Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 février 2010, présentée par le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI ;

Le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 31 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé les décisions du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en date du 12 septembre 2007 et du 5 février 2008 portant refus d’autorisation de commercialisation des produits « Desmodium Adscendens » et « Nicolib », et lui a enjoint de réexaminer les déclarations de mise sur le marché de ces produits ;

2°) de constater le non-lieu à statuer s’agissant de la commercialisation de la spécialité « Desmodium Ascendens » ;

3°) de réformer l’article 2 du jugement du 31 décembre 2009 en ce qu’il fait injonction à l’administration de réexaminer la demande d’autorisation de commercialisation de la spécialité « Nicolib », et de maintenir la décision de refus du 5 février 2008 ;


Vu les pièces du dossier ;

Vu la directive 2002/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 juin 2002 relative au rapprochement des législations des Etats membres concernant les compléments alimentaires ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le décret n° 2006-352 du 20 mars 2006 relatif aux compléments alimentaires ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 1er février 2011 :

- le rapport de M. Bentolila, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

Considérant que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI fait appel du jugement en date du 31 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a annulé les décisions du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en date du 12 septembre 2007 et du 5 février 2008 portant refus d’autorisation de commercialisation des produits « Desmodium Adscendens » et « Nicolib » ;

Sur la légalité de la décision du 12 septembre 2007 :

Considérant que la décision du 12 septembre 2007 portant refus d’autorisation de commercialisation du produit « Desmodium Adscendens » a été retirée par la décision du 20 novembre 2008 du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE acceptant la commercialisation de ce produit ; qu’à la date à laquelle le Tribunal administratif de Poitiers a statué, la demande de la société Laboratoire Lescuyer tendant à l’annulation de la décision du 12 septembre 2007 était devenue sans objet ; que c’est donc à tort que le Tribunal administratif de Poitiers n’a pas prononcé un non-lieu à statuer sur cette demande ; qu’il convient d’annuler sur ce point le jugement attaqué, de statuer par voie d’évocation sur la demande de la société Laboratoire Lescuyer à fins d’annulation de ladite décision et de décider qu’il n’y a pas lieu d’y statuer ;

Sur la légalité de la décision du 5 février 2008 :

Considérant, qu’aux termes de l’article 1er du décret n° 2005-850 susvisé du 27 juillet 2005 : « A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité (…) 2° Les chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs, les chefs des services à compétence nationale mentionnés au deuxième alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 susvisé et les hauts fonctionnaires de défense (...) » ; qu’il résulte de ces dispositions que les directeurs-adjoints sont compétents pour signer, au nom du ministre, l’ensemble des actes relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité à l'exception des décrets, dès la prise de leurs fonctions, et sans qu’il soit nécessaire que le ministre prenne un acte supplémentaire pour leur donner une délégation de signature ; que dans ces conditions, de par sa nomination le 5 septembre 2006, publiée au journal officiel le 7 septembre 2006, en qualité de directrice-adjointe, chargée de la sous-direction des produits agricoles et alimentaires à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, Mme Marie-Christine Buche était compétente pour signer la décision attaquée du 5 février 2008 ; que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI est dès lors fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal a annulé cette décision au motif de l’incompétence de l’auteur de l’acte ;

Considérant qu’il appartient à la cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par la société laboratoire Lescuyer ;

Considérant qu’en vertu de l’article 1er du décret susvisé du 20 mars 2006 : « (…) les dispositions du présent décret : (...) 2° Ne s'appliquent pas aux médicaments et aux spécialités pharmaceutiques, tels que définis aux articles L. 5111-1 et L. 5111-2 du code de la santé publique » ; qu’aux termes de l’article L. 5121-2 du code de la santé publique « Sont considérés comme médicaments les produits présentés comme supprimant l'envie de fumer ou réduisant l'accoutumance au tabac » ; qu’il ressort des pièces du dossier, que le « Nicolib » se présente comme un produit à base notamment de plantes destiné à limiter la sensation de manque de tabac ainsi que ses désagréments, et à diminuer l’envie de fumer ; que ce produit doit donc être regardé, compte tenu de sa présentation, comme constituant un médicament au sens de l’article L. 5121-2 du code de la santé publique, ces dernières dispositions ne comportant aucune disposition contraire aux objectifs de la directive du 10 juin 2002 relative au rapprochement des législations des Etats membres concernant les compléments alimentaires ; que le MINISTRE était dès lors tenu de refuser la commercialisation du « Nicolib » au titre de la catégorie des compléments alimentaires visés par le décret du 20 mars 2006, au motif de ce que le « Nicolib » relevait non pas dudit décret mais de la catégorie des médicaments au sens de l’article L. 5121-2 du code de la santé publique ; que les autres moyens de la société Laboratoire Lescuyer dirigés contre les autres motifs, surabondants, de la décision du 5 février 2008, afférents aux caractéristiques du « Nicolib » au regard de la catégorie des compléments alimentaires, sont dès lors inopérants ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision du 5 février 2008 portant refus d’autorisation de commercialisation du « Nicolib », et à demander l’annulation du jugement sur ce point ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la société Laboratoire Lescuyer la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Poitiers du 31 décembre 2009 est annulé.

Article 2 : Il n’y a pas lieu à statuer sur la demande de la société Laboratoire Lescuyer devant le Tribunal administratif de Poitiers dirigée contre la décision du 12 septembre 2007 portant refus de commercialisation du « Desmodium Adsendens ».

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Laboratoire Lescuyer devant le Tribunal administratif de Poitiers est rejeté.