Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 septembre 2009, présentée pour M. et Mme Alain D==, demeurant == par Me Guiroy ;

M. et Mme D== demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0600913 en date du 23 juin 2009, en tant que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à ce que l’Etat soit condamné à leur verser une somme de 270 000 euros au titre des préjudices subis du fait des agissements irréguliers du trésorier de Cordes ;

2°) de condamner l’Etat au paiement de cette indemnité et à leur verser la somme de 3 600 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 avril 2010 :

- le rapport de M. Pouzoulet, président-assesseur, - et les conclusions de M. Vié, rapporteur public ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. et Mme D== ont fait l’objet d’un examen de leur situation fiscale personnelle à l’issue duquel les intéressés ont été assujettis à des compléments d’impôt sur le revenu mis en recouvrement le 31 octobre 2005, d’un montant de 346 096 euros ; que cependant, dès le 18 août 2005, le trésorier de Cordes, en application des articles 67 et suivants de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, a sollicité du juge judiciaire de l’exécution du tribunal de grande instance d’Albi l’autorisation de prendre des mesures conservatoires en vue d’assurer le recouvrement de la créance fiscale du Trésor public sur M. et Mme D== ; que les 8 et 9 septembre 2005, en application de l’ordonnance du 23 août 2005 obtenue du juge de l’exécution, le comptable public a procédé à des saisies conservatoires et a pris une hypothèque judiciaire provisoire permettant d’appréhender le solde du prix de vente d’un immeuble, s’élevant à 262 491,65 euros et le solde créditeur de divers comptes bancaires des intéressés, pour un montant total inférieur à 5 000 euros ; que, toutefois, le tribunal de grande instance d’Albi, estimant que le juge judiciaire n’était pas compétent pour autoriser des mesures conservatoires, a rétracté l’ordonnance susmentionnée par un jugement du 18 novembre 2005 ; qu’en exécution de ce jugement, M. et Mme D== ont alors obtenu la main levée des garanties prises par le Trésor public au plus tard le 8 décembre 2005 ; que ces derniers font appel du jugement en date du 23 juin 2009, en tant que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à ce que l’Etat soit condamné à leur verser une somme de 270 000 euros au titre des préjudices subis du fait des agissements irréguliers du trésorier de Cordes ;

Considérant que l’article 67 de la loi du 9 juillet 1991 prévoit : « Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement » ;

Considérant que si les juridictions de l’ordre judiciaire sont compétentes pour connaître des responsabilités que l’Etat peut avoir encourues en raison de fautes commises au cours de la procédure tendant à solliciter des mesures conservatoires du juge judiciaire en application des dispositions précitées, le juge administratif est en revanche seul compétent pour connaître de la mise en jeu de la responsabilité de l’Etat à l’occasion d’une faute lourde commise par le service du recouvrement de l’impôt lorsqu’il décide de recourir à de telles mesures ; que, par suite, c’est irrégulièrement que le tribunal administratif de Toulouse s’est déclaré incompétent pour statuer sur la demande d’indemnisation de M. et Mme D== au titre des préjudices qu’ils estiment avoir subis du fait de la saisine du juge judiciaire par le trésorier de Cordes ; que l’article 2 du jugement attaqué doit, dès lors, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme D== devant le tribunal administratif ;

Considérant que le trésorier de Cordes a reçu du service de l’assiette, au début du mois d’août 2005, le dossier de contrôle fiscal de M. et Mme D== et l’information selon laquelle ces derniers pourraient être imposés pour un montant provisionnel de 482 879 euros ; qu’il existait en l’espèce un risque sérieux de voir les requérants, qui disposaient de comptes bancaires à l’étranger, soustraire les sommes dues au Trésor Public en organisant leur insolvabilité en France ; qu’eu égard à ces circonstances, le trésorier n’a commis aucune faute lourde en ayant décidé de solliciter les mesures conservatoires en litige ; que si le tribunal de grande instance d’Albi a estimé devoir rétracter l’ordonnance du juge de l’exécution ayant autorisé ces dernières, cette circonstance relative au déroulement de la procédure devant le juge judiciaire est sans incidence sur l’appréciation qu’il y a lieu de porter sur la décision du trésorier de recourir à des mesures conservatoires ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la demande de M. et Mme D== ne peut qu’être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. et Mme D== la somme qu’ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L’article 2 du jugement du 23 juin 2009 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La demande de M. et Mme D== tendant à ce que l’Etat soit condamné à leur verser une somme de 270 000 euros au titre des préjudices subis du fait des agissements irréguliers du trésorier de Cordes et les conclusions de M. et Mme D== tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.