code de l'environnement :

3. Considérant que si, lorsque la délivrance d'une autorisation administrative est subordonnée à l'accord préalable d'une autre autorité, le refus d'un tel accord, qui s'impose à l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, ne constitue pas une décision susceptible de recours, des moyens tirés de sa régularité et de son bien-fondé peuvent, quel que soit le sens de la décision prise par l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, être invoqués devant le juge saisi de cette décision ;

4. Considérant que la circonstance que la société Pyla Camping ait cru devoir déposer deux requêtes séparées contre le refus d’autorisation spéciale du ministre et contre le refus de permis d’aménager du maire, que le tribunal a d’ailleurs jointes, ne saurait faire obstacle à l’examen des moyens invoqués à l’encontre de la décision du ministre à l’occasion de l’examen de la légalité du refus de permis d’aménager ; que par suite, si le ministre est fondé à soutenir que les conclusions tendant à l’annulation de sa décision sont en l’espèce irrecevables, les moyens soulevés par la société requérante pour en contester la légalité doivent être regardés comme invoqués au soutien de ses conclusions dirigées contre le refus de permis d’aménager ;

Sur la nécessité d’un permis d’aménager :

5. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-42 du code de l’urbanisme : « Le camping pratiqué isolément ainsi que la création de terrains de camping sont interdits : …2° Sauf dérogation accordée par l'autorité administrative après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, dans les sites classés en application de l'article L.341-2 du code de l'environnement » ; qu’il est constant que la société Pyla Camping avait aménagé son camping antérieurement au décret du 28 juin 1994 portant classement parmi les sites du département de la Gironde de l'ensemble formé par le site de la dune du Pyla et la forêt usagère sur la commune de La Teste-de-Buch ; que la société Pyla Camping soutient qu’en lui imposant de présenter une nouvelle demande de permis d’aménager, qui n’était pas nécessaire, pour régulariser et modifier l’organisation de son camping, il a été porté atteinte à des droits acquis ;

6. Considérant, en premier lieu, que l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions attaquées, dispense, en raison de leur nature ou de leur très faible importance, de toute formalité au titre dudit code certaines installations qu’elle énumère, réalisées dans un terrain de camping, sauf lorsque ces installations sont implantées dans un site classé ; qu’aux termes de l’article R. 421-23 du même code : « Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants : (…) c) L'aménagement ou la mise à disposition des campeurs, de façon habituelle, de terrains ne nécessitant pas un permis d'aménager en application de l'article R. 421-19 » ; qu’en vertu de l’article R. 421-19 du code de l’urbanisme : « Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager : (…) f) Les travaux ayant pour effet, dans un terrain de camping ou d'un parc résidentiel de loisirs, de modifier substantiellement la végétation qui limite l'impact visuel des installations (…) » ; que l’article R.443-6 de ce code énonce que le « permis d'aménager impose le respect des normes d'urbanisme, d'insertion dans les paysages, d'aménagement, d'équipement et de fonctionnement » et précise que ce permis « fixe le nombre maximum d'emplacements » ; que le même article ajoute que « pour les terrains de camping, il fixe le nombre d'emplacements réservés indistinctement aux tentes, aux caravanes et aux résidences mobiles de loisirs et délimite, lorsque l’implantation d’habitations légères de loisirs est envisagée, leurs emplacements » ;

7. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le projet en vue duquel la demande de permis d’aménager a été présentée le 14 août 2008 porte notamment sur l'aménagement de trente-trois emplacements pour tentes, l'édification d'un bâtiment de cinquante mètres carrés de surface hors œuvre nette pour le logement du gardien, en lieu et place d'un mobile-home, la régularisation de l'implantation de huit mobile-homes non raccordés aux réseaux, la régularisation de « 21 dalles béton pour camping-cars », la régularisation de l’implantation de « sanitaires mobiles destinés à remplacer le sanitaire n° 3 », le déplacement de dix-huit- emplacements « Grand Confort » accueillant des mobile-homes, par transformation et aménagement de dix emplacements ordinaires ; que ce projet qui prévoit l’implantation de nouveaux équipements et des modifications affectant les caractéristiques et la disposition des emplacements sur le site, implique des travaux d’aménagement sur une part importante du terrain ; que ces travaux, qui comportent l’abattage de 17 pins sur 74 et la plantation d’espèces locales, ont pour effet, en raison de leur nature et de leur portée, de modifier substantiellement la végétation limitant l'impact visuel des installations, la circonstance que l’impact en soit positif étant sans incidence sur l’application des dispositions précitées ; que, dès lors, leur réalisation devait être précédée d’un permis d’aménager en application du f) de l’article R. 421-19 du code de l'urbanisme, alors même que le projet n’augmente pas le nombre maximum d'emplacements réservés indistinctement aux tentes, aux caravanes et aux résidences mobiles de loisirs et que le seul déplacement, à l’intérieur d’un même camping, de résidences mobiles de loisir sur des emplacements ayant fait l’objet d’autorisation n’est pas soumis à la délivrance préalable d’un permis d’aménager ;

Sur la régularité de la procédure :

8. Considérant qu’aux termes de l’article R. 341-10 du code de l’environnement : « L'autorisation spéciale prévue aux articles L. 341-7 et L. 341-10 du présent code est délivrée par le préfet lorsqu'elle est demandée pour les modifications à l'état des lieux ou à leur aspect résultant : 1° des ouvrages mentionnés aux articles R. 421-2 à R. 421-8 du code de l'urbanisme à l'exception de ceux prévus par l'article R. 421-3 ; 2° des constructions, travaux ou ouvrages soumis à déclaration préalable en application des articles R. 421-9 à R. 421-¬12 et R. 421-17 et R. 421-23 du code de l'urbanisme ; 3° de l'édification ou de la modification de clôtures. (…) » ; qu’en vertu de l’article R. 341-12 du même code : « L'autorisation spéciale est délivrée par le ministre chargé des sites dans les cas autres que ceux prévus à l'article R. 341-10, ainsi que lorsque ce ministre a décidé d'évoquer le dossier » ; que l’article R.341-13 prévoit que : « Lorsqu'il statue pour l'application de l'article L. 341-10, le ministre décide après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, et, chaque fois qu'il le juge utile, de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages. Toutefois, l'avis de la commission départementale n'est pas requis lorsque le ministre évoque le dossier. » ; qu’il résulte des dispositions combinées des articles R. 423-23 du code de l’urbanisme et R. 423-31 du même code que le délai d’instruction de droit commun, qui est de trois mois pour les permis d’aménager, est porté à un an quand de tels travaux sont soumis à l’accord du ministre chargé des sites ;

9. Considérant que l’ensemble de ces dispositions suffisent à encadrer le régime de l’autorisation spéciale, sans qu’il soit indispensable de détailler par voie réglementaire le contenu du dossier de présentation du projet soumis à ladite autorisation, pour lequel l’autorité chargée de l’instruction du dossier peut demander, sous le contrôle du juge, toutes précisions utiles à la bonne appréciation de l’impact du projet sur le site ; que par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions ne seraient pas applicables faute de comporter de telles précisions doit être écarté ;

10. Considérant que le décret du 28 juin 1994 a classé parmi les sites du département de la Gironde « l'ensemble formé par le site de la dune du Pyla et la forêt usagère sur la commune de La Teste-de-Buch » ; que les modifications en vue desquelles le permis d’aménager a été sollicité se situent à l’intérieur du périmètre du site classé de la dune du Pyla et de la forêt usagère et ont, ainsi qu’il a été dit au point 7, un impact sur la perception visuelle du site dont elles modifient l’aspect ; que du fait de l’inclusion du camping dans le périmètre d’un site classé, ces aménagements devaient faire l’objet de l’autorisation spéciale expresse requise en matière d’environnement par l’article L. 341-10 du code de l’environnement même si le code de l’urbanisme ne soumet le changement d’implantation de résidences mobiles de loisirs dans un terrain de camping à aucune formalité préalable ; que, dès lors, pour contester la nécessité de cette autorisation requise en matière d’environnement, la société Pyla Camping n’est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l’article R. 443-6 du code de l’urbanisme relatives au permis d'aménager qui prévoient que « pour les terrains de camping, il fixe le nombre d'emplacements réservés indistinctement aux tentes, aux caravanes et aux résidences mobiles de loisirs » ; qu’elle ne peut davantage utilement prétendre que son projet est largement destiné à régulariser des aménagements réalisés sans autorisations préalables ;

Sur le bien-fondé du refus du permis d’aménager :

11. Considérant d’une part, qu’ainsi qu’il a été dit les aménagements en vue desquels le permis a été sollicité ont un impact sur la perception visuelle du site de la dune du Pyla et de la forêt usagère dont ils modifient l’aspect ; que par suite, pour apprécier l’atteinte portée à ce site, le ministre devait tenir compte non seulement de la visibilité plus ou moins grande des installations nouvelles depuis la dune du Pyla ou l’extérieur du site, mais aussi de la perception visuelle à l’intérieur même de la forêt usagère où se trouvent situés les campings ;

12. Considérant que dans son avis du 8 mars 2007, la commission supérieure des sites, perspectives et paysages a recommandé de refuser les « mobil-homes » (résidences mobiles de loisirs ), incompatibles avec l’image d’un site protégé, dans les sites classés ; que si la commission départementale de la nature, du paysage et des sites de la Gironde a, dans sa séance du 10 juin 2009, pris acte des efforts entrepris par les campings de la dune du Pyla en liaison avec les autorités administratives pour améliorer l’insertion dans le site des résidences mobiles de loisirs installées sans autorisation spéciale, elle a donné un avis favorable au projet du Pyla Camping sous réserve notamment que l’aménagement de la parcelle CH 38 en compensation de l’avancée dunaire soit autorisé seulement pour des emplacements ordinaires, ce qui impliquait la suppression de huit résidences mobiles de loisirs qu’il était prévu d’y transférer, que soient enlevées vingt-huit caravanes permanentes stationnant en pied de dune, que l’habillage bois des résidences mobiles de loisirs restantes soit effectué dans un délai de trois ans, et que soient modifiées les mesures de requalification paysagère, avec changement des essences et ajout de pins ou autres essences exclusivement locales pour compenser les dégâts de la tempête Klaus, et enfin que soit déplacé le champ d’épandage des sanitaires 2 et 3 envahis par la dune ; qu’il n’est pas établi ni même allégué que la société aurait acquiescé à ces mesures en proposant un nouveau projet les intégrant ; qu’au regard notamment de la proximité du pied de dune, de l’impact visuel significatif des résidences mobiles de loisirs, celles du Pyla Camping étant au demeurant visibles depuis la dune du Pyla, sans que la société puisse utilement souligner qu’un cordon de sécurité interdisant de marcher sur la crête de dune sur une largeur de cinquante mètres, en raison du danger créé par les arbres enfouis dans la dune, réduirait la visibilité, le ministre n’a entaché sa décision de refus d’autorisation d’aucune erreur d’appréciation ;

13. Considérant d’autre part, qu’en l’absence d’accord exprès du ministre, le maire de La Teste-de-Buch était tenu, en vertu de l’article R. 425-17 du code de l’urbanisme, de refuser le permis d’aménager que la société avait sollicité ; que par suite, celle-ci ne peut utilement invoquer ni des droits acquis qui seraient nés d’autorisations données, en application du code du tourisme, antérieurement au classement du site, ni l’absence de caractère réglementaire du « Guide de gestion des campings de la Dune du Pilat » adopté par les services de l’Etat pour inciter les exploitants à régulariser leur situation, lequel rappelait le cadre réglementaire, les orientations souhaitables et les principes sur lesquels ils fondaient leur appréciation ;

14. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société Pyla Camping n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes ;

15. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société Pyla Camping et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Pyla Camping est rejetée.